Chapitre 13 : Jetez les buglosses au feu, les azalées pousseront.
- PDV Hitch -
Marco a l'air si déterminé, ça me fait presque de la peine...Le pauvre est tellement braqué sur ses idéaux qu'il met sa vie en péril. C'est insouciant, à la limite du puéril, et pourtant il m'impressionne...Mais je dois le lui dire...
Je me fais tourner les pouces pendant que T/p s'en va reprendre les affaires qu'elle avait malencontreusement laissées dans le chariot. Je n'ai que peu de temps. Très peu de temps. Marco me regarde de ses yeux éclairés, une vraie lumière. Mais ça va être à moi de ternir son allure angélique.
" Marco, tu sais, une fois là-bas c'est l'engagement ou la mort... "
Il tourne la tête, ne semblant pas trop comprendre :
" Quoi ? - Il croise les bras - Alors comment tu as fait pour revenir, hein ?! "
" Ce n'est pas moi qui y suis allé... "
Sans autre réponse, je me rapproche des fleurs le plus que possible, leur parfum fruité me rappelle mes vieux draps. Ceux qui brûlaient au soleil avant que je ne me jette dedans avec nostalgie. Je jouais à la poupée dessus, me prenant un jour pour la plus grande des cavalières, un autre, pour la soldate sauveuse de l'humanité. Alors qu'en réalité j'étais juste une enfant attendant mon père... Quel bonheur ça a été de transfuser mes rêves dans ces morceaux de chiffons, mais maintenant c'est moi la poupée maîtresse de mon destin.
Les fleurs me forment le plus beau des cercueils, y repose mon hésitation, mes doutes, mes problèmes. Et je crois même que j'entends déjà les Requiem infernaux. Pourtant, ça me fait sourire, cette impression de mourir. Ca me rappelle que je ne dois plus faire les mêmes erreurs, pour éviter que la boucle ne se répète.
J'ai l'air certainement endormie pour Marco, mais je suis très clairement consciente. Une conscience qui résulte d'une vieille peur, celle de dévoiler la vérité.
D'un coup, le chant s'intensifie, il s'infiltre dans mes tympans comme pour me faire vivre un supplice, mes yeux s'ouvrent momentanément. Les fleurs oublient leur parfum d'enfance, douce et tendre, elles prennent une tournure plus amère et juste, presque sanglante. Cet endroit devient de plus en plus étouffant, éreintant, me rendant prisonnière de je ne sais quoi. Je renaîs dans le deuil, la douleur, mais sans plus de mensonge.
Je me relève d'un coup, et sans aucune retenue, décide de dire tout jusqu'au bout à Marco :
" Mon père et Marlo, ils sont allés se présenter il y a deux ans ! Seul Marlo a pu s'échapper...mon père est mort là-bas...Et je n'en savais rien...Ma mère non plus... "
Le visage du garçon prit une expression pleine de tristesse. Mais je dois continuer, je peux encore l'empêcher...
" S'il te plaît, ne prends pas de risque...Ou alors, raconte tout ce que je t'ai dit à T/p pour qu'elle ne souffre pas si tu en meures... "
Marco me coupe directement la parole :
" Mais ! Lui révéler ça d'un coup ?! "
Les larmes me montent aux yeux, c'est le prix de la vérité.
" TAIS-TOI ! Moi aussi, je sais que la vérité fais mal... MAIS LA DOULEUR EST ENCORE PIRE QUAND ON LA CACHE ! "
Je m'effondre au sol, regrettant l'instant où le parterre me rappelait mon lit de petite fille. Maintenant, c'est aussi dur qu'un roc prêt à être sculpté. Mais c'est si difficile en fin de compte...de tourner la page.
" Papa...Pourquoi es tu parti ce jour-là ? "
Marco ne peut que me regarder timidement. C'est à moi d'être pathétique dorénavant. J'ai l'impression que cet endroit rassemble tout les pleureurs des murs par un moyen ou un autre, et aujourd'hui, c'est mon tour. Je me recroqueville sans aucun contrôle, pantin de mes belles larmes.
Marco fini par m'attraper par l'épaule, et étrangement, il change radicalement d'expression. Un calme doux pèse sur son visage qui se contracte pour me dire quelques mots :
" Désolé, je ne changerai pas d'avis. Mais ne t'inquiète pas, je vais tout dire à T/p. Elle saura au moins mes actes, et j'en assumerai les conséquences... "
Un instant, une lueur brille dans ses yeux. A l'intérieur de ses prunelles, je vois une fleur y pousser. Une azalée. Combien de fois à t-il dû pleurer pour qu'une telle lueur puisse s'y installer ? Aucune idée...
Il me relève gentiment et me dit que je devrais aller attendre en bas de la colline, là-bas, s'y trouve l'unique maison de T/p. Selon lui il n'y a aucun inconvénient à ce que j'aille m'y reposer.
Je ne me fais pas prier et cours m'y réfugier sans me retourner, mes yeux séchant à la vitesse de mes pas pressés.
Je crois savoir ce qu'il veut faire...une chose que je n'ai jamais eu l'occasion d'essayer...
********
Marco arrive vers toi, son visage semble assez tendu, comme s'il avait quelque chose à t'annoncer. Tu poses tes affaires en lui souriant tristement, tu sais qu'il est déterminé à partir là-bas...Tu n'en connais même pas totalement la raison...
L'écho des battements de ton cœur s'intensifie lorsqu'il s'approche de toi et t'enlaces sans un mot. Juste après ça, vos regards se croisent et tu rougis instinctivement. Les lys autour de vous ont un parfum de rose.
Marco se lance.
" T/p, les choses semblant être plus difficiles que prévu, là-bas je prendrai encore plus de risques. "
Tu le fixes intensément sans rien dire, il continue :
" Je risque d'y mourir, atrocement certainement. Alors, je veux que tu le saches... "
Il commence lui aussi à te fixer.
" Avant que je parte, peut-être pour de bon, je dois te le dire... "
Il passe sa main dans ton cou.
" Je ne dois pas te mentir... "
Dans le creux de ses lèvres, les cachotteries brûlent et la vérité s'installe, ses yeux deviennent sincères, il cherche à se libérer. Tu attends curieusement la suite, ses alléchantes prochaines paroles qui te font malgré toi frémir d'un plaisir insoupçonné.
" Qu'est-ce que tu dois me dire ? "
Tes mots, sans que tu t'en aperçoives, témoignait d'un réel intérêt pour Marco. Une sorte de "je t'aime" muet à tes oreilles.
Soudain, il se bloque, comme s'il réalisait quelque chose. Ses yeux se ferment, il soupire, et dit seulement :
" Tu vas beaucoup me manquer... "
Après ça, il part chercher Hitch pour savoir où se trouve les fameux locaux, prêt à s'en aller sur le champ.
Ton cœur censure toute émulsion, tu n'as pas encore compris le réel sens de ses paroles... Tu restes plantée là, perdue...Pourquoi sa sincérité a soudainement disparue ?
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