CHAPITRE 4: La dose Papillon.

Coucou, ça-va mes fraises ? 🍓

Bonne lecture, xx.



𓆃



CÔME.



Les yeux rivés vers la baie vitrée. J'avais le coude posé sur le bar, un verre de whisky à la main. J'avais bu une goutte seulement. C'était dégueulasse. Il était dix-sept heures, mais le soleil du mois d'août rayonnait toujours. J'étais dans un quartier résidentiel du Long Island, d'ici j'avais vu sur des hectares de collines sur lesquelles de luxueuses villas s'avoisinaient. 

Pour cette mission que Stone m'avait confié, j'avais dû emprunter la McLaren dans le garage de Nowak, un ami de la famille de très longue date. Tous les Polonais qui travaillaient de près ou de loin avec mon père savaient que je n'étais plus à la tête de l'empire des King. Mais Nowak n'avait rien dit et je le lui rendrais bien.

J'entendais les glaçons s'entrechoquer dans mon verre à mesure que ma main tournoyait mon verre. Le smoking noir qui m'enveloppait me rappelait que cette mission tombait le jour du mariage de Robin. Un sentiment gris a empoisonné toute ma cage thoracique.

On allait vraiment célébrer ce mariage sans notre petite-sœur... et en même temps, que pouvions-nous faire d'autre... 

J'ai senti mes dents se percuter, contractant ma mâchoire à cette simple pensée. Malgré le goût aigre de cet alcool, je me suis forcé à en boire une gorgée. J'espérais oublier ce sentiment de vide qui m'avait fendu l'âme depuis que j'avais perdu mon sang.

— Mon père est un passionné d'art. Il en raffole.

L'accent russe de cette femme a mis un terme à mes pensées. Ça devait bien faire une dizaine de minutes qu'elle me parlait de son papa Igor Savin et j'arrivais déjà à saturation. Mes yeux se sont baissés sur son visage, j'ai essayé de me concentrer sur les sornettes qu'elle me déblatérait mais rien n'entrait dans mes oreilles.

Elle était porcelaine, une blonde polaire, même ses sourcils se confondaient avec la pâleur de sa peau.

Son regard a fui le mien quand j'ai retrouvé ses iris bleus. La couleur qu'ont prise ses joues imitait ses lèvres roses et pendant un instant je les aurais bien vues faire autre chose que débiter ces futilités.

Avais-je envie de la baiser sur ce bar, certainement. Parce que mes envies avaient été mises à rude épreuve depuis long huit mois. Aucune activité à recenser. Mais allais-je la baiser sur ce bar, certainement pas. Parce qu'elle était pâle et j'aurais voulu qu'elle ait la peau mate. Parce qu'elle avait les yeux bleus et je les voulais de la même teinte que le whisky que je tenais dans la main. Parce qu'elle était blonde et que je les préférait châtain. Je voulais des boucles à l'odeur coco caressant ma paume, m'étouffant la nuit.

Irina Savin. Fille d'Igor Savin, un exploitant gazier milliardaire depuis des générations.

Et Irina Savin m'ennuyait, mais le collier qu'elle avait autour du cou valait des milliers de dollars, voire un bon million.

— C'est amusant que je ne vous aie jamais vu auparavant.

Son accent s'entendait bien. Avant de réponde, j'ai scanné la pièce des yeux dans l'espoir de voir Sashæ revenir avec le tableau qu'il était censé dérober dans une salle blindée au sous-sol pendant que je me devais de prendre ce collier. Les invités respiraient l'abondance, la débauche et les milliards en banque.

— Nouveau dans la région ? Je suppose ?

Ce que je ne donnerais pas pour que cette voix féminine en soit une autre...

— Vous supposez ? La questionnais-je.

— Insinuez-vous que je me trompe ?

— Je ne fais pas dans les insinuations.

— Donc, je me trompe ?

— Je trompe tout le monde, Irina.

Elle a arqué un sourcil. Cette discussion l'amusait, d'une certaine façon c'était tant mieux pour moi.

— Vous êtes une sorte d'espion de l'ombre. Un James Bond qui ne livre pas ses secrets...

Elle avait un éventail. Elle l'a placé à quelques centimètres devant mon visage cachant mon nez et mes lèvres. Ses joues ont pris une autre teinte de rouge en fixant mes yeux. Et j'en profitais pour augmenter la température de ses gentilles petites fesses pour mon bon compte. Comme Sashæ l'avait dit, les hommes étaient des connards et il n'avait certainement pas menti.

Il fallait que je l'attire à l'abri des regards. C'était un avantage pour moi que personne ne me connaisse dans cette partie de la ville, elle ne pouvait pas se douter que mon petit papa volait les gens comme les Savin.

— Et tu veux les connaître, mes secrets ?

Elle a hoché la tête. Excitée. Nous étions tous les deux près du bar. La fête battait à son plein, je ne savais même pas ce que ces gens célébraient exactement, mais je savais que nous avions été ajoutés sur les listes par l'intermédiaire de Stone en tant que proche d'un type qui n'avait finalement pas pu venir.

Elle a pris ma main pour me mener dans un couloir. Il était beaucoup moins animé et en longeant cette propriété elle m'a finalement mené vers un salon privé. Ses escarpins claquaient contre le sol laqué.

La seule question que je me posais c'était, valait-il mieux que je l'assomme maintenant ou avait-il d'autres alternatives plus douces.

— Alors ? Quels sont vos secrets monsieur... ?

Elle n'avait pas besoin de savoir mon nom. Je me retenais pour ne pas baisser les yeux sur son buste brillant qui valait un million de dollars. Elle s'est assise sur le sofa noir au milieu de cette pièce. Maintenant ça pouvait devenir intéressant. Mes pas lents se sont menés juste derrière elle, derrière le canapé. J'ai posé les paumes sur les rebords. La télé fixée au mur d'en face était allumée, je regardais la chaîne d'information en continu qui documentait le prochain lancement d'une fusée. Projet space x. Ça ne m'intéressait pas forcément mais j'avais besoin de réfléchir...

Elle avait penché la tête en arrière, je sentais son regard bleu sur moi.

Finalement, sans détourner le regard de l'écran, ma main s'est saisie de sa queue de cheval que j'ai enroulée deux fois autour de mon poignet.

— Ton papa Igor ne t'a jamais appris que fixer des étrangers pouvait te faire tuer ?

J'ai continué à regarder la télé, en entendant son petit sourire en coin.

— Monsieur Bond, mon papa peut acheter le président américain s'il le voulait, personne n'oserait me tuer.

J'ai baissé les yeux à ce moment-là. Son petit accent russe se mélangeait à son dédain. Le pire c'est que je savais que la fille disait vrai. Son père possédait un empire surpuissant et surtout international. Il aurait pu acheter Guantanamo si ça lui chantait. 

— Vous les Russes...

— J'aurais plutôt dit, le pouvoir.

— Et quel pouvoir aurais-tu sur moi si j'avais ma queue dans ta petite bouche, Irina ?

Elle a gloussé, ça l'amusait sincèrement.

Si seulement elle savait...

— Aucun, monsieur James Bond, aucun.

— En voilà une fille intelligente.

Elle a mordu ses lèvres. Je ne sais pas ce qui était le pire, que cette fille pense que je veuille passer du bon temps avec elle ou de penser que j'aurais préféré avoir Mariposa assise sur ce canapé. Que c'est à elle que je voulais dire autant d'obscénités qui me passaient par la tête. Que je voulais sentir ma poigne dans ses milliards de boucles. Ce n'était pas le moment de l'imaginer ici. Mais mon cerveau ne pouvait s'en empêcher, elle était putain de partout. J'ai dû mordre l'intérieur de ma bouche pour me faire revenir sur terre. Papillon n'était plus là, il ne restait plus que la blonde.

— Fais-moi le plaisir de m'enlever cette petite robe noire.

Elle n'a même pas hésité. Ses index sont passés sous ses bretelles fines. J'ai lâché sa queue de cheval pendant qu'elle faisait glisser sa robe le long de ses jambes. J'en ai profité pour enlever ma cravate. J'avais l'impression de l'initier au mal mais je doutais que la demoiselle était pucelle mais tout de même, je ne faisais pas vraiment dans la défloration.

Irina m'attendait nue assise sur ce canapé, ses seins à l'air ne me faisaient ni chaud ni froid. Pendant une seconde j'ai pensé que j'avais peut-être un problème sous la ceinture mais il m'a fallu imaginer que sur le corps de vénézuélienne il y avait probablement des milliers de tâches de rousseurs pour sentir des frissons durcir ce que j'avais entre les jambes.

C'est à ce moment que j'en ai profité pour lui attacher les mains. Au début elle m'a laissé faire. Mais je crois qu'elle a très vite compris que je n'étais pas ici pour passer du bon temps. Son regard s'est très vite inquiété, ma main est passée sur sa nuque.

Le collier a cédé.

— Ne faites pas ça !

— Ton papa demandera au président de t'en racheter un.

Je ne crois pas qu'elle allait me suivre dénudée. Elle s'est mise à me hurler dessus en la suppliant de ne pas faire ça, mais j'ai fourré ce collier dans ma poche avant de m'empresser de sortir de ce salon privé. Les choses étant bien faite, j'ai failli bousculer Sashæ qui tenait ce qui ressemblait être un petit tableau enveloppé dans un sac poubelle.

— Je n'ai rien trouvé d'autre pour cacher ça, boss.

J'ai secoué la tête d'exaspération, ce truc allait nous rapporter 5 millions de dollars et ce connard n'avait trouvé qu'un sac poubelle pour transporter l'objet.

— On y va, le pressais-je en plaçant ma main sous son bras.

— Oh... Christian Grey... je ne sais pas si je suis prêt, ça va tellement vite entre nous je-

J'ai réalisé que je le faisais sortir de ma main sur son bras. Je l'ai lâché rapidement en lui accordant un regard si noir qu'il s'est étouffé dans sa salive en voulant rigoler.

Personne ne faisait vraiment attention à nous au milieu de ce petit monde. J'avais le cœur qui pompait quand même parce que j'étais en train de penser au fait que si nous sortions d'ici, ça serait accompagné d'un putain de sac poubelle.

Et nous étions dehors quelques minutes plus-tard.

Je me suis assis derrière le volant de la McLaren, Sashæ riait face à l'adrénaline et sa réflexion merdique, pendant que j'accélérais pour rejoindre l'autoroute.

— Tu n'aurais pas pu faire plus con que foutre cinq millions dans un sac poubelle toi !

— Oh, Billy boy ! Je t'ai vu, tu étais en train de te faire la Russe dans son salon ! Alors no comments ! (Pas de commentaires)

Une expression confuse est passée sur mon visage :

— "Billy boy" ? C'est quoi encore ce merdier ?

Billy boy, répète-t-il la voix rauque en plissant les yeux, c'est le surnom qu'on donne au cow-boy de ton genre. Des gens comme toi qui déshabillent de petites Russes chez elles. Mais tu n'as pas honte ?

Il avait une façon de parler comme les shérifs sages dans les vieux films. Mais il était sincèrement mort de rire, je crois que la soirée l'avait excité. Ses pupilles étaient presque dilatés.

— Sashæ si-

J'ai écarquillé les yeux en visualisant le canon une arme se planter sur la gorge de Sashæ. Juste après ça j'ai entendu le bruit métallique que fait le glock lorsque l'on baisse la sécurité.

— Ne bouge pas.

La voix d'une femme a retenti dans le véhicule.

Mon cœur a fait un bond. J'ai levé les yeux vers le rétroviseur intérieur pour découvrir une Asiatique, une capuche noire enfoncée sur la tête, menaçant Sashæ d'une balle dans la gorge. La McLaren était lancée à plus de 150km/h, au beau milieu d'une route déserte de campagne. J'hésitais à tenter un drift pour la désorienter mais je ne pouvais pas risquer quoi que ce soit sans avoir évalué la situation avant !

— Putain, à chuchoté Sashæ, comment est-ce que-

— Toi le comique, tu fermes-ta-gueule, a craché la fille, qui vous envoie ?

— Comment t'es entrée dans ma putain de caisse, m'exclamais-je furieux.

— Écoute-moi bien, je n'hésiterais pas à foutre une belle petite balle dans la gorge de ton putain de copain si tu me fais perdre encore mon temps ! Je vous ai vu à cette soirée ! Qui vous envoie !?

— Comment toi, sale conne, t'es entrée dans ma putain de caisse ? Et putain t'es qui !?

Qui vous envoie !?

Elle a enfoncé son canon dans la gorge de Sashæ, sa colère s'amplifiait je le sentais. Et je n'avais pas énormément d'options non plus ! Ses yeux bleus écarquillés me hurlaient qu'ils étaient inquiets mais il gérait plus ou moins son stresse pour le moment. Je n'étais pas sûre qu'elle le plomberait dans ma caisse mais je ne pouvais pas parier qu'elle ne le fasse pas. Mes pensées se bousculaient salement dans tous les sens. J'avais le cœur martelant contre ma cage et on hurlait tous les deux à 150km/h ! Je me demandais toujours comment cette conne avait fait pour rentrer dans ma putain de caisse !

— Je vais le répéter, une dernière fois, une der-nière fois, qui vous envoie voler ces putains de pièces ?

J'ai enlevé mon pied de l'accélérateur. J'ai pris une seconde de réflexion pendant laquelle j'ai pris le temps d'être reconnaissant envers mon créateur. Pour une fois que j'avais mis ma ceinture, j'en étais ravi.

Considérant que la McLaren n'avait qu'une seule porte.

J'ai freiné très fort avant d'ouvrir ma portière. Et cette putain de conne s'est éjectée tout naturellement de ma caisse.

— LA VACHE, s'écrit Sashæ en hurlant de rire.

J'ai refermé ma portière en effectuant un drift des plus simple et efficace. Demi-tour, Sashæ, continuait de me briser les tympans dans ma caisse pendant que moi je bouillonnais de l'intérieur. Une gonzesse s'était introduite dans ma bagnole sans même que je m'en rende compte ! Elle avait aussi entendu tout ce qu'on s'était dit plus tôt et j'avais une sale intuition que cette "asiatique" était la même dont Bruno avait parlé chez Stone.

— Du jamais vu ce spectacle que tu nous as offert en 4K !

Il était définitivement mort de rire, il s'essuyait les yeux à cause des larmes qui coulaient sur ses joues. Je n'avais qu'une chose en tête, c'était interroger Stonehead à la seconde ou je le reverrais.

La McLaren s'est arrêtée au beau milieu de la route. Je voyais son corps sur le bas-côté et j'espérais ne pas lui avoir écrasé le crâne en l'éjectant. J'avais des questions à lui poser.

J'ai sorti mon arme, parce que j'étais persuadé que cette conne aurait pu me surprendre. Elle était face contre terre. Ses mains visibles m'ont montré qu'elle n'avait plus son arme.

— Putain mais je veux à tout prix savoir qui est cette folle ! Je suis prêt à tout donner pour la connaître !

Je n'ai pas répondu à Sashæ en tournant son corps sur le dos. Son visage était tuméfié d'égratignures. Mes doigts contre sa gorge ont senti un pouls. Elle était encore en vie, inconsciente, mais en vie. Je l'ai fouillé, je n'ai trouvé qu'un téléphone prépayé. J'ai enlevé la puce.

— Donne-moi ta cravate.

Sashæ m'a regardé.

— Donne. Moi. Cette. Putain. De cravate, Sashæ. Maintenant !

La façon dont je l'ai fixé, j'ai moi-même eu peur de ce que je pouvais lui faire. Il s'est finalement résigné à me donner cette putain de cravate. Je l'ai entendu maronner en se plaignant qu'il n'avait pas la même classe sans sa cravate, mais je n'avais pas la patience de m'occuper de ses conneries pour le moment. J'ai levé la main en insistant pour qu'il se dépêche de l'enlever. La fille m'avait déjà assez mis les nerfs.

— T'es un spécialiste des nœuds toi en dirait bien... Christian Grey. 

Je me suis retenu de lui dire de fermer sa gueule.

J'ai noué les poignets de cette fille dans son dos, je savais qu'elle ne le délierait pas de sitôt.

— Ouvre le coffre.

— Elle est très très très mignonne en tout cas.

Il m'a ouvert le coffre.

— Sashæ, ferme-ta-gueule.

Il a explosé de rire. J'ai jeté la fille à l'intérieur.

— On fait quoi d'elle ?

— Pour le moment rien. On s'en occupera après le mariage.

J'ai claqué la porte.


𓆃


Il était vingt heures.

L'heure qui était indiquée sur la carte d'invitation.

Je savais que j'allais me faire avoir et pourtant mes fesses étaient assises sur une chaise en acrylique, derrière une table ronde. Vingt heures chez les Polonais, c'était vingt heures. Vingt heures chez les Nigérians, c'était au moins vingt-deux heures trente.

Je fixais la décoration florale en milieu de table. Je retenais mon désespoir de me prendre à la gorge. Une infinie tristesse me broyait mon estomac en fixant la fleur de tournesol jaune au milieu des roses de toute couleur. Le tournesol était flamboyant. Il ressortait avec gaieté. Ma gorge s'est nouée. C'étaient les fleurs préférées d'Ania, et le jaune était sa couleur préférée.

Je me suis senti voilé d'un drap noir. Qui m'étouffait et me collait à la peau. J'avais détesté l'idée de venir, je détestais être ici. Je détestais ce mariage parce qu'il nous rappelait à tous qu'il manquait un membre de notre famille.

Les images de sa mort tournaient en boucle, je voyais maman plus loin dans la salle. Elle était toujours aussi calcinée, elle était aussi pourrie que ma petite-sœur à l'heure actuelle. Je ressentais une vive douleur au niveau de la poitrine, je n'arrivais même pas à l'expliquer mais elle me coupait le souffle. Je restais figé, les yeux rivés sur le tournesol, jusqu'à ce que mes paupières se ferment... j'entendais la voix de ma sœur. Ses rires. Les ragots de ses copines qu'elle me confiait alors qu'elle leur avait promis de ne le dire à personne. Je savais quand Ania était amoureuse, je savais à qui elle parlait. J'étais là si elle avait besoin qu'on la conduise quelque part. Je mangeais quand même ses crêpes même si elles réussissaient à les rater. 

J'aimais qu'elle me parle.

Mais tout ça est parti en fumée.

J'ai ouvert les yeux. Bien-sûr, maman calciné me hantait toujours. 

Terrible était la peine qui m'arrachait un peu de mon être. Terrible.

J'essayais de me distraire, la salle était tout aussi époustouflante. Des fleurs aux plafonds, sur le trône, des voilages drapés nous entourant. Je savais que ce n'était pas Robin qui avait supervisé la décoration, mais je savais qu'il était à l'initiative de tous ces tournesols.

Il fallait se l'avouer, la salle était époustouflante.

La majorité du peu de personnes présentes ici était des Polonais. Ils ne m'avaient pas salué ni pardonné pour ce que j'avais fait. Je sentais certains de leur regard qui me déshonorait de mon nom.

Mais je restais un King. Et leur fortune se basait en partie sur le sang que j'avais sur les mains depuis que j'avais seize ans. Je leur avais offert le monde sur un plateau d'argent. J'avais sacrifié ma vie pour que la mafia polonaise de ma famille soit les seuls et uniques leaders aux États-Unis. J'avais fait mes preuves, et bâti un empire qui se basait sur des milliards.

J'expirais. J'étais épuisé. Dans ma tête j'étais crevé. Venir ici, voir la salle de remplir des membres de notre clan, en sachant pertinemment qu'elle ne passerait jamais la porte. Que je ne reverrais pas ses yeux verts. Que je ne l'entendrais pas me chuchoter « Côme, il faut que je te raconte un truc, tu vas halluciner ! » accompagner de son rire mesquin. Ça me bouffait.

— Côme ?

Le retour à la réalité m'a fait l'effet d'une gifle. J'ai pris une immense inspiration en entendant la voix de Sashæ. C'était comme si je m'autorisais à respirer de nouveau.

Un mouvement de tête vers lui pour lui signifier que j'écoutais.

— T'avais l'air ailleurs. Tout va bien ?

Un bruit m'a fait baisser les yeux sur ses mains. Il mélangeait des cartes d'une main de maître. Je ne savais pas où il les avait trouvés. J'ai fini par hocher la tête positivement. Il m'a répondu "mh". Il n'était pas convaincu et je m'en branlais complètement. 

— Alors, tu passes une bonne soirée Billy boy Grey ?

Je me suis retenu d'expirer ou le toiser. Son putain d'accent de vieux cow-boy du far-west allait devenir ma nouvelle hantise je le sentais d'ici. Pendant qu'il continuait à brasser les cartes, j'ai répondu :

— Tu vois bien que personne ne s'éclate plus que ma gueule là non ?

— Ah si tu pues l'éclate c'est clair !

— Voilà. Ça me semblait évident.

— Ouais, sacré Billy boy ! Aller choisit une carte.

— Va te faire mettre.

— Violent. Choisis une fucking carte, Billy fucking boy !

J'ai expiré bruyamment, c'était plus fort que moi. Mais finalement j'ai levé le bras. Ce n'était pas comme si j'avais mille et une activités à faire et puis ça me faisait oublier un peu ces horreurs que je ressentais.

— Huit de pique. Très bien, Billy boy... maintenant... look at this (regarde ça).

J'étais d'ores et déjà blasé par le type.

L'aisance de Sashæ me fascinait presque, après tant d'années passées avec Alexander, c'était à peine s'il me tutoyait. Mais ce putain de Peyton agissait comme si nous avions grandi ensemble. Je n'en pensais rien. Honnêtement en une seule journée, il m'avait sorti de mon deuil en m'offrant un champ de possible pour ma vengeance, et pour ça je lui permettais bien d'être familier.

Il a rapidement mélangé les cartes mais je n'ai pas pu me retenir un rire lorsqu'il a prononcé :

— Bibbidi-Bobbidi-Boo !

Ma main s'est calée contre ma bouche. Ce mec tuait pour moi putain et il était l'être le plus idiot qu'il m'avait été donné de voir. Il a ri à son tour avant de mixer une dernière fois le paquet. Il s'est arrêté, et a sorti une carte qu'il m'a montrée.

Valet de pique.

— Applaudis-moi, maintenant !

— Sale petit con, lançais-je un demi-sourire en coin en prenant la carte pour lui montrer.

— Quoi, ce n'est pas le huit ?

Il a regardé la carte.

— Un valet de pique ? Non, boss ! On l'a refait ! Je n'étais pas concentré ! Boss !

Il s'est empressé de mélanger les cartes.

— Que quelqu'un t'encule Sashæ, sincèrement.

Il a explosé de rire en continuant à me supplier de recommencer. Ses mains mélangeaient le paquet. Je me retenais de ne pas céder à l'hilarité. En regardant le tournesol, j'ai empli mes poumons d'un peu d'air. J'espérais que c'était le bout du tunnel.

— Boss ! J'ai déconné mais tout ça, c'est-

— Côme.

J'ai tourné la tête à la voix grave qui m'a interpellé. Je suis tombé sur les yeux noirs, de mon cousin Maddox. Son regard a jonglé de moi à Sashæ avant qu'il ne me présente sa main. Je me suis levé pour répondre à son salut, Sashæ en a fait de même.

C'était un des seuls qui ne m'avait pas tourné le dos après ce que j'avais fait à ma sœur. Le seul de mes cousins à me serrer la main lors de mon départ de Pologne :

— Je ne t'ai plus revu après l'enterrement, prononce Maddox en s'asseyant à côté de moi.

— J'ai préféré ne pas revenir en Pologne.

La vérité c'est que mon père m'avait interdit de remettre les pieds dans mon pays, mais mon cousin a acquiescé d'un hochement de tête avant de lancer un regard intrigué vers Sashæ.

Czy to Aleksander ? (C'est Alexander ?)

Nie, to jego brat bliźniak, répondis-je. (Non c'est son frère jumeau.)

— Parce qu'Alexander à un frère jumeau ?

Une expression d'approbation s'est affichée sur mon visage. Alexander ne parlait que très rarement de sa vie privée. Je n'étais même pas sûr que leur père était mort avant que Sashæ ne m'en parle. Je ne savais pas grand-chose de lui.

— Maddox King, le cousin de Côme.

— Sashæ, Peyton. Le jumeau du très célèbre Alexander Charli Peyton.

Maddox a hoché la tête en guise d'acquiescement. Il n'a pas relevé l'ironie, mais malgré moi je restais bloqué sur le « Charli ». Alexander avait un deuxième prénom ? Et pas des moindres.

— Charli, l'interrogeais-je curieux.

— Ouais. Disons qu'il n'a pas eu beaucoup de chance.

— Pourquoi tu as eu plus de chance toi ?

— Le mien c'est Daryl. Donc un peu ouais. Pourquoi t'as un deuxième prénom toi ?

— J'en ai un.

— Sérieux, mh, c'est quoi ton petit nom mystérieux Billy Boy ?

Un petit sourire en coin accompagné d'un soupire, j'ai articulé:

— Farell.

En haussant ses sourcils, Sashæ a poussé sa bouche en cœur. Il s'est mis à hocher la tête lentement.

— Un mâle alpha. T'es trop beau. Côme Farell King. Finalement je suis prêt pour toute activité extrascolaire sexuelle qui-

— Bref, Maddox ?

J'ai reporté mon attention sur mon cousin. Il n'a pas vraiment réagi. Maddox ne riait que rarement. Mon cousin avait 3 ans de plus que moi. Il venait que très rarement aux États-Unis, uniquement pour les grands événements ou les grandes vacances, mais en général, la famille se retrouvait en Pologne. J'étais tout de même très proche de lui. Nous avions été élevés comme des frères. Son père était le second dans l'ordre et lui gérait le trafic d'ecstasy en Pologne.

Il a posé sa paume sur mon épaule.

— Qu'est-ce que tu deviens, kuzyn (cousin) ?

J'hésitais à lui dire mes activités complètes. Non pas que je ne lui faisais pas confiance, Maddox n'avait jamais apprécié mon père et je ne pensais pas une seule seconde qu'il me retiendrait de lui faire du mal. Mais l'empire dès King était une affaire de famille. Mes oncles avaient des réseaux jusqu'en Europe et en Amérique, je risquais de faire flancher cette famille tout entière. Et puis, Maddox appréciait Sage, qui était actuellement à la tête de la mafia.

— Je renfloue mes comptes, prononçais-je avec détachement.

— Aaron a gelé tes comptes ?

— Bien sûr qu'il l'a fait Maddox.

— Tu es à combien ?

— Sept.

— Déjà.

Je l'ai toisé.

Un infime sourire en coin a creusé sa fossette.

Potrzebuję cię w czymś. (J'ai besoin de toi sur un truc.)

— Tu peux parler anglais, Maddox.

Maddox a regardé Sashæ, puis il a hoché la tête.

— Je cherche un type.

Mon regard se plante dans celui de mon cousin. Il réajuste la veste de son costard noir. Je n'avais pas remarqué les nouveaux tatouages noirs qui grisaient ses mains. J'avais envie de lui demander quand il les avait faits, mais il m'a dit:

— Un milliardaire.

— Mais encore.

— Ce type est responsable de la mort d'une dizaine de gars. Mais l'enflure se déplace sur la carte plus vite que Wolverine.

Du coin de l'œil, j'ai vu que Sashæ a pincé les lèvres et mis son poing devant sa bouche pour s'empêcher de rire.

— Qu'est-ce que tu lui veux exactement ?

— M'occuper de son cas.

— Pourquoi ?

— J'avais presque oublié à quel point tu étais curieux, Côme.

— Qui a-t-il buté de si important pour toi pour que tu veuilles lui faire la peau, demandais-je tout-de-même.

Il m'a simplement fixé. J'ai plissé les yeux.

Maddox n'était pas un impulsif. Il était tout mon contraire. Le genre de fou furieux qu'on ne soupçonnerait jamais au premier abord. Il paraissait toujours contrôlé et calme. Pas facile à lire, et il ne parlait pas tant que ça non plus. Je trouvais bizarre qu'il cherche à détruire n'importe quel connard milliardaire responsable de la mort de "dizaines de gars". Maddox se détournait rarement du business. Tout tournait autour de ses affaires et il ne laissait rien entrer dans sa vie sous aucun prétexte.

Je n'ai pas poussé le dossier plus loin. Aussi curieux que je pouvait l'être, Maddox était une huître. Impossible à ouvrir. Il ne se confiait à personne. Jamais.

— Qui est ton gars, le questionnais-je.

— Barnett. Le PDG de Barnett Pharmaceutique.

J'ai froncé les sourcils lorsqu'il a prononcé son nom.

— Tu me parles d'Owen Barnett la, Maddox ?

— Je te parle bien de lui, me confirme mon cousin, pourquoi ?

— J'ai volé ton gars il a à peine deux semaines, il avait un œuf de Fabergé dans ses tiroirs.

— Ah, parce que c'était toi ? Salopard.

Un sourire en coin s'est affiché sur mon visage au même titre que Maddox.

— Tu as foutu un bordel pas possible dans ma traque. Le type a pris ses précautions, j'ai perdu sa trace depuis deux semaines justement.

— Je peux le retrouver.

Maddox et moi avons simultanément tourné la tête vers Sashæ.

— Aux dernières nouvelles, continue-t-il en s'éclaircissant la voix, le visage très sérieux, on sait qu'il est au Vénézuela. Mais je peux le traquer.

— D'où tiens-tu ces informations ?

— On travaille avec un type, Stonehead, expliquais-je, il n'est sûrement pas réglo mais il me rapporte gros. Il savait où trouver cet Owen, et quand le braquer, il avait les plans de sa maison.

— Stonehead ? J'espère que tu savais que type est surveillé de très près par le FBI, Côme ?

— Le FBI ?

— J'ai un type qui me tient informé d'un peu tout le monde ici. Ils ont mis une petite Asiatique sur le coup.

J'ai failli m'étouffer avec ma salive. Sashæ s'est redressé de son siège. Et au même moment une musique aux rythmiques afros a retenti dans la salle. La couleur des lumières avait changé pour des nuances tamisées de violet et rose.

— Une Asiatique ?

— Je n'en sais pas plus. Je sais qu'elle leur colle au cul depuis plus de huit mois maintenant. Pourquoi ? 

J'ai regardé Sashæ d'une façon plus que significative. On avait un agent du FBI inconscient dans mon coffre, noué aux poignets par la cravate de Sashæ et j'avais son putain de téléphone dans la poche de mon smoking.

— Elle est dans mon coffre, répondis-je.

— Qui est dans ton coffre ?

— La fille du FBI.

J'étais débordé par la situation. Le rire nerveux de Maddox m'a bien fait comprendre que je n'aurais pas pu me mettre plus dans la merde que ça.

— Tue-la, et rapidement Côme, j'espère que personne ne t'a vu avec elle.

— Je le sais.

La tension dans mon corps était à son comble. J'ai commencé à nerveusement tapoter les bouts de mes doigts contre la nappe blanche de cette table. Ce n'était certainement pas le moment de me mettre un mandat d'arrêt international sur le dos. Il fallait que l'on vérifie d'abord si cette fille avait parlé de nous à qui que ce soit.

— Et pour ton type, Stonehead, on dit que c'est un sale vicieux dans le milieu. Apparemment avant d'être un bandit, c'était un indic pour les flics.

— Je suis vicieux moi aussi. Et honnêtement, je me branle de son parcours tant qu'il me paye.

Maddox marque une pause. Le temps de la réflexion, je réfléchis à la meilleure façon de me débarrasser d'un agent fédéral sans m'attirer Interpole sur le dos.

La voix de mon cousin me coupe dans mes pensées.

— Donc tu penses pouvoir traquer mon gars, Peyton ?

— J'en suis certain. Sans prétention.

Maddox n'a pas réagi.

— Retrouvez-moi demain Côme, je t'enverrais un message.

J'ai hoché la tête, j'allais répondre mais une personne est apparue dans mon champ de vision.

J'ai relevé la tête en découvrant Alexander. Il était seul.

— Ah, mon frère !

Sashæ s'est levé directement. La différence entre eux était flagrante. Alexander était rigide quand tout semblait si fluide pour Sashæ. Il a accueilli son frère d'une poigne et d'une tape chaleureuse dans le dos.

Mais les yeux bleus d'Alexander ne me quittaient pas.

— Bonsoir.

La situation était honnêtement étrange. Nous n'étions pas amis, il travaillait pour moi et ça s'arrêtait là. Et pourtant j'avais l'impression que ses yeux en demandaient après moi. J'avais peut-être tort, mais je le côtoyais depuis mes dix-huit ans. J'avais fini par comprendre certaines de ses expressions.

Il a serré la main à Maddox. Ils se connaissaient vaguement. Puis Alexander m'a présenté sa main. J'en avais presque oublié ses bagues qui ornaient ses doigts. C'était la première fois que je le voyais en costard, sans sa fameuse veste en cuir que son père lui avait offerte plus jeune.

Alexander était le bras droit de mon frère à présent, je n'avais plus rien à dire sur les décisions de Sage. D'autant plus qu'ils étaient plus proches tous les deux. Alors je lui ai serré la main. En signe de rédemption.

— Robin...

J'ai froncé les sourcils en attendant qu'il continue.

— Robin est avec Sage et Dove à l'étage. Il voudrait que tu les rejoignes.

Un léger coup de stresse que je ne saurais comprendre s'est immiscé sous ma peau. J'ai hoché la tête avant de me lever. Mes pas m'ont mené vers le fond de la salle. C'était une sorte d'immense château qui comprenait des chambres à l'étage. Il avait été loué jusqu'à demain pour les invités.

Mes pas rapides ont longé le couloir. Je déboutonnais un deuxième bouton. Je ne sais pas pourquoi retrouver mes frères m'angoissait autant mais je ne voulais pas vraiment me retrouver seul avec eux.

J'ai entendu une porte s'ouvrir derrière moi. En me tournant, j'ai vu Amber sortir la tête. Elle est complètement sortie de la chambre, j'entendais ses amies qui lui demandaient ce qu'elle faisait mais elle a refermé la porte derrière elle. J'ai froncé les sourcils.

Elle ne semblait pas très à l'aise. Et j'avais déjà envie de fuir. Son ventre me paraissait en détresse dans sa robe, si il n'explosait pas dans les minutes qui suivaient c'était un exploit. En tout cas je me suis fait la réflexion que si elle accouchait dans la salle je n'aiderais pas. J'étais toujours autant persuadé qu'il aurait mieux valu reporter le mariage après la naissance du petit mais je savais que ça devait être cette pute de Nathalie qui avait insisté.

— Salut.

J'ai hoché la tête.

— Tu es venu...

Je la trouvais juste bizarre. J'ai senti mes paupières de plissé. J'ai sur analysé sa face parce que je voulais comprendre qui elle était. Je ne savais rien d'elle, et pour le moment j'étais toujours sur mes gardes.

— Je sais que tu ne m'aimes pas beaucoup. Mais ce n'est pas très grave. Je voulais simplement te dire... Tu sais... je crois qu'il n'y a personne que Robin aime plus que toi sur cette terre. Enfin, il ne te l'avouera sûrement jamais, mais je sais que même s'il mourait pour vous tous, le premier pour lequel il se jetterait au feu ça serait toi.

Ses mots résonnaient dans mon crâne.

Je savais que Robin se jetterait au feu pour moi.

Il l'avait déjà fait.

— Il m'a expliqué... que c'était lui, qui t'avait sauvé la vie. Dans cet incendie. J'ai vu les brûlures sur son corps et...

Elle s'est à pleurer. Mais avec le maquillage qu'elle avait, elle a rejeté la tête en arrière pour retenir ses larmes en murmurant « j'avais dit que je ne pleurerais pas ». Ma gorge s'est nouée. Les souvenirs de cette nuit remontaient méchamment. J'avais de lourds frissons qui parcouraient mon corps. J'entendais le crépitement des flammes, la sensation de suffocation à cause de la fumée toxique. J'entendais la voix de maman. Puis celle de Robin.

— Je suis désolée... sincèrement... je tenais à te le dire. Je viens en paix... Je ne veux pas te séparer de ton frère, tu seras toujours le bienvenu à la maison, et on voudrait... on voudrait que...

Elle a soufflé une nouvelle fois, en essuyant les gouttes qui menaçaient.

— On voudrait que notre petit garçon s'appelle Farell.

J'ai senti mes sourcils se hausser.

— Q-quoi ?

— Tu es d'accord ?

Je réalisais à peine ce qu'elle venait de me dire.

Je n'arrivais même pas à comprendre sa bienveillance à mon égard. C'était à peine si je lui avais adressé un bonjour quand je croupissais chez elle.

— Robin l'avait suggéré, et c'était un prénom que j'avais écrit dans mes notes depuis que j'ai seize ans. Si ce n'est pas le destin de Dieu, je ne sais pas ce que ça peut être d'autre. Je sais que tu ne me fais pas confiance, et je ne t'ai jamais vraiment parlé, mais moi je t'aime bien Côme. Parce qu'à côté de toi, Robin il se sent aimé et en sécurité. Et j'ai l'impression que tout ce que tu aimes ressentent ça.

Je n'ai pas su quoi répondre. J'avais été forgé dans la violence et la colère. Pour moi, un connard valait mieux qu'un je t'aime. Je préférais les poings de mon père à l'affection de mes frères. Parce que l'amour me rendait mal à l'aise. Comme maintenant.

— Désolé. Tu dois te dire qu'est-ce qu'elle me veut celle-là, mais j'aime Robin à en mourir donc tu n'as pas à craindre que je sois en train de te brancher.

Elle a ri en essuyant ses larmes. Je me suis mis à la jauger une nouvelle fois.

— Alors, est-ce que tu acceptes ?

Et finalement. Je n'ai pas su dire non. Alors j'ai hoché la tête.

Elle a souri gentiment. Je l'ai vu hésiter un peu, mais finalement elle s'est approchée de moi et sa main a caressé mon bras rapidement.

— Merci d'être venue. Que Dieu te bénisse.

Ses mots m'ont fait hausser les sourcils. Elle a posé sa main sur son gros ventre avant de reculer et entrer dans sa chambre. Ses copines l'ont enchaîné immédiatement en voyant qu'elle pleurait. La porte a claqué. Je suis resté debout là. Comme un con. J'essayais encore de comprendre ce qui venait de se passer.

Mais j'ai entendu une nouvelle porte s'ouvrir.

J'ai tourné la tête, le crâne de Robin regardait de l'autre côté, jusqu'à ce qu'il tourne la tête vers moi.

— Entre salopard !

J'ai approché jusqu'à pénétrer sa chambre. Mes yeux sont tombés sur ceux de Dove, mon grand-frère qui portait sa fille endormie dans ses bras.

Puis j'ai vu Sage. Pas de réaction. Il avait le regard froid.

— Apparemment tu es venu à vingt heures, articule Dove en ricanant, dupek.

— J'ai besoin que tu me dises que je suis beau la Côme. Je stresse.

— Kendra m'a dit que ça ne servait à rien de venir aussi tôt. 

— Je suis bien ou pas Côme ? C'est bien comme ça ? 

Dove se faisait des monologues. Mes yeux se tournent vers Robin. Il ajustait le col de sa chemise blanche. Il avait un pantalon de costume parfaitement taillé noir, et des mocassins laqués.

— C'est correct.

— Putain, qu'il aille se faire foutre ce polak de merde !

— Tu ne m'as pas fait monter pour que je complimente ta sale gueule Robin.

— Où est ta cravate Côme, me demande Dove.

— Est-ce que les chaussures passent, ou je mets les mat Côme ? Regarde ?

Robin m'a montré d'autres paires. J'ai fait non de la tête.

— Je garde les laqués ?

J'ai hoché la tête. 

— Tu demandes des conseils à un mec qui n'a même pas de cravate Robin.

— Il s'habille mieux que toi. 

— Il es venu à vingt heures, alors qu'il te colle au cul depuis ta plus tendre jeunesse. Je ne lui aurais pas fait confiance. 

— Occupe-toi de bercer ma nièce, Dove, tu parles beaucoup. 

Entre Dove et Robin qui se renvoyaient la balle, le silence de Sage. J'étais perturbé. J'aurais pensé que l'ambiance soit plus déchirante, déprimante. Et pour moi elle l'était. J'avais qu'une envie, c'était qu'Ania soit parmi nous. J'avais ce désir brûlant qu'elle nous revienne. Qu'elle illumine toute cette pièce. Qu'elle soit la normalité de nos vies...

Mais je savais qu'elle ne passerait pas cette porte. 

Une énième vive douleur s'est enfoncée dans ma poitrine. 

Mes yeux se sont levés vers Sage. Il me fixait déjà. 

Pour lui aussi c'était déchirant.

Son regard m'a fait un truc impossible à réparer. J'ai vu tout de suite que le Sage d'il a huit mois était mort et enterré. J'ai tout de suite compris qu'il n'encaissait pas les méthodes de mon père. Sage avait grandi entouré d'or. Et maintenant il découvrait qu'il y avait mon père. Et il y avait le mafieux.

Je savais qu'il n'était pas fait pour cette position.

Je me demandais comment j'allais pouvoir le sortir de là. Il a fini par détourner le regard le premier. J'ai pincé mes lèvres une seconde le temps d'inspirer plus profondément. Sage m'inquiétait, et personne ne semblait le voir.

— Eh.

J'ai relevé la tête. Robin se trouvait devant moi. Il enfilait sa veste. Un sourire radieux sur le visage.

— Merci.

Je savais que je ne le méritais pas.

— J'attendais que vous soyez tous là.

Robin nous a tous regardés.

— Je ne compte pas sur vous pour danser mais si l'envie vous prend n'hésitez pas. Mais ne me faites pas honte, surtout toi Dove.

Dove a souri.

— Je peux vous demander un petit câlin ou c'est trop demandé ? 

— C'est trop demandé, répondis-je directement.

C'était au tour de Robin de rire.

— Bon bah...

— Pourquoi tu bégayes la, interviens Dove.

— Je ne bégaye pas, c'est juste que-

J'ai juste vu Sage s'approcher de Robin. J'ai haussé les sourcils quand mon petit-frère a plongé dans ses bras. Et Robin semblait tout aussi étonné que nous. Je crois que c'était la première fois que je voyais Sage faire preuve d'affection envers l'un d'entre nous. Il avait même du mal avec Ania.

Je savais d'ores et déjà qu'il fallait que je sorte Sage de là. Peu importe à quel point il me haïssait. Peu importe. Je savais qu'il fallait que je réduise en cendre les milliards de mon père.

L'étreinte entre mes frères a duré une bonne minute. Jusqu'à ce que Sage s'éloigne lui-même, un sourire crispé sur le visage. Je me demandais ce qu'il vivait. Je me demandais ce qu'Aaron King lui faisait faire. Je me demandais ce qu'il devait regarder. Quand ? Comment ? Je connaissais toutes les horreurs de mon père, et c'est pour ça que j'étais heureux de les prendre sur mes épaules. Parce qu'aucun de mes frères n'aurait pu les encaisser.

— Aller, je vous aime les gars.

Robin.

Parce que ni moi, ni Dove, ni Sage n'aurions pu prononcer de telles paroles. C'était un mot tabou. Que je n'avais plus jamais entendu depuis mes six ans. Il n'existait pas. Je le trouvais malaisant.

— On y va !

Je ne voulais pas venir pour ça.

Cet excès de sensations. D'émotions. Je détestais ça. Ça m'irritait de comprendre un peu trop que tout le monde se détruisait de l'intérieur. Nous sommes sortis de la chambre, j'avais commencé à avancer dans le couloir :

— Côme.

Je me suis tourné vers Robin. Il a laissé mes frères avancer.

— Je suis content de te voir.

Il avait un sourire sincère. J'ai essayé de lui sourire en retour. Je crois que j'avais du mal avec ma famille. Parce que chacun d'entre eux me rappelait Ania.

— On voulait te parler d'un truc avec Amber. Mais je t'en parlerais plus-tard.

Si c'était pour prendre mon deuxième prénom, je le savais déjà.

— Repasse à la maison, de temps en temps.

— Ouais. Je passerais.

— Et écoute. Retrouve-la. Tu sais, Bouclettes.

J'étais étonné qu'il me parle d'elle.

— J'sais pas, quand elle était là, tu avais l'air heureux. Il y a un truc qui me fait dire que cette fille-là c'est ton âme sœur. Je ne pourrais même pas t'expliquer mais c'est dans tes yeux. Au point ou, tu te souviens en Italie, le repas qu'on a mangé ensemble. J'étais presque horrifié d'être à côté de vous. Vous dégager un truc trop bizarre Mariposa et toi quand vous êtes ensemble.

Ses mots me noyaient. Parce que tout ce que je voulais c'était la revoir. Je savais que Mariposa était spéciale, et je ne pouvais l'expliquer moi-même. Mais j'avais besoin d'en savoir plus quand je l'aurais en face de moi.

— Je voulais te dire ça. Et je sais, je ris, j'ai l'air heureux. Mais pas une seule seconde ne passe sans que je ne retienne mes larmes pour ma petite-sœur. Je reste debout pour ma femme, et mon fils. Et pour vous. Et ne je saurais remercier Sashæ parce que je sais que c'est grâce à lui que tu es là devant moi.

Il avait raison. J'ai passé ma main sur ma mâchoire. Ses yeux sont devenus vitreux après qu'il ait parlé d'Ania.

— J'ai l'impression de tout le temps faire des monologues avec toi, rit-il tristement, ais un jour Côme tu vas parler. Un jour quelqu'un saura t'écouter. Mieux que moi. Mais en attendant, trace, trouve-la, et j'espère que la prochaine fois que je te verrai en smoking ça sera pour ton mariage. Parce que moi j'y crois. Et tu as vraiment besoin de ça.

Je ne savais pas si je devais y croire. Je n'avais pas envie de me bercer d'espoir non plus.

— Et... si tu en as l'occasion. Parle à Sage.

— Comment il va, demandais-je directement.

Robin a secoué la tête négativement. J'ai compris.

— Il peut venir me voir.

— Mais il ne le fera pas tu le sais mieux que moi Côme.

— Il ne m'écoutera pas non plus.

— Essaie. Je suis incapable de le comprendre. Je ne le comprendrais jamais mieux que toi.

Je le savais ça aussi. J'étais celui qui était toujours là.

J'avais vécu la maladie de Dove quand Robin et Sage traînaient au terrain de basket. Natalie leur permettait de voir autre chose.

J'avais intégré Robin à notre fratrie. Parce que Papa disait toujours que la famille primait sur tout.

J'ai encaissé coups de mon père pour le confort de Sage.

J'étais là.

Alors je savais.

Robin a posé la main sur mon bras.

— Merci d'être venu. 

J'ai hoché la tête, il m'a sourit. 

Puis Robin est parti chercher Amber. Je n'étais plus vraiment là. Je les regardais, avec distance. Pour moi ce mariage était d'une tristesse sans nom. Il me faisait un mal de chien derrière la poitrine. Le cortège de notre famille s'est réuni dans la salle des fêtes. La musique nigérienne a accueilli les mariés. J'étais là, derrière. Stoïc. Je regardais mon frère et sa femme célébrer cette belle journée.

En pénétrant la salle, mon regard s'est posé sur une inscription accolée au mur :

"Bienvenu au Mariage de Robin & Amber Eaton. 10.08"

Le dix août.

Je suis resté figé sur la date.

On était le dix août.

C'était son anniversaire aujourd'hui. Elle avait 21 ans !

Putain. Je n'avais pas fait attention à la date d'aujourd'hui !

J'espérais que quelqu'un se soit souvenu de son anniversaire ! J'espérais que quelqu'un ai pris le temps de lui faire un gâteau !

J'ai eu la haine. Parce que je ratais ça. Et tout était dû à mes lacunes. Mes erreurs.

Putain... c'était ton anniversaire. 

























Joyeux anniversaire, Papillon...


























J'ai cessé de suivre le cortège. De toute façon, j'ai vu au loin mon père assis à la table que j'occupais auparavant et pour couronner le tout, cette salope de Natalie était à sa droite. Mon temps chez les King était révolu. Je ne pouvais plus rester. J'ai cherché Sashæ des yeux, il était assis à quelques places de mon père. Il me regardait déjà. D'un geste de la main je lui ai sommer de venir.

Il s'est levé en saluant son frère qui était assis. Alexander m'a regardé en hochant la tête. J'ai répondu de la même façon.

J'entendais le claquement de mes mocassins contre le sol laqué. Jusqu'à ce que je retrouve les graviers entourant le château. Je n'ai pas dit un mot. Je pense que ça se voyait sur ma tête que j'étais physiquement, émotionnellement drainé.

J'ai retrouvé la McLaren. Nous sommes entrés en silence. J'avais un agent dans mon coffre.

J'avais plein de brouillard noir dans le crâne.

J'avais juste besoin de ma dose.


Ma dose de Papillon. 




𓆃



BONJOUR 🦋 ! 


Je sais, je sais, "où est donc Mariposa ?" Je dis rien du tout MDR !

J'ai du réécrire ce chapitre, j'aimais pas la 1ère version et la je suis satisfaite 😭 ! 


Demain il y a France-Pologne je serais à fond derrière le match la du coup je poste maintenant ! (Je soutiens secrètement la Pologne pour mon fiston) 

Mais on peut parler de Sashæ mon bébé ou pas ? Parce que ce mec en fait il est exceptionnel ! Et ils se sont bien trouvé avec Koko 🥹 ! 

En tout cas j'espère que ça vous a plu :) ! On se retrouve bientôt pour la suite ! 


XOXO, Azra. 🍓

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