Chapitre 8 : L'entrée des acteurs
Le comte Félix, après de nombreuses et vaines tentatives de négociation, s'était vu attribué la tâche d'accueillir les inviter à l'entrée, aux côtés de son neveu, et de s'assurer qu'ils aient fait bon voyage ainsi que tout un tas de modalité, habituel pour lui.
Si cette tâche était valorisante pour Félix, habituellement, ce soir-là elle se révélait particulièrement pénible pour le beau blond. Adrien étant occupé dans la salle des banquets, à guider les invités ou à vérifier que tout va bien dans les cuisines, et Lila n'ayant pas le droit d'être à ses côtés pour accueillir les invités, à cause de sa naissance et de son rang, Félix se retrouvait donc seul avec son neveu, qui tremblait de stresse et de gêne.
Le comte soupira pour la énième fois, quand un noble de bas étage vint saluer Marc et lui souhaiter un joyeux anniversaire, avant d'entrer, ce qui avait fait se crisper le jeune prince et l'avait poussé à se cacher davantage sous l'horrible capuche qu'il avait demandé aux couturières de rajouter.
Félix n'appréciait pas ce que son neveu avait fait du costume que son frère et lui avaient imaginé. Ce costume était censé le mettre en valeur, pas le cacher davantage !
- « "Tu verras, ça sera une belle expérience et ça vous rapprochera !", qu'il disait, l'abruti avec son sourire de bien heureux... La bonne blague ! pesta Félix intérieurement. J'ai plus l'impression qu'il nous fait honte, à paniquer devant chaque représentant de la bourgeoisie de la Lune et à ne même pas parler ! »
Félix lui jeta un nouveau coup d'œil, ne faisant que ça depuis que le ciel avait décliné vers le rouge. Son neveu tremblait. Il ne savait pas s'il devait être agacé ou avoir pitié...
En présence de Lila, la présence de Marc et d'Adrien l'agaçait au plus haut point, pour la simple raison que cela faisait tâche à côté de la parfaite royauté que les amants représentaient. Mais, seul avec eux, il s'étonnait de constater qu'un mur s'était érigé au fur et à mesure des années et que cela le blessait... mais que pouvait-il y faire ? Il aime Lila plus que tout et vivre avec elle avait fait grandir son égo déjà démesuré... C'était trop tard pour revenir en arrière, maintenant !
Il soupira et lança un nouveau regard à son neveu, pour rencontrer ses yeux vert sombre. Ce dernier sursauta et détourna le regard, comme coupable. Félix eut un pincement au cœur, de le voir à ce point effrayé en croisant son regard... Il aurait voulu dire quelque chose, mais il ne savait pas faire... il ne savait pas parler pour réchauffer les cœurs, comme son neveu avait l'habitude de le faire avec Adrien...
Il soupira, résigné, en se retournant vers les gens qui entraient petit à petit. Marc ressemblait trop à Marinette, même s'il avait hérité des yeux et du visage d'Adrien, mais cette ressemblance était suffisante pour savoir qu'ils ne pourraient jamais avoir une bonne relation !
Il croisa les bras dans son dos et se redressa, puis, en se forçant à adopter un ton dur et autoritaire, il dit à Marc, criant presque :
- Redresse-toi, idiot ! Et cesse de trembler, les souverains des autres royaumes vont arriver !
L'effet fut immédiat et, dans un sursaut, le brun se redressa et se crispa pour ne plus trembler, mais ce que le comte ignorait était qu'un petit sourire avait pris place sur les lèvres du prince en apprenant que les souverains des royaumes voisins allaient arriver... Sa famille arrivait enfin !
Marc trépignait presque, quand il sentit un frisson lui parcourir le dos. Le vent commençait à se lever, semblait-il...
Félix leva la tête vers le ciel, il y a quelques instants encore dégagés, et fronça les sourcils, peu surpris par cette tempête soudaine.
Les nobles et valets encore dehors commencèrent à paniquer, ne comprenant pas la raison de cette tempête. Certains y voyaient un mauvais présage, ce qui effraya un peu le prince aux côtés de Félix. Ce dernier ne lâchait pas le ciel des yeux, cherchant quelque chose, n'importe quoi qui pourrait montrer que cette tempête est bien le fruit de qui il croit...
Marc lui attrapa le poignet et le serra avec peur, le suppliant d'une petite voix :
- Mon oncle ? Que se passe-t-il ?
- Silence, je cherche ! Je... Là ! s'exclama-t-il quand un éclair éclata.
Il fixa encore le ciel, puis en revu un... Avec à chaque fois la même silhouette de serpent, qui semblait nager dans les nuages et qui n'apparaissait qu'à la lumière des éclairs... Un dragon !
Il se dépêcha de rassurer les gens autour de lui, qui semblaient sur le point de mourir de peur.
- Noble du Royaume de la Lune, je vous demanderais un peu de calme et de tenue, nous sommes sur le point d'accueillir parmi nous le grand dirigeant de l'Empire du Dragon, le « Maitre de la Foudre » et « Dieu des Vents et de la Pluie » ...
Alors qu'il parlait, il sentait le vent s'apaiser et les nuages s'écarter alors que le dragon serpentait vers la terre pour quitter les cieux.
- L'un des plus vieux alliés du Royaume de la Lune, j'ai nommé...
Le dragon choisit ce moment pour se poser lourdement sur le chemin menant au château, entre deux fiacres encore plein de gens.
- L'impératrice Kagami Tsurugi !
Une fois le dragon posé et immobilisé, ils purent voir qu'il portait des gens sur son dos, tous habillés de longue tenue de style asiatique rouge ou noir. Seule une femme, assise sur les épaules du dragon, se démarquait des autres, par son yukata rouge, avec des bordures noires et des spirales dorés qui partaient du buste pour aller sur les bras, le ventre ou dans le dos. Le bas de cette femme était noir avec des motifs de dragon rouge qui semblait s'enrouler autour de ses jambes. Elle tenait à la main un éventail noir et doré qui cachait la moitié de son visage et, dans ses cheveux, un petit diadème en pierre rouge et noir pointait de chaque côté de son front, comme les cornes de son dragon.
Elle caressa le cou du dragon et ce dernier se coucha au sol, lui permettant de descendre sans se blesser. Quand il se redressa, il poussa un cri qui raisonna dans toute la vallée et chassa les nuages et le vent. Autour de lui, tout le monde était impressionné par cette créature imposante... mais ce que tous avaient oublié, c'était que Kagami aimait soigner ses entrées et que chaque année c'était le même cirque... Cette année, hors de question que Félix laisse passer !
L'impératrice s'avança, droite, noble et fière, comme la nation qu'elle représente. En arrivant devant le comte, ses yeux bruns lui montrèrent tout le mépris qu'elle avait pour lui. Félix fronça les sourcils et commença :
- Impératrice Kagami, bien le bonsoir ! dit-il sur un ton faussement accueillant. Si nous sommes, comme chaque année, heureux de vous recevoir, nous somme à chaque fois... disons fort perturbé par vos arrivées ! La prochaine fois, pourriez-vous laisser Ryuko au Temple du Dragon ?
- A quoi bon, comte Félix ? Ryuko est beaucoup trop gentille pour faire du mal à qui que ce soit ! Voyez par vous-même ! dit-elle sur un ton calme, en montrant le dragon – ou plutôt la dragonne – dans son dos.
La grande créature rouge, doré et bleu attirait la curiosité des invités, surtout des jeunes enfants qui s'étaient précipités pour aller la toucher. Elle les regardait de haut et venait les effleurer de son museau pour les renifler ou jouer gentiment. Puis, après quelques secondes, la pauvre bête se retrouva sur le dos, les quatre fers en l'air, en train de se faire gratter le ventre comme un gros chien.
Le sourire de Félix se crispa devant ce spectacle surprenant d'une créature légendaire qui se couche devant des gosses pour avoir des câlins. Marc, lui, ne put s'empêcher de glousser, se souvenant de sa rencontre avec Ryuko et à quel point elle avait cherché, par tous les moyens, à le faire sourire quand il s'était mis à pleurer devant elle. Kagami remarqua son rire et, de derrière son éventail, sourit également.
Félix toussa, afin de se redonnait un peu de contenance, et dit :
- Bien, nous verrons par la suite... J'espère que votre voyage s'est bien passé !
- Etant donné que je ne suis pas venu avec l'horrible boite à roulette que vous m'avez envoyée, oui : le voyage s'est bien passé !
Marc rit, mais s'arrêta bien vite quand son oncle lui lança un regard noir. Kagami s'approcha de Marc, qui avait baissé la tête suite à la menace silencieuse de son oncle, et lui retira sa capuche afin de lui dégager le visage. Il leva ses grands yeux vers elle et elle lui dit :
- Plus les années passent et plus le parfait mélange de Marinette et Adrien se perfectionne ! Joyeux anniversaire, mon filleul !
Marc rougit et baissa les yeux, gêné.
- Me... Merci, marraine Kagami...
Elle sourit derrière son éventail et lui effleura la joue de sa main douce et blanche, avant d'entrer sans accorder plus d'attention à Félix, ce dernier l'ayant en travers de la gorge.
- Toujours aussi agréable... marmonna le comte pour lui-même, mais assez fort pour que Marc l'entende.
Le prince remit sa capuche en place, les joues encore rouges à cause de ce que sa marraine avait dit. Le prochain carrosse attira l'œil de tous, tant il brillait...
Un grand et long carrosse blanc, couvert presque entièrement de dorure et de pierre précieuse, tiré par quatre chevaux d'un blanc immaculé et rayonnant (dont leur attelage était lui-même fait d'or et de diamant), s'avança sur le chemin et s'arrêta pile devant l'entrée. Le cochet, une jeune femme aux cheveux bruns très clairs, sauta de son poste avec précipitation et couru à l'arrière du véhicule. Elle revint avec une grande pièce de tissu rouge enroulée, qu'elle déroula du carrosse jusqu'à l'entrée du château. Une fois s'être assuré qu'il n'y avait pas de plis à son tapis rouge, elle revint vers la calèche, prit la poignée et annonça :
- Les illustres, royales et puissantes altesses du Royaume du Miel : la grande et magnifique Reine Chloé de Bourgeois, son époux le puissant Roi Luka de Bourgeois-Couffaine...
Comme chaque année, ce nom laissa échapper quelques murmures soupçonneux de la foule venu accueillir les invités, et pour cause : le nom de Couffaine est, depuis vingt ans, mal vu au Royaume de la Lune, au grand désespoir de celui du Miel, qui adore son souverain.
Malgré les murmures méprisants, la brune continua :
- ... Ainsi que leur fille, l'adorable Princesse Mélissa de Bourgeois-Couffaine, vous honore de leur présence !
Sur ces derniers mots, elle ouvrit la porte, laissant sortir une grande femme blonde à la fine silhouette élancée. La blonde portait une longue robe moulante jaune à rayures noir, qui dessinait à merveille ses formes, et dont les manches jaunes étaient munies de fourrure blanche au niveau des poignets. Elle portait sur la tête un gros diadème en or serti d'énorme diamant, aveuglant quiconque la regardait dans les yeux.
La foule l'acclama, la siffla, chose qu'elle devait aimer vu qu'elle les saluait en retour et leur envoyait des baisers et des clins d'œil. Face à ce spectacle, Félix ne put se retenir de lever les yeux au ciel... Comme chaque année, l'arrivée des souverains du Miel le blasait à un point qu'on ne pourrait citer.
Après quelques secondes où Chloé s'était donnée en spectacle, un homme légèrement plus grand que la reine, aux cheveux noirs avec des pointes bleu électrique et des yeux de la même couleur, sortit du carrosse. Il regarda la foule de ses yeux menaçant et les acclamations semblèrent se calmer, la foule préférant ne pas énerver le roi. Chloé sourit et embrassa la joue de son mari, comme pour le remercier.
La reine délaissa son époux pour s'adresser au cochet et le roi en profita pour glisser sa tête dans le carrosse et en ressortir quelques secondes après en tenant la main d'une jeune femme à la même silhouette que sa mère. De loin, elle devait facilement faire une demie tête de plus que Marc et ses cheveux, d'origine blond comme ceux de sa mère portaient quelques mèches rose bonbon et bleu ciel, dans le même style que son père. Elle arborait un air blasé d'ado insatisfait, mais quand ses yeux rencontrèrent ceux de Marc un petit sourire apparu sur ses lèvres. Marc sourit aussi, heureux de voir sa « cousine ».
- Alors ? Toujours pas décidé à accepter le mariage, mon neveu ? lui murmura son oncle, se doutant déjà de la réponse.
Marc ne répondit pas et se contenta de baisser la tête, honteux, alors que les riches monarques s'avançaient sur le tapis rouge.
Arrivé devant le comte et le prince, la blonde lâcha le bras de son mari pour se jeter sur Marc.
Elle s'écria :
- AAAAAAH ! Mon petit Marcounet ! Enfin je te revois ! cria-t-elle en serrant le petit prince comme si elle ne l'avait pas vu depuis une éternité.
- Tante Chloé... Arrête, tu m'étouffe... essaya d'articuler le prince.
A côté de cette scène répugnante, Félix leva les yeux au ciel avec agacement.
- « La soirée s'annonce longue... » pensa-t-il face à l'indifférence des nouveaux venus à son égard.
Chloé s'écarta enfin, suite aux demandes de son conjoint, laissant la possibilité au prince de respirer. Elle ôta avec empressement la capuche du prince, tout en continuant :
- Ça fait tellement longtemps que je ne t'ai pas vu ! Beaucoup trop longtemps, ça devrait être interdit à une tante de ne pas voir aussi longtemps son neveu chéri !
- Que je sache, tu n'es pas vraiment sa tante ! dis Félix avec agacement.
- Mais qu'est-ce que c'est que ça ? demanda-t-elle en montrant la capuche du prince. Pourquoi cache-tu donc ton si beau visage sous un tel tissu ! C'est surement une idée de ton oncle, c'est ridicule, totalement ridicule ! dit-elle avec arrogance, tout en lançant un regard noir à Félix, le faisant enrager.
- « C'est le pompon ! » pensa le comte en serrant les dents.
- En fait, c'est... commença Marc, ne voulant pas que son oncle et sa tante se battent.
- Tu sais quoi ? coupa sa tante. Un jour, tu viendras à Cullinan et je te présenterai les meilleurs couturiers du Royaume du Miel ! Tu verras, tu seras encore plus beau !
- Houlà ! Attention, Mère, vous souhaitez l'impossible, là !
La phrase de la jeune fille fit rire le bleu.
- Il est vrai que ça risque d'être compliqué de faire du plus beau prince de ce monde un être encore plus beau !
Le prince, rouge pivoine, se tourna vers son parrain. Ce dernier lui lança un regard plein d'attente qui mit le prince encore plus mal à l'aise, mais pour une toute autre raison...
Le roi s'approcha à son tour du prince et passa un bras autour de ses épaules, le serrant contre lui et rapprochant leurs visages. Il profita de cette proximité pour lui murmurer :
- Je sais que c'est ton anniversaire, mais est-ce que, par hasard, il t'en aurait confié d'autre ? demanda-t-il, plein d'espoir.
Marc était extrêmement mal à l'aise. Il savait de quoi son parrain parlait, mais savait aussi que ce n'était ni le moment, ni la meilleure idée qui soit... Il hocha néanmoins la tête et leva deux de ses doigts, lui indiquant le nombre. Les yeux de Luka se mirent à briller et il serra encore plus fort son filleul contre lui.
- Viens me les donner demain matin, quand tu auras le temps ! Rien ne presse pour l'instant !
Malgré ses paroles, Marc voyait bien que son parrain trépignait d'impatience à l'idée de lire les lettres de l'ami de Marc. C'était ça, qui mettait le prince mal à l'aise : malgré son mariage et l'amour qu'il porte à sa femme et à sa fille, le roi n'avait pas pu s'empêcher de succomber aux talents de poète romantique du gris. Ce dernier avait écrit bon nombre de déclaration d'amour en poème et de chansons d'amour que le roi avait fini par y prendre gout et à s'éprendre d'un inconnu dont il ne connaissait même pas le visage. C'était gênant pour Marc, surtout que c'était à cause de lui...
Il hocha la tête, mal à l'aise, quand un cri suraigu retentit tout proche d'eux. Ils se tournèrent d'un même mouvement, pour voir Mélissa et le cochet essayer de séparer Chloé et Félix.
- Lâche-moi, Sabrina ! Je vais l'écorcher, ce comte de mes deux !
La petite brune – Sabrina – essaya de raisonner sa reine de sa petite voix :
- Chloé... Euh, je veux dire, Majesté, ne faites pas ça, vous risquez de déclencher une guerre !
Du côté du comte, Mélissa lui tenait un bras et essayait de le retenir, mais le comte, fort et enragé, lui imposait trop de résistance : elle ne tiendra pas longtemps !
D'un même élan, Luka se précipita pour prendre Chloé par la taille et lui murmurer de se calmer, tandis que Marc s'empressa d'immobiliser l'autre bras de son oncle.
- Mon oncle, calmez-vous ! Je vous en prie !
Après quelques secondes de résistance, Félix sembla se rendre compte qu'il agissait en public et laissa les deux ados le tirer en arrière, loin de la reine déjà calmé dans les bras de son mari.
- Merci du coup de main, Marc ! Je ne m'en serais jamais tiré sans toi ! lui lança Mélissa tandis que le comte se redressait pour reprendre une allure plus noble. Elle ajouta dans un murmure : C'est qu'il est costaud, le bougre...
Marc rit un peu et sourit.
- Oui, mais tu as bien lutté ! Ton entrainement porte ses fruits !
- A presque 18 ans, il faut bien que je prouve à mes parents ma capacité à reprendre le trône ! affirma-t-elle avec un sourire victorieux.
Marc sourit. Il adorait sa « cousine », malgré le fait qu'ils n'aient aucun lien de sang. Ils ont toujours été inséparable, de tout petits jusqu'à aujourd'hui, et se considèrent comme des membres d'une même famille. Mélissa a deux ans de plus que Marc et elle a hérité du caractère fougueux et déterminé de son père, bien qu'elle montre souvent des signes d'arrogance et de sensibilité, comme sa mère. Elle a su très jeune que son destin serait de devenir reine du Royaume du Miel, le royaume de sa mère, mais son père s'y était très vite opposé, ne voulant pas la plonger trop jeune dans les eaux dangereuses de ce milieu, ce à quoi elle n'avait pas protesté. Au contraire : c'était un défi qu'elle allait relever et réussir !
Marc, à côté d'elle, n'a aucune ambition de devenir roi... Il aimerait simplement vivre sa vie tranquillement, publier ses poèmes et romances, rencontrer la personne qu'il aimera jusqu'à la fin de ses jours, puis reprendre le trône au tout dernier moment, à la mort de son père, ou l'offrir à l'un de ses enfants, s'il en a un jour... Il n'était vraiment pas pressé et il voulait avoir la chance de voir son père gouverner longtemps...
Le visage du prince affichait son trouble, ce que Mélissa remarqua de suite. Elle posa avec délicatesse sa main sur son épaule et lui demanda avec douceur :
- Et toi ? Ça va, tu... tu penses tenir le coup ?
Elle voyait bien que Marc n'avait pas les mêmes projets qu'elle, mais... Elle savait que malheureusement les lois du Royaume de la Lune ne lui laisseront pas le choix : la règle étant que les princes deviennent roi à leur 18 ans... Il ne restait que deux ans de liberté à Marc et elle voyait que ça l'embêtait...
Le prince haussa les épaules et sourit à son amie.
- Pour l'instant, ce n'est pas la question ! Vous êtes là pour vous amuser !
Il se pencha davantage vers l'oreille de son amie et murmura, l'air complice :
- Le buffet « adulte » est près des fenêtres ! Il y a du vin, du champagne, ainsi qu'une nouvelle variété d'alcool originaire des Terres de Sable !
Les yeux de la princesse brillèrent et elle affichait un grand sourire ravi.
- Compte sur moi pour profiter ! Enfin, avec modération et sans abus ! se dépêcha-t-elle d'ajouter avec un sourire embarrassé et un petit rire.
Marc rit aussi, ravi de voir que Mélissa n'avait pas changer, comme son amour pour les boissons alcoolisées, transmit bien évidemment par Luka ... Marc se rappelait, malheureusement, de toutes les bêtises qu'elle avait sorti la veille de sa première gueule de bois...
- Mélissa, vient ! appela la reine du Miel, déjà dans le hall.
La jeune adulte roula des yeux, offrit un dernier sourire à son cousin et partit rejoindre ses parents, faisant voler sa longue robe argenté et noir, ainsi que le long voile scintillant comme la nuit qu'elle avait de posé sur ses épaules. Marc la regardait partir, un petit sourire aux lèvres, heureux de pouvoir compter sur sa présence une fois encore. Finalement, il ne serait peut-être pas seul toute la soirée...
Alors qu'il remettait sa capuche, il sentait le regard insistant de son oncle dans sa nuque. Il se retourna, s'attendant à croiser des yeux moqueurs ou hautains, mais croisa un regard étonnement doux et curieux, de la part de son oncle.
Il dit, sur un ton bienveillant :
- Tu ne voudrais vraiment pas d'elle comme femme ? Je sais que tu es jeune, que tu ne penses pas que la question mérite d'être posé et que ton père ne veut pas de mariage arrangé, mais je suis sûr que vous serez bien ensemble et qu'elle fera une bonne reine !
Marc, surpris d'entendre son oncle lui parler avec une telle douceur et sans agressivité, ne sut que répondre... Il voyait l'effort que voulait faire son oncle pour ne pas lui imposer son idée, mais c'était tellement inhabituel... Que devait-il faire ? Que devait-il répondre ? Devait-il proposer d'en reparler dans un moment plus calme et intime ? Comme autour d'une tasse de thé ? Son oncle aime-t-il le thé ? Et lui, est-ce qu'il aime le thé ?
L'esprit du pauvre prince était en ébullition et, son oncle, devant son silence, crut qu'il avait dit un truc de mal. Il a poussé un lourd soupire devant son nouvel échec et dit simplement, d'un ton plus dur que voulu :
- Nous en reparlerons un autre jour avec ton père, mais sache tout de même qu'il ne te reste plus beaucoup de temps : dans deux ans tu seras roi et tu devras te trouver une reine !
Les paroles du comte sortirent le prince de sa réflexion et lui firent baisser les yeux. Lui rappeler, de cette manière qui plus est, qu'il sera bientôt roi lui mettait la pression. Il ne voulait pas ! Il n'était pas prêt !
Le prince, depuis cet échange, perdit tout sourire et resta à accueillir les autres invités avec une mine abattue, sans même écouter leurs compliments ni prêter attention à leurs mines inquiètes.
Au moment d'entrer, une vieille comtesse d'un bastion frontalier prit à part Félix pour lui murmurer :
- Qu'arrive-t-il à ce pauvre petit ? Pourquoi une telle tête le soir de son anniversaire ?
Félix la rassura en lui disant simplement qu'il était là depuis longtemps et qu'il était fatigué. La comtesse le gratifia d'un regard soupçonneux, mais n'ajouta rien et entra en lançant un dernier regard au prince.
Constatant que cette femme n'était pas la première à s'inquiéter sur l'état du prince, Félix le fit monter dans sa chambre pour qu'il s'y repose avant le début de la soirée.
Marc le prit mal et partit avec un air tellement attristé que Félix regretta son ton. Il ne comprenait toujours pas pourquoi c'était si compliqué pour lui d'avoir de bons rapports avec son neveu !
Pourtant, après son départ, les nobles s'adressaient davantage à lui, le complimentaient sur son apparence, certaines jeunes femmes tentèrent de le séduire, afin d'avoir la chance de partager une danse avec lui plus tard... Ce nouvel intérêt qu'on lui portait fit grandir quelque chose en lui. Quelque chose qu'il ne comprenait pas, mais qui n'était pas désagréable et se manifestait sur son visage par un sourire à la fois victorieux et fou.
- « Marc... Mon cher petit Marc... Une nouvelle fois, tu n'imagines pas comme ton absence pourrait être la chose la plus merveilleuse qu'il pourrait arriver à tout le monde ! »
* * *
Dans la salle de bal, Adrien courrait partout pour accomplir ses tâches tout en profitant d'être au milieu des convives pour les saluer, les accueillir et leur souhaiter une bonne soirée. Mais, à force d'aller-venir de droite à gauche, de passer d'une personne à l'autre pour la saluer ou de guider les invités vers les différents buffets, il commençait à vraiment fatiguer. Il en était à son troisième aller-retour aux cuisines et son dixième tour de salle, ce qui commençait à faire beaucoup en une demi-heure ! Il jeta un coup d'œil dehors pour voir que le soleil n'était même pas complètement couché...
- « Ce n'est pas vrai... Vivement que tout le monde soit là, que je puisse reléguer certaines tâches à Nino ! »
Quand on parle du loup, il accourt ! Nino s'approcha du roi, l'air inquiet.
- Altesse, tout va bien ?
Adrien sourit face au surnom.
- Nino, on se connait depuis longtemps, alors arrêtes avec ces formalités idiotes ! Appelle-moi juste Adrien !
- Je veux bien, répondit le valet, mais pour ça faudrait que t'évite de donner l'impression d'avoir dix ans de plus que moi !
Adrien éclata de rire et renchérit, faussement vexé :
- Dix ans ? Eh bien, c'est gentil de me vieillir autant !
- Et encore, c'est par respect que j'évite de monter plus !
Adrien lui donna un petit coup dans l'épaule et rit de bon cœur avec son ami. Quand ils furent calmés, Nino demanda avec sérieux :
- Mais vraiment, t'es sûr que ça va ? T'as l'air à bout...
- Mais oui, t'inquiète ! Je suis juste un peu fatigué, mais je me console en me disant que d'ici le couché du soleil je pourrais me décharger de certaines tâches afin de me consacrer à celle propre au métier de roi : m'assoir sur le trône !
Cela avait tout d'une blague, mais Nino ne semblait pas prêt à rire et affichait toujours son air inquiet. Adrien lui tapa l'épaule pour essayer de le réconforter, mais Nino finit par se jeter au cou de son ami pour le prendre dans ses bras.
- Elle nous manque à tous... Tu n'es pas seul pour gérer ça !
Adrien sentit les larmes monter, mais voulut se retenir. Ce n'était pas le moment de craquer ! Pas alors que c'était l'anniversaire de son fils ! Malgré tout, il voulut serrer son ami en retour, mais ce dernier s'écarta de l'étreinte bien trop tôt.
- Nino... ?
- Je m'occupe des cuisines ! Toi, tu vas retourner à la salle de bal et t'assurer que tout se passe bien ! Profites-en pour te changer les idées et boire un coup, t'en as besoin !
Et il partit comme il était venu, direction les cuisines. Adrien sourit et passa sa manche sur son visage, voulant reprendre un peu de contenance.
Il partit direction la salle de bal et, alors qu'il marchait le long du couloir désert qui menait aux différentes salles de réceptions, une voix froide se fit entendre à sa gauche :
- Si la déprime était une maladie, tu serais déjà placé en quarantaine !
Adrien sursauta et se tourna vers sa gauche, où une jeune femme brune dans un yukata rouge, noir et doré marchait, le dos bien droit, l'allure noble et une partie de son visage caché derrière un éventail doré et noir. Adrien mit quelques secondes avant de reconnaitre ses traits asiatiques et ses yeux marrons brillant d'amusement.
- Kagami ?! s'écria-t-il après quelques secondes de doute.
Il sursauta légèrement quand l'impératrice lui sauta au cou, faisant monter aux yeux du roi quelques larmes.
- Bon sang... ça faisait longtemps...
- Tu n'es pas content ? demanda-t-elle, surprise.
- Si ! Si, bien sûr que je suis content !
- Alors pourquoi pleurs-tu ? demanda-t-elle en s'écartant et en passant sa manche sur le visage du roi pour y essuyer les larmes.
- Je suis juste tellement heureux ! Je crois que j'avais besoin de te voir pour...
Il n'eut pas besoin de finir sa phrase, elle avait compris. Ils se reprirent dans leurs bras, un sourire apaisé aux lèvres d'Adrien.
L'étreinte dura un peu, quand Adrien s'écarta et regarda son amie l'air étonné.
- Mais... Au fait, qu'est-ce que tu fais là ?
- Bin, c'est l'anniversaire de Marc... répondit-elle, surprise par la question.
- Oui, mais... Non, ce que je voulais dire c'est qu'est-ce que tu fais dans cette zone du palais ? Par-là, il y a les cuisines, la salle de bal est là ! dit-il en montrant la direction d'où venait la japonaise et celle qu'il suivait il y a peu.
Kagami le regarda en clignant des yeux, avant de dire simplement :
- J'étais perdu !
Sa voix naturellement froide et son ton simple et innocent firent rire le roi, ne s'attendant pas à une telle réponse de sa part.
- Quoi ? C'est vrai ! fit-elle, vexée. Et ce n'est pas de ma faute, votre château est trop grand !
Adrien se calma et essuya les larmes de joie qui lui avaient échappées.
- C'est définitivement trop bon de te revoir ! Mais... les autres sont arrivés aussi ? demanda-t-il plein d'espoir.
L'impératrice haussa les épaules.
- Je ne sais pas, ça fait dix minutes que je tourne en rond !
Il lui prit le poignet et s'en alla vers la salle de réception, trop pressé de revoir les autres.
- Je peux marcher toute seule, tu sais !
Il lui sourit pour s'excuser et la lâcha. Quelques minutes plus tard, ils arrivèrent devant l'entrée de la grande salle de bal déjà bien bruyante. Kagami remit son éventail devant son visage, voulant garder son allure noble devant les personnes qu'elle n'appréciait pas ou peu.
Adrien cherchait des yeux ses amis d'adolescence, plus précisément une blonde et une teinture bleue ambulante.
- Tu vois Luka et Chloé ? murmura-t-il à l'impératrice.
- Non, il semblerait que nos richissimes amis couverts de paillettes ne soient pas encore arrivés...
- Si tu regardais du bon côté, peut-être que tu les verrais ! râla une voix à la fois si attachante et si agaçante.
Le roi et l'impératrice se tournèrent d'un même mouvement vers l'origine de cette voix et virent un homme teinture bleu dans un costume cyan et une blonde en robe moulante.
Adrien commença à s'exclamer, tout joyeux :
- Chloé ! Lu...
Mais il fut coupé par la blonde qui se jeta sur lui pour lui faire un câlin, avant de le tirer à l'écart de la fête. Luka enroula son bras autour des épaules de Kagami, faisant de même que sa femme, tout en échangeant un sourire ravi avec l'impératrice.
Plus loin dans le couloir, les nouveaux arrivant piégèrent leurs amis dans un câlin groupé qui fit rire Adrien.
- Bon sang, ce que vous m'avez manqué ! Ça fait du bien de vous revoir tous !
- Moi aussi je suis trop contente de te revoir, Mon Adrichou ! Toi et Marc d'Amour m'avez trop manqué ! On devrait se voir plus souvent comme ça ! C'est ridicule, totalement ridicule, de rester séparé ainsi !
- Je suis un peu jaloux pour les surnoms, mais je dois admettre que Chloé n'a pas tort, Adrien ! ajouta Luka. On est une famille et une famille se doit de rester réuni et soudé !
Kagami marmonna son approbation et Adrien ne put s'empêcher de sourire encore plus et de serrer ses trois amis dans ses bras.
- Vous avez raison ! Merci beaucoup, les amis ! Vous serez toujours les bienvenues ici !
- Et toi tu seras toujours le bienvenu dans nos châteaux respectifs ! Pas vrai les filles ?
- Oui ! s'écrièrent-elles en cœur.
- Et Marc aussi sera toujours le bienvenu ! ajouta Kagami.
Le roi était heureux, il se sentait bien et à sa place. Il n'aurait manqué que Marc et Félix pour qu'il ait l'impression que sa famille est complète.
Le petit groupe cessa finalement le câlin et, sur les ordres de Chloé, s'installa un peu plus loin, dans un petit salon à l'écart de la fête. Adrien appela un valet et lui demanda d'apporter de quoi boire pour tout le monde et demanda également qu'on prévienne Mlle Rose de la présence des nouveaux venus dans le petit salon. Commença alors une conversation animée, où chacun racontait ce qu'il se passait dans son royaume respectif.
Chloé et Luka étaient fiers d'annoncer les progrès en combat et en diplomatie que leur fille avait fait, tout en taquinant Kagami qui était la plus âgé et qui n'avait ni compagnon ni enfant. L'impératrice se faisait une joie de les ignorer et leur raconta ses derniers affrontements contre des nobles de son royaume qui se pensaient plus à même qu'elle de diriger l'empire. Si Chloé était impressionnée, Adrien et Luka s'échangèrent des regards inquiets, sans oser dire tout haut leurs craintes, de peur de blesser leur amie.
Il n'était pas rare, et cela depuis toujours, que les riches généraux de l'Empire du Dragon se jugent plus fort que leur impératrice ou empereur et ne veuillent la ou le renverser. Dans ce genre de situation, pour conserver son titre, le dirigeant en place doit se battre et tuer le général rebelle afin de conserver sa place... Le souci, c'est que Kagami a déjà dû tuer six généraux de tribus différentes et bannir ou tuer leur famille, afin d'éviter des représailles, le tout en moins de 5 ans... Ils pensaient que ça commençait à faire beaucoup et que Kagami devrait plus s'inquiéter pour la suite, mais elle ne voulait rien entendre et répétait sans cesse que les Tsurugi était empereur depuis la nuit des temps et qu'il était hors de question qu'elle s'incline devant qui que ce soit.
Un blanc s'installa et l'arrivée de Rose apaisa les tensions tout juste nées. Luka fut le premier à se lever pour prendre la petite blonde dans ses bras, pendant que les autres la saluaient amicalement.
Après avoir fait un tour des visages et s'être incliné devant tout le monde, son sourire disparu.
- Son Altesse Tania n'est pas encore arrivée, votre majesté ? demanda-t-elle au roi.
- Il semblerait que nos chers alliés de Tournesol ne soit pas encore là... Mais ne t'inquiète pas, s'empressa-t-il d'ajouter, je les ai vu en ville aujourd'hui et j'ai demandé à des valets de les accompagner jusqu'ici quand elles arriveront ! Tu pourras la revoir !
Le roi ponctua sa phrase d'un clin d'œil qui fit sourire la jeune nourrisse. Luka aussi, semblait aux anges à l'entente de cette nouvelle. En fait, tout le monde n'avait qu'une hâte : revoir l'héritière de Tournesol !
- D'ailleurs, j'ai une grande nouvelle qui devrait vous étonner, concernant Tania ! annonça Adrien avec un grand sourire.
- Laisse-moi deviner, intervint Chloé. Jacob est mort ?
Elle avait dit cette phrase avec un étonnant mélange de mépris et d'espoir. Même au Royaume du Miel, les gens connaissaient la cruauté et la soif de violence du roi de Tournesol, mais personne n'osait rien dire en public, de peur de représailles... Mais, dans ce salon, toutes les personnes présentes s'inquiétaient pour la pauvre reine mariée de force à cet homme.
C'est avec une déception partagée par ses amis qu'Adrien dut la contredire :
- Malheureusement, non, désolé... La grande nouvelle c'est que le fils unique de Tania, Nathaniel, s'est enfin décidé à venir !
Cette nouvelle surprit tout le monde, même s'ils affichaient tous des sourires ravis. Depuis qu'il est né, cet enfant est toujours resté un vrai mythe dont l'existence n'a rarement été confirmé, comme personne ne l'avait déjà vu, à part Adrien, quelques fois.
- Je me demande comment il est... se dit Luka sur un ton pensif, presque méfiant.
- Entièrement comme sa mère ! dit Adrien avec un grand sourire. Autant physiquement que pour les passions ou les points de vue ! Roux aux yeux bleus, ce garçon aime le dessin et les arts et méprise la violence et les combats, au profit de la paix...
- Et pourtant il apprend quand même à se battre comme un chevalier ! lança une voix moqueuse depuis l'entrée de la pièce.
Tous se tournèrent d'un même mouvement vers la porte et un sourire éclatant prit place sur le visage d'Adrien, Luka et Rose.
Sur le pas de la porte d'entrée du petit salon se trouvait la reine Tania, reconnaissable de loin avec ses cheveux roux et sa couronne d'or et de fleur, dans une robe au buste blanc et aux manches et à la jupe rose. A ses côté, Adrien reconnu Juleka, la sœur jumelle de Luka, et, un peu en retrait, le blond pu reconnaitre le roux qu'il avait vu ce matin, dans un beau costume constitué d'un gilet blanc rayé de noir sur le torse et les épaules, avec les manches retroussés, une chemise orange en dessous au col parfaitement plié, où était noué une cravate noire, et un pantalon violet par-dessus des bottes orange. Le prince se tenait en retrait, les joues rouges et la tête baissé, visiblement gêné par tant d'honneur.
- Mes amis – que dis-je – ma famille, je vous présente et vous demande d'accueillir, avec tous les honneurs qu'il mérite, le prince Nathaniel Kurtzberg, du royaume de Tournesol !
* * *
Pdv Nathaniel :
Une heure... Une heure qu'on était dans cette foutu roulotte !
Le soleil avait presque disparu, quand j'ai aperçu l'un des valets du roi par la fenêtre, en train de parler à l'un des carrosses devant. Il devait être à deux carrosses avant le nôtre, quand je l'ai entendu demander les majestés de Tournesol. Je n'ai pas pu m'empêcher de l'interpeller. Il est venu et a demandé :
- Sa majesté la reine Tania de Tournesol ?
Ah ? Non, en fait il n'en avait qu'après ma mère.
- Oui, que se passe-t-il ? demanda-t-elle gentiment.
- Le roi Adrien m'a demandé de venir vous chercher et de vous remettre ça.
Il tendit un papier que j'ai passé à ma mère. Elle le lit et sourit en ouvrant la porte pour rejoindre le valet, lui demandant au passage :
- Vous a-t-il dit autre chose ?
Le valet réfléchit, puis hocha la tête.
- Il a parlé d'une certaine Dame Juleka et du...
- Bien, c'est pas trop tôt ! Nous voilà enfin débarrassé de cette attente qui n'en finissait plus !
C'était mon horrible géniteur qui venait de couper le pauvre valet. Il s'est levé et a voulu pousser la reine pour sortir, mais le valet a fait « non » de la tête.
- Navré majesté, mais le roi n'a jamais parlé de vous ! C'est la reine Tania, le prince Nathaniel et la dame Juleka qu'il attend !
L'expression de surprise du roi se transforma vite en rage quand il vit qu'on était tous sorti, sourire aux lèvres, et qu'il était obligé de rester à attendre l'arrivé. J'ai fait exprès de sortir en dernier, prenant bien le temps de ranger mon matériel dans un sac, puis de le mettre à l'arrière, histoire de bien savourer la colère et l'impuissance qu'il arborait.
Le valet nous a ensuite expliqué que le roi avait organisé une espèce de réunion avec d'autres nobles et qu'on avait été convié tous les trois pour y participer. Cette nouvelle m'étonna au plus haut point, tellement elle manquait de logique. Pourquoi convié un prince et une dame de compagnie à une réunion de noble ? La reine, je peux comprendre, mais sans le roi...
Et c'est ainsi que nous nous sommes retrouvés à monter le chemin à pied, ma mère et Juleka discutant gaiment, le valet nous guidant sans un bruit et avec un petit sourire et moi à l'arrière qui suivais en silence, tout en me questionnant encore et encore.
Je n'écoutais qu'à demi ce que ma mère et Juleka se disaient, très peu intéressé par leurs sujets de fêtes et autres, quand ma mère dériva sur un sujet qui piqua mon attention :
- Tu penses que Marc nous accueillera à l'entrer, comme l'année passée ?
J'ai failli me prendre une racine en entendant ce nom. Mais que se passe-t-il ? Pourquoi faut-il qu'il m'arrive un truc à chaque fois que ce prince entre dans la conversation ? Il est maudit ou quoi ?
- Comment ça ? ai-je demandé à ma mère, bien trop curieux.
Elle s'est retournée vers moi, un sourire malin aux lèvres, et m'a demandé :
- Oh, la conversation t'intéresse, finalement ?
J'ai rougi et détourné les yeux, gêné, avant de simplement répondre :
- Je demandais juste... par curiosité...
Maman a échangé un regard complice avec Juleka, avant de se retourner vers moi et de me dire simplement :
- L'année dernière, le prince Marc Anciel-Agreste était à l'entrée du château, avec son père, et il nous a accueilli avec un sourire et une joie de vivre qui ne l'ont rendu plus beau encore ! dit-elle avec un sourire doux, me provocant quelques frissons dans le dos.
Je devais avoir les yeux qui brillaient, car elles ont commencé à rire et Maman a tapé la main de Juleka.
- Bien joué tu as bien deviné ! complimenta la reine.
J'étais mort de honte. J'ai baissé la tête et pressé le pas sans vraiment le vouloir, dépassant ma mère et ma nourrisse. Cette dernière lança :
- Bin alors, Nath ? T'es pressé de rencontrer le plus beau prince du royaume ?
Elle rit suite à sa moquerie et j'ai commencé à grogner dans ma barbe, ayant encore plus honte. Maman l'a gentiment sermonné et moi je suis retourné dans mes pensées, remplies de questions sur ce prince...
- « Qui est-il vraiment ? A part des "on dit", je ne sais rien de lui, si ce n'est qu'il est le plus beau prince né dans ce royaume... Est-il vraiment gentil et admirable ? Est-il probable que ce prince fasse courir de fausse rumeur sur lui pour se faire aimer ? »
Sincèrement, j'avais peur de m'être fait de fausses idées et d'être déçu une fois face à lui !
- Tu sais ce qu'on dit ? intervint Juleka, subitement apparu à côté de moi. Le meilleur moyen de désacraliser quelqu'un c'est de l'imaginer en train de...
- Stop ! Juleka Couffaine, je t'interdis de finir cette phrase ! m'écriai-je, les joues rouges et la honte au-dessus de moi, telle une épée de Damoclès.
Ma mère et le valet ont ri suite à mon intervention, puis l'homme qui n'avait pas parlé depuis qu'on avait quitté le carrosse se décida enfin à parler :
- Vous avez peur du prince Marc, votre altesse ?
J'ai rougi, honteux, mais je ne l'ai pas contredit :
- A part des rumeurs sur lui, je ne sais rien ! Je ne sais même pas si ce qu'on dit est vrai ! N'est-ce pas normal, dans ce genre de cas, d'être inquiet ? répondis-je, insistant bien sur le « inquiet ».
Il rit et répondit simplement :
- Vous avez raison, c'est une bonne qualité pour un roi, de ne pas être trop naïf... mais à trop confondre « prudence » et « méfiance » on ne sait plus faire la part des choses et on prend de mauvaise décision !
J'ai levé la tête et je l'ai regardé. Ses yeux bleu nuit me fixaient par-dessus son épaule et il avait enlevé le chapeau qu'il portait, montrant à lumière de la lune ses cheveux blond cendré et bleu nuit.
- Comment vous appelez-vous, déjà ? demandai-je, intrigué.
Il sourit, amusé, et remit son chapeau en place sur sa tête en se tournant pour regarder devant lui.
- Qui je suis n'a guère d'importance, étant donné qu'une fois parti vous oublierez complètement notre rencontre !
- Et si je vous disais que non ?
Il gloussa doucement et dit :
- Je m'appelle Hugo ! Hugo Lavillant et je vis depuis toujours au château, avec ma sœur ! Le prince m'a donné le surnom de Blue.
- Donc, vous le connaissez bien ? demandai-je, comme si tout devenait clair.
- En effet, depuis qu'il est enfant ! Et si ces « rumeurs » dont vous parliez faisaient référence à sa gentillesse, j'ai l'honneur de vous annoncer qu'elles sont véridiques !
Il avait dit sa dernière phrase sur un ton un peu sombre qui me fit frissonner. Suite à ça, un silence pesant s'installa, jusqu'à ce qu'on arrive près de la foule qui entourait l'entrée.
Des nobles de tous les royaumes faisaient la queue pour entrer, sans forcément gêner le passage aux invités de marques, tel que les souverains ou, dans le cas présent, les alliés du royaume et leur descendance directe.
Involontairement, je me mettais sur la pointe des pieds pour essayer de voir l'entrée, où devait se trouver le prince, mais j'étais trop petit par rapport aux gens rassemblés. Finalement, en faufilant ma tête entre deux personnes, je réussi à voir un grand homme blond dans un costume violet et noir, qui ressemblait beaucoup au roi.
- Par ici, le Faux Roux ! s'exclama Juleka en me tirant le bras pour m'emmener vers un tapis rouge.
Une petite brunette essayait de l'enrouler, alors que des gens la bousculaient et marchaient sur le tapis sans se soucier d'elle. Ces nobles me dégoutaient !
Je me suis précipité vers elle, bousculant sans le vouloir Hugo, alors qu'elle se retrouvait gêné par un groupe de jeune bourgeois rassemblé sur le tapis.
Je leur dis, faussement aimable :
- Excusez-moi, mais vous dérangez une pauvre dame en plein service ! Serait-il possible que vous alliez discuter ailleurs ?
Ils m'ont d'abord regardé avec mépris, puis l'un d'eux a regardé quelque chose derrière moi... En me retournant, j'ai pu voir ma mère, à quelques pas de moi, son éventail devant son visage, ne laissant voir qu'un regard froid et menaçant. Je me suis retourné vers les nobles, qui n'ont pas tardé à faire le rapprochement, et j'ai croisé les bras avec impatience. Ils sont finalement partis en marmonnant entre eux, de grosse goute de sueur perlant sur leur front.
Je me suis retourné vers ma mère afin de la remercier d'un sourire et elle a refermé son éventail, affichant un sourire rayonnant. Elle fit un mouvement de la main, m'encourageant à poursuivre ce que j'avais commencé. J'ai fait volte-face pour me tourner vers la brunette qui essayait d'enrouler son tapis en le soulevant.
- Attendez, mademoiselle ! dis-je en posant mes mains sur les siennes. Comme ça, ça sera plus simple !
J'ai posé le rouleau du tapis, avant de le pousser vers la partie qu'il restait à enrouler. Elle eut des étoiles dans les yeux en voyant que le tapis s'enroulait presque tout seul et sans effort.
- Merci beaucoup, jeune prince !
J'ai souri, quand j'ai senti qu'on me tapotait la tête. En regardant au-dessus de moi, je vis ma mère et les autres qui m'avaient rejoint et qui m'attendaient. Ma mère me sourit et m'incita à me relever, ce que je fis, après avoir salué la brunette – qui ne m'accorda presque pas d'attention, trop occupé à s'amuser à faire rouler le tapis.
On s'est avancé vers l'entrée, où le sosie d'Adrien saluait un noble avec un grand sourire. A quelques mètres de l'entrée, il sembla nous remarquer et invita précipitamment le noble à entrer, avant de se tourner vers nous, les bras grands ouverts.
- Ah ! Notre héros du jour ! s'exclama-t-il en me prenant les mains.
Il murmura, bien trop proche de mon visage, afin que seul moi l'entende :
- Merci mille fois ! Ça faisait une éternité qu'elle gênait avec son foutu tapis ! Merci de lui avoir montré une manière efficace d'utiliser ce qui lui sert de tête !
Il semblait à la fois soulagé et exaspéré, ce qui fit naitre en moi un drôle de sentiment, similaire au dégout et à l'agacement.
- Nathaniel, je te présente le comte Félix, le frère du roi Adrien Agreste ! dit ma mère en désignant le blond désagréable de sa main.
- Je préfère généralement que les gens ne me comparent pas au roi, mais venant de toi, ma très chère Tania, j'accepte que tu emploi le therme « demi-frère ».
Il lui prit la main et s'apprêtait à la porter à ses lèvres, avant de se redresser et de regarder autour de lui, pour chuchoter :
- Il n'est pas là ?
La reine fit non et le laissa lui baiser la main, avant de la retirer d'un air faussement hautain.
- Ton cher « demi-frère » nous a convié en avance. Où est-il ? demanda-t-elle avant de rire d'elle-même, sous mon regard choqué.
- Hugo va vous conduire à lui et aux souverains du miel !
Et me voilà maintenant dans un couloir qui mélange moulure d'or, sculptures en bois et voute de pierre blanche. C'était magnifique et je ne pouvais m'empêcher de marcher la tête lever pour admirer ce couloir, ce qui me valut de rentrer dans un homme à la carrure imposante. Je me suis excusé et il s'est redressé, révélant sa taille immense, avant de se tourner et de regarder à droite à gauche, comme s'il cherchait la personne qui l'avait percuté.
- « Bon, je sais que je suis petit, mais là c'est quand même insultant ! » pensai-je, blasé.
J'ai levé la main pour attirer son attention et il a baissé la tête, avant de sourire.
- Oh, tient ! Mais à qui il est ce bonhomme ? Tu t'es perdu mon garçon ? Où sont ton papa et ta maman ? demanda-t-il avant de poser l'une de ses grosses mains sur ma tête, avec un sourire enfantin. Tu viens de la fête et tu t'es perdu en jouant, c'est ça ? Tu veux un bonbon, pour te remonter le moral ?
- « Je rêve où il me prend pour un enfant ? » pensai-je, entre l'agacement et l'amusement.
J'entendis un gros rire moqueur venir de devant, derrière l'homme à moustache, et, en regardant sur le côté, je voyais Hugo s'avancer, avec derrière lui Juleka qui se tapait un fou rire devant le spectacle et ma mère qui la regardait avec un sourire moitié amusé moitié gêner.
- Désolé, Monsieur Tom, mais ce jeune homme est avec nous ! dit le cendré en désignant ma mère.
Le grand brun reconnu immédiatement ma mère et sembla embarrasser. Il s'inclina devant moi, se confondant en excuse, ce qui me fit un peu rire. C'est la première fois que je viens et l'accueil est loin d'être terrible, bien au contraire !
Il s'est présenté comme étant le beau-père du roi et, autrement dit, le grand-père du prince. Cette dernière information fit monter en moi une envie de le questionner sur le prince, mais je n'en eu pas le temps, Hugo me ramena près de ma mère et de Ju, puis nous sommes arrivés à un petit salon où des éclats de voix sortaient.
Une voix, que je reconnus immédiatement, sortit du lot :
- Entièrement comme sa mère autant physiquement que sur le plan des passions ou des points de vue ! Roux aux yeux bleus, ce garçon aime le dessin et les arts et méprise la violence et les combats, au profit de la paix...
C'était celle d'Adrien ! Et il était en train de parler de moi ou c'est moi qui suis en plein rêve ?
- Et pourtant il apprend quand même à se battre comme un chevalier ! lança Juleka, en entrant dans le salon.
Rectification, c'est un cauchemar !
Je suis rentré dans la pièce à mon tour, suivant ma mère, et tous les regards se sont tournés vers moi. J'ai baissé la tête, gêné par les compliments du roi, surtout alors qu'il me souhaitait la bienvenue dans la « famille » ...
J'étais mal... Pourquoi est-ce qu'il m'accueille avec autant de bienveillance ? Moi, un inconnu qui n'a même pas daigné ne serait-ce qu'à s'intéresser à ce qu'il se passe dans ce royaume...
Quand le roi eu finit de m'accueillir, une grande femme blonde à l'aura intimidante s'avança vers moi, me faisant un peu paniquer. Mais, une fois près de moi, elle s'est brutalement baissée et m'a attrapé dans ses bras, me faisant lâcher un petit cri de surprise.
- Bienvenue dans la famille, Nathaniel ! s'exclama-t-elle en me serrant contre elle, dans un câlin plein d'énergie.
Bien que gêné, j'ai senti toute la douceur et l'affection que contenait ce câlin. Il m'a réchauffé d'une étonnante manière... Autour de nous, le temps était également aux embrassades : Juleka s'est précipité pour prendre dans ses bras une petite femme blonde dans une robe rose bonbon, avant qu'elles soient toutes les deux attrapé par un homme aux bouts des cheveux bleus, alors que ma mère se retrouvait à pleurer de joie dans les bras d'une petite (par rapport à elle) asiatique et dans ceux du roi.
- Allez, câlin groupé autour de la famille de Tournesol ! cria la reine qui me tenait encore dans ses bras.
Aussitôt, le roi et son amie ont poussé ma mère vers nous, alors que le monarque aux cheveux bleus s'est mis à porter Juleka sur ses épaules, avant de la jeter contre nous, au milieu de la foule. Elles avaient toutes les deux le sourire aux lèvres et des petites larmes aux yeux. Je ne les avais jamais vu comme ça...
Sans m'en rendre compte, j'ai moi-même eu les larmes aux yeux et un petit rire euphorique m'a échappé.
- « Alors c'est ça, une grande famille aimante ? »
* * *
La salle de bal était pleine à craquer, les invités s'étaient répartis en groupes de discussions, où d'anciennes connaissances parlaient de tout et de rien tout en sirotant une coupe de champagne ou en grignotant les amuse-bouche que les cuisiniers apportaient régulièrement. Une légère musique flottait dans l'air, très vite couverte par les discussions en court.
Au milieu de tout ça, Lila avançait gracieusement dans sa robe mauve et bleu, tournant parfois sur elle-même ou écartant les bras, faisant ressortir le voilage couleur jade qu'elle avait demandé de rajouter sur son ventre et ses épaules et qui laissait voir ses épaules et son nombril.
Elle se sentait belle, gracieuse et élégante. Elle regarda néanmoins avec mépris les sièges posés sur une estrade, à l'autre bout de la pièce. Celui au centre était le trône du roi, fait d'un bois magnifiquement bien sculpté et d'un tissu rouge qui semble aussi doux que de la soie, à sa droite se trouve celui du prince, plus petit, mais tout aussi beau, et à la gauche du roi se trouvaient ceux de Félix et Lila, décoré et sculpté de manière simple et élégante pour le comte, mais relativement lambda pour sa maitresse...
Lila savait qu'Adrien ne l'avait jamais vraiment accepté et qu'il faisait l'effort d'être agréable avec elle juste pour faire plaisir à Félix, qu'il aime énormément, mais le fait d'être traité de la sorte, juste parce qu'elle n'est pas de naissance noble, avait fait grandir en elle une haine pour le roi et son fils, qu'elle tentait de masquait en présence de Félix, par amour...
Elle soupira et secoua la tête, ne voulant plus y penser. Ce soir, c'était elle et son compagnon qui vont être à l'honneur ! Il fallait qu'elle sache se montrer aussi élégante et royal que possible !
Elle s'avança vers un groupe de baronnes de différents royaumes en train de discuter joyeusement.
- Bien le bonsoir, Mesdames ! Comment se passe votre soirée ? Vous vous amusez bien ?
Félix lui avait conseillé de discuter avec des nobles de bas étages pour commencer, puis qu'il irait lui présenter des amis de comté, comme chaque année, afin qu'elle se fasse un nom...
Les baronnes se tournèrent vers elle et semblèrent perdre le sourire en la reconnaissant. Si la plupart essayaient d'avoir un visage aimable, l'une d'elle, plus âgée que les autres, ne cachait pas son mépris à son égard. Lila se força à garder un sourire accueillant et amical.
- Dame Lila... Bien le bonsoir également ! répondit l'une des baronnes.
- Merci beaucoup de vous inquiéter pour nous, renchérit une autre, mais la fête est tout simplement parfaite ! Les fêtes en l'honneur du prince sont toujours exceptionnelles !
Le sourire de Lila se crispa légèrement, indiscernable aux yeux de ces femmes qui n'ont que faire d'elle.
- J'ai vu le prince, au moment d'entrer ! intervint une toute jeune, plus jeune que Lila. Il était tellement beau, sous sa capuche noir et blanche !
Elles approuvèrent toutes et Lila dû se forcer à être d'accord, en arborant son plus beau faux-sourire.
- Dame Lila, savez-vous si le prince va choisir son épouse ce soir, comme le roi au même âge ?
- Malheureusement, je n'en sais rien ! Nous aurons la surprise si ça doit arriver ! répondit-elle en forçant l'enjouement.
Un rire poli s'échappa du petit groupe, avant que la vieille baronne ne se décide à intervenir :
- Dame Lila, n'êtes-vous pas attendu quelque part ? Une personne de votre rang, qui a autant d'importance, doit surement avoir plein de chose à faire ! Le comte Félix n'a-t-il pas besoin de vous à ses côtés ? Le roi ne vous attend-t-il pas aux cuisines pour s'assurer qu'il ne manque rien ?
Le mépris était présent dans sa voix, signifiant qu'elle la priait expressément de s'en aller.
Lila esquissa furtivement une grimace, avant d'approuver avec un grand sourire :
- Vous avez certainement raison, j'y vais de ce pas ! Passez une bonne soirée, Mesdames !
Elles lui dirent au revoir, avant de recommencer à discuter entres elles. Lila, après avoir fait quelques pas, fronça les sourcils de colère et d'agacement.
Elle fit en sorte de rester assez proche des baronnes, en se cachant un peu, afin d'écouter ce qu'elles avaient à dire...
- Pour qui se prend-t-elle ? pesta la plus vieille. Oser porter la robe du Paon, exclusivement dédié à la reine ! Quel culot elle a !
- Il est vrai que cette robe ne convient pas à quelqu'un de son rang... renchérit une autre.
- Comment a-t-elle osé la dévergonder de la sorte ? La reine Marinette s'est toujours refusée à la retoucher, par respect pour le roi Gabriel et elle, elle ose la... la saccager de la sorte ! Quelle honte !
- Elle devrait apprendre où est sa place ! Cette petite impertinente se croit tout permis parce qu'elle partage son lit avec le frère du roi... Ce n'est rien de plus qu'une trainée, qu'elle reste à sa place ! s'énerva la plus âgée.
- Je suis parfaitement d'accord !
Des rires méprisants s'élevèrent du groupe, alors que Lila s'éloignait, les poings serrés et un sourire fou et haineux.
- « Riez, bande de pintade sans cervelle ! Riez tant que vous le pourrez, bientôt c'est moi qui rirai de vous ! »
* * *
Pdv Marc, après s'être fait congédier par Félix :
Dans ma chambre, je fixais mon plafond, allongé sur mon lit, tout en me répétant les mêmes questions en boucle...
- « Pourquoi Oncle Félix agit-il comme ça avec moi ? Pourquoi à chaque fois que je fais des efforts, il me repousse si violemment ? Et pourquoi donne-t-il l'impression d'essayer de changer, pour après être encore plus agressif ? Et pourquoi m'avoir puni dans ma chambre ? Lila, je pourrais comprendre, elle ne supporte pas ma présence, mais lui... Si ma présence le dérangeait vraiment, il m'aurait chassé bien avant... Pourquoi... ? »
Involontairement, je pousse un petit cri en me retournant vivement dans mon lit, les larmes aux yeux. Je les essuie d'un revers de la manche puis m'avance vers mon bureau.
- Tant pis, il faut que je pense à autre chose !
Mon cœur tambourinait fort dans ma poitrine, alors que je repensais à la fête... J'ai fouillé mes tiroirs, à la recherche de quelque chose qui pourrait me faire penser à autre chose, et, en renversant les liasses de papier, j'ai fait tomber l'enveloppe qui contenait les lettres de Raphaël.
J'ai soupiré, avant de les ramasser. J'allais remettre la petite enveloppe dans mon tiroir, avant de m'immobiliser...
- « Ne serait-il pas mieux que je lui donne ce soir ? » me demandai-je, soudain inquiet.
Je fixai l'enveloppe, un mauvais pressentiment me serrant le cœur. La curiosité était trop forte, je mourrai d'envie de lire ce qu'elles contenaient, ce que Raphaël aurait pu dire à mon parrain... Ou peut-être que je m'inquiète de savoir quel genre d'ânerie cette andouille allergique au soleil avait pu écrire pour que le roi du miel, d'habitude imperturbable, se laisse séduire...
Connaissant mon parrain et cet abruti gris, mon cerveau commence à s'imaginer certaines choses qui me font monter le rouge aux joues.
- « Ok, stop ! Arrête de t'imaginer ça, ma tête ! Ce n'est pas normal pour deux hommes ! » ai-je vivement pensé, en me tapotant les joues, avant de baisser les yeux vers mon carnet... « Mais, en réalité... Si eux ne sont pas normaux, moi... qu'est-ce que je suis ? »
« Fais de ton mieux, jamais comme les autres ! »
La voix de Raphaël, à travers son dicton favori, raisonna dans ma tête. Ne pas faire comme les autres, mais... faire de mon mieux... Que voulait-il dire ? Il ne sait pas ce que je ressens quand je regarde les dessins, comment peut-il...
Un soupir m'échappe et je me laisse aller sur mon lit, bras écartés et l'enveloppe toujours en main. Finalement, moi qui voulais arrêter de me torturer la tête, c'est raté...
J'ai levé l'enveloppe au niveau de mes yeux, hésitant...
J'ai poussé un soupir :
- Bah, il ne le saura pas...
Je me suis redressé et j'ai ouvert l'enveloppe avec délicatesse, essayant de ne pas abimer le sceau, pour sortir une feuille. Je compte me limiter à une, histoire de ne pas être trop choqué, je tiens à mon innocence, quand même... Il s'agissait de celle que Raph m'avait donné dans la journée...
Je souffle un grand coup et l'ouvre. L'écriture est étonnement belle et l'orthographe simplement parfaite ! Fut un temps, je pensais que Raph n'était qu'un illettré, mais finalement il sait bien écrire.
Je lis la lettre, un sourire aux lèvres face à la douceur que dégage les mots écrit par le gris. Des éloges, des compliments, des vers en proses... le tout transpirait la douceur et l'amour !
C'était avant que je ne passe au deuxième paragraphe... Mes yeux se sont écarquillés et j'ai senti mon cœur s'accélérer. Je ne pouvais pas y croire, alors que les larmes me sont montées aux yeux, tant les mots de mon ami était violent. J'ai remonté ma main sur ma bouche, ne voulant pas laisser sortir les sanglots qui me serraient la gorge, et, sans même prendre le temps de finir de la lire, j'ai jeté la lettre loin de moi.
Je suis tombé à genoux, les mains plaqués sur ma bouche et les larmes dévalant mes joues. J'essayais de me calmer, mais impossible, tant la colère et la tristesse bouillonnaient en moi.
- Hors de question que parrain Luka lise ça ! ai-je réussi à articuler, dans un gémissement que ma gorge serrée laissait à peine sortir.
J'ai refermé la lettre avec le sceau légèrement chauffé à la bougie et j'ai glissé la seconde lettre dans ma veste, préférant la garder et la détruire à un autre moment.
J'ai pris l'enveloppe pour la remettre dans mon tiroir, quand on a tapé à ma porte :
- Prince Marc ? On vous attend pour le bal !
J'ai soupiré et glissé l'enveloppe dans l'une de mes poches.
- J'arrive !
Je me suis dirigé vers ma porte, la boule au ventre et les yeux encore larmoyant après ce que je venais de lire.
- « Je brulerai ce fichu papier une fois en bas, quand j'aurai un moment de tranquillité, et je donnerai l'autre à mon parrain après, en espérant qu'il n'y ait pas... le même genre d'horreur sur celle-ci ! »
* * *
Dans les entrailles du château, alors que des rires et de la musique s'échappaient des salles de bal, une personne, une ombre, se faufila dans les couloirs, évitant les quelques grades restés patrouiller. Elle ne s'exposait pas à la lumière et restait caché sous la grande pièce de tissu qui lui servait de camouflage et lui permettait de se déplacer dans l'ombre.
Cette ombre descendait les escaliers sombres et mal éclairé qui menaient à la Chambre des Trésors. Une fois devant la vieille porte en bois, elle sortit de sa manche la clé qu'elle avait subtilisé à un valet débile et ouvrit la porte.
Elle se précipita à l'intérieur sans prêter attention aux vieux objets gardés sous clé ici et se mit devant le grand miroir au centre de la pièce. Dès l'instant où l'ombre se retrouva devant le miroir, son reflet disparu, signe que le miroir attendait la question de cet inconnu.
- Miroir, mon beau miroir, donne-moi la solution pour mettre ce royaume à mes pieds !
Le miroir afficha le même visage triste qu'au comte et répondit :
- Il vous faut monter sur le trône ! Mais, pour cela, il vous faut vous débarrasser de la ligné en place...
Les visages d'Adrien et Marc apparurent, alors qu'un sourire victorieux s'étirait sur les lèvres de l'ombre. Cette dernière laissa un échapper un rire maléfique et fou, faisant frissonner le miroir, qui redevint noir, une fois l'ordre terminé...
* * *
(10760 mots ! Pfiou...
Salut les Fans des Royaumes ! Comment allez-vous, depuis la dernière fois ?
Je sais, j'ai plusieurs semaine de retard... Je m'en excuse... Mais bon... Quand l'inspiration ne vient pas, je suis bien forcé de m'attaquer à d'autres projets le temps qu'elle revienne ! Et là... bin, j'ai cumulé 4 projets en même temps, j'en ai sorti 2, je me tâte à en sortir un troisième et j'ai posté ce chapitre vachement long...
D'ailleurs, ce chapitre... Je pense que je vais procéder par passage :
Premier passage : je vous présente la plupart des personnages important pour cette histoire ! On a l'impératrice Kagami, de l'empire du Dragon (je reviendrai dessus plus tard), les rois et reines du royaume du Miel, Chloé et Luka, et Mélissa, leur fille de 18 ans. Je ne sais pas si vous l'avez remarqué, mais ils semblent tous avoir un souci avec Félix...
Pour les noms, l'empire du Dragon et le royaume du Miel sont complètement inspiré de Ryuko et Queen Bee, désolé j'ai pas trouvé plus subtile ! Cullinan n'est pas un nom de capital choisi au hasard : si vous le cherchez sur internet, vous découvrirez qu'il s'agit du plus gros diamant au monde (associé à la grande richesse et puissance de ce royaume), mais les connaisseurs découvriront qu'il a également un rapport indirect avec le miel, ça m'a donc semblé être un choix parfait !
Et j'ai donné au dragon le nom de super héroïne de Kagami ! Je sais, ne jugez pas !
Pour Mélissa, c'est encore un rapport avec le miel ("mélisse" voulant dire "douceur", mais pouvant aussi se traduire par "miel"), mais là aussi les connaisseurs y verront autre chose (clin d'œil à Octo Lady !). Elle sera assez effacé dans ce tome-là, mais aura peut-être un rôle plus important au suivant, si je vais au bout de ce projet !
Deuxième passage : Le retour de Nino et la dépression d'Adrien toujours plus présente... On a envie de pleurer avec lui, c'est dingue... Je m'en veux presque de le faire souffrir...
Les retrouvailles trop touchante entre tout le monde, les câlins et les embrassades, ça m'a donné les larmes aux yeux, d'écrire autant d'émotion... J'espère ne pas vous avoir trop fait pleurer ?
Je n'ai pas grand chose à dire sur ce passage, à part qu'ils sont tous du même avis : CREVE JACOB ! Vous avez tous pensé la même chose, je le sais !
Si vous avez des questions ou des points à éclaircir sur ce chapitre, ça sera avec plaisir !
Troisième passage : Retour du Pdv Nathaniel (j'en avais fait un avant ?)! Ah, il vous avez manqué, votre rouquin ?! Je met de plus en plus en valeur la nature altruiste de Nathaniel et le fait qu'il utilise son titre pour aider les plus démunis, mais c'est ce que j'aime : les forts qui aident les faibles !
Vous noterez que Nath rencontre quelques personnes importantes pour Marc (Sabrina, Tom et Hugo), mais une seule nous intéresse : Hugo ! Ne le cherchez pas dans la série, il est complètement inventé par mes soins ! Il est un peu comme Raphaël, dans cette fiction : il cache un sombre secret et, s'il en a l'apparence, il n'est pas humain ! Je vous laisse deviner ce qu'il est, car je ne le dirai pas !
Certains risque de me reprocher d'avoir changé le caractère de Chloé... Ouais, bin désolé, mais la Chloé actuelle ne me convenait pas !
Sinon, on en parle de l'attitude de Nath à chaque fois qu'on parle de Marc ?
Quatrième passage : On découvre un peu plus Lila ! Ouais, mais vraiment qu'un peu... Désolé, mais je voulais vraiment faire par étape : d'abord, on présente les acteurs manquant, ensuite Adrien se lamente, puis Nathaniel se questionne, Lila ne se fait pas respecter, Marc lit en cachette la lettre de Raph et, pour finir, le miroir reçoit un ordre du méchant de l'histoire ! Lila n'avait pas vraiment droit à beaucoup de temps de lecture...
Cinquième passage : Marc lit (enfin) la lettre de Raphaël ! Un Pdv Marc, je crois qu'on n'en avait pas fait depuis longtemps... Il est très court, mais révèle beaucoup de chose. Par exemple : on sait enfin que Luka aime bien recevoir les lettres du gris et qu'il est même "tomber sous le charme"(ayez la réf, pitié)!
Pourquoi Marc était en colère/triste après avoir lu ? Qu'y avait-il d'écrit ? Pourquoi Luka ne doit pas lire ? La suite au prochain épisode ! 😜
Sixième passage : Houlà, le grand méchant de l'histoire serait en train de se révéler ? Evil Queen, serait-ce toi ? Qui es-tu ?
On ne le saura peut-être jamais...
Et oui, les amis, c'est tout ce que j'ai à dire ! Bien entendu, si vous avez des questions ou des avis, n'hésitez pas, commentez ou envoyez-moi un message ou MP ! Je ne vous donnerez pas toutes les réponses, mais je pourrai au moins vous mettre l'eau à la bouche ! 😉
Encore désolé pour le retard de publication... J'espère que vous ne vous êtes pas lassé entre temps et que ce petit (long) chapitre vous a remit l'eau à la bouche !
Bisous les Fans des Royaumes et beau lundi de Pâque à tous ! Que les lapins en chocolats soit bons !😋)
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