Chapitre 3 : Le voyage du prince
(Quelques minutes plus tard)
La déception de la mauvaise nouvelle passée, les préparatifs pour le voyage terminés et les dernières dispositions prise avant le départ, le prince se retrouvait désormais seul, nonchalamment adossé au carrosse royal qui les conduira au Royaume de la Lune.
Il pestait intérieurement contre ses parents qui ne lui avaient pas demandé son avis avant de décider de l'emmener. Il n'était pas venu aux anniversaires du prince de la Lune une seule fois, ces 6 précédentes années, alors pourquoi est-il forcé d'y aller aujourd'hui ? Il repensa à l'excuse de sa mère :
« Tu n'es jamais venu aux autres, le roi et le prince se demandent à quoi tu ressembles ! » Avait-elle dit avec son irrésistible sourire suppliant et sa bouille d'enfant qu'il n'avait rarement l'occasion de voir, et pour cause : elle ne l'utilisait que pour le supplier !
Il soupira, tandis qu'un valet d'écurie apportait les chevaux. Ils étaient tous magnifique : les deux à l'arrière étaient de jolis gris pommelés de teintes différentes, tandis que ceux de tête étaient gris clair pour celui de gauche et noir pangaré pour celui de droite.
Il le regarda les atteler à la voiture, puis, dès qu'il partit, il prit dans l'une des malles un carnet et un crayon et il croqua les chevaux et le carrosse. Les détails s'affichaient peu à peu sur le papier, au fur et à mesure qu'il s'ennuyait, et il finit même par dessiner des gens autour ou dans le carrosse. Des gens fictif et imaginaire, bien sûr, mais également une personnalité qu'il affectionnait beaucoup : le Chevalier Rebelle !
Le Chevalier Rebelle était son personnage, une partie de lui qu'il aimait illustrer dans ses dessins, qu'il offrait au journal local, avec une bourse d'or, pour que ces derniers les publient dans leur journal, la « Gazette de Tournesol ». Ce personnage, ce héros, est en réalité un ancien chevalier de la garde royale, qui aurait décidé de renoncer à son titre pour permettre à la reine, malheureuse et battue par son mari, de s'enfuir dans un endroit où elle serait plus heureuse. Il tomba amoureux de cette reine et elle de lui, mais, étant conscient du danger qui les guettait si on les voyait ensemble, il a décidé de la laisser là où elle serait en sécurité et de continuer son périple sur les routes, fuyant la police et les soldats et volant aux riches pour donner aux pauvres.
Il sourit en songeant à toutes les images qu'il avait déjà fait publier, sans jamais donner d'histoire ou de texte pour les accompagner. S'il arrivait à faire se battre son héros aussi bien que Kim ou à rendre sa reine aussi belle que sa mère, il n'arrivait pas à coucher ses mots sur le papier aussi bien que ses dessins...
- ... « Et le beau Chevalier Rebelle partit sur son cheval blanc, direction le soleil couchant, pour retrouver la belle reine qu'il a sauvé de l'enfer qu'elle vivait et enfin l'épouser, afin d'avoir pleins de marmots braillard à offrir à la pauvre nourrisse désabusée... »
En entendant cette voix moqueuse dans son dos, le prince crut avoir une attaque, tellement il fut surpris.
Il se retourna vivement pour tomber sur le regard amusé et impatient de Juleka. Mais, attendez... « Impatient » ?
- Ju ? Mais... Qu'est-ce que tu fais là ? Et qu'est-ce que tu racontes ? Mon chevalier n'a jamais décidé ça !
- Non, mais il devrait bientôt le faire, s'il ne veut pas faire souffrir éternellement sa belle !
Elle avait dit ça comme un reproche, alors Nath lui lança un regard qui voulait dire « mêle toi de tes affaires ».
- Quant à ma présence ici, je pense que cette malle l'explique assez bien...
Nathaniel remarqua alors qu'elle portait une petite malle à la main droite.
- Je peux savoir où tu vas ? demanda-t-il avec arrogance.
- Je vous accompagne ! répondit-elle avec un regard noir.
Ils se fixèrent un long moment, quand la reine arriva avec sa propre malle. Si Nath hésita à se mettre à genou, Juleka se précipita vers la reine en abandonnant sa malle devant le rouquin.
- Ma reine ! Merci encore de me laisser vous accompagner une année de plus ! Je ne sais pas quoi faire pour vous exprimer ma gratitude !
- Voyons, Ju, c'est tout normal : tu nous accompagnes depuis aujourd'hui 6 ans et tu souris toujours quand tu reviens ! Je suis heureuse de te voir comme ça, c'est la plus belle des récompenses !
La dame de compagnie sourit et prit brièvement la reine dans ses bras, avant de s'écarter er de prendre sa malle. La reine la remercia d'un sourire.
- Nathaniel, peux-tu aider Juleka à porter sa maille à l'arrière du carrosse, s'il te plait ?
Il allait grogner et protester, mais sa mère lui lança un regard auquel il ne put s'opposer. Il prit la malle de la violette et la glissa dans un compartiment à l'arrière, où était déjà la sienne. Juleka fit de même, puis, après avoir échangé quelques mots avec la reine, s'en alla.
La reine allait faire de même, quand Nathaniel demanda :
- Pourquoi tu as refusé à Alix de venir, mais tu l'autorise elle ? Je suis grand, je n'ai plus besoin de ma nourrisse pour me surveiller pendant un bal d'anniversaire !
Sa mère lui lança un regard de reproche, mais il ne se détourna pas, pensant qu'il avait le droit de se plaindre.
- Je te ferai dire que Juleka nous accompagne à chaque anniversaire du royaume de la Lune depuis maintenant 6 ans et après chacun d'entre eux elle demande à être du voyage pour le prochain ! Elle a sa place dans le carrosse de réservé depuis longtemps !
- Ça ne nous empêche pas d'emmener Alix ! répliqua-t-il avec espoir.
- Pour quoi faire ? Que tu passes la soirée avec elle sans aller te présenter au roi et à son fils ? Que vous disparaissiez je ne sais où pour faire des bêtises...
Elle avait dit ça avec un sourire taquin, ce qui fit rougir Nath, qui avait compris l'allusion.
- Et puis, pense un peu à elle, Nath ! Tu sais d'où elle vient, ce n'est pas son milieu, ce genre de réception ! Qui plus est, tu comptes la présenter comment ? Comme ta fiancée ? Ton amante ? Ou simplement comme ta promise ?
Il baissa les yeux, les joues rouges. Il n'y avait pas pensé et maintenant que c'était le cas, il se rendait compte que ça mettrait d'avantage son amie dans l'embarras que cela lui ferait plaisir à lui.
- La reine a raison, Nath ! dit une voix venue de derrière la reine.
Les deux membres de la famille royal sursautèrent et regardèrent les escaliers qui menaient au château. La jeune dame de compagnie s'y tenait, dans une tenue, légèrement moins bourgeoise que sa robe verte et violette, composé d'une veste noire et verte sur une chemise gris sombre et d'un pantalon noir. Cette tenue fit resurgir des souvenirs à Nathaniel : c'était la tenue qu'elle portait, en moins abimé, le jour de leur rencontre...
Elle sauta les derrières marches qu'il lui restait et couru vers Nathaniel en passant devant la reine sans lui adresser un regard, ce que cette dernière ne trouva pas utile de souligner. Elle se jeta au cou du rouquin dans une étreinte d'au revoir, puis se retira du câlin pour lui dire, avec un sourire ravi :
- Ce n'est pas pour moi, ce genre d'endroit clos, où une bande de bourge se marchent sur les pieds...
Elle se souvint de la présence de la reine et se retourna pour s'incliner et s'excuser, en disant qu'elle ne voulait pas l'offenser. La reine leva la main en essayant de la rassurer, puis prit congé, les laissant en paix pour se dire au revoir...
(En vérité, non, elle s'est juste cachée dans les escaliers pour les espionner)
Alix poursuivit :
- Puis, je vais profiter d'être libéré de ma tâche de dame de compagnie pour aller rendre visite à mon père et mon frère pendant quelques jours ! Ça fait un moment que je ne les ai pas vu et ils me manquent un peu !
Nathaniel sourit malgré lui, contaminé par le sourire de cette fille de lumière. Il l'adorait depuis le premier jour !
Mais, malgré lui, il ne put s'empêcher d'être triste par son absence à ce bal, ce qu'elle remarqua immédiatement.
- Je t'interdis d'afficher cette tête toute la soirée, tu m'entends ! C'est un anniversaire, alors ne va pas contaminer ce pauvre prince avec ta déprime !
Il lui lança un regard agacé et blasé, comme à chaque fois qu'elle disait un truc vexant ou qu'il n'appréciait pas. Elle sourit, amusé par sa grimace, puis posa ses mains sur les épaules du prince.
- Allez, souris ! Au pire, si tu te fais chier, essaie de faire la connaissance du prince Marc Anciel-Agreste !
- Qui ? demanda le rouquin, vraiment surpris par ce nom encore inconnu à ses oreilles.
- Bah, le jeune prince du Royaume de la Lune ! Attend... me dis pas que tu ne savais pas comment il s'appelait ?
Nathaniel détourna les yeux, un peu honteux. Il ne s'était jamais intéressé à l'alliance avec le Royaume de la Lune et encore moins à sa famille royale...
Son amie sembla s'en rendre compte et afficha une tête à la fois dépitée et désespérée. Elle soupira :
- Ok, je vois... Du coup, j'imagine que tu n'es même pas au courant de son infinie et inégalable beauté !
La remarque piqua Nathaniel et l'intéressa au plus haut point. Qui était ce prince, pour qu'Alix en sache autant et, surtout, qu'elle le trouve beau ?
Il ne savait pas si c'était de la jalousie qu'il ressentait ou simplement... de l'intérêt pour ce détail infime...
- Beau comment ? demanda brusquement Nathaniel.
Alix fut un peu surprise par sa question. Elle ne savait pas quoi en penser, quand elle vit cette nouvelle lueur briller dans les yeux de son ami. Elle avait compris !
Elle répondit, avec un sourire espiègle et un regard moqueur, en se penchant vers son oreille pour murmurer :
- Quoi ? Tu ne savais pas ? On dit que ce prince serait le plus beau jamais né au Royaume de la Lune ! On dit qu'il aurait la peau claire et brillante comme de la neige au soleil, que ses cheveux seraient aussi noirs que l'ébène et que ses lèvres pulpeuses sont plus rouges que le sang... N'est-ce pas une belle image de beauté ?
Elle était si près... son souffle frôlait la peau de son cou... mais pourtant, l'entendre décrire ce prince, sa beauté, si près de son oreille, avec ce ton de voix... Il sentit la chaleur lui monter au visage et commença à trembler.
- « Bon sang, mais... Qu'est-ce qu'il m'arrive ? » pensa-t-il en subissant les effets des paroles de son amie dans son propre corps.
La rose s'écarta et le regarda avec un sourire sadique, fière du résultat de son œuvre.
Mais une voix vint les interrompre en faisant sursauter la jeune fille.
- Alors, mon Fils ? On dit « au revoir » à la future « Madame Kurtzberg » ?
La rose se retourna pour voir le roi en bas des escaliers regarder sa progéniture avec un sourire victorieux. Les rougeurs du rouquin disparurent instantanément, pour laisser place à une expression de défi et de mépris certain.
Le roi était un homme grand avec des épaules larges et des bras épais, le tout digne d'un bon combattant. Ses cheveux, contrairement à ceux de Nathaniel, étaient court et châtain sombre, presque noir, et il avait les yeux marrons injecté de sang et le teint pâle, comme s'il sortait d'une tombe. Cet homme ferait peur à n'importe qui, que ce soit en dedans ou en dehors du champ de batail !
Il ne sembla pas remarquer le regard que son fils lui lançait et regardait la jeune dame de compagnie avec un regard effrayant. A voir comme son amie se forçait à ne pas trembler, Nathaniel su que ça ne lui plaisait pas d'être dévisagé de la sorte par le roi.
Le roi s'approcha et se mit face à la dame de compagnie, la reine dans son dos, la tête baissée et l'air désolé.
- Alors, jeune fille ? Vous avez oublié la politesse ?
Alix allait mettre un genou à terre, mais Nathaniel lui posa la main sur l'épaule et la fit reculer pour se mettre entre elle et son géniteur. Il le défia du regard, maudissant le demi mètre qui les différenciait de taille et l'empêchait de regarder le roi dans les yeux.
- Que...
- Alors comme ça je suis ton « fils » ? coupa Nathaniel. La dernière fois, je ne sais pas pourquoi, mais j'ai cru t'entendre parler de moi en disant « ce bon à rien de Dessinateur » ! Te serais-tu trompé en t'adressant à moi ?
La reine releva la tête suite aux paroles de son fils et regarda la scène, paniqué et apeuré. Le roi serra les poings en laissant échapper un faible grognement sensé forcer le rouquin à s'écarter devant lui, mais Nathaniel ne bougea pas, ne baissa pas les yeux. Au contraire, il croisa même les bras en prenant une posture d'impatience. Alix agrippa du bout des doigts la veste du rouquin, surement elle aussi paniqué et inquiète.
A bout de patience devant l'arrogance de son fils, le roi grogna de mécontentement et, au lieu de le frapper comme tout le monde s'y attendait, il l'écarta violemment de son passage et s'approcha du carrosse, un valet de chambre sur ses talons pour porter ses affaires.
- Je te conseille de disparaitre de là avant notre départ ! Hors de question que tu restes seule au château en mon absence ! dit le roi en s'adressant à Alix.
Nathaniel lança un regard noir au roi, quand son amie se jeta sur lui et enfouit sa tête dans son torse. Il comprit, à son souffle lourd et saccadé, qu'elle avait eu peur face au roi et qu'encore maintenant elle tremblait suite à cette rencontre.
Il l'entendit murmurer, la voix tremblante :
- Merci...
Il rougit un peu, surpris, mais il sentit également quelque chose naitre en lui : un désir de protéger !
Sa mère vint poser ses mains sur les épaules du prince et ce dernier se tourna vers elle. Elle avait un regard de reproche et de peur.
- Je t'interdis de recommencer ! lui ordonna-t-elle dans un murmure.
Elle colla sa tête à la sienne et il la sentit soupirer de soulagement. Encore une fois, ce désir de protéger se fit ressentir en lui !
- Même pas pour vous, Mère ? demanda-t-il doucement.
Elle le regarda et, contre toute attente, lui sourit tendrement.
Finalement, Alix fut la première à s'écarter, essuyant vivement son visage de sa manche, puis dit, sur un ton pressé :
- Bon, moi j'me taille avant qu'il se rappelle de mon existence !
La reine gloussa un peu et Nathaniel hocha la tête, l'autorisant à prendre congé. Elle courut vers les escaliers et les monta 4 par 4 en faisant des signes de la main au prince et à la reine. Ces derniers lui rendirent ses signes, de manière un peu plus mesurée, avant qu'elle ne disparaisse au coin d'un mur.
Nathaniel resta un long moment à fixer l'endroit où elle avait disparu en souhaitant vite rentrer et la voir à nouveau lui transmettre sa bonne humeur maladive.
Finalement, lui et sa mère partirent s'installer dans le carrosse, attendant que le roi finisse les préparatifs et que Juleka les rejoigne. Ils se sont tous les deux installé sur la banquette dans le sens de la route, laissant le roi dos à cette dernière et le plus proche du cochet pour donner les instructions. Juleka les a finalement rejoints avec des coussins et, comme il restait de la place sur cette banquette, la reine lui demanda de venir s'assoir à côté d'elle et cette dernière se retrouva ainsi entre son fils et sa dame de compagnie et, malheureusement, en face du roi.
Nathaniel n'avait pas pensé à ranger son matériel à dessin dans sa malle et il se dit qu'il ferait mieux de le garder avec lui pour s'occuper durant le long trajet qu'ils s'apprêtaient à faire.
La reine discutait à voix basse avec Juleka et Nathaniel affutait son crayon favori, quand le cochet prit place à l'avant et que le roi grimpa et s'installa lourdement sur la banquette restante. Le silence se fit aussitôt, Juleka tourna la tête avec nonchalance vers la fenêtre et la reine baissa la tête vers ses mains.
Nathaniel jeta un regard furtif aux adultes pour voir que les deux femmes fuyaient le regard autoritaire, fier et dominant de cet homme qu'il devait appeler « père ». Il serra les poings, énervé.
- « Vivement que tu disparaisses, que je puisse monter sur le trône et changer les choses ! » pensa-t-il à l'attention du roi.
Il soupira intérieurement quand le carrosse commença à partir. Il regarda quelques instants à la fenêtre pour voir défiler les murs de la cour intérieur du château et vit des chevaliers, certains se mettant à cheval pour les suivre de loin. Il vit Kim, en train de discuter avec un jeune garçon à la peau mate et portant une espèce de robe et un chapeau bizarre bleu nuit, ainsi qu'une petite paire de lunettes. Kim salua le prince quand il le vit et Nath fit de même.
- Eh, t'as vu, Nath ? Ce ne serait pas Max que voilà ? La tenue et le titre de Merlin lui vont à ravir ! commenta la voix moqueuse de Juleka qui s'était penché par-dessus son épaule.
Le rouquin grogna de mécontentement et de jalousie, tandis que sa mère gloussait. Son père ne fit pas de commentaire avant qu'ils ne sortent de l'enceinte du château.
- Les Merlins ont de la chance d'exister depuis des siècles et d'avoir su prouver leur utilité, sinon voilà belle lurette que j'aurai fait déguerpir ce « magicien » de mes deux et son fainéant de maitre !
- Dans ce cas, pourquoi tu ne le fais pas aujourd'hui ? marmonna la reine sur un ton de défi.
Nath eut peur, mais il sentit également la colère monter en lui. Il n'appréciait pas le fait que Max, un ado de son âge, soit au-dessus de lui hiérarchiquement, mais les deux jeunes avaient été camarades d'enfance à une époque...
Il regarda sa mère défier son géniteur du regard, avec la même arrogance que lui plus tôt. Le roi répondu, sur un ton de reproche :
- Que je sache, ce n'est pas moi qui ai eu la bonne idée d'invité ces tirs au flanc dans mon château ! Ça aurait dû être à tes parents de se charger de ça, au lieu de perdre leur temps à faire prospérer ce royaume uniquement dans le domaine des arts ! Maintenant, les autres royaumes nous prennent pour une bande de femmelette !
- Nous avons toujours été un royaume pacifique ! Depuis la division de cette terre en différents royaumes, empires et califat ! Et chacun d'entre eux a son propre rôle et le nôtre est...
- Silence ! Hurla le roi.
La reine eut un mouvement de recul : le roi avait amorcé un mouvement du bras, comme s'il allait la frapper. Le cochet arrêta la voiture et lança :
- Majesté, tout va bien ?
- Avance et occupe-toi de tes chevaux ! cria le roi à l'attention du cochet. Quant à toi, ma chère, je te recommande de ne pas la ramener ! Ce royaume est mou, ses anciens souverains l'ont fait passer pour un trou à imbécile, mais je te jure que ça changera et ce changement passera par moi : quand j'aurai quitté ce monde, ce royaume pourra enfin se vanter d'honorer de vraies valeurs !
- Celle de la guerre et de la violence ? Ah, bin non merci ! Si c'est ça, autant te tuer maintenant, ça sera mieux pour tout le monde que je monte directement sur le trône !
Les passagers du carrosse se tournèrent tous vers le prince, en train de dessiner un lapin qu'il avait vu au bord de la route.
Agacé par les propos de son géniteur, le jeune prince avait décidé de faire l'innocent en dessinant, mais n'avait pas pu s'empêcher de dire tout haut le fond de sa pensée, mettant au passage le roi en rogne. Ce dernier se tut, ne trouvant pas quoi répondre sans brutaliser sa progéniture.
Nathaniel lança un regard à sa mère pour savoir si elle allait bien et cette dernière lui lança un sourire reconnaissant. Elle tenait à la paix de son royaume et appréciait plus que tout le fait que, vis-à-vis des autres, il soit accueillant et pacifique. Mais son père, lui, ne supportait pas cette paix et n'est devenu roi que pour la faire disparaitre à petit feu, ce qui blessait énormément la reine et ses sujets.
Nathaniel s'était juré de ne jamais devenir comme son père et de, quand il monterait sur le trône, de continuer à faire prospérer l'art et la beauté et de continuer à mépriser la violence et les guerres ! Il se l'était promis pour sa mère...
Finalement, le carrosse arriva à Pétale, la capitale du royaume de Tournesol qui se trouvait au pied du château, à une vingtaine de minute à cheval. Nathaniel releva la tête de son carnet à croquis et regarda les bâtiments de cette ville lumière et floral.
La route principale qui traversait la ville n'était pas différente d'un chemin de terre en campagne et le devant des maisons n'était pas dallé, si bien que des fleurs et de l'herbe poussaient devant les maisons et délimitaient la route et la zone des gens à pied. Les maisons et boutiques étaient toutes colorés en fonction du commerce ou des gens qu'elles abritaient et, sans avoir besoin d'enseigne ou d'inscription, le rouquin savait très bien qui vivait où ou quel bâtiment servait à quoi !
Les gens leurs faisaient « coucou », par moment, et d'autre s'approchaient du carrosse pour dire « bonjour » ou leurs offrir divers objets.
Une enfant s'approcha du carrosse du côté de Nathaniel et le suivit en trottinant à côté. Il se pencha à la fenêtre et rit un peu devant ce spectacle et la petite fit de même. A un moment elle tendit le bras, essayant de lui donner quelque chose, mais elle n'y arrivait pas, étant trop petite. Il allait tendre la main, quand un adulte arriva et souleva brièvement l'enfant. Cette dernière déposa une petite fleur blanche au creux des mains du rouquin en disant, d'une adorable petite voix cristalline :
- Faites bon voyage, Altesse !
L'adulte la reposa part terre et ils lancèrent des signes d'au revoir au prince, qui les leur rendit avec plaisir.
- Nathaniel, rentre immédiatement ta tête dans ce carrosse ou je te fais continuer le voyage en courant à côté ! cria le roi avec agacement.
Nathaniel s'exécuta en lui lançant un furtif regard meurtrier. Il regarda la fleur entre ses mains, la trouvant extrêmement belle, attendri par le geste de cette enfant. C'était pour ce genre d'attention spontané et innocente qu'il se rendait souvent au village !
Ne sachant pas quoi faire de la fleur, il la posa sur son cahier fermé et attendit que le carrosse soit secoué par une malformation de la route pour la faire glisser jusqu'aux mains de la reine.
Cette dernière regarda la fleur, surprise, et se tourna vers son fils. Il lui sourit, les joues un peu roses et elle lui répondit par un sourire tendre et reconnaissant. Elle prit la fleur et la coinça dans ses cheveux, parmi les autres qui composaient son diadème floral.
Après avoir quitté la capitale, la route se fit dans un silence presque pesant, parfois coupé par les remarques méprisantes et agaçante du roi. Nathaniel était la plupart du temps le nez dans son carnet à dessin, sauf quand Juleka l'interpellait afin qu'à eux deux ils puissent détendre l'atmosphère ou que la reine lançait un débat à voix basse avec lui. En revanche, pour son père, il ne se donnait pas la peine de relever la tête ou d'arrêter sa tâche pour lui répondre, ce qui finit par agacer le roi.
Juleka allait lancer un nouveau sujet de conversation sur, bien sûr, le thème de la soirée de demain soir, quand, bien sûr...
- Eh, Nath, tu sais que...
- NATHANIEL KURTZBERG, VEUX-TU BIEN ME FAIRE LE PLAISIR DE CESSER ! cria le roi, en coupant la dame de compagnie.
- Cesser quoi ? demanda le rouquin sans lever les yeux de son carnet, alors qu'il dessinait un chat avec des bottes, un chapeau et une épée.
- Cesse immédiatement ces gribouillis et lève la tête quand on te parle !
Nathaniel s'immobilisa et releva les yeux vers le roi, lui lançant un regard à la fois noir comme la nuit et emplie de mépris. Il ne supportait pas qu'on insulte ouvertement ses dessins, surtout devant lui.
Le roi tint son regard, sans montrer sa peur. Même si son fils lui manquait de respect régulièrement, le roi n'osait jamais le réprimander trop sévèrement et préférait hurler ou s'en prendre à la reine ou à Alix, sachant très bien que Nath les aimait plus que tout. Le roi avait peur de son fils, ou plutôt du regard que celui-ci lui lançait...
- « Un regard pareil pourrait détruire la plus puissante des armés, sur le champ de bataille... » avait-il un jour pensé.
Le silence se fit et Nath allait à nouveau baisser les yeux, quand sa nourrisse lui dit :
- Le roi a raison, Nath : relève les yeux et regardes la route ou tu vas être malade.
Le rouquin savait qu'elle avait dit ça uniquement pour leur éviter la colère du roi, alors il referma son carnet et appuya son menton sur la fenêtre pour regarder la nature dehors.
Ils passaient à côté d'un magnifique champ d'herbe verte, avec par-ci par-là quelques fleurs rouges, surement des coquelicots, qui tendaient leurs pétales vers le soleil.
Nathaniel sourit devant ce spectacle, avant de voir au loin des formes brunes et noirs bouger. En regardant mieux, il reconnut les membres courts, mais musculeux des taureaux. Ils se regroupèrent en troupeau et l'un d'eux au centre se mit sur ses pattes arrière et réussit à se tenir droit. Il fit quelques pas, suivit par d'autres qui s'étaient levé, sous le regard émerveillé du jeune prince.
Il comprit qu'il s'agissait des Minotaures qui vivaient dans certains champs de Tournesol et avec qui ils cohabitaient.
Un chevalier à l'arrière du carrosse souffla alors dans une corne de minotaure, faisant sursauter le prince à cause du bruit et les animaux se tournèrent vers eux, avant de se remettre à 4 pattes et de commencer à galoper dans la même direction qu'eux, en gardant tout de même une distance convenable.
Le prince était émerveillé, il n'avait jamais vu de Minotaure de toute sa vie et, même s'il ne comprenait rien à cette attitude qu'ils avaient soudainement eue, il fut heureux de les voir courir si près du carrosse. Il se demanda s'il pouvait les toucher...
- Nous traversons actuellement une terre offerte à un troupeau de Minotaure, expliqua la reine. Et, afin de leur montrer que nous ne faisons que traverser et que nous leur voulons aucun mal, on leur demande de nous suivre tout le long de leur territoire, sans, bien sûr, trop s'approcher.
Il n'avait pas fait attention, mais sa mère s'était levée pour se mettre au-dessus de son épaule et regarder le spectacle. Il sentait son ventre et sa poitrine légère contre son dos et ses épaules et, sans s'en rendre compte, il s'immobilisa... Il sentait le cœur de sa mère battre à tout rompre et il crut être retourné en enfance.
- Ils sont magnifiques ! dit Nathaniel dans un souffle d'émerveillement.
La reine sourit, quand une idée la frappa.
- Et si nous faisions une pause avec eux à la sortie du territoire ? Comme ça, tu pourras peut-être jouer avec les petits !
- Mère, je ne suis plus un gamin ! dit le rouquin comme si les paroles de sa mère l'avaient offusquées.
La reine gloussa, tandis que Juleka levait les yeux au ciel, amusé. Le roi avait les bras croisés sur le torse et les yeux fermés, comme s'il réfléchissait.
La reine allait donner l'ordre au cochet, quand le roi intervint enfin :
- Si on veut arriver tôt à Argenta, il vaudrait mieux éviter les pauses inutiles ! Les chevaux pourraient tenir encore des heures, à ce rythme-là, inutile de s'arrêter si tôt !
La reine fut la première déçue et elle lança un regard de reproche au roi, avant de baisser la tête et de se rassoir.
- Je pense que, pour la bonne santé des chevaux, il vaudrait mieux s'arrêter le plus souvent possible pour les faire boire ! Le plus tôt sera le mieux ! cria le chevalier à la corne, alors qu'il avançait à côté de la fenêtre du rouquin.
Le roi grogna, avant de baisser la tête, résigné...
Et la pause se fit juste à la frontière du territoire des Minotaures. Bien sûr, après s'être arrêté, la reine et un chevalier sont parti expliquer la solution à celui qui semblait être le chef du troupeau. Certains, qui avaient la faculté de parole, sont restés avec la reine, Juleka et les chevaliers, pendant que Nath jouait avec les plus jeunes. Le roi disparut pendant un temps avant de revenir, mais se tint à l'écart du groupe et des bêtes mythiques.
Ils firent une pause d'un peu plus d'une heure, où la reine avait fait des dessins de son fils au milieu de ces animaux fantastique, en parfaite harmonie avec eux, avant que le roi ne s'agace complètement et n'exige le départ.
La reine et Juleka appelèrent le rouquin tandis que le chef du troupeau a poussé un cri de rassemblement, avant de partir vers le centre de leur territoire.
Une fois dans le carrosse, Nathaniel bailla. Il a essayé de suivre la route des yeux pour se tenir éveillé, mais ne tint pas longtemps, malgré tous les efforts de Juleka pour essayer de le faire parler. Il s'endormit sur l'épaule de sa mère et cette dernière passa le voyage à le regarder en souriant. Le monde pouvait s'écrouler sur elle, tant que son fils serait là elle sera heureuse !
C'est ainsi, dans ces instants magiques entre une mère et son fils, que se poursuivit le premier voyage du prince jusqu'à Argenta, capitale du Royaume de la Lune et endroit où repose l'immense château de la famille royale des Agrestes.
* * *
(Le chapitre 3, chers Fans des Royaumes !
Purée, je pensais pas qu'il sortirait si tôt ! Le dernier remonte à la semaine dernière... et le prochain est déjà en court d'écriture...
Purée, je crois que j'ai enfin trouvé un rythme de travail qui associe cours et écriture ! 😁
D'ailleurs, vous voulez savoir comment j'ai réussi alors que mon emploi du temps de lycéenne et la vie de l'internat m'enlèvent tout moment d'écriture ?
C'est simple, j'ai joué de mon ✨charme✨ ! Ok, blague à part, j'ai simplement sympathisé avec les surveillants de l'internat et avec une prof qui gère la maintenance des ordis de mon établissement ! Depuis, quand j'ai une heure de Perm ou que j'ai fini mes devoirs plus tôt que les autres, ils m'autorisent à prendre un poste informatique, à condition que je n'aille pas sur des sites chelou !
Bref, assez parlé de moi, que pensez-vous de ce chapitre ?
Nathaniel, vous l'aimez bien, par rapport à son père ?
Vous pensez quoi des relations autour de la reine ?
Et Alix ? J'imagine que certains sont en train de prier pour qu'elle se fasse manger par un dragon, non ?😂
Allez, vraie question : vous avez des théories pour la suite ? Que va-t-il se passer ? Marc et Nath vont-ils se rencontrer enfin ? Tomberont ils amoureux ? Ou bien développeront ils de la haine l'un envers l'autre ?
J'attend vos théories avec impatience, en espérant que ce chapitre vous a plu ! Désolé si certains pensent qu'il n'y a pas assez d'action !😅
Et désolé pour le retard de sortie. Certains l'attendaient hier soir, mais j'ai eu pas mal de contre-temps, je suis désolé...
Allez, bisous les Fans des Royaumes !😘)
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