68 टिब्बा में Dans les Dunes

La taïga et les vastes étendues glacées de forêt boréales enfouies sous la neige restèrent un mystère aux yeux de Yuya. Il  ne put pas s'y attarder, y méditer avec la Nature, mais dans son passage rapide, il en apprécia toute la force primitive. 

La forêt n'était pas un obstacle pour lui et Mastani. C'était une voie rapide, une source de magie qui alimentait leurs corps et leur permettait de marcher jours et nuits sans repos. 

Comment avait-il appris à synthétiser ainsi l'énergie pour régénérer son corps ? Il n'en avait aucune idée. Les choses en compagnie de son maître s'enchaînaient en une spirale naturelle, comme si tout découlait d'un mécanisme déjà en route en lui. 

Les deux sorciers descendirent immédiatement plus au Sud dans l'Etat Mandchou pour rejoindre les grandes Routes de l'Ouest. 

Ils voyagèrent plus de cinq jours dans les bois enneigés, vivant de chasse et de pêche, réchauffés par le feu de la guerre qui brûlait en eux, marchant inlassablement comme s'ils n'étaient plus capable de trouver le repos. Non, il n'y aurait pas de repos pour eux tant qu'ils n'en auraient pas terminé avec les Loups. 

Malgré la magie puissante des bois, leur retour dans le monde terrestre les avait épuisé, et Mastani n'était pas encore capable d'utiliser sa magie pour voyager à travers le sol. Elle avait donc décidé de prendre son mal en patience en utilisant leur voyage pour enseigner à Yuya des techniques magiques pour qu'il soit capable d'attaquer et de se défendre avec la magie de la Nature qu'il arrivait à canaliser.  

Ils marchèrent encore trois jours dans des zones vierges, avant de tomber sur une unité de sorciers débroussailleurs chargés de protéger les zones plus avancées dans la forêt pour préparer le passage des bûcherons. 

En voyant ces hommes utiliser des sorts de feu pour maintenir une barrière de protection autour de leur campement la nuit, Yuya eut soudainement l'impression d'être passé de l'autre côté, du côté de l'ennemi. Tout ce dispositif de défense lui semblait inutile, simplement révélateur de l'ignorance de ces sorciers qui ne cherchaient même pas à comprendre les forces naturelles à l'oeuvre dans ces bois.

Alors qu'il voyageait seul avec son maître, il avait bien vu les ombres de deux ou trois animaux mutants dans les bois, mais aucun n'avait osé les approcher. Comme s'ils murmuraient tous le nom de la sorcière entre eux, avec crainte et respect.

Toutes ces défenses contre la Nature lui semblaient maintenant dérisoires et inutiles. Elles ne protégeraient personne, de tout façon, de l'arrivée du Soleil Bleu.

Ils laissèrent les sorciers à leur oeuvre de destruction et continuèrent au sud, dans des pans entiers de forêts qui avaient été rasés par la main de l'Homme, laissant de vastes étendues de terre noire brûlée, comme le corps à vif d'un animal dépecé. 

Ce spectacle replongeait Yuya aux tréfonds de son expérience de l'Autre Monde. Etait-ce donc tout ce que l'Homme était capable de faire ? Méritait-il qu'on se batte pour lui, face à la Magie et à la Nature ? 

Ses constatations furent nuancées lors qu'ils arrivèrent aux premiers campements de bûcherons. Ils voyageait couverts simplement de leurs vestes au beau milieu de l'hiver, et les travailleurs qu'ils croisaient se retournaient tous sur leurs pas pour les dévisager. 

La plupart paraissaient étonnés de voir une femme et un adolescent si loin aux frontières du monde civilisé, et s'empressaient de leur offrir tout ce qu'ils pouvaient, trop heureux de voir enfin des visages étrangers. Les deux sorciers n'eurent à quémander de la nourriture nulle part, et Yuya se rappela ce qu'il avait oublié de l'Humanité pendant son errance avec son maître: la fraternité et l'altruisme. 

On leur en offrit plusieurs fois, en leur proposant de rejoindre les équipes autour d'un feu et d'une marmite de soupe accompagnée de grandes galettes de blé cuites sur les parois d'un fait-tout recouvert de braises. On leur offrit aussi des vêtements plus chauds, et même s'ils les refusèrent à chaque fois, ils retrouvèrent des manteaux ouatés et pantalons doublés empaquetés à côté d'eux au petit matin. 

Mais est-ce que cela disparaîtrait réellement si advenait le monde du Soleil Bleu ? se demanda le garçon. 

Après deux nuits passées d'un campement de travailleurs à un autre, trimbalant de plus en plus de matériel d'hiver, ils arrivèrent au croisement d'une route creusée de gros trous de verglas causés par le passage répétitif des gigantesque engins de déforestation, et Mastani s'arrêta subitement. 

Elle jeta au sol tous les vêtements offerts en poussant un soupir exaspéré. 

— Maître, qu'est-ce qui se passe ? 

— J'en ai marre de marcher, déclara-elle simplement. Et je ne me sens toujours pas en état de voyager par la terre... C'est pour ça que je n'aime pas aller dans le Monde des Esprits. Ça te retourne le corps dans tous les sens au retour... 

Elle leva la tête vers le ciel et émit un sifflement strident, comme si elle appelait un animal. Yuya la regarda, concerné, sans comprendre. Qu'est-ce qu'elle allait faire ? Appeler un Esprit ?

Il entendit soudain un vrombissement venu des cieux, semblable au cri d'une bête. 

— Vous appelez le Démon du Hasard ? 

— Non. 

Un point noir apparut entre les nuages juste au-dessus d'eux et la sorcière écarta son disciple d'une main pour qu'il recule. Le point se rapprochait de plus en, plus, en chute libre. 

— Qu'est-ce que... 

Yuya comprit alors ce dont il s'agissait. C'était la moto de Mastani, celle avec laquelle ils étaient allés jusqu'à Heidao. Elle tomba lourdement sur le sol, droite et prête à démarrer. Sans plus discuter, Mastani l'enfourcha et alluma le moteur. 

— Tu montes ? 

Yuya observa le symbole des Loups de Midgard sur l'avant du véhicule et leva lentement la tête vers son maître. Il se rappelait ce que lui avait dit l'agent spécial Hudson, à Yunhai, sur le passé trouble de son maître, et la jeune Mastani qu'il avait croisé dans le tunnel de l'Entre-Monde.

— Maître, après tout ce que nous avons vécu, j'estime avoir le droit à des explications sur votre passé, explosa-t-il soudainement.

— Et qu'est-ce que tu veux savoir ? demanda-t-elle en le fixant d'un regard sévère. 

Il n'avait pas peur. Du moins plus maintenant. Il était lui aussi allé dans l'Autre Monde, il avait retrouvé les Esprits avec lesquels était liée sa famille, il avait rencontré un Yamabushi, et il était en train de développer SA magie. 

Son maître lui avait appris à oublier les formes, les sorts, les carcans, et elle lui avait ouvert les yeux pour qu'il soit capable de créer sa propre magie. Il se sentait prêt, maintenant qu'il savait ce qu'elle était capable de faire, à la connaître véritablement.    

— Je veux savoir d'où vous venez, comment vous êtes entrée en contact avec des Esprits et pourquoi vous avez traversé le Voile si jeune. Je veux savoir comment vous avez fait pour vaincre les Loups il y a dix ans, et pourquoi vous erriez depuis tout ce temps alors qu'ils étaient en train de se reformer avec ce nouveau bossman

Il était prêt à tout, à ce qu'elle se mette en colère, à ce qu'elle s'enferme dans son mutisme en refusant de répondre, à ce qu'elle élude en faisant de l'humour noir, mais elle se contenta de lui désigner l'arrière de la moto. 

— Assied-toi, on va parler. 

— Quoi ? Vous... Vous ne refusez pas ? demanda-t-il avec surprise.

— T'as assez morflé petit, et t'en a assez vu. Il est temps que tu passes dans la cour des grands. Ouais c'est ça, se dit-elle, on va dire que je te fais officiellement... Hum... disons sorcier de Grade 9. Tu vas pourvoir être initié au "grand mystère" de-

— C'est Grade 10 l'initiation au Mystère, la reprit immédiatement Yuya, sceptique. 

Elle leva les yeux au ciel et fit une moue vexée.

— Ouais, voilà, bah y a pas besoin d'aller à l'école pour le comprendre. Aller, monte. Je vais te raconter en chemin.

Il récupéra les paquets de vêtements et les ficela à l'arrière du véhicule. Il était hors de question qu'ils laissent à l'abandon les cadeaux des hommes qui avaient voulu les aider. 

Il enfourcha la moto juste derrière elle et replia ses jambes sur le cale-pied passager. L'engin démarra en poussant un rugissement mécanique féroce et partit à une vitesse prodigieuse sur la route glacée. 

A bord, la chaleur était infernale. La moto semblait tout droit sortie du cratère d'un volcan et Yuya n'éprouvait pas du tout le froid de l'hiver sibérien. 

— Alors, comment est-ce qu'on va faire ça, Yuya ? Depuis le début ? dit-elle d'un ton sombre et intimidant

— S'il vous plaît, l'encouragea-t-il malgré la gène. 

— Très bien. Je vais te raconter mon histoire alors. Mais avant tout, est-ce que tu sais qui sont les Loups ? 

— Une ancienne organisation secrète qui a pour but de faire fusionner les Deux Mondes ? 

— Ça n'a jamais été aussi vrai qu'aujourd'hui. Auparavant, ils étaient plus nuancés. Les derniers étaient d'ailleurs carrément pourris jusqu'à la moelle dans leurs intentions... Ils ont utilisé un siècle de décadence des Loups à leur avantage. Pour les autres familles qui se sont toujours soumises aux bossmen, c'était une honte... Particulièrement pour la mienne. 

— Je sais que pour que quelqu'un fasse partie des Loups, il faut qu'il ait des ancêtres l'ayant déjà été et je me doutais que c'était votre cas. 

— Oh, ça c'est surtout utilisé pour justifier les prises de pouvoir et la direction des clans. N'importe qui peut rejoindre les Loups. C'est pour monter en grade qu'ils ont gardé une hiérarchie assez... féodale. 

— Donc votre clan était puissant ?

— J'étais issue d'une des plus grandes familles eurasiennes, celle qui régnait sur le royaume de Rājavaṃśa.      

— Mais... Ce royaume a été détruit...

— Ouais, reconnut-elle avec une décontraction déroutante. Il y a plus de soixante ans, à l'époque des guerres Eurasiennes contre les Loups de Midgard. Ma famille avait survécu en se réfugiant dans un lieu caché de tous, le टिब्बा का महल (tibba ka mahal), le Château dans les Dunes. Une forteresse mouvante. Le dernier territoire du Rājavaṃśa... J'y ai grandi avec trois sœurs, mon père, l'ancien roi, et toute une flopée de domestiques qui nous mettaient la nourriture dans la bouche et passaient leurs journées à essayer de nous divertir et de nous détourner de la seule réalité. Notre famille était destinée à s'éteindre avec nous. Les Loups avaient fait de nous des parias. 

Yuya regarda la route glacée qui s'étendait en une longue ligne droite en essayant de se représenter ce palais secret au milieu du désert. Rien qu'aux intonations de Mastani lorsqu'elle utilisait des mots de sa langue maternelle, il avait l'impression de ressentir la chaleur du soleil et la douceur paisible de grandes salles ornées d'arabesques, parfumées de fleurs d'orangers et de jasmins frais. 

—Vous... vous portiez des robes de princesse ? pouffa-t-il soudainement de rire en imaginant la fière Mastani en princesse orientale.

—Un sari, imbécile. Les femmes du Rājavaṃśa portaient des saris ! Et non, je n'ai jamais voulu porter de sari "nobles". Notre origine était notre perte, c'était le fardeau qui nous enfermait dans cette existence de parias et je la détestais. Je m'enfuyais souvent. Je traversais la barrière de sable qui nous rendait invisible aux yeux du monde et je partais dans le désert pendant plusieurs jours pour apprécier l'immensité du monde...

— Vous appreniez la magie ?

— C'était un enseignement obligatoire dans mon clan qui... aimait cultiver certaines spécificités génétiques. Nous dressions les dunes et le sable comme des armées de cavaliers, et nous les renversions sur nos ennemis...

— Comme... Le Seigneur de Guerre des Villes Englouties ? C'était un membre de votre clan ?

— Eh, tu me laisses parler de moi ? s'esclaffa-t-elle, bordel, on peut même pas cultiver son narcissisme en paix...

— Excusez-moi, "Grand Maître", la railla-t-il. Continuez je vous en prie. 

Ils passèrent près d'un lac gelé entre les arbres où se trouvait une minuscule cabane de pêcheur. Elle semblait abandonnée et Yuya vit dans les ombres de la forêt des formes humanoïdes immenses qui creusaient dans la glace à la recherche de nourriture. Des monstres ? Il devait y avoir une fissure du Voile à proximité.

— Bref, moi ça me faisait vraiment chier ces séances d'apprentissage magique, tous ces manuels, les tuteurs et les heures d'études. Alors quand je quittais le château, j'allais dans le désert m'amuser. J'éventrais des monstres, je chassais des gazelles, parfois la nuit je m'approchais des caravanes marchandes et je m'amusais à leur flanquer la frousse. 

— Une... enfance normale, remarqua-t-il sarcastiquement, avant d'être soudainement illuminé par une idée: Attendez ! Vous aviez déjà autant de puissance ? 

— On en a tous énormément, Yuya. Seulement notre éducation et les barrières que l'on s'impose nous en prive petit à petit. Quand ma mère est morte, j'avais à peine quatre ans, et à partir de ce moment, j'ai totalement refusé tout ce qui m'était contraint par tout le monde. 

— Qu'est-ce qui lui était arrivé ?

— Ce qui nous attendait tous. Elle avait été exécutée par un Seigneur de Guerre, parce qu'elle était issue d'un clan de Loups. Elle s'était sacrifiée pour nous laisser une chance de fuir... Quelle mort stupide...

— Héroïque, Maître.    

— Tu ne sais pas de quoi tu parles, Yuya. Son sacrifice n'a servi à rien. Ca n'a pas rendu ma famille plus sage, ça n'a pas donné à mon père l'idée d'abandonner nos vieilles coutumes pour nous fondre dans la masse, et passer une enfance normale. Je ne pouvais pas supporter que ma famille s'enferme dans sa gloire passée alors qu'elle n'était simplement plus acceptée par le reste du monde... J'étais en colère contre eux, contre les Seigneurs de Guerre, contre tout le monde...

Elle inspira avant d'ajouter:

— Et c'est comme ça que j'ai rencontré mon premier Esprit. Je marchais de nuit, dans des gorges au fond desquels se trouvait de l'eau et de la végétation, protégées des sables et du soleil par l'ombre des falaises. C'était un endroit paradisiaque, et pourtant personne n'y allait jamais. Je savais qu'on le disait hanté, et que les caravaniers qui s'en approchaient pour faire boire leurs leurs chameaux n'en revenaient jamais. 

— Pourquoi y êtes vous allée, alors ?

— Justement, parce que j'avais envie de me perdre pour de bon, et que j'étais prête à tout. Je savais qu'il y avait quelque chose d'ancien et de néfaste dans ces lieux, et je me sentais pareil, acculée et affamée de plus de violence, de plus de colère. Je suis entrée dans une grotte au fond de l'oasis et j'ai trouvé une déesse, une femme au corps sombre, vêtue de têtes humaines, les injectés de sang, qui était retenue là par les chaînes d'un sort puissant. 

Si tu l'avais vue, Yuya... Elle était plus belle que toutes les statues que j'ai jamais vu. Et la rage qui se dégageait de son être... C'était une émotion pure, sans compassion, sans pitié, comme un feu qui ne s'éteint jamais, que rien ne peut étouffer. 

— Qu'avez-vous fait ? Vous vous êtes battue ? Comme vous vous en êtes sortie ?

— Quoi ? Me battre contre la Déesse de la Destruction ? Tu rêves, Yuya ! J'avais treize ans ! Non... On a simplement discuté. Je suis restée une semaine dans cet oasis à parler avec elle. Elle m'a tout appris, sur les Esprits, leur monde, elle m'a révélé plus de choses sur les Loups que ma famille n'en a jamais su. Jusqu'au jour où elle m'a dit qu'elle avait faim, et que je devais lui apporter des âmes. 

— Vous êtes parties à ce moment parce que vous aviez refusé ? demanda Yuya en essayant naïvement de l'attirer vers la réponse qu'il voulait entendre.  

— Non, j'ai accepté. Je suis partie attirer des caravaniers dans l'oasis et ensuite je suis revenue... Ne me regarde pas comme ça, Yuya ! Je sens tes gros yeux dans mon dos ! Elle avait réussi à me convaincre que son existence était tout aussi importante que celle d'autres humains, et je n'avais pas envie de la perdre, c'est tout. 

— VOUS AVEZ TUE DES GENS POUR EN NOURRIR UN ESPRIT ? s'écria Yuya abasourdi. Mais alors, quand vous parliez du Dieu Noir que le bossman nourrit en disant qu'il sacrifiait des innocents... Vous n'avez pas fait mieux ! 

— Oh, dit-elle nonchalamment, je n'ai pas de jugement de valeurs à appliquer là-dessus. Moi ce qui me gêne c'est qu'il ait l'intention de faire ça avec 100% de la population humaine.

— Mais... Vous vous rendez compte de ce que vous dites ? Vous avez fait un choix monstrueux ! Inhumain !

— Yuya, je te l'ai dit. Je suis supposée être neutre, entre les Hommes et les Esprits. J'ai eu des moments où je penchais plus d'un côté, et d'autres moments où j'étais plus de l'autre...

— Je comprends maintenant pourquoi le bossman se fiche du reste du monde et ne pense qu'à vous...

La moto fit une embardée et Mastani la retint juste avant qu'elle ne plonge droit vers un lac gelé. Elle ramena l'engin dans sa trajectoire en l'interpellant et en le calmant comme s'il s'agissait d'un animal qui avait agit de sa propre volonté.   

— Quoi ? Il t'a dit ça ? demanda-t-elle soudainement d'une voix étranglée. 

— Qu'importe, maintenant, répondit Yuya, trop heureux de l'avoir déroutée. Poursuivez.

  — Non, mais attends une seconde, gamin. Tu peux pas balancer un truc comme ça et changer de sujet ! s'énerva la sorcière.

— Si, reprenez votre récit, dit-il non sans une once de plaisir sadique.  

De toute façon, il n'avait plus envie de lui parler du bossman, il voulait connaître la suite de l'histoire. 

  — Bon, d'accord... lui concéda-t-elle, mais je veux tous les détails de votre discussion après. J'en étais où ?

— Une gamine de treize ans armée de haine et de colère sacrifie des caravaniers innocents pour nourrir l'Esprit de ce qui semble être une déesse démoniaque, certainement pour palier au manque affectif de sa mère qui n'a jamais été là pour elle, la railla-t-il malicieusement. 

— Ah, oui, fit-elle en riant, ahh cette brave Chamunda, dit-elle en relevant son t-shirt pour montrer le tatouage d'une femme au visage monstrueux qui tirait sa longue langue sur sa hanche. Oui, je lui ai amené ce dont elle avait besoin et nous avons conclu un pacte. Je devais la libérer de ses chaînes et elle me donnerait le pouvoir d'aller dans un monde où je ne serais plus pourchassée. En vérité, elle avait besoin que j'aille dans ce monde, le Monde des Esprits, pour tuer le Voyageur qui l'avait enchaînée. Je t'ai dit que les Voyageurs sont à l'origine des Loups qui ont accompli le voyage initiatique de la secte ? 

— Non, vous ne me l'aviez pas dit. Vous voulez dire que les humains dans le monde des Esprits sont tous des Loups ? 

— Tous, je ne sais pas, peut-être pas ceux d'avant la Fracture, mais celui-là en était un. Enfin, tout ça pour dire que... j'ai tout de suite accepté. J'avais hâte de tuer un Loup dans le Monde des Esprits, un homme qui avait laissé son clan sombrer et qui s'était réfugié dans un autre univers pour fuir comme ma famille. J'y suis donc allée, déterminée, prête à tout...

— C'est donc ce que j'ai vu dans l'Entre-Monde ?

— Oui, un souvenir de cet instant. L'Entre-Monde est la négation totale des lois de l'espace-temps de ce monde, il conserve le temps et les corps dans des fragments temporels qui subsistent aux siècles et se déplacent aléatoirement dans le tunnel par séquences. Ils réagissent à certains stimuli, comme... comme si tu tournais un kaléidoscope. Et ton passage a fait réagir l'Entre-Monde en faisant remonter le fragment de mon passage. 

— Saviez-vous que le bossman avait déjà fait réagir l'Entre-Monde lors de votre premier passage ? Je l'ai vu vous observer, alors que vous ne le voyez pas... Alors c'est l'Entre-Monde qui lui a révélé votre existence... Maître, je ne pense pas qu'il s'agisse seulement de hasard. Ce... kaléidoscope doit être régit par certaines lois magiques. 

— Quoi ? c'est vrai ? demanda-t-elle, soudainement troublée. Il... Il m'observait ? 

— Je crois que c'était la première fois qu'il vous voyait. Mais poursuivez, s'il vous plaît. 

— Yuya... Tu attendais quoi pour me le dire... commença-t-elle à fulminer. 

— Maître, dit-il pour rester focalisé sur le sujet qui l'intéressait, qu'avez vous fait ensuite ? 

Elle poussa un soupir, vaincue, et reprit son histoire.

— Ensuite ? J'ai livré le plus rude combat de toute ma chienne de vie. Les trois bossmen que je me suis fait après c'était de la pisse de moine à côté...  


Photo:  americasgreatoutdoors, Denali National Park in Alaska 

Et voilà, on apprend peu à peu le passé de Mastani à travers ces chapitres qui arrivent. 

Qu'en pensez-vous ? Est-ce que cela répond à certaines questions que vous vous posiez sur son passé ? Pas encore ? Ça va venir mes petits, ça va venir...

Eh oui, ce chapitre était long, c'est vrai ! Mais vous savez quoi ? J'ai aucune excuse, c'est pas moi, c'est le flow, le groove, le rythme intrinsèque à la narration, le sens du monde, le roulement régulier de la fortune !

Z'avez quelque chose à redire ? Vous feriez mieux de courir...

https://youtu.be/9mz0Nn3kGZg


Bạn đang đọc truyện trên: AzTruyen.Top