Paris c'est loin.
Je stresse, mais pourquoi je stresse. C'est quoi le stress ? Google. Définition du stress.
Mmm. Non, c'est certainement pas du stress ça.
Mais mon ventre me fait mal et puis bizarrement, je repense au comportement que j'ai eu lorsque j'ai vu Idryss avec Lou, seuls. Ça m'a gavé ! Mais là c'est l'inverse, voilà qu'il veut un appel rien qu'avec moi. Pas un vocal, un appel oui. La différence, vous voyez. Ben elle est là.
— Re, j'entends à travers mes écouteurs.
Je m'allonge plus confortablement sous ma couette, sa voix m'apaisant directement.
— Re...
— C'est quoi cette p'tite voix ?
Ben quoi. C'est ma voix.
— C'est quoi cette remarque ? je réponds alors.
— C'est pas une remarque, je constate.
— Je t'ai dit que j'étais fatigué...!
Et ça par contre, c'est vraiment une vérité ! Les cours m'ont épuisé comme d'habitude, je me languis les vacances bien que je peux encore attendre.
— Dommage ça.
— Pourquoi ?
Des fois, ses réponses vagues me font vraiment douter. Qu'il arrête d'être si mystérieux, après moi je sais plus quoi penser. Déjà qu'on se connaît pas trop tout les deux... Je ne peux pas dire le contraire, ça ne fait que quelques jours qu'on parle ! Et durant ce temps... J'arrive pas à croire tout ce que j'ai fait pour cet inconnu, surtout aujourd'hui, en me ramenant à sa fac... J'espérais quoi, bon sang ? Bref. Je me perds.
— Parce que.
— Tu m'énerves, Idryss.
— Aaah, ben tu vois ce que ça fait ?
Non, je vois pas de quoi il parle. Après mon soupir, il reprend.
— Ça me fait pareil quand tu m'dis pas ce que t'as à dire.
Je rêve, pourquoi il est méchant comme ça. D'autant plus qu'il force, mais il a raison dans un sens ! Je vais certainement pas lui en parler au risque de me prendre pour un fou.
Alors moi c'est Mathis, tu sais, celui que tu surnommes Petit Prince. Puis voilà, je crush complètement sur toi depuis... Depuis là, une semaine, depuis que je te parle en fait ! Oui, c'est un truc de fou malade. Je sais pas ce que tu m'as fait, sûrement parce que tu as l'air beau et que... J'sais pas mais je trouve que tu dégages quelque chose d'attirant... Peut-être c'est ta voix ? Ta façon de parler ? Le caractère que tu me montres...?
Non, jamais je pourrais avouer que j'ai été jaloux, que j'ai voulu te voir... Aujourd'hui. Là où tu travailles.
Je veux mourir, wesh ! Qu'est ce qu'il me prend de me faire des scènes dans la tête.
— Je... Laisse tomber ! Je t'ai dit que j'étais fatigué, maintenant on passe à autre chose.
— C'était dur les cours ?
Oui, voilà. Parlons des cours...
— Normal ! J'ai traîné en ville avec mon ami ce midi.
— Ah ouais ? Vous avez fait quoi ?
Euh... Pourquoi la discussion prend forcément ce tournant ? Je suis tellement bête, il me fait perdre les moyens ! Pas grave, je sais mentir. Plutôt bien, en plus... J'aurai dû faire théâtre.
— On a fait du skate...
Ça par contre, c'est vrai.
— Jure, tu fais du skate ?
— Oui, j'aime bien.
— Ah ouais, beau gosse ça.
Je souris un peu, il n'a pas tort ! En plus je me débrouille bien même si je ne pratique pas tous les jours.
— T'en fais depuis longtemps ?
— Depuis 3 ans.
Je lui parle rapidement de la passion que j'éprouve pour ce sport et il m'écoute, me faisait quelques remarques positives. J'apprends que lui, à défaut d'être une merde en skate, il préfère courir. C'est un joggeur et il m'a avoué qu'il a fait de l'athlétisme au collège ainsi qu'au lycée. Je suis admiratif, moi qui m'étouffe en même pas 3 minutes de course...
— C'est le cardio ça. Ça s'apprend. Dans plein de choses.
Mmm. Est-ce un sous entendu ? Je fais l'innocent.
— Ah oui ? Je peux apprendre avec toi ?
— Je vais bien te faire apprendre, tu verras.
Bien te faire apprendre. Tu verras. J'évite de gigoter dans mon lit bien que mon cœur rappelle à mon cerveau de se calmer en un battement brusque.
— Après, ça dépend comment tu veux apprendre.
Je sais et tu sais à quoi je pense. On se sait tous les deux, bien que je ne veux pas avouer.
— À toi de me proposer...
— Arrête.
Je fais pas exprès, je me contrôle pas. C'est lui, qui me contrôle de loin. Il le sait ! Encore plus que je ne le sais moi même.
— C'est toi t'as commencé.
— Mais t'as continué.
Juste pour voir ce qu'il allait me dire ! Mais en vrai, parce que j'aime bien aussi...
— Ah tu m'énerves, dit-il dans un soupir.
— Pourquoi ?
— Pourquoi t'es loin de moi ?
Euh... Ouais, si tu savais Idryss. Tu ne me poserais même pas la question, tu viendrais directement te planter à ma porte et ça me fait flipper en imaginant la scène... Déjà, mes parents ne comprendraient même pas les pauvres. Ils appelleraient les gendarmes !
— En fait, j'sais même pas si t'es loin ou pas de moi. Tu m'as pas dit.
Bien sûr, je savais que ça allait arriver... C'était bien obligé, à un moment donné.
— T'es d'où ?
— Je... J'suis de Paris ! Oui, Paris. Ville des amoureux, et tout...
— Ah, ok. C'est bien, c'est cool Paris. Les pigeons, tout ça. La tour Eiffel. Notre Dame.
Je rêve ou c'est la première seule chose qu'il retient ? Dans notre ville aussi il y a des pigeons ! Ils sont relous d'ailleurs, ils prennent trop la confiance ces rapaces. J'ai envie de les écraser quand je roule avec mon skate.
— Du coup ouais, t'es grave loin de moi en fait.
Si on voit les choses comme ça, oui plutôt... Je sais que je suis en train de m'enfoncer dans un mensonge et que ce n'est pas bien. Je viens ronger l'ongle de mon petit doigt avant de reprendre, ne me voyant pas partir sur une mauvaise base dès le départ.
— Non mais, en fait...
— Quoi ?
— J'habite pas à Paris. J'ai menti.
Une pause s'installe entre nous. Idryss répond après quelques secondes de silence, d'un ton calme.
— Ben t'habites où alors ?
J'ai dit à moitié la vérité, manque plus que l'autre. De toute façon... S'il sait... C'est pas grave, non ? Ce n'est pas un psychopathe, d'après ce que je juge.
— Vers chez toi, et... Désolé d'avoir menti mais quand tu m'as dit le nom de ta fac, j'ai eu peur ! Ça m'a fait bizarre.
Voilà, j'espère qu'il ne va pas le prendre mal... J'attends sa réponse en enroulant le fil de mes écouteurs autour de mon doigt, compressant ainsi mon sang, ce dernier devenant rouge. Mais lorsque j'entends son rire, je relâche la petite pression en me sentant soulagé.
— Mais... T'as cru qu'il allait se passer quoi qu'on soit dans la même ville ?
À son avis. Tout peut se faire très vite maintenant comme...
— Ben... Que tu veuilles me voir, ou j'sais pas.
— Mais de toute façon, on va se voir.
— Quoi ! Mais, non.
Ma réaction semble le surprendre puisqu'il marque une pause, se demandant sûrement pourquoi je refuse de cette façon. Il prend un ton faussement offusqué.
— Tu veux pas me voir ?
— C'est pas ça...
— J'ai pas dit maintenant, hein. Mais t'inquiète.
Oui voilà... C'est bien. Pas maintenant, je préfère cette réponse !
— Putain, je rêve... rigole-t-il encore un peu, sûrement désespéré.
J'aime bien son rire donc bon, je laisse continuer quelques secondes.
— Je vois pas ce qu'il y a de drôle...
— C'est toi. T'es marrant.
— C'est vrai ou c'est moqueur ?
— Hé. Je t'ai déjà dit d'arrêter de penser ça.
Ça va, pas la peine de me rappeler mon côté relou. Sa voix devient plus sérieuse, je la trouve attirante aussi. Mais ça, est-ce encore un secret ? Au bout d'un moment...
— Je suis sincère.
Par rapport à moi... Mais j'aimerais aussi le croire. Je dis ça puisque même s'il est sympa, que j'aime bien discuter avec lui ben... Je ne le connais pas comme je connais Lou, par exemple. Alors il ne faut pas que je me fasse des idées ou que je tire des conclusions trop hâtivement.
Je ne me ferais pas avoir une deuxième fois.
Je suis quelqu'un de gentil, qui donne ma confiance aux gens assez rapidement. Mais ce n'est pas bon, surtout sur Internet. Je l'ai compris au fil du temps mais je baigne dans ce monde depuis tout petit. J'en ai rencontré des gens et ce n'est pas parce qu'on est derrière un écran... qu'on est des robots sans cœur, qu'on n'est pas des humains derrière ces machines. Je ne compte plus le nombre de fois où j'ai cru des conneries, des choses, qu'on m'a menti pour faire genre d'avoir une vie, d'avoir des choses merveilleuses alors que ces personnes là n'étaient absolument rien sans leur wifi.
C'est pour cela que je dois faire attention, attention aux gens que je rencontre même si j'ai souvent tendance à foncer tête baissée, droit dans le tas. Comme avec Idryss. Je me laisse entraîner par lui, je commence à m'attacher pour ne pas dire que je le suis déjà et tout ce que j'espère en retour, c'est que ce soit un minimum réciproque.
Me perdant dans mes réflexions, j'ai cessé de répondre et notre appel continue dans le vide complet. Ce n'est qu'après quelques minutes qu'il reprend, d'une voix posée.
— Qu'est ce que t'as ?
— Rien... Je réfléchis, c'est tout.
— Réfléchis pas trop, tu vas plus pouvoir dormir après.
Mmm, qu'il ne croit pas trop ! Je peux très bien m'endormir à cet instant précis. S'il me berce encore un peu. Avec sa voix ASMR.
— Mais si t'arrives pas à dormir, ça m'arrange aussi.
— C'est méchant ça.
Il répond quasiment au tac au tac.
— C'est méchant de vouloir que tu restes, j'avoue. Je suis égoïste.
— Mmm.
— Si tu me réponds encore une fois « Mmm », j'te prends et j'te frappe.
— Tu pourrais me faire peur...
— Je suis très sérieux.
J'en doute pas, surtout quand il prend cette voix. Mais qu'est ce qu'il peut me faire derrière un téléphone, hein ? Rien, nada. Donc qu'il me laisse m'en amuser.
— En plus, tu mérites plein de baffes...
Pas du tout, je suis un enfant exemplaire.
— T'entends comment t'es violent... Puis, je mérite pas.
— Je suis toxique, oui, c'est vrai.
Pourquoi il fait genre ?
— Tu vas me faire du mal ? je pose bêtement.
— Dans tous les sens du terme.
Ça m'énerve, pourquoi ça ne me fait pas peur.
— Je veux te voir, Mathis.
Le fait qu'il ait dit mon prénom me fait presque bizarre. Il ne l'a jamais prononcé depuis qu'on se parle, c'est si... Enfin, j'aime bien. Ça me fait quelque chose, bam. Mince !
— Comment...?
— Je veux des snaps.
Ah, oui. Pendant un instant j'ai cru qu'il me parlait IRL... Il va me rendre dingo, oui ! J'oublie mes rougeurs sur mon visage puis j'active ma caméra de l'application. Je lui envoie donc une photo de moi sans filtre, ni rien. Je veux qu'il voit le naturel de mon visage, comment je suis... À l'heure actuelle. Il est 23:04 quand il ouvre ma photo.
— Wesh, trop mignon ce mec.
Il rejoue ce que je lui ai envoyé, bien que j'ai laissé le temps au maximum.
Mais non, il me fait chier ! Maintenant je vais voir ma gueule tout le temps ! Et ça va me stresser...
— J'peux te mettre dans my Eyes only ?
Quoi... Et puis pour quoi faire...? C'est bon, il l'a déjà enregistré ici, sans mon accord en plus mais bon...!
— Mais mon snap restera ici quand même, non...
— Je te fais marcher, t'inquiète. J'te garde ici.
— Oui, en plus my Eyes only c'est pour les trucs bizarres...
Genre, les nudes. Je le sais parce qu'un mec dans ma classe en collectionne, et il met tout sur My Eyes ce fou ! Si ces filles savaient... En même temps, attention à qui on envoie !
Moi je pourrais pas. Je pense à une personne de confiance, oui.
— Tu t'y connais, je note, je note.
— Alors là, pas du tout ! Je dis seulement ça puisque c'est logique qu'ils ont fait ça pour les nudes !
— T'en as ?
Non, j'ai même pas créé mon code pour utiliser cette option...
— Je fais pas ça moi.
— J'avoue. Moi non plus. J'fais pas de nudes. Je montre tout qu'en vrai, ça va pas ou quoi.
Il fait son prude, comment il le dit... Pourtant on pourrait penser, je sais pas... Il a l'air d'en faire. Une impression bizarre, mais c'est comme ça !
— Après, j'sais pas... P't'être ça dépend de mon mood avec la personne aussi.
— Mmm. Je vois.
Que dire... J'espère que la personne ce n'est pas moi. De toute façon je suis bête, il parle de manière générale, ouais...
— Tu vois quoi ?
— Le noir.
— Pourtant, j'suis pas noir.
Qu'il est con ! Mais il me fait rire. Pff, ça me saoule.
— Tu prends trop la confiance, je finis par souffler.
— Mais tu m'vois dans le noir.
— Comment je pourrais te voir dans le noir, déjà... Tu es très bizarre, Idryss.
Il veut me faire imaginer des trucs, peut-être. Puis quand il reprend, c'est bien ce que je pensais. Mon corps recommence à me renvoyer ces signaux qui me prennent de plus en plus souvent ces temps-ci. Et je ne sais pas si bon ou pas.
— Si. Tu m'vois au dessus de toi, dans ton lit.
Je ne préfère pas imaginer.
— Non... Non, pas du tout.
— Tu veux que je me rapproche ?
Je veux... Oui, non. Si je réponds ça, il va me chanter Angèle, s'il a du goût... Mais mon avis change directement, car je sais jamais ce que je veux.
— Un peu... Peut-être.
— Ok. Attends, j'me rapproche.
Mes doigts tremblent légèrement, je ne sais plus comment tenir mon téléphone. Mes yeux admirent sa photo de profil, il est si beau... Quand je les ferme je repense à son visage, celui d'Idryss. J'ai screen cette image dans mon esprit et puis dans la pénombre, je l'aperçois bien que j'aimerais que ce soit une réalité et pas mon imagination.
— Est-ce que tu m'ressens ?
Je sais pas... Mais mon corps est comme devenu lourd sous la tournure que prend notre dialogue, l'atmosphère entre nous change au tout pour tout et je ne peux m'empêcher d'apprécier ça. Un mot plus fort qu'apprécier mais sur le coup, j'en ai pas.
— Réponds moi.
— Oui, Idryss...
Je veux crever. C'est sorti tout seul dans un soupir et... Je l'entends sourire dans mes oreilles. Je sais qu'il aime quand c'est comme ça, cette simple affirmation suivie de son prénom.
— Putain, tu commences à me plaire toi.
Commencer ? C'est déjà un bon début, si je commence déjà... La température de mon corps augmente subitement suite à ce qu'il vient de me dire, je ne peux nier l'effet qu'il me fait.
Impossible. C'est trop tard. Puisque j'me suis déjà prit le pied dans le piège qu'il a laissé tomber par terre. Idiot.
— C'est dangereux.
Ah bon ? Pourquoi ça serait dangereux, finalement ? Je réponds après avoir légèrement toussoter, espérant avoir une voix normale au téléphone.
— Pourquoi...
Il ne me répond pas immédiatement, mais je lui laisse son temps. Je deviens tout timide.
— Parce que que tu vas me rendre mauvais. J'vais trop te vouloir, si tu rentres dans ce petit jeu avec moi.
Mais moi, j'ai envie de continuer comme ça. Comment expliquer ce sentiment qui s'empare de moi ? C'est indescriptible. C'est... Non. Ce n'est certainement pas de l'amour, c'est moins profond mais plus... redoutable, et exaltant. Du désir. Cette envie qui me prend, me transformant en une simple victime de la définition même de ce mot. Malgré ça, je me laisse emporter et lorsque je lui réponds ce que j'ai à dire, c'est là que je percute que je me perds dans le jeu, le jeu d'Idryss. Qu'il soit bien, qu'il soit mal. Car je vous ai dit que je fonçais souvent tête baissé...
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