Diabolo match.
Oh non. Je ne m'attendais pas à autant de monde. Punaise, mais on peut se faire drop autre part ?
La salle d'arcade est bondée ! En même temps, quelle idée de se retrouver dans ce lieu rempli de geeks et d'otakus en tout genre un samedi après-midi. Mathis... Et ton cerveau ? Ce lieu est trop baka pour moi, je regrette presque d'avoir entraîner Idryss ici, pour notre premier date... D'ailleurs oui, c'est bel et bien un date ! Au cas où ça ne serait pas assez clair... Il ne peut y échapper, ni m'échapper d'ailleurs. Je l'ai décidé et malgré tous ces gens, je compte bien passer un bon moment en sa présence.
Quand je tente un regard vers lui, je me sens sourire comme un débile... J'aime bien quand il triture sa chainette du bout des doigts, c'est un tic ?
Enfin... Au moment où je dis ça, le voilà qu'il vire vers un petit bar, là où se trouve une employée désemparée, habillée d'un uniforme où un imprimé Donkey Kong harmonise sa tenue à la perfection. Le singe est un peu l'emblème phare, ici.
Mais. Punaise.
Pourquoi il met des feintes comme ça ? Je devrais arrêter de me perdre dans mes pensées, à défaut de le perdre lui. J'aime pas quand il fait ça, ça commence à bien faire. Je rouspète dans ma barbe avant de le rattraper tant bien que mal. Je m'excuse en demandant à une fille de mon âge de se décaler, elle me bloque la route, ce qu'elle fait après 10 bonnes grosses secondes. Misère de misère.
— Hé ! Tu pourrais au moins m'attendre ! Tu sais, un kidnapping est vite arrivé, je dis sans trop savoir ce que je raconte.
Je parle vraiment pour dire de la merde. C'est juste que... Ça me saoule un petit peu le fait qu'il me fuit déjà. Surtout en public, comme ça. J'ai l'impression de me sentir un peu con...
On est venu ensemble, alors j'aimerais l'avoir auprès de moi. Enfin... Je crois que je m'emballe un peu trop lorsque je le vois se décaler pour me laisser une place à ses côtés, un petit sourire dessiné sur ses lèvres. Il aurait comprit ? Son regard veut tout dire, je pourrais même le voir secouer légèrement de la tête. Pff. Je retire mes conneries, je me sens soudainement revivre. Son coude se frôle au mien sans faire exprès quand il lève son bras pour l'accouder au comptoir, ses doigts venant retenir son menton.
Ses yeux sont rivés sur la pancarte des boissons et des sucreries, jugeant avec attention ce qu'ils proposent. Il s'en fiche de mon pseudo kidnapping qui n'aura jamais lieu d'être pour le coup, qui voudrait s'emparer de moi dans un tel endroit ? J'te jure. Ils sont tous obnubilés par les jeux, d'autres criant tandis que d'autres pleurent de nerfs, tels de misérables mauvais joueurs.
Tiens, c'est limite si j'me vois moi dans un futur très proche. C'est drôle. En tout cas, je commence à me faire doucement à l'ambiance.
— Tu veux boire quoi ? son visage me fait signe pour que je regarde la carte.
Ah ! Euh. Il a raison, vaut mieux que je prenne des forces avant de l'écraser convenablement. Il ne faut pas que je commence à me faire du mouron, je suis plutôt bon... La blague.
Je fais mine de réfléchir alors que je sais exactement ce que je vais prendre. La fille du bar divague de droite à gauche pour faire quarante mille chose en même temps : servir, faire payer, préparer, encaisser, râler, sourire, saluer... La pauvre, c'est limite si je veux la déranger !
— Bonjour... ! Vous avez fait votre choix ? s'empresse-t-elle alors de nous demander, ses doigts triturant les bords de sa caisse.
— Euh... Je vais prendre un diabolo fraise, s'il vous plaît !
J'entends un léger rire à mes côtés, pas la peine de préciser qui c'est. Je ne peux m'empêcher de lui lancer un regard interrogateur, c'est quoi le truc ? C'est vraiment bas de juger quelqu'un par sa boisson, Idryss ! Vraiment... Je fais genre de m'en foutre, le regard vers le plafond. Ma tête accentue son rire.
J'vais finir par commander dix Diabolo fraise si c'est pour entendre ce son.
Malin Mathis.
— Diabolo fraise... Un vrai gamin, lance-t-il dans le vide, son rire s'estompant.
Je viens pousser son avant bras, il saoule ! Il m'ignore totalement avant de reprendre en direction de la jeune femme. Mince, elle attend.
— Ah... Ce sera un Diabolo menthe, s'teuplé.
— ... Pff.
Ce type. Après c'est moi l'enfant. Je suis outré, ce gars se fiche de moi. Idryss me lance un sourire espiègle avant de venir pousser mon bras à son tour, étant tout aussi gamin que moi. Cherche pas, j'vais continuer. J'suis encore plus chiant que toi.
Et... Pause.
Je ne m'empêche pas de le trouver mignon comme ça, nos boissons matchent, je ne pourrais rêver de mieux, mais on est où là ? Dans un roman d'amour où tout tourne à la perfection ? Peut-être. Cet idiot, sûrement il l'a fait exprès pour me charmer. C'est sans doute ça.
Je veux être la p'tite feuille de menthe qui s'éclipse dans son verre. Ou sa paille verte, totalement assortie à la couleur de son mélange ? Putain, le choix est trop compliqué. Je regarde l'employée préparer tout ça avec soin, les yeux dans le flou.
Une personne s'installant bruyamment à mes côtés me sort de ma rêverie. Je me fais un peu bousculer, ce qui me fait me cogner contre mon crush, ce que je fais non pas exagérément. Olala, mais il m'a poussé tellement fort...! Alors, je ne sais pas qui est cette fabuleuse personne mais sache que... que je t'aime. Mon épaule se ratatine contre le torse d'Idryss, comme c'est bizarre, mon corps est devenu tout aussi mou que du marshmallow.
Oh comme c'est bizarre, oh alors...
— Hé ! Fais gaffe non ?
Qui, moi ? Non.
La voix grave d'Idryss tonne au dessus de ma tête à l'encontre du mec qui vient de me heurter, ce dernier s'excusant rapidement. En vérité, il s'en fout royalement de nous et surtout de moi. Je suis invisible, l'homme invisible. Il reprend la discussion avec son ami, rieur. Ah. Je sens le brun râler un peu plus en voyant qu'il se fait complètement ignorer, enfin, il a dit pardon mais sans plus, faut pas chercher ! Les gens sont malpolis de nos jours.
Idryss s'apprête à tirer le col de l'autre mais je l'en empêche.
— Ça va, t'inquiète. J'ai pas eu mal...
Au contraire. Tu es d'un confort sans nom. Dis, j'peux squatter plus souvent ?
C'est mon ventre qui me fait mal, d'ailleurs ! Mon cœur ne peut s'empêcher de faire le fou et mes joues me brûlent depuis que je me suis ratatiné contre lui. Qu'il s'excuse l'autre, ça ne me fait ni chaud ni froid. D'ailleurs, il pourrait même recommencer si c'est pour aussi bien tomber.
Bon. Heureusement que la fille qui travaille ici finit par nous servir et on peut s'éclipser, nos gobelets en plastique à l'effigie du fameux singe crée par Nintendo entre nos précieuses mains. Idryss a payé nos boissons on a pu avoir quelques pièces à utiliser pour nos jeux.
Il n'a pas hésité à sortir sa carte bleue d'une élégance sans nom, petit paiement sans contact... Quel homme. Moi, j'aimerais un petit contact cela dit. J'aime bien, j'aime bien. Même si je souhaiterais lui payer quelque chose, en retour... C'est notre date après tout ! Je le laisserais pas tout faire.
Hors de question.
En fin de compte, nous trouvons une borne afin de s'affronter au Mortal Kombat. L'heure est arrivée, ça y est ! Je sirote mon Diabolo à l'aide de ma paille rouge tandis que je regarde Idryss voler mon côté préféré. Le droit.
— Non, c'est moi le côté droit... je m'exprime, un peu boudeur.
— Je préfère le côté droit.
— Et ? Je suis le plus...
— Aller, arrête de râler et ramène toi.
On est quoi ? Deux quilles pour avoir ce genre de discussion. On s'en fiche du côté Mathis, juste place toi ! Pourquoi j'suis comme ça... Je m'énerve tout seul.
Oui ! D'accord. J'arrête de me plaindre à partir de maintenant. J'ai compris. En plus... Il va finir par me trouver lourd à force. Mais ce n'est pas de ma faute, je ne sais même pas pourquoi je me comporte ainsi. Je crois que c'est la panique qui prend le dessus. D'un point de vue extérieur, on ne dirait pas, mais je suis hyper stressé de me retrouver avec lui... Je ne me rends pas encore très bien compte à qui j'ai affaire.
Pendant qu'il est en train de choisir son personnage sur l'écran animé, mes yeux divaguent sur sa personne, son visage de profil, sa mâchoire un peu trop bien dessinée, ses quelques mèches rebelles noires qui retombent un peu sur le devant de ses yeux et... je ne peux m'empêcher de trouver sa main un peu trop attirante à mon goût.
Je dois avoir un problème. Non mais. J'explique juste. Promis, c'est la dernière pause !
Je fais mes aveux ouais. Là, maintenant et tout de suite.
Mais c'est juste la partie que je préfère chez un gars. Si t'as de belles mains, tu m'as gagné. Il m'en faut peu, certes, je m'avoue vaincu et considérablement faible.
— C'est le jeu que t'es censé mater, pas moi.
Ah ouais ? Qui a dit ça ? C'est noté où ?
Je... regardais l'endroit. Oui. Magnifique endroit dans lequel se trouve un magnifique spécimen. Bref... On se perd, là. J'ai même pas eu le temps de décrire les alentours tellement il accapare mon champ de vision ! Toutes les bornes sont placées dans la pénombre, nos manettes et nos consoles se retrouvant illuminées de néons bleutés qui nous plongent, tous les deux, dans une certaine ambiance plutôt chill et renfermée. Est-ce que je suis le seul à ressentir ça ou... Je me fais des idées ?
J'arrive à ignorer toutes les présences autour de nous.
Enfin, je croise ses yeux. Ses yeux noirs se noient dans les miens et je sens comme un éclair traverser le milieu de mon crâne et s'échapper sous terre, sous mes baskets. C'est étrange mais en même temps, terriblement agréable.
— Wesh, ça va ou... Tu veux que j'te recherche à boire ?
Merde ! Il va me prendre pour un gros taré à l'observer comme ça ! Nerveusement, j'aspire dans ma paille sans me rendre compte que je n'inhale plus que... Ben, de l'air ! Y'a plus rien ! Ce qui produit ce bruit là, vous savez, ce bruit insupportable et je me déteste d'être ce genre de personne à ce moment précis.
— C'est à ton tour de choisir, souffle-t-il tout en bougeant sa manette.
Oui c'est ça, ignore moi. Je m'excuse rapidement, lâchant un maigre désolé tout en posant mon verre sur une table, derrière nous. Pourquoi je m'excuse ? Question sans réponse, vaut mieux.
Mathis, ça va plus. Tu divagues.
Du coup je prends un personnage aléatoire, il m'a complètement déconcentré là. Quoi que, je le suis depuis le début. Depuis que je suis tombé sur lui, je me sens un peu sonné. J'ai bu mon Diabolo et j'ai encore soif. Oui je sais, je suis chiant. Et oui, j'avais dit que j'arrêtais de me plaindre, my bad. Je respecte rien.
— Prépare toi à goûter le sol, p'tit Prince.
— Tu m'en diras des nouvelles, vu que j'compte t'envoyer au tapis dans pas longtemps.
Je ne sais pas d'où m'est venue cette soudaine inspiration mais ma réplique a fait sourire Idryss, je ne prends plus le danger de le regarder mais... je l'ai senti, oui.
Son sourire.
Rapidement, notre premier combat se lance et nos deux personnages se regardent dans le blanc des yeux, face à face, placés en position de combat. Ce jeu me rappelle des souvenirs, quand je jouais encore à la Xbox 360. Maintenant, elle est en train de pourrir dans un carton au grenier.
Je me sens tout d'un coup nostalgique. C'est décidé, ce soir je demande à mon père de me la descendre !
Johnny Cage Wins !
Hein ?! Déjà ? Mais on vient de...
— C'était quoi que j'devais manger ?
— J'étais pas prêt ! Attends, je me concentre !
Menteur de merde, Mathis. Il se fout de toi, là. Punaise, faut que je me réveille parce que si ça commence comme ça, il va gagner les 10 parties en 10 minutes et là... Là je commencerais à regretter mes dernières paroles !
Elles me narguent dans ma partie.
« Si tu arrives à me gagner 10 fois... Tu gardes la vidéo et je ferais ce que tu veux. »
Le clown du spectacle, le dindon de la farce. Sinon, tu as envie de me connaître ou pas du coup ?
Les sourcils froncés, mes doigts s'agitent lors du deuxième combat. Un peu plus dans le jeu, j'essaye de me concentrer sur ces tas de pixels qui s'affolent à une allure de...
Johnny Cage Wins !
... de baisé ! Mais j'en ai marre ! Comment il arrive à enchaîner ces combos ? Et ce n'est que le deuxième round ! Je vais détester le Mortal Kombat. En fait, elle peut rester où elle est, la Xbox.
— Arh, fait chier !
— Putain, j'la sens bien cette p'tite fin de journée.
Hein... Comment ça, tu la sens bien ! Ne t'imagine pas trop de choses, j'vais pas... C'était une façon de parler, je ne ferais pas tout ce qu'il voudra, je vais rester le maître de moi-même ! Même si... Même s'il se prénomme Mastership Idryss en virtuel, il peut aller se brosser.
Suis-je en train de rager ? Oui.
— J'sens que mon p'tit Prince va me régaler.
Johnny Cage Wins !
— Dis, tu rinces après les Diabolo ?
Johnny Cage Wins !
...
— J'ai l'impression de jouer contre un bot.
— Mais ferme là !
Johnny Cage Wins ! Flawless Victory !
— C'est pas à moi de décider de... Tu fous quoi ?
Qu'il. Me. Laisse. En. Paix.
Je m'écroule tel un faiblard au sol, m'accroupissant en me retenant aux rebords de la console de jeu à l'aide de mes doigts, laissant tomber ma tête dans le vide, totalement défaitiste. Un long soupir s'échappe de mes lèvres, au bord de la déprime. Ah...
J'ai besoin d'une pause. D'une pause respiration.
— Quelle drama...
Je suis un mauvais joueur, je l'avoue. Mais ce qui m'énerve d'autant plus c'est la manière dont il me met K.O. Je n'ai pas le temps de faire une attaque ou une technique que me voilà éjecté tel un noob de l'autre côté de l'autre écran. M'énerve ! Je n'ai pas à mon mot à dire contre Idryss. Je suis venu ici pour souffrir, c'est un fait.
Et s'il continue de passer ses doigts de cette manière dans mes cheveux, ce n'est plus la souffrance qui va me taquiner ; mais plutôt, la mort...
Mon cœur balance entre le mal et le bien, son toucher me terminant affreusement. Il joue à quoi... Mon visage me brûle, je me sens rougir de partout. Je suis sûr que même ma nuque, est colorée. Mes yeux sont ouverts et découvrent les motifs et les couleurs de la moquette de cette putain de salle d'arcade, j'aimerais m'enfoncer à travers ce sol et disparaître avec Idryss.
D'autant plus lorsque sa douceur change et ses gestes s'assombrissent, ses doigts tirant désormais les mèches châtains de mes cheveux pour me forcer à relever la tête, j'imagine... Et puis ça fait mal, je vais pas mentir. Et... Et ! Bordel. Je sais plus aligner les mots. Enfin. J'essaye. Pour ma fierté. Parce que...
— Tu sais... je trouve le courage de dire, mes yeux finalement levés sur lui. Ça pourrait confusion, là.
Voilà. Cette position est un peu... Space.
Je me retiens de tousser et de me dégager de son emprise, en réalité, je veux qu'il le fasse de lui même... Il relâche peu à peu la pression jusqu'à ce que je ne sente plus rien. La légèreté.
— Euh, ouais... J'vérifiais juste que t'étais pas en train de pleurer.
Ah ouais ? T'es sûr ? Side eye.
Wow. Mais j'ai fini par l'embarrasser où je rêve ? Non. Minute ! C'est lui, qu'est ce qui lui a prit de me tenir comme ça ? Il se referme alors que... Bon, peut-être qu'il voulait en effet vérifier même si... C'était bizarre hein ? D'accord. Changeons de sujet.
Ah ouais. Est-ce que c'est la peine de préciser que j'ai gagné que 5 parties sur 20 ? Et encore... Je sens qu'Idryss m'a fait don de ces tours en particulier puisque j'étais au bout du rouleau. Je suis faible, terriblement faible face à ce niveau 90. Faut se l'avouer, il est beaucoup plus doué que moi aux jeux. On s'est lancé dans un Mario Kart, après. C'était drôle, beaucoup plus drôle que le Mortal Kombat et je regrette presque de ne pas l'avoir défié à ce jeu. Je suis plus doué que lui au volant.
J'espère qu'il n'a pas son permis.
Je lui ai bien foutu la honte, à la course de l'arc-en-ciel. Comment ça, il ne connaissait pas les raccourcis ? La honte, pour un geek. Je l'ai charrié sur ça, et il s'est vexé. Il faut bien que je me rattrape !
— T'affole pas non plus. T'as oublié ce que t'as dit, plus tôt ?
Non.
Nous voilà maintenant affalés contre un canapé, devant une table où se trouvent nos deux verres à présent vides. Ah oui, j'ai enfin payé une autre tournée de Diabolo ! Cette fois-ci, on a échangé les goûts... Il a prit fraise et j'ai prit menthe.
C'était une technique pour me tromper de verre et de boire dans le sien, j'étais toujours sur mon Diabolo à la fraise moi ! Oui. J'ai 4 ans. Mais Idryss en a 3, puisqu'il ne s'est pas gêné pour faire pareil. J'ai esquissé un sourire un peu gêné en déposant ma joue dans la paume de ma main.
— C'était... C'était cool, aujourd'hui ! Je me suis bien amusé.
Il sourit.
— C'est drôle, venant d'un perdant.
— Je... Ouais. C'est drôle, c'est vrai...
Quand c'est pas l'un qui arrive à gêner, c'est l'autre... Deux idiots.
Mathis, tu ne sais plus parler c'est ça ? Ah, c'est si embarrassant... Ce silence entre nous ! C'est pas comme ça quand on se chamaille, je n'ai pas le temps d'affronter ce mutisme et ses yeux qui défient les miens. Ses doigts tapent un rythme inconnu contre le gobelet en plastique. Il va me répondre un jour ou bien ?
Brise ça, Idryss. Me laisse pas solo. Sois pas ce genre de mec. On a un tas de choses à se dire, je suis sûr...
— Tu rentres chez toi ce soir ? lance-t-il d'un coup.
Ça me surprend un peu. Il veut que je rentre où ?
— Bah... Oui ? Pourquoi cette question...
Un peu bête mais je lui en veux pas. Plus rien ne m'intéresse, je veux juste entendre sa réponse et tout ce qu'il a à me dire. Est-ce qu'il voudrait finir la journée avec moi ? Rien qu'en me projetant aussi vite et aussi loin, je sens mon cerveau exploser dans ma boite crânienne ! Et mon cœur faire du Fast & Furious.
— J'te raccompagne ?
Seulement si on se tient la main alors.
J'suis chiant.
Bon.
J'essaye de relativiser. En fait, je sais que ce n'était pas ce qu'il avait en tête. Son regard est un peu fuyant maintenant et il semble un peu... Dans les nuages ? Bizarre... Je fais une petite moue suivi d'un signe d'accord et tout s'enchaîne un peu trop vite à mon goût. Et bien... Adieu petite sale d'arcade. Ce fut vraiment un plaisir de me foutre la honte ici. On reviendra, quand j'aurai gagné une vingtaine de level je pense.
— J'ai kiffé te rencontrer, en tout cas. T'es le même. Un p'tit rageux en vrai aussi.
Qu'est ce qu'il lui prend ! Je ne peux m'empêcher de lâcher un rire. Il est bête... Mais il a raison. Un Mathis qui accepte de perdre sans chialer... Ce n'est pas moi. Je suis toujours obligé d'en faire trop, c'est dans ma nature et...
Ah. Ah. Il est tactile, hein... Comment j'ai pu oublier ça... Ses doigts. Encore.
— On se refait ça bientôt, hein ?
OUI. Oui. Bien sûr.
Même maintenant, si tu veux.
Son murmure s'échoue contre mon oreille, ses doigts ne relâchant pas la pression sur ma nuque. Je m'empresse de hocher de la tête, limite un peu forcé parce que... Je n'ai pas le choix lorsqu'il a cette emprise sur moi.
Mais... Quelque chose me chiffonne dans ce qu'il vient de dire. Ça veut signifier que... Ça y est, la fin de notre date s'achève ici ? En face de cette vieille salle d'arcade remplis de tous ces puants ? Je refuse. L'après-midi ne vient que de commencer.
Faux. Le soleil est en train de se coucher, j'ai pas vu l'heure passer.
— C'est quoi cette tête ? souffle-t-il.
À ton avis ?
— Tu as oublié quelque chose...
— Quoi donc ?
Idryss fronce légèrement les sourcils et je prends mon courage à deux mains pour enchaîner, ignorant tous ces sentiments farfelus qui me prennent d'un coup.
— J'ai perdu le défi, alors...
Tu sais, hein... Aller, tu le sais. J'ai pas besoin de redire ce que j'ai dit plus tôt...
On la continue cette soirée, oui ou non ? À l'instant présent, je ne pense plus qu'à Idryss. Je sors mes yeux doux. Maintenant que je suis avec lui, je n'ai pas envie de me détacher. Est ce que grave ? La suite nous le dira.
— Aller, j'te raccompagne. Vraiment. Tes parents vont s'inquiéter.
Pourquoi il est si... Je soupire, empoignant mon skate sous mon bras. Je crois que je m'emballe un peu trop vite... Idryss n'est pas aussi facile, visiblement. Un pas, il avance, deux pas, il recule.
Je ne peux m'empêcher de jeter un coup d'œil à l'horizon dès que je le vois s'éloigner peu à peu de moi, sa silhouette contrastant impeccablement avec le fond orangé, ce coucher de soleil lointain et si proche, tout ce passage fascinant au dessus de lui. Rapidement, je prends une photo. Celle-ci, je vais la garder précieusement. Notre rencontre. Je regarde le résultat, zoomant sur le personnage. Je souris, un peu con, rabattant au mieux ma casquette. Pff. Fond d'écran ?
— Hé... Attends moi !
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