Chapitre 31 - Just because it burns doesn't mean you're gonna die
Jeudi 2 février
Le corps froid et puissant de mon père prend possession de mon salon pendant que je le regarde ternir mon refuge, impuissante. Si j'étais simplement fatiguée depuis quelques jours, en une demi-seconde mon corps s'est vidé de son fluide. Abattue par les mots qui vont bientôt me désintégrer, je m'assois sur mon canapé et le laisse faire. Je suis déjà vaincue, à quoi cela servirait-il que je me batte ?
Mon père s'approche et se plante à seulement quelques centimètres de moi. Sa carrure imposante m'engloutit dans son regard déçu et je reste pendue à ses lèvres, attendant fébrilement de connaître mon sort.
-Peux-tu enfin m'expliquer où diable te trouvais-tu samedi ? Je suis venu te chercher mais ton appartement était vide et nous t'avons attendue pendant des heures.
Chaque mot qu'il prononce semble le dégoûter profondément, comme s'il s'adressait à la pire des ordures que la terre n'a jamais portée. Je fourre mes mains sous mes cuisses et je me pince pour que ma douleur fasse diversion.
-Je...
-As-tu simplement idée de l'embarras dans lequel tu nous as mis, avec ta mère ? Toute la famille Bergmann était présente pour que nous te présentions leur fils. Et toi, comme une irresponsable, tu as décidé de déserter les lieux et d'ignorer nos appels !
Mon estomac se retourne lorsque je me remémore le nombre d'appels et de messages que j'ai effacés sans même prendre la peine de les consulter. Je savais que ma désertion allait une fois de plus engendrer une catastrophe mais... à dire vrai, je crois que j'ai préféré ignorer tout cela.
-Je vous avais prévenus que je ne participerai pas à ce repas.
-Et depuis quand c'est toi qui commande Candice ? rétorque-t-il dans un rire cynique qui me glace jusqu'à l'os.
Malgré mon épuisement moral et physique, je sens une vague de colère se former dans mes veines mais je suis juste trop faible pour qu'elle ait le moindre impact sur mon géniteur.
-Alors maintenant, tu vas nous faire le plaisir de rendre visite aux Bergmann samedi pour t'excuser platement et rencontrer ce garçon qui fera enfin de toi quelqu'un de respectable.
Je me prends la tête entre les mains et je suis surprise de constater que je n'ai même plus la force de pleurer. J'ai juste envie de me faire mal pour que ma douleur physique anéantisse ce qui ronge mon esprit bien trop violemment.
-Mais... mais non... laissez-moi tranquille, s'il vous plait...
-Non mais tu veux bien arrêter ton cinéma ! Tu es ridicule ma pauvre Candice, tu es vraiment pathétique ! Mais regarde-toi... tu ne ressembles à rien, ta vie n'a aucun sens et tu as toujours pris les mauvaises décisions. Et aujourd'hui, alors que nous essayons vainement de t'accorder des chances que tu ne mérites pas, tu te contentes de me tenir tête de cette manière ! Tu gâches nos vies et tu n'en as même pas conscience. Tu nous fais constamment honte et tu ne fais rien pour y remédier !
Son corps s'approche encore un peu plus du mien et je me recroqueville contre mes genoux. Je sens sa main froide agripper durement mon bras et ses ongles s'enfoncer dans ma peau. D'un coup brusque, il me relève et je tangue. Ma tête tourne et je prie silencieusement pour que quelqu'un m'achève.
-Maintenant, tu vas arrêter tes caprices et tu vas me suivre, que tu le veuilles ou non. Tu es certes la pire chose qui nous soit arrivé mais sois-sure que nous ne te laisserons pas tranquille tant que...
-Putain de merde, mais c'est quoi ce bordel ??!
Soudain, tout se passe très vite. Je n'ai pas besoin de relever la tête pour savoir que mon sauveur s'est enfin matérialisé. Je sens les doigts de mon père quitter mon bras et je me recule instinctivement. Je ne respire pratiquement plus. Mes prunelles observent la scène apocalyptique qui se déroule devant moi mais mon cerveau a totalement disjoncté. Il est incapable de comprendre ce qui se trame et de faire quoique ce soit pour l'arrêter.
Je vois Ethan empoigner violemment le col du manteau de mon père et le soulever du sol avec une facilité déconcertante. Même si mon père est plutôt grand et costaud, l'homme qui se tient en face de lui le surplombe avec rage. J'entends son dos frapper abruptement contre le mur avant qu'Ethan pose sa main sur sa gorge. Je distingue les yeux de mon père crier silencieusement à l'aide et son visage devenir blanc. Il suffoque mais les petits bruits étouffés qu'il lâche sont immédiatement assourdis par la voix plus grave que jamais qui claque dans l'air.
-T'es qui toi ?
Aucune réponse. Seuls les battements délirants de mon cœur et les grognements de rage d'Ethan brisent le semblant de quiétude qui a envahi mon salon.
-De quel droit tu oses poser tes mains sur Candice, espèce de connard ?
Les yeux vitreux de mon père s'écarquillent de stupeur et je crois voir ses mains trembler.
-Ravale toute de suite la merde que tu lui as dit où je défonce ta sale gueule de connard dans deux secondes !
Mon père reste stoïque et c'en est trop pour Ethan. Brusquement, je vois son poing se lever et s'approcher à toute vitesse du visage bleui de son ennemi.
-Nooooooon !
J'ai crié aussi fort que j'ai pu. Ma voix d'outre-tombe nous surprend tous les trois et Ethan tourne vigoureusement la tête dans ma direction, détachant ainsi son regard de mon géniteur pour la première fois depuis qu'il est entré en trombe ici. Ses iris affolés et inquiets me demandent de parler, de le rassurer et de lui expliquer mais je suis paralysée. Je parviens seulement à murmurer, du bout des lèvres :
-Laisse-le Ethan...
Ma supplique ne semble pas avoir l'effet escompté puisqu'il se retourne immédiatement pour poignarder mon père de ses yeux tranchants.
-Réponds-moi. T'es qui toi ?
-Son... son... pè-père.
D'où je suis, je peux aisément voir l'effarement se dessiner sur le visage totalement défiguré de mon homme. J'imagine que plus les secondes passent, plus il prend conscience de la violence des mots qu'il a entendus un petit peu plus tôt. Qu'un homme quelconque me les balance à la figure me blesserait bien sûr, mais à partir du moment où il s'agit de mon père, notre dispute prend une toute autre ampleur. Et Ethan n'en est que bien trop conscient.
-Lâche-le Ethan et laisse-le partir... s'il te plait...
Sa mâchoire se serre ostensiblement plus fort, lui dessinant ainsi un visage carré plus menaçant que jamais et sa main se resserre à nouveau contre sa trachée. J'entends mon père s'étouffer de peur.
-Je ne veux plus jamais te voir approcher d'elle c'est bien compris ? La seule raison pour laquelle tu ne quittes pas cette pièce totalement défiguré, c'est parce que Candice ne mérite pas de voir ta cervelle de connard exploser sur ses murs. Maintenant, dégage avant que je change d'avis.
Mon père ne demande pas son reste et s'enfuit en courant. Ethan le suit et s'assure qu'il quitte définitivement les lieux avant de refermer la porte. Il se retourne alors vers moi et tout devient noir devant mes yeux. Mes jambes me lâchent et je tombe violemment au sol, à bout de force. J'entends Ethan accourir pour me relever mais je ne sens que mon corps trop lourd qui me fait mal. Mon homme ne perd pas une seconde pour plaquer ma joue contre son torse et je me reconnecte lentement à la réalité grâce au bruit de son cœur inquiet qui cogne vigoureusement contre mon oreille.
-Chuuuut Candice, je suis là maintenant, personne ne te fera du mal...
Sa bouche logée dans le creux de mon cou dévoile tous les mots qui essaient d'effacer mes maux. J'use de mes dernières forces pour passer mes bras derrière son buste et m'accrocher déraisonnablement à lui. Nous restons assis par terre, blottis l'un contre l'autre, le corps d'Ethan berçant doucement le mien. Petit à petit, mon esprit parvient à démêler tous les nœuds qui l'obstruent et je me mets à trembler violemment, les émotions qui m'assaillent étant beaucoup trop fortes à supporter. Mon homme caresse doucement mes cheveux tout en me répétant inlassablement ces mots :
-Je suis là... je suis là...
Mon cerveau ne parvient pas à se focaliser sur autre chose que la violence dont a fait preuve mon père. C'est la première fois qu'il perd autant ses moyens face à moi. Il a été plus méchant que jamais et ses gestes étaient teintés de haine. Je ne pourrais plus jamais me retrouver dans la même pièce que lui sans frémir.
Plus ses mots tournent en boucle dans ma tête, plus je réalise qu'il a raison. Je ne vaux rien. Je perds mes amis un à un, je blesse l'homme le plus gentil que j'ai rencontré et le seul homme à qui je m'attache n'est pas capable de m'offrir la lumière. Je suis pitoyable.
Brusquement, je me défais de l'étreinte d'Ethan et je cours jusqu'à ma salle de bain. Je m'enferme et allume le jet d'eau pour recouvrir ses cris derrière la porte. J'arrache tous mes vêtements un à un et je fonce sous le pommeau. L'eau qui s'écrase sur mes épaules est brûlante mais je m'en fiche, je veux avoir mal partout. Mes ongles lacèrent la peau de mon ventre, l'eau chaude brûle toutes mes cellules, mes doigts tirent durement sur mes cheveux et j'enfonce mon index dans mon bras pour recouvrir les marques que mon géniteur a laissées.
Je ne sais pas combien de temps je reste ici à me punir avant qu'Ethan ne défonce enfin la porte. Il pénètre comme une furie dans ma douche et se fige instantanément lorsque ses yeux descendent sur mon corps. Je vois ses pupilles s'écarquiller de douleur quand elles rencontrent les marques rouges que je me suis infligées avant de porter machinalement la main à sa bouche.
-Candice...
Mon homme me rejoint et règle immédiatement la température de l'eau. Les gouttes qui tombent maintenant sur ma peau me paraissent tièdes, presque fades. Elles ne me font rien oublier, au contraire, elles m'obligent à revivre mon cauchemar encore et encore. Ethan se penche doucement pour enrouler son bras autour de ma taille mais je me débats. Je ne veux pas qu'il me touche, je veux juste souffrir seule.
-Candice, regarde-moi.
Il me force à retrouver ses iris bruns et la détresse que j'y lis me sort de ma torpeur. J'enroule mes bras autour de son cou et je plaque mon visage contre sa peau. Immédiatement, il plonge ses mains dans mes cheveux trempés et s'agrippe désespérément à moi. Ses lèvres déposent quelques doux baisers avant qu'il n'éteigne le jet d'eau et qu'il me porte délicatement hors de la douche pour m'enrouler dans une serviette chaude. Je le laisse prendre soin de moi et ferme les yeux. J'inspire difficilement jusqu'à ce que je sente son parfum virevolter autour de moi. Son opium devient mon oxygène et je m'en délecte. Ses mains rugueuses parsèment mon corps de frissons lorsqu'il me sèche avant qu'il ne se relève. Il se déshabille et se sèche à son tour sans jamais me quitter du regard mais un froid glacial s'est abattu sur moi. Je ne veux plus être seule, je veux qu'il me touche à nouveau.
Peut-être a-t-il entendu mes incantations silencieuses. Peut-être sait-il maintenant mieux que moi ce dont j'ai besoin. En tout cas, lorsqu'il se penche pour me porter à nouveau, je le laisse faire et je m'accroche à mon roc. Ethan me mène jusqu'à ma chambre et ouvre d'une main mon armoire. Il dégote un pantalon de pyjama noir ainsi qu'un petit pull fin puis me les enfile en douceur. Je le regarde faire, totalement subjuguée par la délicatesse dont il fait preuve. Ses sourcils sont toujours froncés, sa mâchoire toujours serrée et ses yeux me confient qu'il a peur pour moi. Mais ses gestes me transportent dans un autre monde et c'est exactement ce dont j'avais besoin.
Je crois que je tremble car lorsqu'Ethan s'allonge à côté de moi, il me blottit contre son torse et frotte vigoureusement mon dos. Ses lèvres commencent à embrasser mon cou et je soupire, enfin délestée de toute cette haine qui m'a engloutie un peu plus tôt. Je pose ma main sur sa barbe et je la caresse machinalement. J'aime cette sensation rêche contre ma peau douce. J'aime cette dualité qui nous ressemble. Je nous aime.
Nous restons ainsi un moment, enlacés dans le noir, à nous réchauffer l'un contre l'autre avant qu'Ethan ne brise le silence.
-Qu'est-ce qu'il s'est passé Candice ?
Ce n'est qu'un faible murmure lancé l'obscurité mais je distingue très clairement le léger trémolo dans sa voix. Elle ne tremble pas de peur mais de rage.
-Pas ce soir Ethan... s'il te plait...
En réponse, Ethan me serre plus fort contre lui. La nuit nous enveloppe dans son intensité démesurée et je ressens maintenant tout plus fort. Ma peau me brûle, les cicatrices que je me suis infligée me piquent et les mains de mon homme me rassurent. J'ai autant mal que je suis bien. Les heures passent et il finit par s'endormir sans jamais relâcher son étreinte. Moi, je reste désespérément éveillée et les mots, les images et les gestes tournent autour de moi, toujours plus vite, toujours plus fort. Ils m'étourdissent et me donnent la nausée. Je me sens minable, faible, moins que rien. Je me sens inutile, sans valeur. Comment quelqu'un pourrait partager ma vie sachant que je ne vaux rien ?
Je commence à me noyer dans mes peurs et je suffoque. Par reflexe, je pose brusquement ma main sur la joue d'Ethan et mes lèvres s'entrouvrent pour l'appeler à l'aide :
-Ethan, ne me quitte pas, s'il te plait !
Mon petit cri le réveille en sursaut et il plaque immédiatement sa main derrière ma tête, pour me fondre contre sa peau chaude.
-Candice, grommelle-t-il.
-J'ai besoin de toi, ne me laisse pas...
Ma demande semble tout simplement l'abasourdir puisqu'il redresse la tête. Ses petits yeux encore tout endormis m'interrogent faiblement et je ne sais plus quoi lui dire.
-Je suis là Candice, je n'irai nul part. Oublie ce que ce connard t'a dit, tu ne mérite aucun de ses mots.
Et soudain, je pleure. Je pleure comme je n'ai jamais pleuré. Je pleure dans un torrent de larmes qui brouille ma vision et anéantit mon cœur. Je pleure sans pouvoir parler ni respirer. Je pleure aussi silencieusement que bruyamment. Je pleure de toute mon âme.
Immédiatement, Ethan passe ses bras dans mon dos et me fait pivoter afin d'allonger mon corps sur le sien. Sa main gauche reste dans le creux de mes reins mais sa paume droite se pose sur ma joue.
-Regarde-moi Candice. Tu es la plus belle personne que j'ai rencontrée. Tu es pure, profondément gentille et dévouée pour ceux que tu aimes. Je me damne pour chaque minute passée avec toi et si tes salopards de parents ne sont pas capables de s'en rendre compte, tant pis pour eux. Mais s'il te plait, ne les crois pas. Ne leur donne pas cette importance. S'ils sont assez tordus pour essayer de te détruire depuis des années, ne cherche plus à les excuser. Fais ta vie sans eux. Tu es libre mon ange !
Ses lèvres déposent le plus enchanteur des baisers sur ma bouche et je respire enfin profondément. Avec la plus grande douceur, Ethan dépose mon visage contre sa poitrine et chuchote au creux de mon oreille :
-Parle-moi.
Je ferme les yeux, respire son parfum et ne réfléchis plus.
-J'ai peur qu'ils aient raison. J'ai peur d'être de trop, de ne pas être assez ou d'être insignifiante. Je préfère être transparente pour plaire aux autres mais j'ai mal de n'être assez bien pour personne.
-Tu ne seras jamais de trop quand tu es la seule personne qui compte à mes yeux. J'en ai rien à foutre de toutes les conneries qui me font chier dans ma vie mais toi... toi, tu es précieuse. Quand tu n'es pas là, je n'y arrive pas. Arrête de faire ta vie en fonction des autres, la seule chose qui compte c'est toi. Ce que toi tu aimes. Ce que toi tu veux. Qu'est-ce que tu veux au plus profond de ton être Candice ?
-Toi. Je veux être avec toi. J'ai... j'ai peur que... que tu réalises que je ne vaux rien. Et que tu... me quittes.
-Regarde-moi bien, gorgeous. Jamais ! Tu m'entends ? Ca n'arrivera jamais. Enlève-toi tout de suite ces conneries de la tête.
Je plonge dans son regard hypnotisant et je m'y perds. Ses prunelles effacent un à un les maux que mon géniteur a causés ce soir. Je me détends doucement contre son torse nu mais sa peau chaude me manque. Je me redresse pour ôter mon pull et me rallonge contre lui. Nos peaux sont maintenant connectées et notre bulle se crée immédiatement. Rien d'autre n'existe que nos deux âmes entrelacées.
Nous parlons encore un petit moment, avant de laisser nos corps s'exprimer. Ils se cherchent, se trouvent, se redécouvrent et se promettent. Le lendemain matin, je me réveille tôt. Ethan dort paisiblement dans mon dos, son torse étant fermement plaqué contre mon buste. Je repense à la soirée de la veille et aux cicatrices que mon père m'a laissées. Entendre le souffle de mon homme chatouiller mes oreilles me fait réaliser qu'il a finalement tort. J'ai le droit de mener ma propre vie et ce n'est pas parce qu'ils ont soi-disant tout sacrifié pour moi que mes parents ont un quelconque pouvoir de décision sur ma destinée. J'ai le droit de faire mes propres choix et mes propres erreurs.
C'est la première fois de ma vie que je me donne autant d'importance. Moi, la jeune femme chétive et discrète, je sors de ma coquille pour affronter la vie. Je ne suis pas seule et si je trébuche, Ethan sera là pour me tenir la main. Mes parents n'ont plus leur place dans ma vie tant qu'ils n'auront pas compris qu'ils doivent m'accepter telle que je suis. J'ai trop longtemps toléré toutes leurs attaques sous prétexte qu'ils sont mes parents. Or, de vrais parents n'agissent pas comme eux.
Je me sens instantanément libérée. Même si j'ai dû tomber plus bas que terre pour prendre conscience de tout cela, je suis fière de parvenir à m'émanciper mentalement de leur joug. Je me retourne délicatement et observe le visage serein de mon homme emporté par les songes. Je prends conscience de la chance que j'ai de l'avoir à mes côtés. Même s'il n'est absolument pas celui que je recherchais, il est celui qui m'a trouvée.
Je pose doucement ma paume sur sa barbe et mes lèvres se perdent sur sa peau rugueuse. Ma langue parcourt malicieusement son cou puis son torse avant qu'Ethan ne se rallonge sur le dos en grognant. Mon terrain de jeu est maintenant totalement exposé sous mes yeux et je prends possession de lui sans aucune pitié. Ma tristesse s'est évaporée et elle a laissé place à un désir foudroyant. Mes lèvres s'entrouvrent sensuellement pour lécher son tatouage avant de rejoindre son sexe déjà prêt pour moi. Je me positionne entre ses jambes et engloutis son membre tendu. Je me délecte de sa peau chaude contre ma langue, de ses petits gémissements sourds qui ricochent directement entre mes jambes et de ses muscles qui se contractent.
-Candice, bordel c'est trop bon !
Sa voix rauque du matin est la chose la plus sexy qui m'ait jamais été donné d'entendre. Je ne réfléchis pas, je le caresse jusqu'à le consumer. J'accélère mon mouvement puis je relève les yeux et découvre Ethan, le visage totalement transcendé par la scène que je lui offre. Ses pupilles noires de désir sont perçantes et sa mâchoire carrée me donne tout bonnement l'impression qu'il va me dévorer. Avec toute l'insolence dont je peux faire preuve, j'attrape sa main et la place dans mes cheveux.
Un éclair électrisant de désir traverse ses beaux yeux juste avant qu'Ethan ne se mette à cadencer mon rythme avec ses hanches. Plus les secondes passent et plus le désir remplace notre raison. Ma peau frétille sous son regard brûlant et mon entrejambe dangereusement trempé me hurle de le soulager au plus vite, tout comme les coups de rein que m'offre Ethan me supplient de l'emmener découvrir les étoiles.
Mon homme grommelle, ferme brièvement les yeux, serre mes cheveux encore plus fort et se libère finalement dans un râle puissant qui me fait trembler des pieds à la tête.
-Oui putain Candice !
J'avale ce qu'il me donne sans me poser de question et je continue de le cajoler plus tendrement avec ma langue. Ses larges mains aguerries agrippent mes cheveux et me forcent à me relever. Je suis le mouvement qu'il me dicte jusqu'à ce que mon sexe se retrouve assis sur son membre imposant. Ses paumes descendent langoureusement le long de mon buste pour empoigner mes hanches et il commence à me dicter un rythme démoniaque. Mon intimité totalement trempée se frotte maintenant sans retenue sur son sexe toujours dur et la sensation est... extraordinaire. Je suis pratiquement au summum de l'excitation et un rien peut me faire basculer. Mon Apollon semble le remarquer puisqu'il ne se prive pas pour me caresser aussi lentement que délicieusement.
La combinaison de ma petite danse lascive et de ses caresses de plus en plus appuyées me perd totalement. Je libère un puissant orgasme dans un cri de plaisir qu'Ethan vient tout de suite avaler de ses lèvres gourmandes. Il plaque ses deux mains dans mon dos et me ramène contre son torse alors que mon corps est parcouru de spasmes.
Son baiser est ravageur. Il n'a rien besoin de prononcer avec des mots, ses lèvres me disent déjà tout. Mon cœur est en transe, il danse si vite dans ma poitrine que je découvre l'exquise douleur du bonheur. Mes jambes s'emmêlent instinctivement à celles d'Ethan et ses mains sont maintenant partout sur ma peau. Elles me parcourent comme si elles me découvraient enfin et je les laisse faire ce qu'elles voudront de moi. Ce matin, je ne m'appartiens plus.
Après quelques minutes passées à calmer ma respiration et à profiter de la chaleur de mon homme, je me décolle de son torse et m'allonge contre son buste. Je passe ma jambe droite par dessus sa hanche et ses doigts viennent immédiatement se poser sur ma peau. Alors qu'il les laisse me parer d'un voile de frissons, il tourne la tête pour planter son regard dans le mien. Automatiquement, plus rien n'existe autour de moi. Mon monde se réduit à ses deux billes brunes pleines de promesses et d'interrogations.
-Candice... promets-moi que tu ne te feras plus jamais du mal comme tu t'en es fait hier ?
Je me raidis, honteuse et incapable d'expliquer ce qui m'a pris.
-Si un jour tu n'arrives plus à gérer tout ce qui te bousille de l'intérieur, je préfère que tu me frappes, que tu prennes mon corps pour un punching-ball mais je t'en supplie, ne te mutile plus jamais.
Ne sachant que répondre, je me contente de hocher imperceptiblement la tête. Ses prunelles douloureuses ne me quittent pas et je comprends qu'il a besoin de savoir.
-Après que je sois rentrée de mon cours de danse, mon père est arrivé. Il m'a fait tout un tas de reproches parce que j'ai refusé de participer à un repas avec un jeune homme... un homme avec qui ils voudraient que je fasse ma vie. Je ne le connais pas et je n'ai aucune envie de le connaître.
Au fur et à mesure que mes mots se posent sur lui, j'observe le visage d'Ethan se crisper et son regard se réfugier derrière une armure de glace.
-Quand j'ai essayé de lui tenir tête, mon père a totalement disjoncté. Il m'a dit des choses horribles et il m'a fait mal.
Un petit silence s'installe avant que mon homme ne puisse plus se retenir.
-Putain, mais pourquoi t'a-t-il dit que tu es « la pire chose qui leur soit arrivé » ? Mais c'est pas possible, il ne peut pas oser dire de telles horreurs à la chair de sa chair ! En fait... j'ai été con, bordel ! J'aurais du lui péter la gueule à ce connard, c'est tout ce qu'il méritait !
-Non ! Bien sur que non ! Ce n'est pas une solution, ça aurait juste envenimé la situation.
-Mais de quoi parlait-il ? Qu'est ce qui a bien pu se passer pour que vous en arriviez là ?
Il vient de poser la seule et unique question qui hante mon existence.
-Justement. Je n'en sais rien. Ils ont toujours été comme ça. Et encore, tu n'as pas rencontré ma mère. D'habitude c'est elle la plus blessante.
-Putain mais non Candice ! Tu ne peux pas me dire ça !
-Ca a toujours été comme ça. Ils décident, ils ordonnent, j'obéis et je les déçois. Quoique je dise, quoique je fasse, je les déçois toujours.
Ethan pose durement ses mains sur mon visage pour le prendre en coupe et me regarde intensément.
-Ils ne te méritent pas. Je ne veux plus jamais que tu les revoies.
Ses mots me choquent.
-Ethan, déjà ce n'est pas à toi de décider qui j'ai le droit de côtoyer. Ensuite, ils restent mes parents. Même si je veux à tout prix prendre mes distances, je serais obligée de les recroiser bientôt.
-Tu ne comprends pas Candice ? La simple idée de te retrouver une nouvelle fois comme hier me bousille. Je préfère crever que de te voir souffrir.
Ses mots violents sont si doux dans mon cœur. Je brise la distance nous séparant et dépose un baiser si soyeux sur ses belles lèvres que ses épaules s'affaissent immédiatement.
-Il faut que tu comprennes pourquoi ils agissent comme des cons et essaient de te détruire.
Je ne réponds pas. A quoi cela servirait-il ? J'essaie depuis des années de les comprendre, de les écouter, de leur pardonner et d'avancer mais force est de constater que le mystère reste entier. Après cela, nous ne parlons plus. Nous restons juste enlacés dans les bras l'un de l'autre jusqu'à ce que le réveil sonne. Quand je me lève, je constate tristement que notre discussion a réveillé l'amertume qui me consume.
Pendant qu'Ethan se prépare dans ma salle de bain, je sors deux tasses et les remplis de thé. Lorsqu'il me rejoint dans la cuisine, la vision qu'il m'offre est divine. Son torse-nu est orné de quelques gouttes d'eau, ses cheveux sombres encore mouillés sont tout ébouriffés et la serviette blanche qu'il a enroulée autour de ses hanches me donne juste envie de la défaire sauvagement. Je pose ma tasse et m'approche rapidement de lui pour nicher ma tête dans le creux de son cou. Il enroule ses mains dans mes cheveux et les tire en arrière pour positionner ses lèvres à hauteur des miennes. Au moment où il m'embrasse voracement, je réalise que ce geste qu'il adore faire m'électrise totalement. C'est un savant mélange de fermeté, de douceur et de virilité qui lui correspond si bien !
A bout de souffle, il sépare nos lèvres avant de m'asséner une petite tape sur les fesses.
-File te préparer, on va être en retard.
Je m'exécute et après une bonne vingtaine de minutes, je le rejoins. Il me détaille, les sourcils froncés. Je n'ai enfilé que des vêtements noirs et cela ne lui a pas échappé. D'habitude, je rajoute toujours une petite touche de couleur à ma tenue mais aujourd'hui je n'en ai pas le cœur. Ethan me prend la main, la porte à ses lèvres pour l'embrasser puis me tend mon manteau. Quand je referme la porte de mon appartement derrière nous, il me lance, d'une petite voix toute gênée.
-C'est... c'est mieux si... si on prend chacun notre voiture. Histoire de ne pas arriver ensemble au bureau...
Je lui réponds positivement et ne parviens même pas à être révoltée. Je savais pertinemment qu'en scellant la serrure de mon appartement, mon cocon allait exploser. Ces rares moments volés ne peuvent pas être dévoilés au grand jour mais ce matin, ça me fait mal. Je lutte de toutes mes forces pour ne pas me laisser envahir par cette perfide sensation et je suis soulagée d'apercevoir Marina se garer en même temps que moi sur le parking de la soierie. A petits pas, nous atteignons notre étage tandis qu'elle me raconte la soirée affreuse qu'elle a passée avec les amis de son mec hier.
-Ils étaient six, six mecs de quarante-trois ans à se plaindre de la bourse et du réchauffement climatique. J'ai cru que j'allais creuser un trou et me cacher dedans !
Je ris de bon cœur avec elle et suis subjuguée par la simplicité avec laquelle elle aborde la vie. Elle aime un homme plus âgé qu'elle, ils ont des différences qui l'agacent mais elle ne s'en formalise pas plus puisque l'important à ses yeux, ce sont les sentiments profonds qu'ils partagent. Plus j'y pense, plus j'envie sa désinvolture et plus je me sens étriquée dans ma propre vie.
Je m'installe à mon bureau et allume mon ordinateur. Je reste quelques secondes le regard dans le vide, à ne ressentir rien d'autre qu'un stupide abattement. Ces douze dernières heures ont été un peu trop riches en émotions et j'aimerais réellement pouvoir rejoindre Ethan pour lui chaparder une nouvelle étreinte salvatrice. Le poids de notre relation cachée commence à peser un peu trop lourd.
Je suis prise d'une lancinante vague de chaleur qui déploie ses ailes dans chacune de mes cellules quand mon cœur se met à battre machinalement plus vite. Par reflexe, je lève la tête et découvre Ethan, debout dans l'embrasure de ma porte qui m'observe avec un air inquiet sur le visage. Je sors de mes pensées et lui adresse un petit sourire pour le rassurer. Ce dernier sonne faux et mon homme entend tout de suite les fausses notes résonner entre nous. Il baisse les yeux, me tourne le dos et part s'enfermer dans son antre.
En fin de matinée, Mme Saint-Martin vient me déranger pour m'informer que Marina et moi sommes attendues pour une petite réunion. Je file donc rejoindre la grande salle et m'assois à côté de ma collègue. Ethan s'installe en face de moi, à côté de ma responsable et ne perd pas une seule seconde pour annoncer la liste des dossiers sur lesquels il veut faire un point.
J'observe attentivement mon patron mener la discussion. Je ne suis pas en présence de mon homme mais bien assise en face de l'homme d'affaire qui gère son entreprise d'une main de maitre. Ses traits sont tendus, son regard illisible. Je ne reconnais pas celui qui a partagé mon lit cette nuit et je suis un peu perturbée par son attitude. Il ne me porte aucune considération, il ne me regarde même pas. Pour moi qui étais déjà mal à l'aise ce matin, cette réunion ne fait que creuser le gouffre qui déchire silencieusement mon cœur.
Après pratiquement une demi-heure de compte-rendu et de nouveaux objectifs, Mme Saint-Martin s'apprête à mettre un terme à notre entrevue quand mon boss la coupe.
-Mademoiselle Dumin, je vais avoir besoin de vous en début de semaine prochaine.
Sa voix grave électrisante et son regard tendu qui se pose enfin sur moi me consument déjà. Je ne parviens pas à soutenir son regard.
-Nous devons partir pour gérer un élément imprévu concernant le dossier Dior. Merci de prendre vos dispositions.
Sur ces paroles surprenantes, il se lève et quitte la pièce. Marina s'approche alors de moi et me chuchote :
-Bon courage pour ce tête à tête avec l'ogre ! J'espère qu'il sera mieux luné qu'aujourd'hui parce que sinon, il va te manger toute crue !
Je déglutis, soudainement gênée et lui adresse un faible sourire.
-Va prendre tes affaires et rejoins moi en bas, on part manger un bout ensemble, lâche-t-elle avec un petit clin d'œil de connivence tout en nous conduisant vers nos bureaux.
Lorsqu'elle me tourne le dos, je libère enfin un long souffle d'épuisement. Faire semblant est éreintant. Je ne sais pas combien de temps je vais tenir à ce rythme là mais pour l'instant, je décide de me concentrer sur le repas qui se profile, pendant lequel je vais devoir me forcer à picorer une ou deux bouchées. Cette idée me donne déjà envie de vomir.
J'attrape mon manteau et mon sac à mains puis je jette machinalement un coup d'œil à ma boite mail avant de partir. Un nouveau message d'Ethan apparaît en même temps que mon téléphone vibre. Je consulte d'abord l'email. Aucun mot, juste une pièce jointe. Je découvre deux cartes d'embarquement pour un voyage à Londres dont le départ est prévu samedi matin et le retour mardi soir. Je reste perplexe, ne sachant absolument pas quoi penser de ce périple.
Tout en rejoignant ma collègue, je prends mon téléphone et ouvre le message. Il provient également d'Ethan mais cette fois, les mots s'enchainent alors que mon cœur se déchaine.
Ethan : Candice, je n'ai aucune envie de rester ici à te voir te dézinguer le cerveau. Prépare ta valise et prévois des vêtements chauds ainsi que des chaussures de randonnée, moi je m'occupe du reste. Fais moi confiance, je sais exactement où tu as besoin d'aller pour mieux revenir.
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Me voici de retour après un dimanche sans publication. Je suis prête à reprendre mon rythme parce qu'il faut que je vous l'avoue, même si je ne touche plus terre, vous me manquez horriblement !
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