Chapitre 13

C'est ainsi que je me suis retrouvée assise seule sur le canapé du salon à manger mes pauvres raviolis qui étaient de base pour Toby, cuillère à la main parce que j'ai pas trouvé de fourchettes ni de couteaux et que j'avais la flemme de chercher dans tous les tiroirs de la cuisine. J'aurais pu préparer un autre plat pour Toby mais j'étais tellement dépitée que j'ai lâché l'affaire. De plus, je mourrais de faim.

J'entendis alors le brun descendre les escaliers, la trousse de secours en mains. Il avait sûrement dû s'en servir pour soigner ces bras blessés de tout à l'heure car je vois ces derniers enroulés de bandages et de pansements. Je souris à cette vue. Bien que je le déteste, je reste humaine et ne peut supporter de voir quelqu'un se faire du mal ainsi. Quand il me vit, sa première question fut :

- Pourquoi tu manges tes raviolis avec une cuillère ?

J't'en pose des questions, moi ! Je répondis, le sourire crispé avec une pointe de sarcasme :

- Parce que j'aime ça.

Je pensais qu'il allait comprendre lui-même que je n'avais pas trouvé les autres couverts mais à la place, il répondit un simple :

- Ok.

Avant de continuer sa route vers la cuisine où je le perdis de vu. J'espère qu'il a bien vu que c'était une blague et qu'il ne croit pas sérieusement que je mange mes raviolis avec une cuillère ! Je pouvais entendre de là où j'étais que Toby ouvrait et fermait des tiroirs avant de percevoir le bruit du micro-onde. Il sortis de la cuisine un peu plus tard avec, dans une assiette, des raviolis avant de s'asseoir à son tour dans le canapé à environ un mètre d'écart de moi. Je le regarda avec de grands yeux, il baissa son masque jusqu'au menton et commença à manger tandis que je m'exclama :

- Mais tu m'as dit tout à l'heure que t'aimais pas ça !

Il tourna son regard vers moi en disant :

- Ouais mais y a rien d'autres à manger.

Moi : Mais pourquoi tu as acheté des raviolis alors que t'aime pas ça.

Il haussa les épaules en disant :

- Je sais pas.

Avant de rajouter après un court silence :

- Lyra adorait ça.

Je resta muette en le fixant, sous-entend-t-il qu'il croit que j'aime les raviolis comme Lyra ? Et donc, que c'est pour ça qu'il les a acheté ? Après un silence qu'on pourrait croire religieux tellement il n'y avait pas de bruit aux alentours, il reprit en regardant ces raviolis d'un air triste :

- Tu penses qu'elle serait heureuse de voir ce que je suis devenu ?

La réponse était évidente pour moi. Et pourtant, je ne pus m'empêcher de répondre l'inverse de ce que je pensais :

- Bien sûr que oui. Tu es son frère tout de même.

Il rie jaune avant de dire :

- Tu crois vraiment que les liens du sang suffisent à ne pas en vouloir à une personne ? Je te rappelle que tu parles à quelqu'un qui a buté son père.

Il avait dû comprendre que je lui avais menti. Je baissa la tête, honteuse, avant de poser l'assiette de raviolis avec la cuillère sur la table basse du salon en face de moi. Il eut de nouveau un silence, légèrement pesant pour ma part. J'aurais aimé briser ce blanc entre nous deux mais j'ai l'impression que, à chaque fois que je brise un silence entre nous, je me tape la honte. Donc, cette fois-ci, je vais me retenir.

Il continuait de me fixer constamment durant ce long silence. Ne voit-il pas qu'il accentue le malaise en faisant cela ? Par réflexe, je décala mes cheveux de mon oreille gauche afin de mettre une barrière de cheveux entre lui et moi, de sorte à ce qu'il ne me voit plus. Je l'entendis soudainement dire :

- J'aime pas tes cheveux.

Parce que tu crois que moi j'aime tes commentaires, peut-être ?! Toby, t'étais pas du genre à critiquer à longueur de journée dans mes souvenirs ! Je balaya mes cheveux d'une main comme pour le narguer, enlevant ainsi le rideau qui nous séparait pour l'affronter du regard et dire, de l'insolence dans la voix :

- Et ?

Il répondit d'un ton indifférent face à ma provocation :

- Ils étaient pas comme ça, au collège.

Je répondis de nouveau :

- Et ?

Toby : Je les préféraient avant. Qu'est-ce qu'il t'a pris de te les laisser pousser jusqu'au fesses et de te les teindre en rose bonbon ?

Moi : J'ai évolué, voilà ce qu'il m'a pris ! Et d'abord c'est pas rose bonbon mais rose pastelle !

Toby : J'aime pas.

Et là, je sortis une phrase qui était peut-être un peu trop osé face à un tueur en série psychopathe :

- Et qu'est-ce que ça peut me foutre que t'aime pas, hein ?!

Quand je me rendis compte de la maladresse que je venais de commettre, je plaqua par réflexe mes deux mains sur ma bouche avant de me tourner vers le brun. Ce dernier me regardait à présent avec de gros yeux, je pouvais sentir sa colère à travers son masque et ses grosses lunettes oranges. Sentant que cette histoire allait mal finir, je me leva du canapé sur lequel nous étions assis et commença à marcher à reculons en balbutiant pitoyablement au brun :

- Je... Pardon, désolée... Vraiment désolée, Toby...Heu...C'est sorti tout seul...J'ai pas fait exprès, promis...Tu sais, le changement d'habitat, de te revoir après toutes ces années...Tout ça fait que je suis un peu perturbée...Tu vois...

Il me regardait avec une telle froideur que je peinais à garder mon calme. Il dit alors d'un ton sec :

- Cette fois-ci, tu ne me laisse pas le choix, (T/p). Je vais devoir te punir.

Je supplia misérablement :

- N...Non...Toby...Je suis désolée, vraim-

Il me coupa d'un ton menaçant :

- Vas dans la cave.

Il pointa du doigt une porte en vieux bois fermée. Je tourna la tête de gauche à droite, il rajouta toujours avec la même dureté :

- Je te ferais pas de mal, promis. Alors ne discute pas et vas dans cette p*tain de cave.

J'hésita encore un instant entre fuir et faire ce qu'il me dit mais finalement je pris l'option du danger et me retourna pour m'enfuir le plus loin possible de ce timbré. Malheureusement, je n'eus le temps de faire à peine trois pas que je sentis une vive douleur à la racine de mon cuir chevelu, me faisant tomber lourdement en arrière. Toby avait attrapé mes cheveux d'une main et commençait à m'entraîner vers la cave en tirant mes cheveux.

J'hurlais de douleur et le supplier de me lâcher quand il s'arrêta soudainement de marcher. Aurait-il enfin eut pitié de moi ? C'est ce que je pensais avant que je l'entends dire :

- Au final, je n'ai pas encore besoin de t'emmener là-bas. Je vais plutôt le faire ici.

Il pris tous mes cheveux longs dans sa main et sorti une hache de sa ceinture. Il positionna son arme en face de ma chevelure. Il tirait fermement mes pauvres cheveux en hauteur au-dessus de ma tête tandis que j'étais assise parterre en pleure. Je le supplia :

- Toby... Je t'en supplie, ne fait pas ça...

Il répondit sèchement :

- Si tu m'avais sagement écouté quand je t'ai ordonné d'aller à la cave, je t'aurais bien couper les cheveux. Or, tu m'as désobéis. Pire, tu as tenté une nouvelle fois de me fuir. Donc, au lieu d'avoir une coupe de cheveux bien symétrique et jolie, je vais plutôt faire ça.

Il recula sa hache de ma chevelure jusqu'au dessus de sa tête avant que cette dernière s'abatte violemment sur mes pauvres cheveux.

Par peur, j'avais bien sûr fermer les yeux. Et en une demie-seconde, je ne sentais déjà plus la douleur de mes cheveux tirer vers le haut mais ces derniers retomber doucement sur ma tête. Pendant un instant, j'eus le miracle que Toby m'avait épargnée. Mais ça c'était avant de sentir un souffle frais dans ma nuque qui me procura un épouvantable frisson. Je me décida donc de rouvrir mes yeux. Une vision d'horreur s'ouvrait alors à moi.

Mon regard était rivé sur le sol blanc et sale de ce bâtiment que je hais à présent. Sur ce sol où j'étais pitoyablement assise, il y avait des tonnes de cheveux roses parterre. Mes cheveux. Des larmes perlaient à mes joues tandis que j'approchais une main tremblante vers ces ficelles roses que j'aimais autant que ma propre vie.

Flashback

C'était peu de temps avant que je révèle à Lyra que j'aimais son frère. C'était le soir, environ 23h. Elle venait de se faire battre par son père pour une idiotie et, complètement désespérée, elle a fuit son chez elle pour venir toquer à ma porte. Pourtant, j'habitais dans le quartier voisin au leur, c'était donc pas à côté.

Quand je l'ai vu, j'ai ressenti de la colère. Pas envers elle, bien sûr. Mais envers son géniteur. Elle avait des bleus au visage et était couverte de larmes. Son regard, je ne pouvais pas le décrire tellement il représentait le désespoir et la détresse. À ce moment-là, comme n'importe qui, j'aurais pu la prendre dans mes bras, la rassurer ou tout de suite la faire rentrer chez moi et lui demander ce qu'il s'est passé. Mais non, à la place, j'ai juste dit :

- Pourquoi il a fallu que ta mère épouse un type aussi ignoble ?

Elle m'a regardé surprise avant de baisser le regard. Avais-je été si vexante en disant cela ? Je me rappelle ensuite avoir raconté un mensonge à mes parents en disant que j'allais sortir les poubelles puis avoir pris la main de ma meilleure amie et courir dehors en fermant précipitamment la porte après mon passage. Cette nuit là, nous avions couru comme si plus rien n'avait d'importance, on cherchait simplement à être libre.

On avait couru jusqu'à plus d'air. Quand nous avions relevé la tête, nous étions toutes les deux en plein centre-ville. C'était début octobre, on avait un peu froid sans manteau ni écharpes mais au fond on s'en foutait. On n'avait même pas remarqué que nous étions toutes les deux sans chaussures aux pieds tellement on était parti en catastrophe de chez nous. Épuisées de cette longue course, nous avions continué notre périple en marchant silencieusement. Nous n'avions rien de particulier à se dire, ou plutôt, on ne voulait pas vraiment discuter à ce moment-là. Juste, on profitait de ce calme et de ce coup de folie qu'est l'adolescence.

Nous nous étions arrêté au-dessus d'un pont, pas mal de voiture passées au-dessus de nous, on les regardait lascivement défiler une par une. C'était assez agréable, comme si nous étions toutes les deux au-dessus de ce triste monde qu'est la réalité. Enfin, quand nos regards se croisèrent, aucune de nous n'avait pris la parole, on se souriait mutuellement. Petit à petit, ce silence prenait une tournure si absurde que de légers rires se sont mit à sortir de nos lèvres avant qu'on parte toutes les deux dans un fou rire inexplicable.

Si quelqu'un était passé à cet instant là, il nous aurait pris pour des folles. C'était peut-être ce qu'on était, de vraies folles rigolant d'un rien. Encore aujourd'hui, je me demande pourquoi on s'était mise à rigoler de la sorte, à cause de ce silence qui crée un malaise entre nous ? Car on avait passé une journée fatigante, elle et la violence de son père, moi et l'amour que j'éprouve secrètement à son frère ? Peut-être.

Après ce long et puéril fou rire, on s'est de nouveau tourné vers les voitures qui passaient une par une en-dessous du pont. Puis, j'ai entendu Lyra dire :

- Tu sais, (T/p)...

J'ai tourné la tête, elle souriait face à la route qui s'offrait à nous en continuant :

- Mon père m'a frappé car j'ai juste dit que je trouvais la teinte rouge que s'était faite récemment ma cousine de 19 ans magnifique. Il a dit que c'était c*n et complètement idiot de faire cela, que c'est simplement pour attirer l'attention et que ma cousine ressemblait à une boule à facette. J'ai voulu contrer ces propos mais...Tu sais comment ça s'est finie.

Je souffla du nez en roulant des yeux :

- Je déteste ton père dans tout les domaines !

Elle soupira :

- Je sais, tu le dis tout le temps...Du coup, pour me venger, j'ai décidé de me teindre les cheveux moi aussi ! Et de me les teindre en rose, tiens !

Je ricana :

- Et pourquoi en rose précisément ?

Lyra : Car mon père déteste cette couleur !

Je ricana avant de dire :

- Alors moi aussi, je me les teindrai en rose ! Pour honorer ta cousine !

Elle rigola en disant :

- On aura l'air maline toutes les deux !

Moi : T'inquiètes, je prendrais du rose pastelle et toi du rose fluo !

Elle me donna un petit coup de coude en disant, le sourire aux lèvres :

- Hé ! Je veux pas ressembler à un panneau de signalisation version Barbie !

On rigola en cœur, heureuses. On aurait adoré rester là toute la nuit, on redoutait le moment où nous allions rentrer chez nous, du coup, on n'y pensait pas. On ne pensais à rien. Juste à notre bonheur et à notre liberté.

Cette nuit-là, je ne l'oublierai pour rien au monde.

Fin du Flashback

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