iv. j-2 // cody

Don't wanna give you all my pieces
Je ne veux pas tout te montrer de moi
Don't wanna hand you all my trouble
Je ne veux pas te refiler tous mes problèmes
Don't wanna give you all my demons
Je ne veux pas te transmettre tous mes démons
You'll have to watch me struggle
Tu devras me regarder lutter

~
tw : 👨‍👩‍👦😡/🥵

  Bon, j'avoue, j'ai choisi la deuxième option. Et je suis un imbécile. Et je viens de signer mon arrêt de vie. Mais que voulez-vous, je suis ainsi, faut toujours que je fonce dans les ennuis et m'enlisse dedans jusqu'au bout.

  Non, plus sérieusement, j'ai besoin de bouger. Le dégoût dans les yeux de ma famille, la déception de ma mère, la prise de conscience que mon quotidien s'apprête à changer complètement, pour une putain de petite connerie de merde... C'est trop, j'étouffe.

   J'en ai marre qu'on me traite comme si j'étais le pire des criminels pour des petites conneries qu'il est tout à fait normal de faire à mon âge, qu'on attende toujours le pire de moi, comme si tout ce que je faisais quotidiennement était de décevoir les gens. Je suis loin d'être parfait, et je l'assume, mais à force d'agir comme si j'allais forcément finir par dérailler, bah je finis par dérailler. Parce que je me dis que, même si j'essayais de m'assagir, on ne verrait toujours en moi que mes erreurs, peu importe tous mes efforts. Je ne suis pas mon père ! Je suis moi, une personne à part entière, et ce n'est pas parce que je suis son fils que je vais forcément finir comme lui ! j'ai envie de leur crier. Mais bon, comme je sais que ça ne me mènera à rien mis à part des nouveaux conflits, alors je préfère me taire et décider de m'en foutre. Je ne vais pas sacrifier mon plaisir personnel pour des gens qui ne m'aimeront jamais comme je suis. C'est eux qui perdent quelque-chose, de toute façon, pas moi.

  Je balance mon sac de sport dans lequel sont toutes mes affaires sur le porte-bagage de ma moto, en y mettant par dessus mon étui de guitare électrique. Je l'enfourche, démarre, jette un dernier coup d'oeil à ma maison derrière moi, et me mets à rouler au loin.

  Je fais le chemin d'abord jusqu'à la maison de Jonas, où j'ai demandé à toute la bande de me retrouver pour leur annoncer la nouvelle. Mon coeur se serre à cette idée. Je n'accorde pas d'importance à beaucoup de choses, mais il est vrai que, maintenant que j'y pense - c'est-à-dire beaucoup trop tard après avoir fait la boulette, comme d'hab - ça va être nul de ne plus être au lycée avec eux l'année prochaine, sans compter qu'ils risquent d'être absolument vexés par mon acte égoiste et irréfléchi. Oups. Bien sûr, on pourra toujours se voir en dehors des cours, de plus qu'ils savent depuis longtemps que le proviseur m'avait dans le collimateur, mais bon.

  Je me garde devant chez mon meilleur ami où il m'attend de pied ferme. A peine ai-je le temps d'éteindre le moteur et de descendre, que déjà il me saute dessus.

- Cody, tu peux m'expliquer dans quoi tu t'es encore fourré ?

Je tapote le bout de mes indexs ensemble - le fameux don't be shy, toi-même tu sais - pour marquer ma gêne.

- Tu me sors comme ça, hier à minuit "oh tiens, que je te dise, je me suis encore fait lyncher, tu vas pas être très ravi", après quoi tu me dis de patienter jusqu'au lendemain pour savoir, limite à faire une réunion d'affaire pour anoncer la chose ! Donc qu'est-ce que t'as bien pu faire, encore ?

- Je vais t'expliquer à l'intérieur.. je me contente de répondre en le contournant pour passer. Tout le monde est déjà là ?

- Yes.

  Il passe une main dans ses cheveux dorés, ses yeux bleus me fixant avec mécontentement difficilement crédible, et de curiosité. Car, connaissant mon meilleur ami, ce n'est pas lui qui va le plus se fâcher. Il est encore plus irresponsable que moi, donc je pense qu'il va rigoler un bon coup, puis pester contre le lycée. Par contre, Meghan et Alyssa, ça risque d'être une autre histoire... Bon, je vais moins pouvoir faire le malin, maintenant.

  On se dirige dans le salon, où tout le monde nous attend assis sur les canapés. A peine ai-je franchi le pas de la porte, que Meghan, mon autre meilleure amie, se lève et vient me prendre dans ses bras. Je la serre contre moi avec un sourire, toujours attendri de ses marques d'affection. Mais elle finit par se reculer, et elle me frappe l'arrière du crâne.

- Qu'est-ce que t'as bien pu encore nous inventer, toi ?

Marco, qui est présent pousse un rire de malaise.

- Ouch, ça va chauffer, grimace-t-il.

- Toi, je suis sûre que tu n'y es pas pour rien ! s'exclame Alyssa en pointant un doigt accusateur sur lui.

Il lève les mains en l'air, comme un criminel mis en état d'arrestation par un policier, et se défend :

- Je pouvais pas savoir que les conséquences risquaient d'aller aussi loin !

Il prend une mine boudeuse.

- Pffff, de toute façon, j'en étais sûre qu'un jour ça finirait mal, vos histoires.. râle Meghan.

Jonas rit :

- Je crois qu'ils s'entraînent pour le Guiness des Records de la Connerie la plus Stupide !

- La ferme, parce que t'es pas mieux ! rétorque Alyssa.

- Peut-être, mais moi, au moins, j'ai l'intelligence de pas me faire choper.

Et il tire la langue dans sa direction, tel le plus puéril des gamins.

Je me mords la lèvre, avant de me racler la gorge en m'asseyant, pour avoir leur attention.

- Désolé les gens, mais ça va un peu moins vous faire rire, cette fois..

Tous se calment, et me fixent d'un air assez inquiet devant ma mine déconfite et honteuse. C'est vrai que ça ne me ressemble pas du tout, de regretter après avoir fait les quatre-cent coups, au contraire.

- C'est si grave que ça ? demande Alyssa, les yeux écarquillés.

- J'ai réussi à me faire virer du lycée pour le dernier jour.. j'avoue en baissant la tête.

- Quoi ? s'exclame Jonas.

Meghan rigole faussement, avec ironie.

- Hilarant, Cody..

Je lui lance un regard qui la dissuade de la moindre supposée tentative de blague.

- Attends, c'est pour de vrai ?

- En effet..

Elle plaque une main devant sa bouche, abasourdie.

- Et comment t'as fait ton compte ? questionne Alyssa.

Je leur raconte comment Marco et moi, pris d'une envie soudaine, on est allés se cacher dans un cabine pour faire nos affaires, sous l'excuse que c'est la fin de l'année, qu'on nous dira rien.. Sans s'imaginer qu'un prof passerait dans le couloir à ce moment-là et entendrait ses gémissements tandis que je lui astiquais le poireau. J'ajoute aussi le rendez-vous avec le directeur, la réaction de ma mère, les insultes de George..

Marco complète avec celle de la sienne, qui s'est fâchée contre son manque de décence, mais qui, au final, était plus inquiète pour notre sort qu'autre-chose. Elle lui a bien sûr confisqué sa play pour deux semaines, ce qui risque d'être une très dure épreuve pour un geek comme lui, mais la connaissant, elle ne lui en voudra pas si longtemps que ce qu'elle veut lui faire croire.

A la fin de notre histoire, on se retrouve tous comme des imbéciles à fixer dans le vide, sans trop savoir quoi dire. Jonas est le premier à briser le silence :

- C'est chaud, quand même.. Ils auraient pu être plus cléments.

- Mais Cody, on va faire comment sans toi ? me réprimande Meghan. Tu te rends compte qu'on pourra plus se voir pendant les jours d'école ?

- On se retrouvera les soirs, on s'organisera, la rassuré-je.

- Bah même, c'est vraiment pas cool !

Alyssa, elle, se contente de ricaner avec sarcasme.

- Vous avez vraiment pas de cerveau, quand même ! fait-elle.

Mais je sais que derrière cette facade, elle aussi est déçue. Mais bon, c'est comme ça, j'imagine.

Marco soupire, en me demandant :

- Mais du coup, tu vas faire quoi pour tes parents ?

- J'ai prévu d'aller chez ma marraine Kendra pour passer l'été chez elle ; j'ai besoin d'un peu de solitude pour réfléchir.

Sans faire exprès, je ne peux m'empêcher de laisser deviner de l'amertume dans ma voix. C'était son idée, au départ, après tout. Bien que je ne lui en veuille pas, c'est vrai que ce fait me refroidit un peu quant à lui. Et à propos de Kendra, je ne pense pas que ça la dérangera que je déboule chez elle sans prévenir : elle m'a toujours dis que je pouvais m'inviter chez elle n'importe quand, puis elle n'organise que très rarement quelque-chose durant les grandes vacances, elle sera donc disponible.

Tous hochent la tête, compréhensifs, mais je leur promets malgré tout qu'on s'organisera des trucs. Après tout, elle n'habite pas très loin, à peine trois quarts d'heures de route, c'est pas la mer à boire. Mais j'ai besoin d'un peu d'isolement, afin de me recentrer sur ma manière de me comporter, sur ce que je veux vraiment, et prendre le temps de réfléchir à la manière dont j'aborderai la questions de ma sexualité avec ma mère, car je crois bien que ça va être inevitable... Mais si on en parle à chaud, ça risque plus de se terminer en hurlements et claquages de portes qu'autre-chose.

Nous passons le reste de la journée ensemble, à discuter de tout et de rien dans une ambiance un peu plus apaisée, puis viens le temps de partir. Je reprends mon téléphone que j'avais laissé de côté pour n'être qu'avec eux, et constate que, comme je m'y attendais, j'ai des tonnes de messages de ma mère.

Elle : Ah, parce qu'en plus, tu crois que tu peux partir comme ça sans prévenir ?

Elle : Rentre à la maison, tout de suite.

Elle : Cody, tu as interêt à me répondre. Où es-tu ?

Elle : Je ne te le dirai pas cinquante fois. Déjà que ton beau-père est furieux..

Énervé de son manque de compréhension, je lui réponds sèchement :

Moi : Désolé, mais j'ai besoin de respirer un peu, là.

Elle : Parce que tu crois que c'est dans ton droit, après la honte que tu nous as causé ?

Je l'ignore, et dis au revoir à mes amis, et enlace tour à tour Meghan, Jonas et Alyssa. Marco, quant à lui m'annonce qu'il va m'accompagner dehors pour me parler seul à seul.
  Une fois sortis, un silence s'installe tandis que nous marchons côtes-à-côtes. Puis...

- Désolé, s'excuse-t-il. Si j'avais su que..

- C'est bon, je le coupe. Ce qui est fait est fait.

Il se masse les tempes, contrarié.

- J'espère que, magré tout, tu regrettes pas tout ce qu'on a pu partager. J'veux dire, c'était cool d'expérimenter tout ça avec toi.

En effet, toute cette histoire a commencé quand, après s'être croisés à plusieurs fêtes, durant l'une d'elle après avoir un peu trop bu, on s'est rendus compte qu'on partageait tous les deux le même petit secret : se poser des questions sur notre sexualité. Je me doutais depuis plus longtemps que ça encore que je pouvais être attiré par les garçons, mais il n'y avait jamais rien eu de concret, n'ayant jamais rencontré d'autres membres de la communauté lgbt dans mon lycée de cathos. Alors, même si mes plus proches amis étaient déjà au courant et ne m'ont jamais jugé, ça m'a fait du bien de rencontrer quelqu'un qui partageait mes doutes. Alors, c'est comme ça qu'on a commencé à explorer ce côté de nous, même si il n'y a jamais rien eu de plus entre nous que cette avidité de découverte et cette camaraderie un peu maladroite.. Je me demande d'ailleurs si, un jour, je tomberai vraiment amoureux d'un garçon. Qui sait ?

- T'inquiète, je le rassure.

- Tu préfères qu'on en reste là, c'est ça ?

Voilà, le point de la conversation, ce qui l'a poussé à venir. Ce qu'il voulait savoir.

- Sans vouloir te vexer, je crois qu'on a fait un peu le tour, tous les deux. Pis ça valait pas vraiment tous les problèmes que ça nous cause maintenant.

- Ouais, t'as raison. Mais on reste quand même potes ?

  Sa question a été posée d'un air assez nonchalant pour que je puisse me dire qu'il ne me demande pas ça tristesse ou résignation, juste par curiosté de savoir ce qu'il en est. Ce qui m'arrange, moi qui ne suis jamais très enclin à exprimer de l'affection envers les gens, surtout quand je les connais si peu. C'est donc sur ce même ton que je lui réponds :

- Bien sûr.

- OK.

Puis, on se retrouve à fixer les graviers, sans plus rien à dire. Je finis par crever l'abcès, en lançant :

- Bon, je dois y aller. A plus, mon pote.

Il me fait un signe de la main en souriant, tandis que je grimpe sur ma moto. Le soleil de fin d'après-midi se réflète sur ses cheveux noirs, illiminant son teint métisse. Okay, j'avoue que physiquement, il est pas mal, quand même. Mais bon, ça s'est toujours arrêté là.

J'étire mes lèvres dans sa direction pour lui rendre sa salutation, et démarre.

_x.

Quand j'arrive à destination, je me gare devant chez ma marraine, et entre directement avec le double des clefs qu'elle m'a donné il y a des années. Je traverse les pièces, jusqu'à sortir par derrière par la baie vitrée, où je la trouve à la table de jardin, de dos, discutant avec en face Nathaniel, son mari, et Caroline, leur fille.

Celle-ci est d'ailleurs la première à me voir, et elle se lève en courant dans mes bras :

- Cody, quelle merveilleuse surprise !

Spoiler alert : ça fait pas mal de temps que je la souçonne d'avoir un petit faible pour moi. Comme ça, vous êtes prévenus direct.

Kendra se retourne, et ses yeux deviennent ronds comme des soucoupes quand elle me remarque, dans une réction similaire à celle de son mari.

- Mais qu'est-ce que tu fais là, toi ?

Je pousse un rire malicieux, profitant quelques secondes de l'effet de surprise. Après tout, j'avoue que j'ai toujours aimé être au centre de l'attention... Puis, j'annonce :

- Faudra que je te parle d'un truc, en privé.

- Oula..

Me connaissant par coeur, elle devine rien qu'à ma tête qu'il y a un léger problème. Caro me lâche, et je vais faire saluer ma marraine et Nat, avant que celle-ci et moi allions à l'intérieur pour discuter, à l'abri des orreilles indiscrètes. Les autres, eux, nous regardent nous diriger vers l'intérieur d'un air un peu déboussolé.

Elle me suit à la cuisine où j'ai laissé mes affaires, et je pose ma veste en cuir sur une chaise, avant qu'on s'installe à table pour que je lui raconte la bonne nouvelle. J'allume une cigarette, tire une taffe, et lui passe. Elle l'accepte, avant me demander :

- Bon, qu'est-ce qui se passe ?

Et pareil, je lui dis absolument tout, sans aucune gêne ni pudeur. Il n'y en a jamais eu entre elle et moi. Malgré tout, j'appréhende surtout pour le début, ce qu'elle va penser du fait que je sois.. bisexuel ? enfin, pas hétéro, mais à aucun moment elle ne me regarde d'un air écoeuré, ni même ne fronce les sourcils. Elle lève juste les yeux au ciel d'un air amusé quand vient l'histoire des toilettes - "quand même, y'a que toi pour être capable de nous faire des coups pareils !" fait-elle d'un ton mi-amusé, mi-exaspéré - et m'observe avec trouble et anxiété quand je lui parle de mon châtiment et de la manière dont ma famille l'a pris.

Quand j'ai terminé, elle souffle de la fumée avec ma cigarette en plissant des yeux, puis me dis :

- C'est une sale histoire, quand même. Je veux dire, c'est sûr que c'était pas très malin, mais tout le bazar que ça engendre.. Enfin, vous êtes adolescents, c'est assez normal de se chercher à votre âge.

- Tu vas me sortir que c'est juste une phase ? je fais d'un ton un peu vexé.

- Non, je parlais de ce que vous avez fait, pas du fait que tu aimes les mecs. C'est bien connu qu'à l'adolescence, notre libido se réveille, et forcément on a envie de s'explorer...

- Ah.. Mais du coup, ça te dérange si je reste chez toi le temps que ça se calme un peu ?

Mon coeur tambourine dans ma poitrine. J'espère qu'elle ne va pas refuser.. Bien sûr, je ne veux pas déranger, mais c'est vrai que ça me sauverait fortement la vie.

- Je pense qu'il n'y a aucun mal à ça, mais je te préviens : je serai pas seule pendant ces deux mois.

- Comment ça ? je la questionne, surpris.

C'est devenu rare qu'elle invite des gens à la maison depuis la mort de mon père, son meilleur ami.. Elle semble justement lire dans mes pensées, car elle plante ses yeux noisettes dans les miens, et me dis d'un ton un peu tremblant :

- July m'a contactée pour me dire qu'elle voudrait qu'on essaye de reprendre contact.

A mon tour de m'arrêter de resprirer, sous le choc.

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