Chapitre 3 - 2009

Mardi 27 octobre 2009.

Même si cela rendait Mathilde triste de ne pas pouvoir fêter son anniversaire avec sa maman, cela lui faisait toujours plaisir de l'avoir au téléphone pour prendre de ses nouvelles le jour J ; c'est comme si elle était retournée dans le sud-ouest le temps d'un appel téléphonique. Après lui avoir parlé des cybercriminels qu'elle passait ses journées à traquer, sa maman posa des questions sur elle et son anniversaire chez son père. La conversation téléphonique terminée, Mathilde allait rendre son téléphone à son père. 

Anna, Jules et Pedro - le fils de sa belle-mère qui avait le même âge qu'Anna - étaient tous venus pour l'occasion et fêter ses 8 ans avec Mathilde. Comme à son habitude, Mathilde avait passé la journée à se faire taquiner par Jules, le plus vieux de ses frères et sœurs paternels qui avait le même âge que Stéphanie, la seule sœur qu'elle avait du côté de sa mère. Même si douze ans les séparait, elle adorait passer du temps avec son frère et passait son temps à l'embêter en retour. Ce qu'elle préférait par-dessus tout c'était le réveiller en ouvrant sa porte de chambre à Ghetto, un Jack Russell qu'avait adopté leur belle-mère l'an dernier, dans un premier temps et ouvrir les volets avant de tenter de lui retirer sa couette dans un deuxième temps. 

Alors que la nuit commençait à tomber, Anna et Mathilde allèrent se coucher après avoir dit bonne nuit à tout le monde. Mathilde était impatiente de savoir ce qu'Anna avait à lui raconter. Une fois la lumière éteinte et les deux filles sous leur couette respective, une ambiance calme s'installa et Mathilde avait quitté le mélange de ses pensées pour boire les paroles de sa sœur.

Depuis qu'Anna était entrée au lycée, elle avait multiplié par deux le nombre d'histoires qu'elle avait à raconter à sa petite sœur les soirs de vacances. Mathilde avait le droit aux péripéties qu'Anna vivait avec sa meilleure amie, aux problèmes qu'elle pouvait rencontrer avec le groupe de pestes de sa classe, tout en passant par ses histoires d'amour improbables. Ce soir-là, Anna avait choisi de lui raconter une histoire qui impliquait non seulement les pestes de sa classe mais aussi sa meilleure amie.

Après quelques dizaines de minutes d'anecdotes, Anna ne put se retenir de bâiller. Prête à s'endormir, elle souhaitait à sa sœur de bien dormir juste avant. Cette dernière lui répondit avec tendresse avant de fermer les yeux, à nouveau aspirée dans ses pensées encombrantes. Celles-ci s'arrêtèrent net lorsqu'une histoire lui revint en mémoire.

Mathilde était rentrée en classe de CE2 à la rentrée dans une nouvelle école, un peu plus éloignée de chez elle. De ce fait, sa maman devait l'emmener et la ramener en voiture tous les jours. Elle aurait bien aimé pouvoir rester dans son ancienne école qui se trouvait juste en face de chez elle mais celle-ci ne faisait pas les classes au-dessus du CE1. 

Là-bas, elle avait retrouvé tous ses camarades de classe de son ancienne école mais elle avait aussi aperçu des nouvelles têtes, issues de l'autre école de quartier. 

Si, au début, elle avait appréhendé son année après avoir entendu les autres enfants de sa classe dire qu'on leur avait attribué l'institutrice la plus sévère de l'école, elle avait réalisé très vite que l'institutrice n'était pas la personne à redouter le plus. C'était à partir du moment où elle a accepté, sur proposition d'une copine à elle, de s'intégrer dans le groupe de jeu de Karmen - la peste de l'école depuis la classe de CP - qu'elle s'était rendue compte que l'institutrice en question n'était pas celle dont il fallait se méfier.

Mathilde avait été très hésitante au départ. Elle se souvenait en fait d'une récré en classe de CE1 qu'elle avait passé volontairement seule afin d'écrire dans son journal intime. Et Karmen, ses deux harpies derrière elle, était venue lui arracher des mains l'ouvrage pour lire le contenu à voix haute avec un plaisir mesquin.

Puis, sa copine avait réussi à finalement la convaincre et Mathilde s'était dit que c'était du passé et que, de toute façon, cela ne l'avait pas vraiment blessé. Elle avait encaissé, rien de plus. A ses yeux, il était inutile de garder une certaine animosité pour si peu.

Cependant, plus les jours passaient et plus elle se sentait mise à l'écart par le groupe pendant les différents jeux auxquels ils jouaient lors des pauses. Mais encore une fois, rien n'était grave, elle encaissait et enregistrait inconsciemment dans un coin de sa tête.

Puis, un beau jour, alors qu'ils étaient tous sortis de la cantine pour rejoindre le bâtiment qui servait à assurer les activités faites entre midi et deux, Mathilde, qui suivait le pas derrière Karmen, riait à ce que disait une copine plus loin. En l'espace de quelques secondes, Mathilde s'était retrouvée sèchement plaquée contre le mur et surplombée par les yeux dorés et menaçants de Karmen avant que celle-ci ne lui intima de ne plus rire.

Sous l'effet de la surprise, Mathilde l'avait fixé avec de grands yeux pendant qu'une copine à elle s'était dépêchée de venir à elle et lui demandait si ça allait. En retournant en classe, Mathilde avait refusé catégoriquement d'informer l'institutrice du dernier événement ; elle redoutait des représailles. Mais sa copine de classe n'avait pas été du même avis sur ce point et, quand bien même Karmen était à côté, avait rapporté l'incident à la maîtresse.

A la surprise de Mathilde, il n'y eut pas grandes représailles mis à part que Karmen lui avait désormais interdit de jouer avec elle et son groupe. Pour autant, cela n'avait pas attristé Mathilde plus que ça. Bien au contraire, elle avait appris à rester seule sans pour autant s'ennuyer. 

C'est sur ces pensées que Mathilde sombra dans son sommeil.

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