Chapitre 6.

Tranquillement installé sur l'un des bancs de la cour de l'université, je ne perds pas mes vieilles habitudes et regarde une vidéo de YouTube, attendant que les cours reprennent. Je viens de finir de manger. La cour est pratiquement vide. C'est assez apaisant. Personne ne risque de me déranger dans ces conditions. Soudain, quelqu'un me plonge dans l'obscurité à cause de son ombre. 

-J'aurais mieux fait de ne pas penser à ça..., songé-je tristement.

Je lève les yeux pour regarder l'auteur de ma déconcentration. Ça ne m'étonne même pas de voir Patron en train de fumer allègrement son cigare. Je me défais de mon casque audio et lui demande ce qu'il fabrique.

-Je n'ai pas le droit de venir te voir? Comment vais-je faire pour t'aborder? 

Je souffle d'exaspération et lui fais comprendre qu'il peut s'asseoir à côté de moi.

-T'es souvent tout seul, je trouve, me révèle-t-il, le regard dans le vague.

-Oui et alors?

 -Tu n'as pas d'amis avec qui passer le temps?

-J'en ai quelques uns mais j'aime bien me retrouver seul. 

-Pourquoi ne restent-ils pas avec toi? continue-t-il de me demander.

-Parce qu'ils ont d'autres amis que moi, je suppose.

-Pourquoi ne pas rester avec eux?

-Parce que je n'apprécie pas vraiment les gens que côtoient mes potes? proposé-je.

Il arrête de me poser des questions et tire une nouvelle taffe.

-Pourquoi toutes ces questions? l'interrogé-je à mon tour.

-Je te trouve plutôt solitaire, mais quand je te parle, tu sembles avoir du caractère et n'avoir aucune difficulté à t'exprimer. Ça m'intriguait.

Je souris, amusé.

-Tu t'intéresses à moi?

-Peut-être bien. T'es un gamin intriguant.

-Oh, vraiment? 

-Je te l'assure.

Nous rions de bons cœurs. Il est assez amical, quand il veut.

-Au fait, voilà ta chemise. Merci de me l'avoir prêtée.

Il fouille dans son sac et me tend le vêtement. 

-Oh mais je ne te l'ai pas passée par plaisir. Je voulais seulement éviter que les enfants que tu croiserais se mettent à pleurer. Hors de question de les choquer aussi jeunes!

Il ricane, satisfait de mon répondant. Je reprends la parole aussitôt.

-Tu permets? Je vais aux toilettes.

-Je peux t'accompagner.

-C'est ça. Pour me voir pisser?

Il se met à rire et déclare sans honte:

-J'ai toujours rêvé que l'on me pisse dessus.

-T'es dégueulasse!

-Chacun ses délires, tu sais?

-Pas obligé de les révéler sur tous les toits!

Nous nous remettons à rire. Je suis tombé sur un gars attiré par les perversions les plus bizarres qui soient. Plus qu'à l'entendre dire qu'il aime déflorer les enfants et pratiquer les jeux du BDSM! (Lucy-Gondra: Pour les petits nouveaux, le BDSM est une pratique pour les sadiques et les masochistes.) Et si cela se révélait être le cas? 

...

Je n'ose pas vraiment lui demander!

Nous continuons d'avancer jusqu'à arriver devant la porte menant aux toilettes. Je me dirige vers les urinoirs et fais mes affaires, cherchant à ne pas me montrer au Patron qui attend bien sagement à l'extérieur. Je remonte ma braguette et je me dirige vers l'évier pour me laver les mains. J'entends des pas se rapprocher dans mon dos et quand je ressens le peu de proximité qu'il y a entre nous, je me dis que ça ne peut que Patron. Il entoure ses bras autour de ma taille, ce qui me paralyse sur place. Il dépose son menton sur mon épaule et me souffle à l'oreille:

-Ça te dit de faire un tour dans le bar du coin, Gamin?

Je ne me peux m'empêcher de rire. Il est bien bête.

-Tu ne m'auras pas comme ça, tu sais? Je ne suis pas un garçon facile.

Il me retourne subitement et coince mon bassin contre l'évier en glissant une jambe entre les miennes, les mains de part et d'autre de mon corps, pour m'éviter de prendre la fuite.

-Je vois que tu préfères quand je prends les choses en main directement.

Sans plus attendre, il se rapproche de mon visage, prêt à m'embrasser avec une sensualité dont lui seul a le secret. Sa bouche entrouverte laisse apparaître sa langue qu'il place entre mes lèvres avec une extrême délicatesse. Mes yeux se ferment à moitié et ma langue rejoint instinctivement la sienne. Mes mains se posent sur les siennes et nos langues se frôlent avec lenteur. Nous nous laissons aller au plaisir de ce baiser naissant et nous débutons une charmante valse enchanteresse. Il se penche davantage vers moi, ce qui me force à creuser la nuque et lever le menton. Il s'éloigne et me lance un regard suave.

-Es-tu sûr que tu as toujours une chance de gagner à notre petit jeu?

Je souris de façon carnassière pour lui faire comprendre qu'il a entièrement tort. Je plonge mes mains dans ses cheveux et me colle à lui.

-Ce que tu peux être naïf. Perdre serait une trop bonne chose pour toi.

Je l'embrasse avec sensualité, jouant mon rôle à merveille. Je ne dois pas perdre de temps et faire en sorte de gagner le plus tôt possible. Qui sait ce qu'il oserait me donner comme ordre si je venais à subir une défaite écrasante...?

Quand j'y pense, je m'étais dit que si je gagnais, je lui demanderais de ne plus venir me voir. Mais maintenant...je me suis un peu attaché à lui. Je l'aime bien, ce gars. Qu'est-ce que je pourrais lui demander? Qu'il arrête de me draguer? Qu'il ne s'approche plus de Céleste et de mes autres potes? La question est bien agaçante... Je ne vois pas ce que je pourrais lui demander.

-Alors? Tu viens avec moi au bar, ce soir?

Nous sortons des toilettes. Je remarque que la cour est nettement plus remplie que tout à l'heure. Je tapote son épaule, l'air désolé.

-Ce soir, je ne peux pas. Il y a mon petit frère qui passe. Ça fait tellement longtemps que je ne l'ai pas vu!

-Tu as un frère, toi?

-Oui. Mais si jamais tu viens à le croiser dans la rue, tu ne te diras jamais qu'il fait parti de ma famille. On ne se ressemble pas du tout!

-Il doit bien y avoir des ressemblances, suppose-t-il.

-Nos parents disent qu'on a à peu près le même visage mais c'est surtout sa façon de s'habiller qui le différencie. Ses vêtements sont beaucoup trop grands et il porte toujours une casquette qu'il fasse beau ou mauvais. (Je lui lance un coup d'œil.) Un peu comme toi avec tes lunettes de soleil.

-Il s'appelle comment?

-Attends, tu essayes de t'en prendre à mon petit frère chéri? Il n'appartient qu'à moi! (Je murmure plus bas:) Bien que je dois le partager avec son petit copain...

-Serais-tu jaloux? se moque-t-il. Ne t'en fais pas. Il n'y a que toi qui m'intéresse.

Je sens le sang me monter à la tête. Pourquoi cette remarque me fait-elle de l'effet!? 

-Si tu me dis ça, ça veut dire que tu as perdu la partie!

Il me donne une petite claque à l'arrière du crâne et me fait remarquer que c'était une phrase de tombeur populaire. 

-J'avais deviné...

-Donc, il s'appelle comment, ton petit frère? répète-t-il.

-Geek. Geek Sommet.

Il me regarde de travers et j'ai l'impression qu'il va me faire un reproche.

-Donc pour toi, quand je te dis que je m'appelle Patron, tu trouves ça étrange. Mais quand quelqu'un s'appelle Geek, c'est totalement normal. Tu te fous de moi, Gamin?

Il place son bras sur mes épaules. Le pire, c'est qu'il a raison! 

-C'est vrai que je n'y ai pas pensé...

-T'es vraiment irrécupérable, Minus...

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