CHAPITRE 25: Through music.
Hello wattpad, ça-va ? 🌹
Je viens de finir de corriger le chapitre 😬, comme quoi hier je n'aurais jamais pu le mettre.
Et merci pour toutes les astuces animal crossing, je suis à présent milliardaire, j'ai vendu des navets, voilà, voilà PTDR.
Je vous laisse avec ce chapitre, je peux vous conseiller Work Song de Hozier pour le lire tranquillement parce que je crois que vous êtes pas prête 😇...
Aller bisous d'amour !
Bonne Lecture! 📖
Xoxo - Iamkunafa. 🍓
𓆃
CÔME.
Piste audio : 21 questions de 50 cent.
La tête de mon frère, Sage, se balance lentement au rythme du tempo.
La tonalité est faible, mais la musique emplit tout de même l'espace confiné du véhicule. L'odeur de la nicotine que Sage aspire s'enfonce dans mes poumons, se colle à ma peau.
Notre voiture banalisée est garée sur le parking d'une supérette. Un sklepik pour être plus précis. Une épicerie polonaise, dans laquelle un des hommes qui garde la villa de mon père : Zabójca, se rend tous les midis, les fins d'après-midi, et les soirs pour aller se chercher quelque chose à se mettre sous la dent.
Couvert par le ciel noir de la nuit qui est tombée depuis des heures, nous sommes cachés sur ce parking plus ou moins désert, à quelques mètres du magasin. J'observe les entrées et sorties des clients.
Ça fait presque trois semaines que j'ai quitté Richmond pour les Hamptons, à l'extrémité du Long Islang. C'est là que mon père a choisi de passer tous ses jeudis. J'aurais pensé que nous aurions pu en finir avec lui depuis bien longtemps, mais il s'avère que sa sécurité, ou que plutôt l'obstacle de son mercenaire nous pose problème.
Seuls lui et mon père possèdent les clés de cette foutue villa.
Sage ne peut pas les lui prendre sans se faire prendre, notre seule ouverture c'est lui.
Ça fait trois semaines que je le traque, la plupart du temps, seul. Mais en ce jeudi soir, Sage a pu me rejoindre exceptionnellement. Une part de moi redoute que Zabójca sache déjà que je le piste.
Pour être tout à fait honnête, c'est lui qui m'a appris tout un tas de trucs sordides pour torturer des gens.
Le plan est simple. J'ai un silencieux dans la ceinture de mon pantalon. On doit agir vite, et attendre qu'il vienne prendre de quoi grignoter. À la seconde où ses fesses se posent sur son siège, j'appuierais sur la détente.
— Tu connais ?
Je détourne le regard vers Sage, puis vers la piste audio affiché sur le tableau de bord.
Baby By Me, toujours de 50 cent est chuchoté dans la Hyundai.
— Ouais, répliqué-je.
— C'est Robin qui t'a fait connaître ça, hein ?
— C'est une de ses musiques préférées. Mais... oui c'est lui qui me faisait écouter ça.
— Ouais moi aussi.
Sage à un micro sourire en coin. Presque imperceptible, il rive son regard vers l'entrée du sklepik attiré par l'agitation qui se déroule devant - un groupe d'adolescentes bruyantes pénètrent la supérette, en se chahutant légèrement.
Pendant une seconde j'ai un moment de réflexion à l'idée que Sage vient de me parler normalement.
Et j'ai même l'impression que depuis les révélations qu'on a eues sur le parking de la dernière fois, on réapprend un peu à se découvrir pour de bon cette fois.
Enfin je crois, je n'en suis pas très sûr. Je ne sais même pas ce qu'avoir une relation avec Sage représenterait. Je n'ai jamais été un grand frère modèle pour lui. Mais maintenant, il sait pourquoi je hais sa mère, et je sais pourquoi il me haïssait moi.
Je me réajuste sur mon siège en m'éclaircissant un peu la voix. Puis j'entends le mécanisme de sa fenêtre se baisser, il jette sa cigarette avant de refermer sa vitre.
— Et celle-là ?
Je baisse les yeux sur la main de Sage qui change de piste audio. Sur l'écran de bord, je lis « Rollercoaster – Burna Boy ». Je laisse la musique à faible volume s'immiscer dans mes oreilles alors que mon frère rythme encore lentement sa tête sur le tempo lent.
Je secoue la tête négativement.
Il me lance un regard qui a l'air de dire : « t'es sérieux ? ».
Je ne perds pas de vue notre mission et je n'oublie pas de regarder l'entrée du sklepik.
— Donne-moi ton téléphone, suggéré-je en tendant ma paume vers l'appareil.
Sage m'analyse une seconde avant de finalement me glisser son téléphone dans ma paume.
Mes doigts tapent rapidement sur l'écran : "Miúda Linda - Nelson Freitas."
La piste audio change.
Je vois ses sourcils se froncer légèrement en même temps que, sûrement sans qu'il n'en ait vraiment conscience, sa tête se laisse bercer par le tempo de la musique.
— Comment tu connais ce genre de musique toi ? me demande-t-il sur un ton presque étonné.
— Robin, qui d'autre.
— J'connaissais pas.
Un léger choc me prend lorsque Sage laisse un sourire étirer de façon infime ses lèvres. Je sens que mes sourcils se haussent une seconde.
— T'écoutes vraiment ça ?
J'acquiesce un peu septique, pas sûr de savoir si son expression faciale est une façon de se moquer, ou il est réellement étonné.
— Pourquoi ça ne m'étonne pas que tu aimes ce genre de musique toi.
À mon tour, je réprime l'envie de sourire.
Je détourne le regard vers l'entrée du supermarket. Je vois le gérant, Jakub, balancer un seau d'eau sur le trottoir. Je sais qu'il y a une fuite d'eau dans son arrière-boutique depuis quatre jours, et qu'il n'a toujours pas appelé un plombier.
Une nouvelle musique aux tempos afro-caribéens résonne doucement dans la voiture.
J'appuie mon bras dans l'encadrement de ma fenêtre, mes doigts appuient contre ma tempe.
En dehors de la surprise que je ressens à chaque fois que Sage me parle normalement.
Je dois avouer que mes goûts musicaux ont été totalement influencés par Robin.
Quand il est arrivé dans notre famille dysfonctionnelle, c'est par la musique qu'on a commencé à créer des liens.
Je ne lui parlais pas, mais parfois, après que mon père se défoulait sur moi et qu'il n'était plus dans la maison, je venais dans sa chambre. Je me sentais bien avec lui.
En général, lui-même venait de se battre contre Dove pour la énième fois.
Dove et Robin se détestaient, mais moi, il m'a toujours laissé m'asseoir près de sa porte.
Et il ne m'a jamais demandé de partir.
Il mettait tous les classiques de rap, rnb, des années 2000. Je trouvais qu'il chantait bien, mais ça aussi, je le gardais pour moi. En réalité, c'était mes seuls moments de normalité et le petit garçon traumatisé que j'étais l'aimait bien.
— Coupe la musique, ordonné-je en me redressant sur mon siège.
Sage s'exécute immédiatement, je défais ma ceinture et il fait de même que moi. Un homme tenant en laisse un malinois noir qui semble lui obéir au doigt et à l'œil.
C'est lui, c'est Zabójca.
Il pénètre le sklepik. Son chien le tire à l'intérieur, je me demande déjà si je vais devoir abattre son clébard en même temps que mes chaussures raclent le sol mouillé de la pluie qui n'a pas séché depuis.
— Reste ici, ordonné-je.
Mon estomac se serre légèrement, je repère le pick-up de Zabójca, garé juste en face. Mon cœur accélère et je sais que je n'aurais qu'une seule chance contre lui. Pas deux.
Le silencieux longe le long de son corps. Comme à son habitude, Zabójca est seul, et peut-être que c'est l'erreur qu'il n'aurait jamais dû commettre. Mes sens s'affolent alors que je me fonds dans la nuit pour m'approcher de façon traître prêt de son pick-up, ou j'attends cacher au niveau de la benne.
J'entends mon cœur résonner dans ma gorge, une pluie très fine me colle à la peau. Ma veste me gêne, et il y a mille autres lieux où j'aimerais être autre que derrière la voiture d'un mec qui m'a appris à tuer.
Je n'ose pas jeter de regard à Sage, de peur de rater le coche et que je me fasse surprendre par Zabójca, ou son chien.
Les nerfs à vif, j'ose à peine jeter un coup d'œil vers Sage. Sûrement par peur de voir dans ses yeux le reflet de ma propre angoisse. Le silencieux est froid contre la paume de ma main.
Chaque seconde qui s'écoule à l'attendre est un supplice.
Ma bouche est sèche, mes pensées tournent en boucle dans mon esprit.
Soudain, un bruit me fait sursauter. Un chien. Son malinois. Mon esprit me ramène instantanément au lac où j'ai failli mourir à cause de ces putain de clébard.
Je comprends tout de suite qu'il y a un problème lorsque j'aperçois à travers la vitre le chien tirer sur sa laisse, il gronde et semble vouloir contourner la voiture.
Mon cœur bat la chamade alors que je me faufile silencieusement autour du véhicule, collé à mon ombre. Zabójca essaie de calmer son chien :
— Uspokój się, (Calme-toi)
Mais il n'en tient pas rigueur, je n'ai pas le temps de contourner la voiture, car le chien s'échappe, et s'élance vers moi.
Je m'entends hoqueter de surprise, dans un réflexe, je tire sans réfléchir, la détonation étouffée par le silencieux. L'animal s'effondre sur moi, mais Zabójca m'a vu maintenant. Il a déjà sorti son arme, et elle est pointée dans ma direction.
J'écarquille les yeux, mon estomac se serre, mes mains sont moites, mais je ne bouge pas. C'est trop tard.
Le temps semble ralentir, mon regard jongle du canon rivé sur moi, aux yeux noirs du mercenaire. Je compte chaque seconde, en sentant mon co2ur tomber dans mon ventre je me demande s'il n'est pas possible de revoir Papillon encore une fois.
Mais avant que je n'aie eu le temps de comprendre ce qui se passe, la tête de Zabójca est violemment repoussée sur le côté. Son corps cogne contre sur le pare-brise de sa voiture, il s'effondre.
La surprise me fait hoqueter de nouveau, je tourne la tête, Sage, vient de tirer avec son silencieux.
Je ne l'avais même pas vu arriver, je pousse lentement le corps du chien sur moi, dégoûté. Encore sous le joug de l'émotion, j'ai failli y passer, et un sentiment étrange de soulagement s'empare de moi.
Mes prières ont été entendues... Je la reverrais encore une fois...
Mais je ne ressens ni joie ni victoire, juste une pause momentanée dans cette vie de guerre...
Un instant, nos regards se croisent. Les yeux de Sage sont durs dans les miens, et je suis incapable de comprendre si c'est de l'inquiétude ou de la colère. Mais il me redresse, me prenant fermement par le bras.
— On est grillé ici, dit-il d'un ton calme.
En pleine rue, sans le moindre soin pour la discrétion, nous entassons Zabójca et le chien dans le pick-up.
Il n'y a pas de temps à perdre.
Nous devons nous rendre à la villa de notre père et surtout ne pas se faire prendre maintenant.
Je suis couvert du sang du chien. L'odeur métallique me donne la nausée, un écœurant rappel de ce que je suis. Un assassin.
Silencieusement, je m'essuie le visage avec un bout de ma manche qui n'est pas taché, essayant d'effacer les traces de cette sale soirée.
Une pensée traverse mon esprit. J'avais dit à Sage de rester dans la voiture. Je veux le lui rappeler, mais je ne peux pas. Sans lui, je serais mort.
Le véhicule fonce à travers le quartier résidentiel où notre père juge bon de tromper Nathalie.
Non pas que cette femme me fasse de la peine, mais son appât, du gain l'a poussé à accepter toutes les frasques d'Aaron King.
Après une éternité de silence, la voix de Sage se fait entendre :
— C'est cette maison.
Je tente d'apercevoir au-delà du gigantesque portail qui l'entoure. Le ciel ne me facilite pas la tâche.
Je décide de me garer le long de la route.
— Normalement, il est seul. Il n'emmène que Zabójca, ici, continue Sage.
J'acquiesce silencieusement, coupant le moteur. Une boule immense commence à se former dans ma gorge. Mon corps se raidit, je n'ai pas envie d'y aller, mais je ne peux plus reculer, pas maintenant.
Nous sortons du véhicule.
Le froid de la nuit me fait frissonner. Je me dirige vers la benne du pick-up, fouillant les poches du cadavre de Zabójca pour récupérer les clés. Mes doigts rencontrent le froid du métal. Les clés du parking.
Sage et moi échangeons un regard lourd de sens.
Dans nos yeux, une compréhension silencieuse. Il n'y a plus de retour possible maintenant.
C'est une réalité qui nous pèse à tous les deux, je le vois dans ses yeux autant que je le ressens dans mon ventre, mais nous avons choisi cette voie, tous les deux.
Il est temps de l'emprunter jusqu'au bout.
— T'es pas obligé de faire ça, Sage, soufflé-je à Sage.
Il rive son regard sur moi, ses yeux me montrent qu'il n'a aucunement l'intention de me laisser en plan :
— J'aurais dû être à tes côtés depuis le début. Arrête d'essayer de me protéger.
Je réalise que je ne reconnais plus l'homme devant moi.
Je ne suis même pas sûr de l'avoir connu un jour, mais je sais qu'autant Sage que moi avons changé tous les deux.
Il nous aura bien fallu plus d'une décennie pour enfin trouver un terrain d'entente, pour sentir le vent du changement souffler entre nous.
Et maintenant, je ne veux pas perdre cette chance.
J'ai déjà perdu notre petite sœur. Je ne veux pas revivre ça.
Alors, je hoche la tête et sors mon silencieux.
— Allons-y, murmuré-je en refermant la ridelle du pick-up avec un claquement sourd.
Je dépasse Sage. Dans le silence glacial qui annonce l'approche de la mort, nous descendons la rue vers l'entrée du parking privé.
Le bruit d'un clic résonne dans la nuit lorsque j'appuie sur le bouton. Lentement, lourdement, le portail du parking commence à s'ouvrir. Une tension malsaine s'installe dans l'air alors que Sage et moi, nous franchissons le seuil. Au fond de moi, je sais que c'est probablement la dernière fois que je vois mon père en vie.
Le silence de l'immense propriété est presque assourdissant. Nous traversons le sous-sol, grimpant prudemment vers les étages. Pas un garde en vue.
Sage disait vrai, mis à part Zabójca, personne ne surveille le vieux.
Soudain, un cri de femme brise le silence, suivi d'un rire criard et du bruit d'eau éclaboussée. On dirait le son d'un plongeon. Je fronce les sourcils, avançant le long d'un large couloir orné de tableaux qui coûtent probablement des millions de dollars.
Le rire résonne encore, puis une voix féminine hurle :
— Aller saute avec moi Aaron ! Regarde, il ne fait rien !
Le monde autour de moi semble devenir plus réel, plus vif.
Je sens l'odeur de l'eau de piscine se mêler à celle de l'herbe fraîchement coupée.
L'acier froid de mon silencieux se fait de plus en plus présent dans ma main tandis que je me rapproche du couloir.
Au détour, Sage et moi tombons sur une scène grotesque : notre père, deux fois plus vieux que nous, se prélasse avec une gamine à peine sortie de l'adolescence...
Un hurlement aigu perce l'air quand elle nous voit.
Instinctivement, Sage et moi levons nos armes. Mais c'est trop tard, nous sommes repérés.
En une fraction de seconde, notre père se retourne, utilisant la fille comme bouclier. Les balles l'atteignent malgré nous.
— Bande de petits fils de pute ! hurle-t-il sa rage qui se mêlé au fracas des tirs.
Il se réfugie derrière une colonne de marbre qui trône autour de la piscine, puis sort un glock de nulle part et commence à nous tirer dessus.
— T'es qu'un putain de traître, Sage ! Un putain de traître ! Quand j'pensais que t'avais plus de couilles que tes frères, tu ne vaux pas mieux qu'aucun d'entre eux ! Tu vas me le payer petit bâtard ! Merde ! Je t'ai raté toi aussi !
Le son de sa voix est presque noyé par les détonations.
Je me cache derrière un canapé, jetant un regard à Sage à côté de moi. Il baisse légèrement la tête, un mélange de résignation et de détermination peint sur son visage.
Tout autour de nous, le monde semble toujours plus en feu...
Les mots de notre père le blessent très certainement.
Chaque insulte déchire le silence presque aussi efficacement que les coups de feu.
— Sors d'ici, Sage, lui dis-je urgemment.
Il me fusille du regard.
— Ferme ta gueule, Côme. J't'ai dit d'arrêter de faire ça. On en finit maintenant avec ce gros lard !
Les mots de mon frère me glacent le sang.
C'est maintenant ou jamais. Soit notre père, soit nous. Quelqu'un va mourir ce soir, et je compte bien faire en sorte que ce ne soit pas nous.
Je me redresse légèrement et évalue mes options. La piscine n'est pas loin. Je signe rapidement à Sage, utilisant la langue des signes :
— Tu vas à gauche, je vais à droite, on l'encercle et on le bute.
Il acquiesce d'un signe de tête et ensemble, nous commençons à tirer vers notre père qui réplique en visant principalement Sage.
J'essaie de le dissuader en me frayant un chemin à travers le salon. Sage riposte également, mais soudain son arme s'enraye, j'entends un coup de feu exploser parmi les balles que je tire, et mon frère tombe lourdement sur le dos.
Je sens un cri déchirer ma gorge, son nom résonne dans l'air.
— Sage !
Mon cœur bat à tout rompre alors que je me précipite vers Sage, ignorant les balles qui sifflent près de mes oreilles. Je peux entendre le son déchirant des projectiles qui se logent dans le mur derrière moi.
Enfin, j'atteins mon frère. Son bras est peint en rouge vif. Sans réfléchir, je le tire derrière le canapé pour nous abriter.
— Vous êtes que des bons à rien ! J'pourrais vous buter tous les deux ! Et putain de merde, qu'est-ce que je vais dire à ta mère, Sage putain ! Vous êtes à peine capables de réussir votre coup correctement !
— Sage ? L'appelé-je en tapotant ma paume contre son visage pâle.
— J-J'ai rien, j'ai rien, murmure-t-il, mais son expression trahit la douleur.
Je déchire sa chemise blanche et une plaie béante se révèle sur son bras, une balle l'a effleuré. Le tissu est déchiqueté, mais il respire encore, c'est tout ce qui compte.
— C'est rien, tu vas t'en tirer, lui assuré-je d'une voix précipitée.
Avec un morceau de sa chemise, je comprime la plaie, essayant de contenir l'hémorragie.
— T'occupe pas de moi, bute ce fils de pute ! me lance-t-il.
Je me redresse prudemment et aperçois notre père qui court vers une autre colonne. Mon index contre la détente ne cesse de faire cracher ces balles qui fusent vers lui.
Mais alors que je vise sa tête, mon silencieux s'arrête dans un bruit sec : plus de balles.
— Fait chier, craché-je, les dents serrées.
J'attrape un opinel dans ma poche.
— Plus de balles. Plus de frère pour t'aider. Qu'est-ce que vous avez au final si ce n'est mon nom, mon argent, ma réputation ? ricane notre père.
Je fais glisser Sage et moi-même vers un autre abri. Sans balles, chaque instant est un potentiel arrêt de mort.
— Je t'avais dit qu'un jour je reviendrais, lancé-je d'une voix aussi tranchante que possible. Mais la vérité c'est que je ne suis pas rassuré.
Je nous déplace lentement, espérant m'approcher de lui.
Je voudrais croire à ma diversion, mais c'est lui qui m'a tout appris. Il n'est pas du genre à se laisser tromper.
— Revenir pour moi ? J'aurais dû te laisser dans cette poubelle où je t'ai jeté quand t'étais un gosse, crache-t-il.
Je continue à changer de position avec Sage, reculant derrière des meubles. Une balle siffle près de nous, mais on arrive à se réfugier à temps.
Sage me fixe, questionnant silencieusement. Il n'était pas au courant de cette histoire. Il n'était même pas encore né.
Je me souviens de cette soirée où j'ai commis l'erreur de venir à table sans m'être douché. J'avais passé la journée dehors, seul d'ailleurs. Je m'étais amusé et mes baskets avaient ramassé un peu de boue. Je frissonne rien qu'à la mémoire du châtiment qui avait suivi.
Ce souvenir déchire un peu ma concentration.
Je me souviens encore de cette odeur de boue sur mes baskets, qui avait rempli la salle à manger. Mon père avait détesté ça. Nathalie avait renchéri, en disant que j'étais bien le fils de ma mère.
Sauf que maman venait de mourir brûlée dans cet incendie qui ne fait toujours pas sens à mes yeux. Sa remarque avait déchiré ma poitrine au point ou je lui avais répondu d'aller se faire foutre. Je donnerais tout pour revoir son air outré et horrifié sur son visage ce jour-là.
Sauf que cette sorcière avait suggéré à mon père qu'un petit garçon comme moi n'était bon qu'à jeter à la poubelle. Et c'est ce qu'il a fait.
Je ne me rappelle encore du son de mon corps heurtant le métal froid de la benne à l'extérieur de notre maison.
C'était la dernière fois que je pleurais en la présence de mon père. Les coups qui avaient suivi m'avaient appris à ne plus jamais pleurer devant lui.
— Pourquoi tu nous as fait ? craché-je emplis d'amertume.
Je ne voulais même plus lui poser de questions, mais à ce stade, j'ai besoin de comprendre comment on en est arrivés là.
Avec Sage, on continue de changer de position, se rapprochant de la piscine. Les colonnes derrière lesquelles nous nous cachons sont froides et rugueuses sous mes mains.
L'eau de la piscine scintille d'une lumière surnaturelle dans l'obscurité. Mais... Ce n'est pas le pire. Je remarque dans l'eau un grand requin blanc nager de façon circulaire dans l'immense piscine derrière nous...
— On ne choisissait pas d'avoir des gosses en mon temps. On respectait les traditions, et on faisait en sorte que la famille tienne, raconte mon père en sortant parfois son visage pour nous surveiller.
Il sait que je pourrais viser ce couteau en plein dans sa gorge.
— La famille, murmuré-je avec sarcasme.
Le mot se perd dans l'air tandis que mes yeux se posent sur le couteau que je tiens dans ma main. Une lame froide et tranchante, comme le souvenir de la violence de mon enfance.
— Ouais... Cette famille, tout ce que je demandais c'était des fils pas trop cons pour assurer que ces business tiennent, et tout ce que vous avez fait, c'est ruiner cet empire, une erreur après l'autre, accuse-t-il.
— C'est à cause de toi que personne ne croyait en cette famille. T'as tout détruit avant même que ça commence. T'as pas laissé de chance à Dove, ni à moi, ni à Sage, répliqué-je avec colère.
Mon père se met à rire, un rire glacial qui résonne dans la nuit.
— Ton frère risque de mourir à tout moment, et t'étais aussi insolent que ta mère. J'ai cru en Sage, jusqu'à ce que tu me trahisses toi aussi en venant chez moi pour me buter !
— J'ai tout fait pour te satisfaire !
— Ouais, comme enlevé cette putain de Díaz alors que je t'avais dit que ça allait nous créer que des emmerdes ! T'as détruit mes commerces en provoquant son frère, ta buter son frère, merde ! T'as jamais rien écouté de ce que je te disais, petit merdeux !
Je ne m'y attends pas, mais je vois soudainement mon père du coin de l'œil, il lève son arme, mais je réagis juste à temps. Je frappe violemment ses poignets, lui faisant dévier sa trajectoire. L'arme tombe à nos pieds, dans un bruit métallique.
Mon père a beau avoir la cinquantaine, il est encore doué en arts martiaux. Il me donne un coup violent dans la torse, je sens mon souffle se couper net, mes genoux heurtent le sol avec une violence sourde.
Je sais que je n'ai pas beaucoup de temps avant qu'il ne prenne le dessus.
Les mots de Mariposa résonnent dans ma tête :
"Tu n'es pas le seul à avoir peur de ton père."
Et en cet instant, je suis tellement terrifié à l'idée qu'il reprenne le contrôle sur moi, que je me dis que je dois à tout prix mettre fin à ça.
Par miracle, je réussis à planter mon couteau dans la cuisse de mon père, seulement vêtu d'un maillot de bain et d'un peignoir. La situation est si ridicule que j'en viens presque à avoir envie de rire.
Je n'aurais jamais pensé en arriver là avec lui.
Quand mon père grogne de douleur, je me laisse aller à la violence comme j'ai tellement l'habitude de le faire. J'oublie une part de moi, celle qui est sensible, celle qui sait que Mariposa n'aimera pas voir ça. J'oublie le sang qui me gicle au visage et qui se répand le long de sa jambe et éclabousse sur ma paume.
J'ai toujours eu horreur de ça.
Le sang.
Et avant que je ne puisse le réaliser, j'ai planté mon père dans la cuisse une quinzaine de fois. Je le vois se tordre de douleur, le bruit sourd de son corps qui heurte le sol me rappelle que c'est bien réel.
J'ai planté mon propre père.
Mon père recule et je sens que je suis trempé de sueur, essoufflé. Je le regarde geindre, effrayé par moi pour la première fois de ma vie. Je me redresse lentement, ma main ensanglantée glisse sur la colonne de marbre froide.
Ma respiration est à peine audible, je suis en état de choc.
C'est terrifiant de voir son propre père totalement terrorisé par son fils.
— Comment... comment tu peux oser ? balbutie-t-il.
Aaron recule davantage et je me sens déconnecté de la réalité. Sage me rejoint, se tenant le bras, il semble presque au bord de l'évanouissement. Des cernes de fatigues creusent son visage. Il faut qu'on traite son bras rapidement.
— C'est moi qui vous ai fait, gronde Aaron.
— Tu nous as ratés, rétorqué-je. Et parce qu'on a eu un père comme toi, on a dû apprendre à vivre.
Aaron se tient la cuisse, son sang coule à flots.
— Je t'ai donné un toit, une réputation. T'as pu coucher avec suffisamment de filles pour repeupler toute l'Amérique. T'as vécu dans le luxe grâce à moi ! s'écrie-t-il.
— Tout ce que je voulais, c'était que tu n'enterres pas ma mère sans moi, et que parfois, tu me parles d'elle. Au lieu de ça, t'as passé ta vie à me faire comprendre que je n'aurais jamais dû exister.
Aaron gémit et essaie de reculer lentement. Je le regarde faire, un sentiment de victoire sombre et mélancolique m'envahit. Pour une fois, j'ai l'impression d'avoir le contrôle. Il respire grossièrement, je vois qu'il transpire à grosses gouttes, et sa paume ne quitte pas sa jambe que j'ai déchiquetée.
— Quoi... C'est comme ça que tu parles maintenant ? T'avais besoin d'amour et de câlin ! Putain, je t'ai donné tout pour qu'on te respecte ! T'as enlevé cette gonzesse et tu penses que tu pourras la sauter et avoir des gosses avec elle ? T'es qu'un taré, Côme, les gens comme nous... Ils finissent comme moi. Trahis par leur propre fils.
— Quand toi, tu t'es assuré que je ne sois que des petits morceaux abîmés, elle a rassemblé les bouts de moi-même, même ceux que je haïssais le plus en moi. Elle m'a fait comprendre que je comptais, en tant que personne. Je n'étais plus un soldat, juste moi. Alors... Oui, quand je l'ai rencontrée, j'ai très vite compris que si j'ai un enfant avec elle un jour, il n'aura jamais à se sentir aussi déchiré que moi.
Mon père me regarde avec un tel dégoût que pendant un instant, j'ai presque l'impression que ça s'apparente à de la jalousie...
Peut-être qu'au fond de lui... Tout ce qu'il voulait, c'était que quelqu'un lui fasse sentir qu'il est plus qu'un portefeuille, une réputation, un chef de mafia...
— Sage... interpelle mon père, même toi ? Toi aussi tu me tournes le dos.
Je regarde mon petit frère et je réalise à quel point nous nous ressemblons. Je ne dis rien, je fixe simplement mon père avec une haine froide.
— Quand Ania est morte, j'aurais préféré que tu m'enterres avec elle, murmure Sage.
Ses mots me frappent comme un poing dans l'estomac, un malaise sourd m'envahit. Je ne sais pas encore jusqu'où notre père a abusé de lui. Mais je le fixe en essayant de capter les expressions brisées de son visage.
— CÔME, ATTENTION !
Je tourne la tête et, par réflexe, je lance vivement l'arme dans la gorge de mon père.
Son bras retombe et je remarque qu'il allait sortir une arme de je ne sais où.
Très vite, l'instant qui suit, je vois mon père suffoquer, ses mains se portent à sa gorge. Un sentiment de nausée m'envahit, s'intensifiant lorsque mon père tombe lentement à la renverse.
Son corps heurte violemment l'eau de la piscine, nous éclaboussant. L'eau se teinte de rouge. Et il ne faut pas longtemps avant que le grand requin blanc se jette sur lui. Sage et moi assistons à une agitation macabre dans l'eau. Des lambeaux de chair se déchirent et flottent à la surface.
Ça dure pendant de longues minutes. C'est révoltant, mais je n'arrive pas à détourner le regard. C'est comme si une partie de moi avait besoin de voir la fin de cet homme, de ce monstre qui nous a tant fait souffrir.
Mes mains tremblent. Une nausée incontrôlable s'empare de moi, suivie d'une migraine perçante. Je sens la main de Sage se poser sur mon épaule.
— C'est fini... On s'en va, murmure-t-il.
Je m'étais toujours dit qu'un jour, je le tuerais.
Je ne pensais pas que ça arriverait comme ça.
Guidé par Sage, je le suis jusqu'au garage par lequel nous sommes rentrés. Je prends les clés d'une Audi suspendue sur le mur en même temps que je vois des bidons d'essence sont alignés au sol.
Sans réfléchir, j'en prends un et je commence à répandre l'essence dans le garage, laissant une traînée jusqu'à l'extérieur. Je me sens étrange, comme si je flottais hors de mon corps. Un vertige intense m'envahit, j'ai l'impression que je peux tomber dans les pommes à tout moment.
— T'as du feu ? demandé-je à Sage en essayant de reprendre mon souffle.
Sage hoche la tête et sort son briquet, accompagné d'un paquet de cigarettes. Il tend le briquet vers moi, mais je prends aussi le paquet de cigarettes. Il en reste deux. Deux cigarettes pour deux frères. Sur le coup, je ne pense plus à rien qu'à la fumé pour essayer d'oublier cette nuit cauchemardesque.
Je prends les cigarettes, en offre une à Sage que je place entre ses lèvres. Je fais de même. J'allume d'abord celle de Sage, puis la mienne.
Nous restons plantés là, dans la demeure de notre père, fumant en silence. La fumée s'envole vers le ciel, et je lève les yeux, espérant un pardon pour mes fautes.
J'ai l'impression d'être en enfer.
C'est l'enfer sous ma chair, et dans mon cerveau, j'espère ne pas tomber dans la folie.
Au bout de quelques minutes, je tire une dernière bouffée sur ma cigarette. Je croise le regard de Sage, et ensemble, nous jetons nos cigarettes sur la traînée d'essence.
Nous regardons les flammes s'intensifier et suivre leur chemin jusqu'au garage, reculant lentement tandis que l'incendie gagne en ampleur.
Sans un mot, nous quittons finalement les lieux.
Nous récupérons la Audi.
Le silence reste notre seul compagnon, en dehors de Sage et moi, c'est le seul témoin silencieux de cette nuit de rédemption et de destruction.
On arrive en bas de chez Robin au bout de presque deux heures de conduite.
Je coupe le contact, mais aucun de nous ne bouge. On reste là, comme ça, pendant de longues minutes avant que je ne parvienne finalement à dire :
— Sashæ pourra t'arranger ça.
Je parle de la blessure que Sage a sur le bras. Il ne répond pas, un nouveau silence s'installe.
Quelques minutes plus tard, c'est Sage qui brise ce silence :
— Il m'a obligé à tirer sur Alexander.
Je tourne la tête vers lui, choqué.
— C'était des balles à blanc. Mais je n'en savais rien. Je devais lui prouver ma loyauté.
Je sens une nausée croissante. Le malaise s'accentue encore plus en moi.
— Au début... J'ai pas réussi. Mais... J'ai dû le faire. Alors... j'ai tiré...
Je baisse les yeux sur mes mains tremblantes. Le poids de ses paroles s'ajoute à la lourdeur de cette soirée.
— Ça n'a plus jamais été pareil avec Alexander après ça. Et je le comprends, je ne lui en veux pas. Mais il n'a plus confiance en moi. J'aurais réagi comme lui si ça avait été moi.
Je m'éclaircis la voix. Je ressens la tristesse accablante de Sage. C'est plus que des mots, c'est une douleur sourde qui résonne entre nous.
— C'est mon meilleur ami, ajoute-t-il. Il a toujours été cool avec moi depuis que j'suis tout petit.
Je me pince les lèvres. J'ai horreur de la sensation que ses mots me font. Je crois que ça me fait mal de voir mon frère si brisé et j'aimerais trouver une solution mais je n'en ai pas.
— Et je l'ai trahi. Je ne comprends même pas pourquoi il est toujours loyal envers notre famille... malgré tout.
J'expire longuement. Je n'ai pas de réponse à cette question. Un nouveau silence de quelques secondes s'impose, puis Sage reprend :
— Combien de temps sommes-nous censés nous détester encore ?
Je tourne la tête vers lui :
— Je ne t'ai jamais détesté.
— À un moment, j'ai pensé que si.
— Je n'ai jamais détesté aucun de vous. Je déteste ta mère, mais elle n'a rien à voir avec toi.
Sage baisse les yeux, il a l'air gêné. Il pince les lèvres et pour la première fois, son visage semble brisé.
Mais je suis saisi lorsque j'aperçois une seule larme silencieuse glisser le long de la joue de mon frère.
Sage tente de garder contenance et l'essuie rapidement en reniflant discrètement. Je ne sais pas quoi dire. C'est un truc qui n'est jamais arrivé avant ce soir. Et je me rends compte que je n'ai aucune idée de comment je suis censé faire lorsqu'il s'agit de mes frères.
— C'est grâce à Papillon, c'est ça ? Tu ne m'aurais jamais dit ça avant elle.
Pour un moment, un micro sourire se dessine presque sur mon visage. Le fait que Sage n'ait toujours pas retenu qu'elle ne s'appelle pas Papillon me donne envie de sourire. Puis je réfléchis.
C'est vrai que je n'ai jamais été un grand bavard. Et encore moins du genre à rassurer les gens sur la façon dont je les considère. Mais d'une certaine manière, elle m'a forcé à tout avouer.
— Je suppose... dis-je finalement.
— À mon avis, si c'est vraiment sérieux, tu devrais l'emmener loin d'ici. Loin de ce pays.
Je résiste presque à l'envie de toiser Sage. Depuis quand me donne-t-il des conseils en matière de filles ?
— Ne gâche pas tout. Je l'aime bien et ça me ferait chier que tu la perdes encore une fois.
Je suis choqué une fois de plus. Je détourne le regard vers la route.
— Moi aussi.
Je l'ai murmuré, mais je sais que Sage a entendu. Je sens une honte et une gêne prendre le dessus sur moi. Je ne veux pas paraître aussi sentimental devant lui.
— Rentrons, il faut que tu soignes ça.
Je sors de la voiture. Sage en fait de même. Les portières claquent. Nous marchons tous les deux vers la maison. J'ouvre la porte d'entrée, la maison est plongée dans le noir.
Nous montons tous les deux à l'étage, et nous nous séparons au niveau des escaliers mais je regarde mon petit frère partir et toquer à la porte de la chambre de Sashæ.
Je me dirige finalement vers le dressing où je prends des vêtements propres, et je vais me doucher directement.
J'ai passé probablement une heure sous la douche à me hanter par l'image de mon père se faisant déchiqueter. À ressasser tous les coups qui ne sont plus que des souvenirs et pourtant, ils restent gravés à ma peau et me tétanise toujours autant...
Quand je sors de la douche, je ne me regarde pas dans le miroir. Je ne veux pas me faire face. Je me rhabille, d'un pantalon et d'une chemise, parce que je sais que je ne vais pas dormir.
En sortant de la salle de bain, je passe par le dressing ou Robin a vraiment installé un lit pour moi.
Je vois Sage allongé sur mon lit, complètement endormi, un nouveau bandage sur le bras. Je fixe mon frère un moment. Et je sens vraiment que quelque chose a changé entre nous...
Je descends finalement et m'affale sur le canapé.
Pendant de longues secondes, je fixe la télé éteinte devant moi.
Je repasse tout ce qui vient de se passer en revue, essayant de me souvenir des bons moments avec mon père qui justifieraient que je n'arrive pas à éprouver de la haine envers lui.
Qui justifierait que je n'ai pas autant horreur de moi pour ce que je viens de faire. Qui justifierait pourquoi je ressens un manque. Pourquoi je voudrais le revoir, lui parler, de quoi ? Je n'en sais rien...
Je me sens dépossédé de moi-même pour l'acte que je viens de commettre. Et pourtant, je l'ai déjà fait... j'ai déjà tué sans aucune pitié. Je ne comprends pas pourquoi maintenant ça compte quand avant rien n'avait de sens.
Maintenant, je me sens coupable d'une vie. J'éprouve d'immenses regrets pour avoir tué quelqu'un, mon père qui plus est.
Mes pensées sont interrompues par le craquement de l'escalier en bois. Je relève la tête et tombe sur Mariposa.
— Tu ne dors pas ?
C'est tout ce que j'ai réussi à lui dire après deux semaines sans Papillon.
Ma voix a légèrement craqué en articulant ces mots, je me redresse de ce canapé sur lequel je me suis littéralement affalé. Je m'éclaircis la voix en rivant mes yeux dans les siens.
Pendant un moment, j'ai peur que le sang de mon père sur mes mains me rende totalement insensible. À tout, à elle.
Mais je réalise qu'à la seconde où elle est là, les émotions que je gardais en moi ressortent à la surface. Elle ne me quitte pas des yeux, et tout ce que mon corps ressent c'est cette envie de vomir constante.
Je n'aurais pas pensé ressentir un tel mal-être intérieur après cet acte. Les images me hantent d'ores et déjà, je n'ose pas imaginer ce qui se passe dans la tête de Sage. Mon ventre se tord, et j'ai du mal à avaler ma salive, j'ai l'impression que mon œsophage me brûle.
Je pensais vraiment que ça me libérerait de lui.
Au contraire.
Ça m'a lié encore plus à lui.
Mariposa descend les dernières marches.
J'inspire un bon coup profondément en la regardant s'approcher de moi. Je n'ai pas réussi à vraiment sourire mais en baissant les yeux sur ses jambes, c'est mon pantalon de pyjama que je vois.
Je lève la tête.
Elle se place devant moi et instinctivement, mes paumes se lèvent pour se glisser dans les siennes.
Mariposa est froide.
Mes mains brûlent.
Ce parallèle entre King et Diaz ne cesse donc jamais ?
Pourtant, ce sentiment d'être son opposé me donne toujours plus la sensation de la compléter. Le froid de ses doigts me ramène sur terre et j'espère que ma chaleur l'emmène très loin d'ici.
— Tu l'as fait...
Sa voix est douce, et elle l'affirme comme si elle l'avait vu dans mes yeux.
Je n'ai même pas besoin de lui dire que mon père est mort. Je n'ai pas besoin de lui dire que c'est moi qui l'ai fait. Je sais qu'elle le sait déjà...
Ce n'est pas la première fois, mais parfois, je suis incapable de soutenir ses iris noisette, alors je baisse les yeux en premier.
J'ai un sérieux sentiment sordide qui s'immisce sous chaque parcelle de ma chair. Je crois que je me déteste un peu plus chaque seconde de ne pas parvenir à supporter mon acte.
Mon crime me ronge ce cerveau et me donne cette envie de me noyer dans du noir. Me perdre dans autant de désespoir que de colère.
Pourtant... C'est ce pour quoi j'ai été fait. Une simple machine à tuer qui n'arrive plus à supporter le sang sur ses mains ? L'ironie de ma situation me fait me demander quel est le chemin exact de mon destin... ?
Une pression sur mes paumes m'incite à me redresser, elle tire sur mes bras, et fini par m'entourer des siens. Debout, devant elle, je la dépasse et maintenant c'est elle qui lève la tête pour me regarder.
— Tu veux écouter de la musique triste avec moi ? me demande-t-elle d'une voix douce.
Je fronce les sourcils, je ne m'y attendais pas.
— Dehors ? me précise-t-elle.
Ma tête s'incline avec une expression intriguée.
— Écouter de la musique... triste ?
Elle hoche la tête avant de poursuivre :
— Tu sais... Je me dis que... Une fois que la musique sera finie, peut-être tu réaliseras que tes cauchemars sont finis eux aussi... C'est fini Côme, tu n'as plus à avoir peur de lui... Tu réalises ?
Décrire ce qui se passe au niveau de ma poitrine me bouffe tant que j'ai l'impression qu'elle me l'ouvre de ses mains et m'oblige à sentir qu'elle garde mon cœur entre ses doigts.
La sensation gonfle autant ma gorge qu'elle me tétanise.
Je ne réalise rien.
Pas encore. Le choc est encore trop violent et mon corps n'a pas encore choisi son moment pour me faire comprendre à quel point j'ai gravement péché...
Alors je finis par hocher la tête pour accepter sa proposition.
Mariposa enlève ses bras autour de moi, et elle sort de la ceinture de son pantalon de pyjama un petit téléphone portable qui m'a l'air de dater des années 2000. L'appareil est emmêlé par le fil blanc des écouteurs.
Elle l'a caché là comme si c'était une arme à feu, et sur le moment, ça me donne envie de me laisser aller à ce moment de légèreté.
Mariposa me guide par le bras vers la porte d'entrée. Tous les deux, on enfile des manteaux qui pendaient sur le meuble, elle glisse ses pieds dans des sortes de crocs blanches, tandis que je renfile mes chaussures.
L'air frais se colle à mon nez à la seconde ou Mariposa ouvre la porte d'entrée.
Le sol est un peu humide, mais ce n'est rien comparé à tout à l'heure.
Je prends les premières clés que je vois dans le porte-clés et referme la porte d'entrée derrière moi.
Je n'ai pas le temps de descendre une marche que Mariposa s'arrête devant moi. Je regarde ses doigts démêler des fils blancs.
Et sur le moment je réalise qu'il n'y a rien d'autre que cette femme pour me rendre la vie simple.
J'ai des images de mes actes qui semblent s'effacer devant ce nez trompette et cette façon qu'elle a de froncer les sourcils alors qu'elle est concentrée à démêler ces écouteurs. Il a une paix intérieure qui m'abrite quand elle y arrive, et qu'elle lève le bras pour enfoncer un écouteur dans mon oreille tandis qu'elle place l'autre dans la sienne.
— Tu veux choisir ?
Sa question me paraît tellement anodine que j'arrive à peine à croire que je ne viens pas de ce monde de normalité, ou une femme peut simplement écouter de la musique avec un homme.
Sur le moment, j'ai presque envie qu'elle me rappelle à quel point je suis un monstre...
Même si mes yeux ne la voient pas comme telle, je me souviens qu'elle en est parfois un elle aussi.
Elle comprend.
Le moment me paraît irréel.
— La musique je veux dire, me précise-t-elle ce qui me sort de mes pensées.
Je ne peux pas oublier qui je suis.
— Choisis quelque chose pour nous, répliqué-je en enlevant doucement une boucle devant son front.
— D'accord, articule-t-elle en hochant la tête.
Je la regarde sélectionner une musique sur ce téléphone qui m'a l'air de dater du siècle dernier. Je me demande même où elle a déniché ça. Et l'idée qu'Amber pourrait garder ce genre d'antiquité me paraît la plus probable.
La seconde qui suit, les premiers beats de la musique s'immiscent dans mes oreilles. Mariposa glisse son bras autour du mien et m'incite à descendre les marches du perron de la maison pour marcher le long de la route.
L'air est glacial, Noël approche.
Ce qui signifie que l'anniversaire de la mort d'Ania approche également...
Nos pas laissent de légers sons à cause du sol mouillé.
La marche est lente, douloureuse... Je la laisse me guider pour ce soir, en osant à peine dire ou faire quoi que ce soit.
C'est peut-être bien la première qu'elle se laisse aller avec moi depuis que nous sommes rentrés du Vénézuéla.
C'est la première fois qu'elle me montre...
Que je compte, pour elle.
Bleeding Love, de Leona Lewis.
Je n'aurais pas mieux choisi. Mes jambes sont flageolantes, je sens mes mains trembler. Les contractions que font mon cœur sont de moins en moins supportables. Je sens que mon souffle devient de plus en plus étouffant.
Je me revois pousser mon père dans l'eau, l'eau prend la teinte de sa vie qui s'échappe lentement de son corps. Et bientôt, les images macabres de son corps se faisant déchiqueter par ses propres caprices de milliardaire me reviennent par flashs.
Je sais que la journée de demain sera pire que celle d'aujourd'hui.
Je sais que la nuit de ce soir sera cauchemardesque.
Sa mort me hante, et je me hais de ne pas le détester.
Cet homme a détruit toutes onces d'humanité en moi et pourtant...
— T'es pas obligé de parler tu sais, mais...
La voix de Mariposa me ramène un tant soit peu sur terre. J'ai la gorge gonflée et mes pas deviennent de moins en moins assurés.
— Mais... Tu m'écoutes toujours toi, et... Si tu veux... Tu peux en parler...
Un banc au bord du chemin attire mon attention.
Je dois juste m'asseoir.
La faiblesse qui s'empare de mon corps me fait halluciner.
Juste m'asseoir une seconde.
J'entre dans une sorte de désillusion et je trouve place sur le siège. Mariposa reste debout quelques secondes avant de s'accroupir devant moi. Ses paumes se croisent sur un de genoux tandis que je n'arrive rien à articuler.
Je ferme les yeux en sentant ma bile remonter et brûler le long de ma gorge. Je ferme les yeux parce que la quantité d'émotion qui monte en moi est en train de me démolir et j'ai peur que la regarder empire tout.
Je ne veux pas exploser devant elle, et honnêtement, je ne m'en donne pas le droit.
L'écouteur est miraculeusement toujours dans nos oreilles, tandis que j'entends les paroles me dire que je saigne sûrement de l'amour d'un père qui m'a laissé une cicatrice ouverte sans prendre la peine de la refermer, je sens mon souffle se coincer.
La panique prend le dessus alors que je n'ai pas envie de céder à une énième crise de tétanie. Je sens les mains de Mariposa voyager le long de mes bras.
— J'avais pas le choix, murmuré-je dans un souffle.
Je sens ses mains sur mes joues. Toujours aussi froides. Et pourtant... C'est dans cette glace que je me sens comme à la maison.
— Je sais ce que tu as fait. Mais tu as vécu toute ta vie en pensant que tu étais en train de brûler, et ce feu s'éteint aujourd'hui Côme... Il ne te lèvera plus jamais la main dessus.
J'ai senti mes sourcils se tortiller de douleur.
Ma boule dans ma gorge devient plus lourde, et je ressens encore ces coups contre ma peau d'enfant. Je revois les silences qui suivaient mes pertes de conscience. Ma peur du noir. Revoir ma mère en flamme. Nathalie. Être propre, passer des heures sous l'eau froide. Bien se tenir. Être présentable. Les premières armes dans mes mains.
Mon premier meurtre.
Le dernier.
— C'est fini, prononce-t-elle d'une voix basse.
Et j'ai du mal à y croire.
Mais mon père est mort. Sa maison n'est plus que ruine et cendre.
Son seul héritage sont ses fils.
Des fils qui le haïssent autant qu'ils ne l'oublieront jamais.
— Comment les gens comme nous sont supposés vivre, Mariposa ?
La question dépasse mes lèvres sans vraiment que je ne le veuille. Mais je brûlais d'envie de la lui poser.
Elle prend un moment avant de me répondre, je sens ses pouces sur mes paupières, ce qui me fait finalement ouvrir les yeux pour les plonger dans les siens.
Je dois déglutir un peu pour admirer ce visage sans me sentir trop submergé pour agir bizarrement.
Et finalement, elle prononce :
— J'ai l'impression que... certains d'entre nous ont la vie dure, pour que nous puissions raconter notre histoire à quelqu'un, et les aider à grandir à travers nos cicatrices. Je crois qu'il y a quelque chose d'atrocement significatif dans ces souffrances.
Sa réponse me laisse sans voix pendant un moment.
— Je sais que ça fait mal, et je ne sais pas comment on vit avec, mais je sais comment ont grandi avec, et, c'est toi à travers tes promesses, qui m'a fait comprendre qu'il ne fallait jamais abandonner...
— Je veux juste... faire une pause...
Le sang de mon père que j'ai sur les mains me fait me haïr toujours un peu plus. Mais je n'ai pas réussi à l'articuler devant elle.
Mon cœur se compresse, de douleur de choc, peut-être ?
Et je me mets à penser que Robin avait raison depuis le début, tuer mon père allait juste me détruire un peu plus.
Les derniers tempos de la musique s'arrêtent lentement. Les derniers mots me disent que je continuerais de saigner.
— Je sais, murmure-t-elle enfin en enlevant les écouteurs de nos oreilles. Mais... regarde, la musique est finie, et je pense qu'un jour tes calvaires s'arrêteront aussi...
Elle enroule le fil autour de ce téléphone.
J'expire profondément.
Et puis ses mains me quittent car elle défait le nœud de son bracelet aux couleurs du Venezuela qu'elle a autour de son poignet à côté de celui que je lui ai donné.
La surprise s'affiche sur mon visage lorsqu'elle prend mon avant-bras, et qu'elle noue ce bracelet autour de mon poignet.
Je la regarde faire en la questionnant du regard.
Et Mariposa poursuit en me disant :
— Parfois, j'ai un peu peur de te parler. Je ne sais pas si je devrais le faire. Parce que j'ai peur qu'on se déchire comme avant. Mais... Tu sais, Côme, tu as été là pour moi comme personne ne l'a jamais été. À un certain moment de ma vie, tu m'as fait me sentir en sécurité et je crois que j'étais heureuse dans tes bras. Tu m'as appris à me défendre alors que j'ai toujours été la fille qui cherchait à faire plaisir à tout le monde en s'oubliant elle-même.
Incapable de détourner le regard, ses mots réchauffent mon visage.
Que Mariposa parle autant je trouve que c'est un exploit. Cette fille a tendance à tout garder pour elle, et j'arrive à peine à croire qu'elle me livre un bout d'elle ce soir. Les palpitations de mon cœur résonnent jusque dans mon ventre, et je ne sais toujours pas comment réagir face à ses paroles.
J'ai peur du « à un moment » et du « j'étais » heureuse dans son discours, autant que ses aveux me plongent dans ce petit monde où il n'y a qu'elle et moi.
Un petit cosmos qui me donne la sensation de rentrer chez moi.
— J'ai adoré avoir ton bracelet pendant deux ans quand tu n'étais pas là.
Mes doigts s'amusent à faire tourner le bijou autour de mon poignet. Je ne sais même pas comment je suis censé me comporter ni me sentir.
Ces moments d'intimité avec elle m'avaient manqué. Et je le réalise maintenant qu'elle m'a donné une partie d'elle.
Quand mes yeux retrouvent les siens. Je n'ai plus qu'un seul souhait, et je veux que ma vie se résume à ce désir :
Que Mariposa m'appartienne.
Elle continue encore à me parler, sa voix féminine fait office de musique et je ne la trouve pas triste, au contraire, elle me réconforte sincèrement.
J'ai envie d'entendre la musique de sa voix, jusqu'à ce que mon heure vienne. Je veux l'entendre jusque dans ma mort, et je veux que ce son soit la raison qui me fasse devenir meilleur à chaque mot...
— Je ne peux pas te dire que je sais ce qui arrive après la tristesse, parce que, moi-même, j'ai l'impression de ne jamais en sortir, mais, peut-être, que si tu essayes, tu y arriveras ? Non ?
— Essaie avec moi, répliqué-je immédiatement.
Ses yeux s'écarquillent un peu.
Je ne vois pas un monde où j'essayerais d'aller mieux sans l'emmener avec moi.
— Je sais... Je vois que tu as toujours peur de ce que je peux te faire Mariposa, mais, s'il te plaît, fais-moi confiance quand je te dis que je ne veux plus jamais nous détruire. Je ne veux plus jamais te faire ça. Tu ne peux pas imaginer combien je me sens démoli de l'intérieur, je me sens complètement vide, mais la seule chose qui me donne encore un peu d'espoir, c'est de savoir que seras là...
Mes mots me semblent pratiquement désespérés.
« Pratiquement »... « Presque »...
J'ai l'impression que ces mots définissent la bulle qu'il y a autour de Mariposa et moi.
Parfois, avec elle, j'avais l'impression que notre histoire n'était que désespoir et désolation.
C'est toujours « presque » ça...
Et chaque fois que nous pensions être suffisamment proches, quelque chose nous rappelait que ce n'était pas encore le bon moment.
Ce sentiment d'être destiné à rencontrer cette fille et à la perdre, encore et encore jusqu'à retrouver sa route et ce que tout rentre finalement dans l'ordre entre nous...
Ou peut-être que cette fois-ci, je devais la perdre pour de bon.
Mon estomac tombe dans mon ventre à cette pensée. Mes yeux comptent chaque constellation sur son visage d'ange et ça me fait autant souffrir de la regarder que ça me fait comprendre que je ne pourrais jamais m'en passer.
L'idée de perdre Papillon, encore une fois, hérisse mes poils comme jamais auparavant.
Pendant un moment, je me dis que peut-être, si que j'ai survécu aussi longtemps, c'est parce que le petit garçon qui l'avait vu dans ce parc espérait la revoir un jour.
J'avais presque envie de brûler le monde entier pour m'assurer que la perdre n'arriverait jamais.
J'ai essayé, trop longtemps de ne rien ressentir en sa présence, au point de presque la détruire... au point de me détruire moi-même, mais c'est un fait, je ne peux pas m'en empêcher.
À chaque fois que je regarde dans ses yeux, j'ai l'impression que l'univers vit en moi.
Je ne veux pas vivre une vie à penser que je l'ai « presque » eue.
Que ses doigts froids contre les miens disparaîtront, qu'ils ne me toucheraient plus jamais.
Je voulais qu'elle sache que j'avais fait tout ce travail sur moi, parce qu'elle ne méritait pas celui qu'elle a côtoyé il y a deux ans de ça. Je voulais être le Côme de ses rêves. Je voulais devenir toutes les prières qu'elle avait dû faire, à voix haute, dans son cœur, à genoux, en privé.
Devant Dieu, je voulais être la réponse à ses prières.
Pour qu'un jour, elle vienne d'elle-même dormir paisiblement tout près de moi. En qu'elle se sente en sécurité, même entourée de mes bras.
— Tu penses vraiment qu'un jour je serais heureuse, Côme ?
Sa voix brise finalement le silence, et j'ai presque un léger mouvement de recul. Stupéfait par sa réponse. Je reste sans rien dire pendant un moment.
Elle est toujours accroupie devant moi.
Et là je comprends que Mariposa nourrit l'idée qu'elle n'ira jamais mieux. Elle garde espoir pour moi, pour tout le monde autour d'elle, mais elle a abandonné pour elle depuis bien longtemps.
Pourquoi ça ne m'étonne pas d'elle.
Cette fille avait de l'espoir pour moi, même quand je voulais encore me venger de ce que son frère m'avait fait...
Et c'est à ce moment-là que j'ai décidé que je garderais espoir pour nous deux.
J'allais dire quelque chose, mais sa voix résonne au milieu de la nuit froide :
— J'aimerais sincèrement que tu surmontes ce qui te détruit intérieurement... Depuis que tu m'as dit que tu ne voyais plus ta mère, que tu consultais des spécialistes pour mieux te comprendre, j'ai l'impression que tu vas y arriver, et tu sais, je suis tellement heureuse pour toi.
Elle est heureuse pour moi...
Au final, cette discussion me déprime plus qu'autre chose, ses paroles me donnent l'impression qu'elle se voit déjà morte, et ce constat me provoque des sensations qui me font horreur. J'ai presque du mal à gérer l'expression de mon visage, je m'accroche à ses mains qu'elle a posées sur mes cuisses.
— Je ne choisirais jamais d'avoir la paix, si tu n'y es pas.
Elle me sourit.
— Comme d'habitude, tu penses toujours aux autres avant toi...
— Je sais que je survivrai d'une manière ou d'une autre, continué-je, mais cette fois, j'aurai besoin de toi à mes côtés.
— Tu n'as pas besoin de moi, Côme tu es très fort sans moi.
J'étais fort quand je ne me laissais rien ressentir. Maintenant, les pulsations de mon cœur dépendent de son bonheur. Je ne voulais pas qu'elle soit heureuse sans l'être pour elle-même avant tout.
— Et qu'est-ce qui te fait penser que tu sais ce dont j'ai besoin ? répliqué-je avec amertume.
— Le fait que tu penses à vouloir me réparer, alors que tu viens de perdre ton père, Côme. Je ne veux pas que tu penses à moi ce soir alors que je sais à quel point tu es en train de te pourrir de l'intérieur pour ce que tu as fait. Il ne s'agit pas de moi...
J'ai senti un peu de colère dans sa voix, elle poursuit :
— Je ne veux pas que tu te sacrifies pour moi. Je veux te voir essayer d'y arriver.
— Est-ce que ça te donnerait envie d'essayer toi aussi ?
L'impression que la nuit devient lumineuse lorsque son rire angélique résonne jusque s'immiscer sous ma peau. La frustration entre nous deux s'envole tout aussi vite. Un léger sourire incontrôlé étire mes lèvres mais je reste tout de même perdu par sa réaction :
— Qu'est-ce que j'ai dit de si drôle, demandé-je.
— Non... En fait, c'était adorable.
Je sens la peau de mon visage prendre quelques degrés, et finalement je secoue la tête en appuyant mon dos contre le dossier du banc. J'enfonce mes mains dans les poches de mon manteau.
Mariposa se redresse, je lève la tête pour la regarder. Elle glisse aussi ses poings dans ses poches. Je vois la buée d'air frais s'échapper de ses narines à chaque expiration.
Elle est tellement belle qu'à chaque fois je me demande encore si elle est vraiment réelle.
Je ne la lâche pas du regard et sa simple présence me fait comprendre que ça ira.
Peut-être pas demain, peut-être pas dans un mois.
Mais ça ira.
— J'ai vécu suffisamment longtemps grâce à toi, love. J'attendrais... Mais je n'ai qu'une seule demande à te faire... Donne-nous la chance de vivre...
J'en avais marre de survivre.
Je voulais la paix.
Ses yeux s'ouvrent un peu plus. Ma langue se délie, je n'arrive pas à la garder pour moi plus longtemps, j'ai besoin qu'elle le sache :
— Je suppose que tu m'as appris à retrouver mon cœur, à le remplir de trop de sensations, et le laisser ressentir quelque chose. Si je t'ai donné assez de force pour t'apprendre à te défendre, tu m'as donné assez de force pour apprendre à mon cœur à se dévouer qu'à toi.
Mariposa gémit discrètement, son visage se tortille un peu. Je constate que ses yeux deviennent brillants et elle ne me cache pas ses émotions non plus.
— Qu'est-ce... Qu'est-ce que ça veut dire, chuchote-t-elle.
Au fond de moi, dans ses yeux, je sais qu'elle sait très bien ce que je veux lui dire.
Mes mains s'extirpent alors de mes poches.
J'ai tout d'un coup extrêmement chaud. J'ai peur. Je ne suis pas sûre que ce soit le bon moment. Je me sens trembler légèrement, mais mon corps a tellement envie qu'elle sache que je n'arrive plus à m'arrêter.
Alors, je pointe mon index sur mon torse.
« Je. »
Puis mes bras se croisent sur mon cœur.
« Aime. »
Et finalement, mon index la désigne.
« Toi. »
Mariposa éclate en sanglots et ses doigts cachent ses paupières.
Même si je ne pense pas une seconde qu'elle parle la langue des signes, je sais qu'elle a compris.
— Q-qu'est-ce que ça-ça veut d-d-dire, me redemande-t-elle entre deux sanglots. T-tu peux me dire... C-ce que ça veut dire... s'il-te-plaît ?
J'ai eu envie de rire.
Parce que je sais qu'elle sait ce que ça signifie.
Mais elle veut juste me l'entendre dire.
Elle veut juste que quelqu'un lui dise.
Sur le coup j'ai trouvé ça beau.
Et vraiment mignon.
Mon cœur s'affole.
Mais si cette femme voulait m'entendre le dire, alors je devais lui dire.
Je me suis levé, et j'ai enlevé cette main sur ses yeux.
Elle a relevé la tête vers moi.
Ses yeux brillent, j'adore leur couleur. J'adore sa peau, j'adore ses fossettes, ses cheveux.
Je l'adore Mariposa...
J'en suis sûr maintenant, ce visage-là, je voulais que mes enfants l'aient aussi.
Je voulais l'appeler ma femme et que son nom soit le mien. Je voulais finir ma vie avec elle. Je la voulais elle, elle et toutes ses cicatrices, elle et la Mariposa Verde, elle et juste Mariposa.
Ses sanglots me semblent si sincère.
J'essaye de lui essuyer ces larmes qui dévalent sur ses joues comme un torrent.
Mais je crois que pour une fois, ces pleurs me plaisent, car je vois, dans ses yeux qui me fuient mais qui finissent toujours par me revenir, du bonheur, un peu de peur, et... une touche d'espoir.
Finalement, la nuit nous enlace. Je me sens léger, avec cette impression de créer cet univers juste pour qu'elle puisse y reposer en paix. J'espère qu'elle y retrouvera ses ailes écorchées, alors après plusieurs longues secondes à l'admirer, je m'entends lui avouer :
— Je t'aime, Mariposa.
𓆃
Re ⭐️ !
JE PEUX PAS COLLER DE GIF PURÉEEE JE SUIS TROP ENEEEERVÉEEEE !
BON UIHZEJDNCOIAKLZKXZNIC, ON CRIE QUAND !?
Vous vous y attendiez pas à celle-là HEIN ? ESKE VOU VOU I ATTENDIIIÉ OU PA ! JE NE CROI PA !!!!!!
Côme, I love him so much, il a un cœur trop soft (malgré sa sauvagerie 😮💨)... Mais il est trop amoureux mon bébé d'amour purée, il lui a enfin dit non JKJKJKJJNUIZAJNEZJH (coller gif d'un personnage qui crie 😤)
📜 BON, c'est l'heure du Tea time : ☕️🫖🧋: Dites moi tout ce que vous en avez pensé de ce chapitre ? (😋)
Le chapitre il était ARCHI long 10k de mots (Vraiment j'ai un problème comment les gens font pour écrire 2000 mots PTDR j'y arrive pas purée)
Bon... Et sinon, on peut parler de Sage et Coco ? 🥹 Leur relation évolue petit à petit. Je les aimes trop tous les deux...
Toutes celles qui parlaient mal de Sage : vous mettez vos cartes d'identité dedans SVP : 🗃, vous allez toutes en prison là 🚔 !
Bon j'ai vraiment kiffé écrire ce chapitre, franchement probablement un de mes favs 🥹 ! Il m'a fait trop quelque chose ❤️...
En tout cas j'espère qu'il vous aura plu autant qu'à moi guys !
Aller, on se retrouve très vite in sha'Allah ! Love you ! ❤️
Bisous bye ! 📸
@𝐚𝐳𝐫𝐚.𝐫𝐞𝐞𝐝 𝐬𝐮𝐫 𝐈𝐧𝐬𝐭𝐚𝐠𝐫𝐚𝐦
xoxo, Azra.
Bạn đang đọc truyện trên: AzTruyen.Top