On s'capte demain.

J'ai du mal à trouver le sommeil. Sous ma couette, j'ai les yeux rivés au plafond et les mains croisées sur ma poitrine, mon regard se perdant dans l'obscurité la plus totale de ma chambre.










Satané Idryss... ! Il m'énerve tellement ! Comment arrive-t-il à me faire passer par autant de stade ? Je pensais qu'il voulait me quitter mais il m'a fait si peur en s'exprimant de cette manière. Maintenant, je n'arrive plus à penser à autre chose. Je n'ai que lui dans mon esprit, heureusement que demain je ne me lève pas. Je sens que j'vais passer une nuit blanche à force.

Je gigote dans mon matelas, enragé. Quand j'me sens plus à l'aise du côté droit, je passe au gauche. Jusqu'à revenir à la case départ, c'est-à-dire, sur le dos. Je soupire gravement en choppant aveuglement mon téléphone posé sur la table basse.

J'ai oublié de le poser dans la cuisine. Tant pis. C'est vendredi soir, elle ne me dira rien.

Sans me rendre compte, j'ouvre Discord et je retombe sur notre ancienne conversation qui commence à dater un peu. Je ronge mon pouce nerveusement en le voyant toujours en ligne sur l'application... Il ne dort toujours pas ? Toujours avec son pote ? C'est relou.








Il m'avait quitté en disant que son ami devait l'appeler et depuis, il m'a oublié. Super. Pourquoi il me fait passer en second plan alors qu'on avait des choses à se dire ? Il arrive à penser à autre chose ? Car moi non. Il me fatigue à faire ça, on avait pas fini de parler et les choses ne vont pas s'arranger juste en me balançant qu'il en a marre de me parler à travers un appel. C'est quoi ce comportement ?

Il pense à ce que je veux, moi ?

Je ne me sens pas prêt à le voir ! Enfin... Je sais pas. Déjà que la dernière fois, j'ai fait quelque chose de très limite... On se souvient très bien de la fois où je suis allé jusqu'à sa fac' pour espérer le voir. En mode stalker, mais mignon. Ça me fait soupirer d'allier ce mot péjoratif avec un adjectif gentil. Peut-être que ça m'aurait arrangé de voir sa tête... et son allure, au moins je sais à quoi m'attendre lors de notre première rencontre.

Ça me fout les jetons. Je sais que j'me comporterais pas pareil avec Idryss en face de moi. Il va m'intimider, c'est sûr. Je le connais, il est fourbe.





Aaaah.

Ça m'a fait peur. J'étais sur la conversation et voilà qu'il débarque comme comme une fleur. Oui, je dors. Heureusement que j'ai changé mon statut et que je suis inscrit comme étant hors ligne. Je cache mon téléphone après l'avoir verrouillé sous mon coussin puis je laisse mes paupières se fermer.

Je me sens satisfait de ne plus être le dernier message. Ça fait du bien !

Mais. Maintenant... j'ai envie de répondre. Alors, c'est moi qui deviendrait de nouveau le dernier message. Quel cercle vicieux n'empêche.

Bon, aller. J'm'en fiche après tout. Même si je le boude encore un peu de m'avoir traité de la sorte tout à l'heure. Il faut qu'il apprenne à ne plus me parler comme ça, c'était pas cool vis à vis de moi. Il faut qu'il contrôle ses émotions, un peu ! J'veux pas qu'il se défoule sur moi parce qu'il sait pas gérer ses sentiments. Il me kiffe, il devrait s'estimer chanceux de m'avoir en crush, c'est pas tous les jours que je m'accroche autant à quelqu'un.

Pff.

Surtout que ça commence à faire un bon bout de temps que je n'ai pas craqué pour une autre personne que pour lui. La situation devient critique, Capitaine Mathis. Vous êtes sûr que tout est en ordre ?

Non. Rien n'est dans l'ordre. Surtout quand il me répond. Bien sûr, j'ai dit que je dormais pas.

Onyx — Aujourd'hui à 22:43 
Tu vx qu'on s'appelle ?

J'attendais que tu me proposes oui ! J'ai l'air idiot d'espérer que ça ? Très certainement. Est ce que j'en ai quelque chose à foutre ? Non. Une grosse semaine est passée depuis que je n'ai plus entendu ta voix alors je vais pas refuser cette opportunité. Ma rancune disparaît lorsque « Onyx » s'affiche dans une notification sur l'écran de mon Iphone.

Les écouteurs branchés, je décroche son appel. Un p'tit silence s'en suit, parce que je n'ose pas parler en premier. J'veux qu'il comprenne que je suis saoulé.

Je suis un gamin, mais lui, n'en parlons pas. Je rejette toujours la faute sur lui j'ai l'impression...

S'il me voyait IRL, il rigolerait je pense. Sauf que je ne ferai rien passer ! Je serai stoïque. Je ne veux pas qu'il croit qu'il a gagné et qu'il peut m'avoir aussi facilement. Je. Veux. De. Vraies. Explications !

Tu dormais ? soupire-t-il pour commencer.

Si je te réponds, c'est que non.

— Je voulais y aller, oui. Mais je n'arrive pas à m'endormir...

Et mince, je parle déjà trop. C'est mauvais. Pourquoi je n'arrive pas à répondre froidement, tout simplement ?






Qu'est ce qu'il m'envoie ?

Je reçois une photo de son écran d'ordinateur portable. Il regarde un anime, mon anime préféré. Il le fait exprès. T'essaye donc de me draguer ? J'avais dit qu'il était fourbe. Fait gaffe, on pourrait en parler pendant des heures. Je décide donc de lui répondre, sans qu'aucun de nous deux ne parle en vocal. Ce n'est pas gênant, c'est même agréable de le savoir là, présent, dans mon téléphone.






Qu'est ce que tu m'as envoyé...

Il ne mérite pas ce snap mais j'espère qu'il va rire. C'est drôle. Il pouffe légèrement et ça me fait plaisir. Voir trop. Non, ressaisis toi Mathis.

Tu dois le bouder. Rappelle-toi. Tu n'es pas aussi faible, si ? Peut-être.

T'es con.













Un vrai artiste.

Oui, c'est vrai. Je me retiens de lui dire que lui encore plus mais je me la ferme. J'ai pas envie de m'embrouiller, j'ai plus envie... Je déteste ça. Je suis pas né pour ça, et je viens en paix. Toujours. Je veux qu'on ait toujours des bonnes discutions avec Idryss, j'veux pas qu'on soit en froid, ça me fait mal.

— Dis Idryss... Pour tout à l'heure...

Je prie intérieurement pour qu'il ne s'énerve pas. J'hésite un peu à aligner mes mots comme il le faut, de peur qu'il se braque. À ce moment, je ne sais pas trop comment engager la conversation avec lui vu ce qu'il s'est passé plus tôt.

Oublie. C'est moi, j'sais pas pourquoi j'ai réagit comme ça.

Ah ! Bien. Oui, c'est vrai que personne n'a comprit. Il reprend à mon plus grand bonheur. Je l'écoute d'une oreille attentive, mes doigts jouant avec le fil de mes écouteurs blancs.

C'est juste que ça m'a saoulé qu'on se soit pas parlé cette semaine. T'avais p't'être des choses à faire, franchement j'en sais rien. Et j'l'ai prit un peu trop perso', j'pensais j'avais dépassé les bornes la dernière fois.
— Ah...

Oui, il parle de la cam. Je me souviens très bien lorsque tu m'as dit que j'étais ton type. J'y ai pensé toutes les nuits tellement ça m'avait perturbé, mais en bien ! En bien... C'est pas tous les jours que quelqu'un t'avoue ce genre de pensée. Tu vois, que tu sais parler ! Quelle plaie ce mec.

J'ai dépassé les bornes du coup, ou ça va ? reprend-t-il après cette brève minute de silence.

Ah, je dois répondre ?

— Euh, bah... Non.

Je suis gêné, je ne pensais pas qu'il allait me poser cette question aussi directement. Et après, il veut qu'on se voit... Et bien, qu'est ce que ça va être en face à face, comme il l'a si bien dit la dernière fois ! Je sens que je vais commettre des bourdes, et pas qu'une.

— Je... Je trouve que ça va.

Je lève les yeux au ciel après ma réponse, me saoulant moi-même. C'est possible ça ? Quand on s'appelle Mathis, très certainement. Je me place donc sur le côté, ne pouvant rester de manière tranquille allongé comme ça. Mon ventre se tord dans tous les sens et je soupire fortement par le nez, mes cheveux s'éparpillant contre ma peluche Krokmou qui me sert plus de coussin qu'autre chose.

J'suis désolé si j't'ai rendu mal à l'aise.
— Pas grave... ! C'est du passé, maintenant. Juste...

Le fait qu'il se livre un peu plus à moi durant ces quelques minutes me donne le courage de lui dire ce que j'ai à dire, moi aussi.

— J'veux plus qu'on se prenne la tête comme ça... Même si j'ai l'air de prendre les choses trop à coeur, j'veux pas que tu te bloques et... je veux que tu dises quand y a un truc qui te dérange. C'est tout.

Sans même bégayer, je suis un crack.

T'étais où cette semaine ?

On en vient aux faits ! C'est vraiment ça qui l'a saoulé. S'il savait la raison... Après tout, j'dois bien lui dire même s'il va rire.

— Et bien... En fait, j'ai été puni, je réponds donc, un peu honteux, à mon grand âge.
T'as fait quoi, vilain garçon ? il rigole.

Hé, du calme. Si moi j'suis vilain, alors là.

— Tu sais... Attends, mais tu sais !
Je sais quoi même ?
— Ben... Après notre cam... Tu as bien entendu ma mère non ?

C'était trop gênant, punaise ! Rien que de repenser à la dernière fois, mes joues font n'importe quoi. Il a bien entendu ma mère m'engueuler et m'ordonner d'éteindre le pc ! Quoi que... Sous la précipitation, je sais plus si j'avais réussi à quitter l'appel.

Non. J'étais en train de te dire quelque chose et tu m'as coupé en quittant.

Ah bah. Oups. Pas fait exprès.

Je comprends maintenant pourquoi il a la haine. En plus, j'ai rien envoyé après tellement j'avais pas le moral le lendemain... J'avais expliqué la situation à Lou et puis c'est tout.

C'est quoi l'histoire avec ta mère ?

Je soupire et je reprends, en essayant le plus possible de chuchoter. Il est presque minuit et si elle m'entend, elle risque de venir me saouler. Je ne veux pas ça. Pas encore.

— Elle dit que j'passe trop de temps sur l'ordinateur, quand je rentre des cours. Et puis, ça lui a pas plu les notes que j'ai ramené y'a pas longtemps...
T'as eu quoi comme notes ?
— Un 8 et un 10. C'était un truc à rendre en français et le 10 c'était en géographie, j'ai fait un hors-sujet complet...
Elle est sévère ta mère ?

Non. Mais là, elle a abusé grave !

— Ben... Ça va d'habitude...
Maintenant, c'est quoi le bail. On va plus pouvoir jouer en semaine ?

Je sens une pointe de déception dans sa voix. Moi aussi je suis déçu Idryss, moi aussi ! C'était devenu comme une sorte de petit refuge de venir jouer à Nitefort avec toi, le soir. Elle a tout gâché maintenant. Je m'en veux un peu, j'aurai pu être plus discret en quelque sorte mais quand on perd, ça me fait rager un peu. Dire que j'étais au point de monter au niveau 19 !

Jamais je vais rattraper son level. Jamais.

— Pour l'instant, ça va être compliqué...
C'est chiant. J'vais me faire chier.

C'est sûr. Tu n'auras personne à entraîner, mon pauvre. En plus, c'était drôle quand on jouait. Même si je lui servais plutôt à rien, lui, au contraire, il m'aidait beaucoup. J'avais la classe avec l'avatar d'Idryss à mes côtés.

— On pourra jouer ce week-end si tu veux...
J'espère. En plus, j'avais quelque chose pour toi.

Quoi ? Il a quoi pour moi ? J'aime bien ce genre de phrase.

— C'est quoi ? je m'intéresse, curieux.
T'avais dit que t'habitais vers chez moi, c'est ça ?

Non mais c'est emprunter quel genre de virage ça ?! C'est mort. S'il veut m'offrir mon « cadeau » en réalité, il peut se le garder. Bon. J'aurai du mentir et dire que j'habitais vraiment à Paris. Sauf que j'pense que c'est un peu mort, il a cramé mon petit accent quand je m'énerve.

— Ah ouais, j'ai dit ça moi... je dis, d'un ton voué à l'innocence. C'est bizarre...

Je gigote dans mon lit comme pas possible. Il l'entend.

Mais tu branle quoi ? C'est quoi ces bruits.
— C'est ... Je change de position, c'est tout ! Ne t'imagine pas.
Change bien alors.

Bref. Heureusement qu'il prend encore un autre tournant.

T'as si peu envie de me voir ou quoi ?

En vrai... C'est juste qu'il me fait peur... Comment lui dire sans le blesser... Parce que c'est super méchant de dire ça ! C'est vexant. En réalité, il est peut-être mignon et il se donne un style juste parce qu'on est séparés par le virtuel. J'essaye de me rassurer comme je peux.

— Bah...
On se capte ce week-end ?

Je vais m'étouffer.

— ... Mais ! Tu me laisses même pas le temps de répondre ! je me justifie en ignorant sa demande.
J'veux pas connaître ta réponse, en fait. Moi, j'veux te voir.
— Mmm. D'accord.

Minute. J'aurai peut-être pas du répondre comme ça.

Cool, demain c'est bon pour toi ? On n'aura qu'à se rejoindre devant ton lycée.
— Devant mon... Hé, comment tu sais mon lycée !!

Merde, pourquoi je cris ! Punaise, ça m'a échappé ! Mon sang ne fait qu'un tour. J'espère que mes parents ne m'ont pas entendu... Sans même m'en rendre compte, je me suis redressé, assis dans mes draps en désordre, mes cheveux n'en parlons pas, les yeux écarquillés et la main devant la bouche. Je lui ai dit où j'étudiais ? Il me semble pas... Alors... Comment ... ?

Tu sais que t'as ta localisation activée sur Snap ?

PTDR.

Putain. Quel con.

J'ai envie de pleurer toutes les larmes de mon corps, pour de vrai.

C'est une blague ?

Non ce n'est pas une blague, il a raison.

Donc. Il est en train de me dire qu'il sait même où j'habite, là ?

Comment est-ce que c'est possible d'être aussi idiot ?! Durant tout ce temps, il pouvait me stalker et moi, je ne me rendais compte de rien !

— C'est... C'est, je pensais que j'avais désactivé...

Oh non, non, non, non ! Le stress me monte et me fait paniquer. Je vais donc sur Snap et me dépêche de me foutre en fantôme sur la carte. Je galère à trouver la carte, appuyant sur tous les boutons inimaginables. Lui, bien sûr... Plus intelligent que moi, il n'y figure pas ! Bah oui, hein !

Mathis, putain...












Je le déteste ou plutôt, je me déteste. Et il fait le petit ange en me demandant si oui, j'habite vers chez lui alors qu'il le sait très bien ! Je me reprends, en colère contre moi-même.

— Et pourquoi tu fais l'innocent alors que tu sais très bien ! Hein ? T'es chiant, bordel...
Je te sens stressé, là... Avec ton chapeau de paille.









Il parle de mon bitmoji. Il est colère désormais. Oui, je l'ai changé car l'autre faisait pitié de ouf. Mais là n'est pas le sujet !

— T'es juste chiant ! Je me sens à nu, là ! j'avoue, encore un peu sous le choc.

Et si c'était un fou ? Maintenant, trop tard mais voilà pourquoi je ne devrais pas donner mon réseau à tout le monde.

Arrête de faire ta victime, c'est bon. J'vais pas débarquer chez toi, non plus. J'ai déjà oublié ton adresse.
— Mytho. Je suis sûr que tu l'as déjà noté...

Il rigole, moi ça me fait pas rire.

J'ai p't'être l'air d'un taré mais j'me pointerais jamais à ta porte, rassure-toi.
— Tu veux pas rencontrer mes parents ? je demande, un peu sonné.

Je ne sais pas pourquoi je dis ça, bien sûr qu'il ne veut pas rencontrer ses beaux-parents.

Ne nous précipitons pas. Déjà, j'veux te voir dans la réalité pour commencer.
— Pour voir ? Me voir ? Tu m'as déjà vu.

Y'a trop de fois le mot Voir, j'ai paniqué.

J'suis sûr t'es mieux en vrai.

Il me charme, oui. Beau parleur, il sait comment parler. Même si j'ai envie de lui en foutre une. Il ne mérite même plus que j'use mes paroles pour lui.

Demain, devant ton lycée. À 15h00.
— Ah, je soupire. Je n'ai vraiment pas le choix... ?

Bien sûr que non, tu n'as pas le choix. Tu as vu avec qui tu t'es mêlé ? Ça m'apprendra.

Pas vraiment. Me pose pas de lapin, sinon j'te bloque. Ou j'débarque chez toi, tu préfères quoi ?

Sale geek. Si tu crois me faire peur... Je passe mes doigts dans mes cheveux, essayant de me détendre mais après cet appel, je pourrai tellement pas dormir. J'vais vraiment rencontrer Idryss avec une nuit blanche dans le sang. Ça promet... Je crois que je ne rends pas vraiment compte qu'on va se voir à l'instant même.

— Je serai là, c'est bon... je grommelle.
— À demain, Petit Prince. Dors bien.

Oui, oui, bonne nuit.

J'ai hâte.

Hâte de quoi ! Comme si quelque chose allait se passer...

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