Chapitre 4

J'entends la porte du bureau s'ouvrir, et les chaussures cirées du président claquer sur le dallage dans la direction opposée à la mienne. Je relâche enfin ma respiration, que j'avais involontairement bloquée depuis le début de la conversation. Je rêve ou je viens d'entendre la Président menacer Monsieur Fournier ? « Il faut se débarrasser des maillons faibles, il nous tire vers le bas » j'entends encore l'écho de cette voix grave dans ma tête, il venait clairement de dire que mon supérieur était un maillon faible, et qu'il devait s'en débarrasser.

Je me remets lentement de mes émotions, il faut que je retourne dans la salle de documentation. OK, 1,2,3... Je serre un peu plus fort la fiche entre mes doigts, et je me dirige vers la porte de la salle. Je traverse la pièce sous les yeux des autres chasseurs de prime, je sens un voile rosé se déposer sur mes joues, et j'accélère un peu plus le pas.

J'arrive à nouveau devant mon ordinateur, il faudra que je parle à Emma de ce que je viens d'apprendre! L'adrénaline coule encore dans mes veines, et j'ai du mal à me concentrer sur mes recherches sur Adam Martin.

Quand la journée se termine, j'ai une migraine à tout casser et je ne suis pas plus avancée sur mes recherches. J'ai passé la journée à retourner dans tous les sens ce que j'ai compris de cette fichue conversation, pourquoi le Président a t'il dit que la moitié des survivants n'était pas censé survire ? Je ne comprends pas. Je pose mes paumes froides dans le creux de mes yeux, dans l'espoir d'estomper le mal de crâne qui me vrille le cerveau, il faut que je fasse une pause, ça fait plusieurs heures que j'ai les yeux rivés sur l'écran de l'ordinateur en train de faire le tri dans mes pensées. Je me lève de mon siège, et me dirige vers la salle de pause, je commende un café à la machine après avoir pianoté un instant sur l'écran.

Je soupire en attendant que la machine achève de préparer ma boisson dans un bruit infernal. Il faut que j'en parle à Emma à la maison, si je lui en parle maintenant, il y a de grande chance que notre conversation soit enregistrée. Je récupère mon café, et le boit d'une traite, il est insipide, mais il aura au moins le mérite de me tenir éveillée. Je regarde l'horloge de la salle, c'est bientôt la fin de la journée, je jette le gobelet en plastique dans la poubelle prévue à cet effet et quitte la salle pour retourner devant mon PC. Je n'ai rien mangé de la journée, et le café a eu le don de réveiller mon appétit, je regrette amèrement d'avoir sauté la pause déjeuner au profit de la prose de mes pensées.

Je tente à nouveau de récolter un peu plus d'information sur le Responsable, mais à défaut d'être épuisée, je suis maintenant affamée, et les gargouillis de mon ventre m'empêchent de me concentrer. Je jette un coup d'œil aux peu de renseignements que j'ai recueilli sur Adam Martin : je sais son prénom et son nom de famille, son âge, je sais également qu'il a vécu pendant de nombreuses années en Bretagne, avant de devenir un fugitif. J'en ai déduit qu'il y a de grande chance pour que soit, il y soit resté, soit il se cache dans les régions à proximité. C'est la première fois que j'ai aussi peu d'information sur un Responsable, je ne suis vraiment pas concentrée aujourd'hui.

Je regarde le cadran de l'ordinateur, il ne reste plus qu'une minute, j'imprime les renseignements que j'ai récoltés, et je glisse la feuille dans la pochette où je range habituellement mes informations. J'éteins mon ordinateur, et frotte mes yeux. La plupart des autres chasseurs de prime font la même chose, et l'instant d'après, tout le monde se lève pour sortir de la salle. Je suis la nuée, en apercevant la tignasse d'Emma devant moi. Je sors des locaux, et je vois Emma ouvrir le 4x4 en me jetant un coup d'œil, je marche dans sa direction et me place sur le siège passager. Je boucle ma ceinture et mon amie sort du domaine, j'attends que l'on soit assez loin pour engager la conversation :

« Em' ?

— hum ?

— Il faut que je te dise quelque chose, tout à l'heure, j'ai voulu aller dans le bureau de Monsieur Fournier, et je l'ai entendu parler avec le président... Prise de court, Emma tourne brutalement le volant, et la voiture fait une embarrée, elle prend la direction du parking le plus proche et gare la voiture. Elle plante son regard dans mes yeux, j'ai toute son attention à présent.

— Continu ! M'ordonne-t-elle

— Je l'ai ai entendu discuter ensemble, Monsieur Fournier se demandait pourquoi le président lui donnait simplement une longue liste de personne à arrêter, sans lui donner plus d'information. Il lui a répondu que la moitié des personnes survivantes n'était pas censé survire... Je dis, peu assurée ;

— Mya, tu n'aurais jamais dû écouter cette conversation, elle était privée, commence-t-elle en soupirant, je suis désolée, mais je vais devoir te dénoncer.

— Pourquoi? Je demande, surprise et sidérée.

— Mya, tu crois vraiment que je ne suis pas au courant ? Je suis sorti major de ma promotion, le président m'a tout raconté, la seule chose que tu as à savoir, c'est que tu dois capturer les gens sur cette liste. Le président sait très bien ce qu'il fait, ne t'en fais pas.

— Tu ne réponds pas à ma question, pourquoi tu veux me dénoncer ? Je demande.

— Si je ne le fais pas, on va être sanctionnées toutes les deux si quelqu'un finit par découvrir la vérité, je suis désolée. Dit-elle en baissant les yeux, dans une expression presque honteuse.

— Donc, si je comprends bien, je vais être « puni » ? Tout ça parce qu'une personne que je considérais comme une amie m'aura dénoncé ? Ce sera quoi cette « sanction » d'abord ?

— Je suis tenue au secret, désolé, Mya. » Annonce-t-elle avant de remettre le contact. Je fronce les sourcils, je ne comprends vraiment pas sa réaction. Je jette un coup d'œil au revolver qui se trouve dans le vide-poche de la portière d'Emma, je n'ai aucune chance, si je m'enfuie, elle n'aurait aucun mal à m'abattre, si je dois fuir, il vaut mieux que je le fasse la nuit.

Un détail me chiffonne encore, quelle sera cette sanction ?

Je comprends alors pourquoi Emma avait cette expression honteuse : la sanction...

Je parie qu'ils vont me tuer et faire passer ça pour un accident, après tout, je suis le « maillon faible », la plus jeune des chasseurs de prime, le boulet qui empêche Emma de capturer plus de fugitif. La voix du président résonne dans ma tête, « il faut se débarrasser des maillons faibles, il nous tire vers le bas »...

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