Septembre 2002

Lorsqu'Hermione retourna à la cabane la semaine suivante, il n'y avait pas de parchemin sur la table.

Il n'y avait pas non plus de table ni de chaises. Le petit bout de mobilier qui avait été là auparavant avait disparu.

Son estomac est tombé et elle a senti la poignée de la porte cliqueter dans sa main.

Elle a continué à regarder fixement, souhaitant qu'un parchemin apparaisse. Elle a regardé dans le reste de la pièce. Peut-être avait-elle négligé quelque chose.

Les meubles n'étaient plus là.

Elle est entrée lentement dans la pièce et a jeté un coup d'oeil autour d'elle.

Peut-être était-il simplement occupé. Peut-être qu'il l'apporterait dans la soirée, pensa-t-elle nerveusement.

Mais les meubles n'étaient plus là.

Il avait peut-être été blessé ou tué. Elle n'y avait même pas pensé jusqu'à ce moment-là ; il pourrait mourir et elle ne le saurait même pas. Il aurait juste disparu, et elle ne l'aurait jamais revu.

Severus lui aurait sûrement fait savoir si Draco était mort...

De plus, les meubles n'étaient plus là.

Elle est restée debout au milieu de la pièce, se demandant quoi faire.

Il n'allait sûrement pas mettre fin à son accord avec l'Ordre juste parce qu'elle avait saigné sur ses meubles d'occasion. Il avait eu le dos taillé en lambeaux pour être un espion. Traîner du sang dans sa planque ne pouvait pas être sa limite.

Peut-être qu'il avait juste brûlé les meubles.

Elle s'est retournée une dernière fois et s'est dirigée vers la porte. Elle reviendrait dans la soirée. S'il n'y avait rien la semaine suivante, alors elle se laisserait aller à la panique. Elle n'allait pas encore se laisser aller à la panique. Il pourrait y avoir une autre explication.

Elle était à mi-chemin de la porte quand elle a entendu un bruit sec. Elle s'est retournée et a trouvé Malfoy debout au centre de la pièce.

Elle l'a regardé fixement, les yeux écarquillés et incertaine. Il l'a regardée de haut en bas, comme s'il s'attendait à ce qu'elle soit à nouveau blessée.

" Nous devrions reprendre l'entraînement ", a-t-il dit après un moment.

Hermione n'a rien dit. Elle était partagée entre l'envie de rire et de pleurer. Le coin de sa bouche s'est contracté et elle a essayé d'avaler une boule dans sa gorge. Sa main tremblait faiblement alors qu'elle luttait pour retenir toutes les choses furieuses qu'elle voulait dire.

J'ai été ici chaque semaine. C'est toi qui as arrêté de venir. Je ne voulais même pas boire cette nuit-là. Tu m'as fait rester et tu m'as punie pour ça. Pourquoi ça t'intéresse ? Pourquoi es-tu là ? Pourquoi espionnes-tu pour nous ? Pourquoi ne peux-tu pas être logique pour que j'arrête de me demander si tu es rachetable ou non ? J'étais ici. J'étais ici et tu es celui qui n'est jamais revenu.

Elle n'a rien dit. Elle est restée sur le seuil de la porte.

Elle voulait simplement se retourner et partir. Partir et essayer de comprendre pourquoi elle se sentait concernée.

Elle s'en souciait. Elle s'est sentie trahie.

Il l'avait mise en garde, lui avait ordonné de faire de l'exercice, de s'entraîner au duel, d'être prudente. Il l'avait rendue paranoïaque et stressée à chaque fois qu'elle s'aventurait à chercher des ingrédients pour ses potions, jusqu'à ce qu'elle puisse à peine respirer quand elle était dehors, jusqu'à ce qu'elle ne puisse même pas manger la veille parce que la nourriture avait un goût de cendre et que son estomac était tellement noué par l'anxiété qu'elle ne pouvait pas la faire descendre.

Il lui avait fait réaliser à quel point elle ne voulait pas mourir.

Elle ne voulait pas mourir.

Il lui avait dit qu'il la formerait, l'avait ridiculisée parce qu'elle n'était pas assez impitoyable, puis l'avait abandonnée.

Il n'a pas abandonné l'Ordre.

Il l'a seulement abandonnée elle.

Ce qui aurait dû être bien. Ça aurait dû être bien pour elle. C'était toujours supposé ne concerner que l'Ordre. Mais ça a fait mal. Chaque semaine où il ne s'était pas montré avait été ressenti comme un nouvel abandon.

Était-elle si facile à abandonner ?

Sa poitrine bégayait, et ses pommettes étaient douloureuses à cause de l'effort qu'elle devait faire pour ne pas pleurer.

Elle n'a rien fait ; n'a rien dit. Elle se contenta de le fixer, les yeux écarquillés, et de déglutir jusqu'à ce qu'elle cesse d'avoir l'impression qu'elle allait fondre en larmes.

"D'accord", a-t-elle dit. "Aujourd'hui ? Ou c'est juste un avertissement pour la semaine prochaine."

"Aujourd'hui", a-t-il dit. "Sauf si vous avez d'autres engagements ce matin."

Elle n'avait pas d'autres engagements. Elle avait du temps. Avec Padma qui prenait de plus en plus de place dans le travail d'Hermione, Hermione avait rarement d'autres engagements. À moins que Kingsley n'ait besoin d'elle ou qu'il y ait une blessure grave, elle était entièrement à la disposition de Malfoy.

Elle se doutait qu'il le savait.

Elle était guérisseuse en arts sombres et spécialiste des malédictions. Elle avait une maîtrise des potions. Elle avait laissé derrière elle et finalement abandonné tous ses amis pour devenir ces choses, pour devenir un atout dans l'effort de guerre.

Mais la contribution que l'Ordre attendait le plus d'elle était qu'elle se transforme en une femme fatale capable de manipuler émotionnellement Draco Malfoy pour qu'il dépende d'elle ; qu'elle essaie de profiter de son manque d'intimité jusqu'à ce qu'elle le possède.

Parfois, cela la mettait tellement en colère qu'elle pensait en mourir.

C'était entièrement la faute de Malfoy. Il l'avait cherchée. Il leur avait fait ça à tous les deux, mais elle était actuellement la seule à en payer le prix.

Il y avait des moments où elle lui en voulait tellement qu'elle avait l'impression que son coeur allait se réduire en poussière dans sa poitrine.

Elle est retournée dans la cabane et a fermé la porte.

"Quand tu as échappé au vampire, comment as-tu fait ?" demanda-t-il après un moment.

"Il avait coincé le bras de ma baguette, alors je l'ai poignardé dans la tempe avec mon couteau à récolter l'argent", dit-elle en haussant les épaules, en essayant de ne pas le regarder.

Ça faisait mal de le regarder.

Il acquiesça, ses yeux ne la quittant pas. "Vous avez toujours un couteau sur vous ?"

"Eh bien, c'est pour la récolte, donc oui, il est habituellement dans ma sacoche."

"Tu devrais le porter. Tu gardes ta baguette dans un étui sur ton bras, n'est-ce pas ?" Son regard se baissa et parcourut son corps de haut en bas, comme s'il la cataloguait.

" Eh bien, parfois ", dit-elle en croisant les bras sur sa poitrine, mal à l'aise sous cette attention. "Il fait presque 20 cm de long. Mes avant-bras ne sont pas aussi longs. Le porter limite le mouvement de mes bras. Soit je perds la mobilité de mon poignet, soit je ne peux pas plier mon coude."

Elle a sorti sa baguette de la poche de sa veste et l'a tenue près de son avant-bras pour faire une démonstration.

Draco se renfrogna et fit rouler sa mâchoire.

" C'est problématique. Où est-ce que tu la gardes ?"

" Si j'ai une veste, je le garde dans une poche intérieure. Si je n'en ai pas, je l'ai dans ma sacoche ou dans ma poche. "

"Ce n'est pas assez rapide. Si on t'attaque, tu ne pourras pas le sortir à temps. Vous devriez au moins avoir un couteau. Tes vêtements sont blindés maintenant, n'est-ce pas ?"

"Oui", dit Hermione immédiatement. "Tout ce que je porte quand je cherche de la nourriture a des charmes de protection."

George et d'autres personnes dans les refuges de l'hospice qui avaient encore des mains assez stables pour faire de l'orthographe passaient la plupart de leur temps à tisser des sorts de bouclier dans les vêtements de rechange pour les résistants.

" Tu préfères les manteaux ou les vestes ? " demanda-t-il après un moment, d'un ton presque suspicieusement désinvolte.

Les yeux d'Hermione s'étrécirent.

"Les capes se fondent mieux dans le monde des sorciers. Une veste sur une femme tend à signaler qu'elle est née dans un milieu moldu ", dit-elle.

" Très bien, alors ", dit-il, en tirant sa baguette de son poignet, mais en la passant dans sa main droite. "Voyons si tu t'es améliorée depuis la dernière fois".

Hermione posa sa sacoche et la warda avant de prendre la pose de duel.

Elle s'était beaucoup améliorée depuis leur dernier entraînement, lorsqu'il était blessé. Elle avait fait de l'exercice au point d'avoir une bonne endurance, et Kingsley et Maugrey l'avaient entraînée plusieurs fois.

Elle était aussi assez en colère pour vouloir jeter un sort à Draco.

Il a bougé pour éviter plusieurs de ses sorts et elle a bloqué la plupart des jets d'eau qu'il lui a envoyés. Finalement, il s'est arrêté.

"Tu t'es améliorée", a-t-il dit.

"Je ne veux pas mourir", a-t-elle dit en haussant les épaules. Sa voix n'était que légèrement amère.

"Bien", dit-il en hochant la tête. Il rangea sa baguette et fouilla dans sa robe. Il en sortit un parchemin, puis un flacon qu'Hermione reconnut immédiatement comme étant rempli d'Essence de Dictame.

Elle sursauta et tendit les mains sans réfléchir. L'essence de Dictame nécessitait de telles quantités de feuilles de Dictame qu'il était rare qu'elle en ait. Ils en avaient obtenu une certaine quantité lorsque l'Ordre avait attaqué la division des malédictions, mais elle en avait utilisé la majeure partie pour soigner les prisonniers. Ce qui restait, elle l'avait utilisé pour neutraliser le venin dans ses runes.

Elle n'a pas pu se permettre d'en acheter ou d'en produire plus après ça. Une seule goutte nécessitait un boisseau de feuilles. Elle transformait généralement son Dictame en poudre ou en teinture. L'efficacité était plus faible, mais ses provisions duraient plus longtemps de cette façon, et pouvaient être utilisées pour soigner plus de gens.

"Ne retourne pas dans le Hampshire", a-t-il dit. "Il y a des centaines de vampires là-bas. Tu as eu de la chance de survivre."

Elle a accepté la flasque avec hésitation.

"Cela va-t-il vous exposer ?" demanda-t-elle en passant ses mains sur le verre avec envie. "C'est une quantité suspecte. Un individu ne pourrait pas en utiliser autant dans une vie."

Il a souri dédaigneusement. "Je suis un général dans les armées du Seigneur des Ténèbres, je peux demander tout ce que je veux. Ceux qui le remettent en question ont tendance à voir leur langue disparaître. "

Hermione a blanchi et Draco a roulé des yeux.

" Je suis facétieux, Granger. Je n'ai jamais coupé la langue de personne. Il suffit de dire que je ne vais pas faire quelque chose qui risque de faire sauter ma couverture juste à cause de toi. " Il s'est moqué d'elle en lui remettant le rouleau d'informations dans les mains.

"Continue à t'entraîner." Il a disparu sans faire de bruit.

Hermione fixa l'espace vide pendant plusieurs minutes avant de partir.

De retour à Square Grimmaurd, elle répartit subrepticement l'Essence de Dictame dans des dizaines de petites fioles et les cacha soigneusement. La plupart des membres de l'Ordre étaient trop ignorants des potions pour remarquer ou se demander si Hermione en avait soudainement une réserve inépuisable, mais Padma le saurait. Cela faisait des semaines qu'ils essayaient d'inventer des moyens d'étirer leur maigre réserve de Dictame.

Malfoy était calme et hargneux lorsqu'il l'entraînait. Il ignorait ses questions et ne parlait que pour la gronder avec colère quand elle faisait quelque chose de mal.

Elle aurait presque pu croire qu'il la détestait, mais chaque fois qu'elle passait la porte, il apparaissait instantanément et avait l'air de se préparer à la trouver blessée ; ses yeux la parcouraient de la tête aux pieds comme pour se rassurer.

Les séances de duels étaient de plus en plus longues.

Hermione fit semblant de ne pas remarquer.

Plusieurs semaines plus tard, Malfoy sortit une cape blindée. Elle l'examina attentivement.

"Tous mes vêtements sont déjà blindés". Elle tint sa cape devant elle et constata qu'elle était parfaitement dimensionnée pour sa taille.

"Celle-ci est protégée par du sang de manticore."

Elle l'a regardé avec insistance. "Cela signifie-t-il que tu l'as tué ?"

"Non. Il est étonnamment difficile de trouver une bonne excuse pour les tuer. Mais il semble que le mien soit étrangement léthargique, McNair ne comprend pas pourquoi", dit-il avec un sourire en coin.

" Tu le saignes ", dit Hermione en regardant à nouveau la cape.

Il acquiesce. " Ils ne se débrouillent pas bien dans les climats froids. Peut-être connaîtra-t-elle une fin malheureuse cet hiver. Si j'ai de la chance, il sera assez mature pour produire du venin avant de succomber au froid."

"J'espère que tu ne le tortures pas", dit Hermione en le regardant. "Il est sensible. Et même s'il ne l'était pas, tout être vivant doit être traité avec humanité."

"Je ne le torture pas. Bien que le qualifier de sensible juste parce qu'il peut parler soit très généreux," dit Draco avec un léger sourire. "Tout ce qu'il fait, c'est chantonner en disant qu'il veut me manger vivant."

"Si tu me gardais prisonnière et que tu me vidais de mes capacités magiques, je croonerais de la même façon", dit Hermione.

Draco a éclaté de rire.

" Merci pour la cape " dit Hermione après l'avoir examinée attentivement. Elle était magnifiquement faite. Des charmes de régulation de la température y étaient tissés pour qu'elle puisse la porter toute l'année et elle était doublée de dizaines de poches indétectables pour qu'elle puisse y cacher des choses. L'ourlet était enchanté pour qu'on ne trébuche pas dessus. Même sans la protection du sang de manticore, la cape devait valoir une petite fortune en termes d'artisanat.

"Considère que c'est mon remerciement pour avoir soigné mon dos", a-t-il dit sans la regarder.

Elle l'a regardé et il a regardé fixement par la fenêtre. "Sont-ils...", elle a hésité. "Est-ce que le tissu cicatriciel a bien pris ? Je... tu... tu n'es jamais venu... quand je suis venu voir comment ils allaient."

"Ils vont bien", a-t-il dit d'une voix raide. "Physiquement, je peux à peine les sentir. Je n'avais pas besoin de plus d'attention."

Sa mâchoire roulait légèrement, ondulant alors qu'il la serrait. Hermione le fixa un instant avant de baisser les yeux sur la cape.

"C'est bien," dit-elle. "Je n'avais jamais fait la procédure à ce point auparavant. J'étais inquiète..."

"Ne le soyez pas ! Je n'ai pas besoin de l'inquiétude de quelqu'un comme toi."

Hermione l'a regardé avec de grands yeux. Il a serré les mains en poings en la fixant.

"Je voulais juste...", commence-t-elle.

"Laisse tomber, Granger", dit-il d'une voix dure. Il a arraché un parchemin de sa robe et l'a laissé tomber sur le sol avant de disparaître.

Hermione ramassa le parchemin pensivement et se tapota le menton après avoir tout rangé dans sa sacoche.

Elle quitta la cabane et se dirigea vers le ruisseau, plongée dans ses pensées.

Qu'avait-il dit à propos de l'influence des runes ?

"Elles ne contredisent pas mon propre comportement, mais c'est comme si de nouveaux éléments avaient été inscrits. Il est plus facile d'être impitoyable. Un peu plus difficile de me dissuader de mes impulsions. Ce n'est pas que j'avais beaucoup de distractions avant, mais maintenant, tout le reste semble encore moins important."

Elle avait mémorisé le vœu runique, elle avait passé tant de soirées à le fixer. Inébranlable, rusé, infaillible, impitoyable et inflexible ; déterminé à réussir....

Mais ce qui le poussait à réussir n'était pas précisé, laissé à sa discrétion.

Il la voulait.

Elle en était presque certaine. Il était actuellement partagé entre sa détermination à la repousser et son désir de l'avoir.

C'est pour cela qu'il avait été si furieux qu'elle soit blessée.

Il ne pouvait pas se dissuader au point de ne pas se soucier de sa mort, mais il était déterminé à ne pas céder à son désir et à se compromettre. Les Malfaisants sont possessifs comme des dragons, avait dit Severus.

Il savait ce qu'elle faisait, ce pour quoi elle avait été envoyée. Elle pouvait le voir dans la façon dont il la fixait, plein de ressentiment. Il y avait une rage vicieuse dans ses yeux qui n'était pas là avant.

Mais il était acculé par la réalisation qu'elle allait probablement mourir s'il ne la formait pas. L'attaque du vampire avait été remarquablement chanceuse. Si elle avait essayé de la mettre en scène, ça n'aurait pas pu mieux se passer.

Si elle le gardait près d'elle, ce n'était qu'une question de temps avant qu'il ne dérape finalement ; il la désirait trop pour continuer à se retenir. Les runes le garantiraient.

Quand cela arriverait...

Hermione soupira.

A ce moment-là, il lui appartiendra.

A moins qu'il ne soit si désespéré de se libérer de son obsession qu'il la tue.

Par moments, lorsqu'elle sentait ses yeux sur elle pendant qu'ils se battaient en duel, elle avait l'impression qu'ils étaient à pile ou face. Comme s'il pesait constamment ses options.

Aussi confiante qu'elle était devenue dans son attention, elle n'était pas assez confiante pour dire si elle y survivrait. Il y avait tant de choses sur Draco Malfoy qu'elle ne connaissait pas ou ne comprenait pas. Quand elle le regardait, elle ne pouvait que se demander s'il était le genre de personne à détruire les choses qu'il aimait.

Quel que soit ce qu'il voulait - son motif d'espionnage - il avait déjà tué un nombre incalculable de personnes pour tenter de l'obtenir. S'il pensait qu'elle était sur son chemin... elle pourrait être la prochaine.

Inébranlable, rusé, indéfectible, impitoyable et inflexible ; poussé à réussir.....

Hermione a tordu la sangle de sa sacoche en réfléchissant.

Elle devait donner la priorité à la formation de Padma pendant le temps libre dont elle disposait.

Padma avait une bonne aptitude pour la guérison, elle restait calme sous la pression et avait une bonne tête pour mémoriser tous les sorts et leurs variations. Elle avait cependant des difficultés avec la précision requise pour certains travaux de baguette de guérison, et elle avait tendance à se fier à la mémorisation par cœur plutôt que de faire preuve de la créativité nécessaire pour inventer des contre-malédictions. Mais Hermione espérait qu'avec l'aide de Pompom, Padma serait capable de la remplacer suffisamment.

Hermione avait commencé à emmener Padma à la recherche de nourriture. Il fallait que quelqu'un d'autre sache comment rassembler les réserves locales de potions ; à l'approche de l'hiver, il fallait essayer de faire des réserves. Mais Hermione avait pris soin de ne pas faire savoir à Draco qu'elle avait un partenaire de recherche de nourriture. S'il le découvrait, il arrêterait probablement de l'entraîner.

Elle allait chercher de la nourriture avec Padma le jeudi matin. Les mardis, elle y allait toujours seule, mais avec plus de précaution.

Hermione avait besoin que tout soit en place avant d'essayer de faire avancer les choses avec Draco.

Elle regardait l'eau glisser sous le pont et se demandait si elle ne gagnait pas du temps.

Elle ne voulait pas mourir.

Ces dernières semaines, elle s'était surprise à penser à la mort presque autant qu'à Draco.

Après avoir senti les crocs du vampire s'enfoncer dans son épaule, elle a été brusquement confrontée au fait qu'au niveau primaire, elle était absolument déterminée à ne pas mourir. Elle n'avait pas réalisé à quel point cette pulsion était écrasante.

Rationnellement, elle avait toujours considéré la mort comme quelque chose qu'elle pouvait affronter. Pour une bonne raison, elle serait heureuse de mourir.

Mais à l'instant où elle a senti la terreur des mains qui la maintenaient au sol et des dents qui s'enfonçaient dans sa chair, l'instinct de se battre pour se libérer et de tuer tout ce qui se trouvait sur son chemin a envahi son esprit. Elle n'avait pas réalisé à quel point son instinct de survie l'emportait sur tout.

Elle n'avait pas réalisé à quel point elle ne voulait pas mourir.

Mais s'il s'agissait d'elle et de Draco, elle mourrait probablement. Il pouvait la tuer si facilement. Un autre cadavre pour son compte. Elle se viderait probablement de son sang avec le reste de ses morts au bout d'un moment.

Elle a souri amèrement en pensant au contraste entre eux.

Le nombre de cadavres d'Hermione était la représentation de ses échecs. Tous ceux qu'elle n'avait pas sauvés.

Le nombre de cadavres de Draco était l'illustration de sa réussite. Tout ce qu'il était et pourquoi il avait de la valeur pour Voldemort et l'Ordre.

Leur relation, quelle qu'elle soit et où qu'elle aille, ressemblait à une forme cruelle d'ironie. C'était comme s'ils étaient l'inverse l'un de l'autre.

Le yin et le yang. Ils tournaient inexorablement autour.

D'une certaine manière, la guerre les avait liés

Elle est retournée au Square Grimmaurd et est allée trouver Kingsley.

En général, elle ne parlait qu'à Maugrey, mais Alastor était en Irlande pour former de nouvelles recrues avec Remus et Tonks.

Kingsley était debout dans la salle de guerre, fixant une carte sur le mur. Hermione savait qu'il était conscient de sa présence, mais il ne la reconnut pas immédiatement.

" Kingsley ", dit Hermione en fermant doucement la porte, " je peux te parler ? ".

Il se retourna d'un geste vif, ses robes flottant autour de lui, et jeta plusieurs protections d'intimité dans la pièce avant de parler.

"Granger", dit-il, "de nouvelles informations ?"

Hermione a débouclé sa sacoche et lui a tendu le parchemin. Kingsley le déplia et le parcourut des yeux pendant une minute avant de le ranger dans sa robe et de regarder à nouveau Hermione.

" Tu as besoin de me parler de quelque chose, Granger ? "

Hermione le regarda fixement pendant un moment. Depuis que Draco l'avait réclamée, Kingsley avait cessé d'utiliser son prénom. Elle l'avait remarqué. Il désignait Harry, Ron et la plupart des autres membres de l'Ordre par leur prénom, mais il utilisait toujours son nom de famille pour s'adresser à elle. Pour la rendre impersonnelle à ses yeux, elle en avait conclu.

" Je pense que Severus vous a parlé, ainsi qu'à Maugrey, de ses inquiétudes concernant Malfoy ", dit-elle.

Kingsley hocha la tête, son expression ne trahissant rien. "Oui, nous avons parlé."

Hermione hocha la tête. " Au train où vont les choses... je commence à penser qu'il y a au moins une chance que Malefoy me tue. "

Kingsley l'a regardée franchement et a redressé sa robe. " Vous voulez qu'on vous sorte de là, Granger ? "

Hermione détourna le regard et fixa une nature morte sur le mur. "Non. Nous avons besoin d'informations. Sans Malfoy, nous serions probablement tous morts à l'heure qu'il est. Je veux juste savoir à quoi je dois donner la priorité pendant que je forme Padma pour me remplacer. Elle n'a pas deux ans comme moi, et il y a encore trop de soins de base qu'elle doit apprendre avant que je puisse lui enseigner les soins avancés des arts sombres. Et puis il y a les potions et la recherche de nourriture. Je ne suis pas sûr. Elle n'est pas aussi motivée que je l'étais. Je sais qu'elle voulait rester sur le terrain avec Parvati. Donc j'ai besoin de savoir ce que vous et Maugrey considérez comme les plus grandes priorités."

Kingsley est resté silencieux pendant une minute.

"Je vais parler avec Alastor et regarder les rapports de l'hôpital. Peut-être faire une liste des domaines dans lesquels nous n'avons pas de redondance. J'aurai une réponse la semaine prochaine."

"D'accord", dit Hermione en hochant la tête. Sa voix semblait guindée et mécanique.

"Granger. Dites-moi, quelle est exactement la stratégie que vous essayez d'employer ?"

Elle jeta un nouveau regard à Kingsley et se sentit fatiguée.

" Il me veut. Il est obsessionnel, et il me veut. Mais il sait ce que je fais. Je peux dire, à la façon dont il me regarde, qu'il sait. Je ne sais toujours pas quels sont ses objectifs à long terme. Il ne dit jamais rien qui le trahisse. Si je continue à l'attirer, et qu'il s'avère que j'interfère avec son ambition première, il pourrait avoir recours à me tuer. Mais s'il ne me tue pas, d'après Severus, les Malfoy ont tendance à être à la fois obsessionnels et possessifs. Je ne pense pas qu'il abandonnera l'Ordre à ce moment-là. La volonté semble essentielle, et il sait que la mienne est conditionnée par la survie de l'Ordre. "

Puis elle a haussé les épaules. " Ou je pourrais me tromper et il se retournera contre l'Ordre, ce que Severus craint. Honnêtement, je ne sais pas. Ce n'est pas... je ne sais pas comment utiliser les gens comme ça."

Kingsley était silencieux.

" S'il est de plus en plus obsédé par vous - c'est plus que ce à quoi je m'attendais ", dit-il en jetant un coup d'œil à la table et en posant ses doigts sur le bord et en tapotant pensivement.

Hermione avait l'impression qu'elle devait avoir une réaction quelconque à ces mots, de l'offense ou de la satisfaction ou quelque chose comme ça. Mais elle ne ressentit rien. C'était comme si son cœur se compactait lentement à l'intérieur de sa poitrine, devenant plus petit et plus dur jour après jour.

"Je ne suis pas...", commença-t-elle avant de s'arrêter et de presser ses lèvres l'une contre l'autre. Elle a légèrement tourné la tête alors qu'elle sentait la tension dans son cou commencer à irradier le long de ses épaules. "Je ne lui mens pas, Kingsley. Je ne suis pas hypocrite. Le lien émotionnel entre nous est réel."

Les doigts de Kingsley s'immobilisèrent, et il l'étudia avec des yeux légèrement bridés. " J'espère que vous ne vous compromettez pas avec lui, Granger. L'Ordre dépend de vous pour rester en mission. "

Hermione hocha la tête avec raideur. " Ma loyauté ira toujours à l'Ordre en premier. "

L'expression de Kingsley ne s'est pas calmée. " Harry, tu sais que je ne peux l'éloigner des pires combats que si je sais lesquels. "

Hermione a tressailli. " Je sais. Je fais tout ce que je peux, Kingsley. Je fais tout ce que je peux, du mieux que je peux. Je ne ferais jamais rien qui puisse mettre Harry en danger. "

" Continue comme ça alors ", a dit Kingsley en se retournant vers la carte sur le mur.

Hermione le fixa dans son dos pendant plusieurs instants avant de se retourner et de poser sa main sur la poignée de la porte ; alors qu'elle la saisissait, elle se mit à rire doucement.

" Vous voulez dire autre chose, Granger ? " La voix de Kingsley avait une légère pointe.

Hermione jeta un coup d'œil par-dessus son épaule. Il lui tournait toujours le dos.

"Je viens de réaliser", dit-elle à voix basse, "Si je réussis, vous m'utiliserez pour contrôler Malfoy de la même façon que vous utilisez Harry pour me contrôler. J'ai presque de la peine pour lui. "

Kingsley est resté silencieux pendant un moment. "Eh bien, il le méritera bien plus que vous."