Chapitre 20 - You can call on me when you can't stop the tears from falling down

Dimanche 25 décembre

Nous roulons depuis un long moment dans la nuit noire et pluvieuse de ce triste Noël. Quand il m'a rejoint sur le bord de la route où mes pas m'avaient guidée, il m'a trouvée complètement trempée, assise sur un banc en bois à moitié bancal. Mes longs cheveux bruns gorgés d'eau étaient collés à mon visage pâle et brisé par tout le mal que mes parents m'ont fait un peu plus tôt. Je tenais fermement mon sac contre mon ventre, comme on s'accrocherait à une bouée de sauvetage en plein naufrage. Toutes mes affaires étaient rassemblées dans cette sacoche ruisselante et en cet instant, j'avais l'impression que c'est tout ce qu'il restait de moi. De pauvres vêtements mouillés. A part cela, je n'avais plus rien. Plus de famille, plus de force, plus d'envie.

Je colle ma tête contre la vitre de l'automobile et je laisse mes paupières se fermer. Immédiatement, le visage vaincu d'Ethan se mêle aux mots humiliants de mes parents et je dois rassembler toutes les maigres forces qu'il me reste pour réprimer la nausée qui me submerge. Je rouvre les yeux brutalement, dans l'espoir de stopper cette attaque que mon cerveau dirige une nouvelle fois contre moi mais les paroles de ma mère résonnent sans relâche au plus profond de moi. Les yeux rivés à la route qui défile en face de moi, je revis inlassablement tous les moments douloureux qui m'ont détruite petit à petit pour faire de moi la fille brisée et seule que je suis devenue.

Le concours de danse auquel j'ai participé à mes huit ans... j'étais arrivée seconde du classement et ma mère ne m'a pas adressé la parole pendant cinq jours. Le jour où elle a décidé de briser ce silence, elle s'est agenouillée à ma hauteur et m'a simplement expliqué à quel point je la décevais.

Lors de mon onzième anniversaire, mes parents ont accepté que j'invite pour la première fois tous mes copains à mon goûter d'anniversaire. Nous avons joué à « chat » dans le salon et malencontreusement, j'ai fait tomber l'ordinateur professionnel de mon père. Quand il est rentré le soir et qu'il a découvert qu'il était cassé, il m'a enfermée dans ma chambre sans diner et je l'ai entendu marmonner « je n'aurais jamais dû accepter cette gamine » en refermant la porte.

Durant toute mon année de terminale au lycée, j'ai tenu tête à ma mère qui voulait que je poursuive des études de médecine. Au moment de remplir les formulaires d'admission post-bac, mon cœur tambourinait si fort que j'ai cru que j'allais tourner de l'œil mais mon père a convaincu ma mère de faire un compromis en me destinant à des études de commerce international. Cette petite victoire a très rapidement eu un goût amer lorsque j'ai surpris une de leurs discussions dans laquelle mon père expliquait à ma mère que je n'étais pas douée pour grand-chose et qu'il fallait qu'elle accepte enfin que je la décevrai toute ma vie.

Tandis que les souvenirs douloureux s'enchainent, le regard inquiet de mon compagnon de voyage me sort de mes pensées. Je tourne la tête vers lui et n'essaie même pas de sourire. Pourquoi lui faire croire que je suis capable de sourire alors qu'il m'a ramassé à la petite cuillère au bord d'une route déserte en pleine nuit le soir de Noël ? Je reste alors plusieurs minutes à le contempler. Il est le seul que je pouvais appeler, je n'avais personne d'autre. Il fallait à tout prix que quelqu'un me sorte de mon enfer avant que je ne dépérisse. Malgré l'attachement profond qu'il voue à ses parents et l'importance qu'un tel jour doit avoir dans sa famille, il n'a pas hésité une minute avant de voler à mon secours. Je n'ai rien eu à dire, rien eu à expliquer. Il a compris tout seul et il est venu. Je n'en attendais pas plus mais maintenant que nous quittons Paris et qu'il s'engage sur l'autoroute en direction du sud, je me rends compte qu'il va faire bien plus pour moi.

De silencieuses larmes de reconnaissance coulent sur mon visage et lorsqu'il les remarque, Gabriel ne peut s'empêcher de froncer les sourcils. Il ne m'a posé aucune question, il a eu le tact de ne pas me bousculer mais je présume que toutes ses interrogations à mon égard lui brûlent les lèvres. Après avoir enclenché la cinquième, il déplace sa main autrefois posée sur le pommeau de vitesse pour la positionner délicatement sur la mienne. Sa paume est chaude mais elle ne m'apporte aucun réconfort. Je reste immobile, sans réagir. Je suis comme anesthésiée. Je ne ressens ni le froid qui me glace jusqu'à l'os, ni la faim qui me tiraille depuis de nombreuses heures, ni la chaleur qu'il tente de m'insuffler par son geste doucereux. Tout mon être n'est plus que douleur et souffrance. Chaque cellule de mon corps pleure, mon cœur saigne et mon âme ne vaut plus rien.

Même le garçon à ma gauche est en cet instant incapable de m'aider à remonter la pente. Mais en ai-je seulement envie ? Je ne sais plus vraiment. Quand vous n'êtes pas assez bien pour vos propres parents, que vous passez votre temps à les décevoir et à leur prouver que toutes leurs désillusions sont justifiées, que votre meilleure amie ne vous accepte pas telle que vous êtes et que votre entourage n'a pas la moindre idée de ce que vous traversez chaque jour, pourquoi voudriez-vous vous battre encore ? Contre quoi ? Contre qui ? Depuis mon plus jeune âge, je me bats contre moi-même afin de réfréner ma nature profonde et d'être celle que les autres veulent que je sois et voilà le résultat.

Celle que je suis réellement s'est enfuit quand elle a compris que jamais personne ne l'aimera. Celle que je prétendais être ne satisfait plus personne. Que me reste-t-il alors ? Un corps vide de toute vie, une âme vagabonde qui erre parmi les ténèbres et un cœur tellement déchiqueté qu'il n'est plus capable de ressentir quoi que ce soit.

Gabriel presse légèrement sa paume contre la mienne et ce simple geste me reconnecte avec la réalité. Je prends alors conscience que je ne sais même pas où il m'emmène et sincèrement, je crois que je m'en fiche. Je veux seulement être loin de mes parents et de ma solitude. Quand il m'a retrouvée complètement anéantie sur mon banc, il s'est empressé de me faire monter dans sa voiture pour me mettre à l'abri et me réchauffer. Telle une automate, je l'ai suivi et je l'ai laissé faire. Il m'a débarrassée de mon manteau trempé et m'a doucement posé le sien sur les épaules, puis il m'a fermement frictionné afin de me réchauffer. Sa sollicitude et son inquiétude m'auraient retourné le cœur si je ne l'avais pas barricadé au plus profond de mon être. Lorsqu'il a mis le moteur en marche, je crois l'avoir entendu me dire que tout était terminé et qu'il allait prendre de soin de moi mais je n'en suis pas sûre. Mes pensées été seulement obnubilées par le vide vertigineux que je ressentais. Il nous a conduit jusqu'à chez moi et m'a demandé de rassembler des vêtements chauds ainsi qu'un nécessaire de toilette. Machinalement, je me suis exécutée et je l'ai ensuite regardé emballer mes biens puis nous avons repris la route.

Nous roulons maintenant depuis deux heures et demie, l'autoroute est quasiment déserte et la pluie n'a jamais cessé. Un profond silence nous accompagne depuis que nous avons quitté mon appartement et je sens bien que Gabriel est de plus en plus mal à l'aise. Je n'ai pas réagi lorsqu'il a posé sa main sur la mienne et je n'ai pas prononcé un mot depuis qu'il m'a rejoint. Je suis parfaitement consciente que je devrais au moins le remercier mais j'ai peur de m'effondrer si j'ouvre la bouche. Alors je me contente d'observer notre voiture enchainer les kilomètres. Au bout d'un moment, Gabriel se penche pour fouiller la boite à gants et en ressort un CD. Mon regard se perd dans la nuit noire qui nous engloutit et je tente de me faire mentalement violence pour m'adresser à mon seul ami présent aujourd'hui.

Soudain, quelques notes de musique retentissent dans l'habitacle alors que Gabriel range le boitier du CD. Je reconnais immédiatement les premières notes de The Scientist et je me retourne vivement vers Gabriel qui me couve du regard, un léger sourire en coin. Cet homme si prévenant fait tout ce qui lui est possible pour me réconforter alors qu'il ne sait même pas ce qui m'a mis dans cet état. Mais qu'importe, il sait que la musique peut me venir en aide alors il a lancé l'album de Coldplay dans le seul but de me mettre du baume au cœur. Devant tant de gentillesse, mon cœur de pierre se fissure lentement. Peut-être que j'arriverai à retrouver un peu de chaleur ce soir...

De grosses larmes roulent silencieusement sur mon visage exténué pendant que je laisse la musique prendre possession de moi. Je ne saurais pas expliquer comment ni pourquoi mais je ressens un léger soulagement et mon corps se relâche quelques instants. Le temps d'une chanson, mon esprit torturé s'évade et j'oublie. Ces quelques minutes m'offrent un sas de décompression salvateur qui m'aide à m'ouvrir à Gabriel.

-Merci Gabriel... merci pour tout.

Ma voix rauque et éraillée par les sanglots qui obstruent ma gorge nous surprend tous les deux. Mes mots murmurés s'envolent pour se poser directement sur le cœur de mon compagnon de voyage. Je remarque immédiatement que son corps se détend et le long soupir de soulagement qu'il libère me fait prendre conscience que cet homme se soucie profondément de moi.

-Ne te sens pas obligée de me parler si c'est trop dur pour toi Candice, je veux juste que tu te sentes mieux et que tu te confies seulement si tu en ressens le besoin. Surtout ne te forces pas.

Ces paroles me font l'effet d'un pansement posé délicatement sur mon cœur et sur ma chair abimée par les horreurs que mes géniteurs m'ont balancées au visage. N'étant pas prête à me dévoiler ce soir, je pivote mon corps vers la gauche afin de pouvoir observer sans retenue celui qui ne pourra que m'aider à me relever. Je laisse la musique chasser mes sombres pensées et lentement, je m'assoupis. Pour la première fois depuis neuf interminables nuits, je réussis à dormir profondément sans être hantée par des souvenirs dévastateurs.

Je sens une main chaude caresser ma joue et je crois que quelqu'un me chuchote des mots à l'oreille mais mon esprit emmitouflé dans un doux songe ne daigne pas refaire surface. Les yeux toujours clos, je perçois une sourde agitation autour de moi mais je refuse de me réveiller. Mon corps engourdi rattrape toutes les heures de sommeil dont il a été privé et j'ai la sensation de flotter le cœur léger au-dessus de moi-même. C'est à ce moment-là que je sens deux bras passer sous mon corps et me soulever. Gabriel me colle contre son torse et le sentiment de protection et de sécurité que ce simple geste fait naitre en moi est saisissant. Brusquement, j'agrippe son cou de mes bras et je blottis ma tête dans sa nuque. Moi qui croyais n'avoir plus aucune valeur aux yeux des autres, voilà qu'un homme précautionneux m'offre tout le réconfort dont j'avais besoin ce soir.

Lorsqu'il m'extirpe de sa voiture, une froid polaire s'abat sur moi et je me recroqueville de plus belle contre lui. Le crissement de ses chaussures s'enfonçant dans le sol me rappelle quelque chose mais je serai incapable de dire quoi. Ses pas nous guident à l'intérieur de ce que je suppose être une maison et après avoir monté les escaliers, il me dépose délicatement sur un lit moelleux. Je n'ai aucune envie qu'il me quitte mais la quiétude qui s'infiltre en moi quand je m'enroule dans les draps me fait vite oublier ma solitude. Le sommeil me rattrape et mon esprit s'évade l'espace de quelques heures.

Quand j'ouvre les yeux le lendemain matin, je mets un long moment avant de comprendre où je suis. La chambre qui m'a accueillie pour la nuit est toujours plongée dans la pénombre mais je distingue des poutres en bois au plafond ainsi qu'une grande armoire en chêne massif en face de mon petit lit. La pièce n'est pas très grande et lorsque je pose les pieds par terre, le vieux parquet se met à craquer. A ma droite une minuscule fenêtre carrée attire mon attention. Je traverse la petite pièce pour l'atteindre et ouvre les volets. La vue qui s'offre à moi est absolument époustouflante.

Devant moi, de majestueuses montagnes blanches composent un paysage idyllique parsemé d'immenses sapins verts saupoudrés de neige. L'épais manteau blanc qui recouvre le sol brille tel un désert de paillettes sous les rayons du soleil qui orne le ciel bleu. Mon regard se perd sur d'interminables plaines enneigées que rien ne vient perturber. Seul un vaste lac brise cette vue pratiquement monochrome et d'où je me trouve, je ne distingue aucune route qui mène à cet oasis. Au loin, j'aperçois un minuscule village avec une vieille église en bois qui trône fièrement au centre. Quelques chalets viennent ponctuer cette vision immaculée mais le calme qui règne ici fait encore plus ressortir le bruit des battements de mon cœur qui tambourine dans ma poitrine. Je ne sais absolument pas dans quel patelin Gabriel a bien pu m'amener mais j'ai la sensation de me trouver dans un lieu loin de tout, où le temps s'est arrêté. L'air frais emplit mes narines et je ne peux m'empêcher de fermer les yeux tout en inspirant profondément.

J'attrape rapidement un épais gilet en laine dans ma valise puis je retourne me poster à la fenêtre pour admirer ce splendide paysage. Le calme de ce lieu m'apaise et allège légèrement mes peines. Je me sens comme protégée dans cet endroit reculé et je crois que c'est exactement ce dont j'avais besoin : quelques jours coupée du monde afin de prendre du recul.

La maison est totalement silencieuse et lorsque je sors de ma chambre, je déambule timidement dans le couloir afin de ne pas réveiller Gabriel. Je ne sais pas à quelle heure nous sommes arrivés hier mais je suppose qu'il doit être fatigué après toutes ces centaines de kilomètres que nous avons parcourus sous la pluie. Tout en refermant mon gilet, je descends l'étroit escalier en bois qui craque sous mon passage puis je découvre une pièce unique qui accueille à ma droite une cuisinière sommaire et plus que rustique sur laquelle sont posées deux casseroles en cuivre. Un minuscule réfrigérateur est placé juste à côté d'un évier ancien et j'ai tout bonnement l'impression de me retrouver dans le conte de Boucle d'Or et Les 3 Ours. Une grande table en bois massif accompagnée de deux bancs est installée près de la cheminée dans laquelle quelques braises ardentes résistent encore. Je m'empresse de mettre quelques buches afin de raviver le feu et de réchauffer cette petite maisonnette qui commence à subir les assauts du froid polaire qui règne dehors.

Le feu reprend instantanément de la vigueur et mon corps s'imprègne d'une douce chaleur. Je reste un moment près du feu, à admirer les flammes qui dansent et enchainent les reflets orangées. Cette vision me rappelle immédiatement le lever de soleil que j'ai contemplé la semaine dernière dans les bras d'Ethan. Je chasse rapidement ces pensées amères avant qu'une cuisante nostalgie ne s'empare de moi et je dois lutter pour oublier le regard inquiet qui n'a jamais quitté mon patron de tout le voyage. Je ne dois plus me torturer l'esprit avec ses soucis, je dois totalement me détacher de lui et de toute façon, il n'a très certainement pas besoin de moi. Il a une femme avec qui il peut partager ses doutes, ses peines et ses joies.

Mes résolutions sont difficiles à tenir car je dois bien avouer que je commençais vraiment à m'attacher à lui. Bien évidemment, je n'étais pas tombée amoureuse de lui et heureusement, car ma chute aurait été encore plus douloureuse. Mais au-delà de cette indéniable attraction qui nous liait, j'avais le sentiment qu'il était le seul à n'avoir jamais été capable de faire tomber mon masque. Mais à présent, je dois accepter que cet homme m'ait caché une partie importante de sa vie et que je ne peux pas en faire partie.

Le crépitement du feu me sort de mes pensées et je ne réalise que maintenant que je porte toujours ma robe noire et rouge tachée de café. Mes cheveux trempés par la pluie se sont emmêlées en séchant et les résidus de maquillage qui doivent orner mon visage doivent définitivement me faire passer pour une folle. Je remonte à l'étage rassembler des vêtements propres et file prendre une douche. L'eau chaude finit d'apaiser les tensions qui habitent mon corps et je me sens définitivement au bon endroit dans cette maison.

Après m'être préparée et avoir attrapé mon Ipod et une couverture épaisse, je m'installe sur un rocking-chair sur la terrasse devant notre chalet et je laisse la mélodie prendre possession de mon esprit. Je remonte le plaid sur moi et j'observe le paisible paysage qui me fait face. Même si je me sens cruellement vide et sans valeur, la sérénité qui se dégage de cette vue me permet de ne pas replonger dans une énième crise de larmes. Je reste dans cette position un long moment, laissant mes pensées vagabonder ci et là.

Soudain, je perçois une ombre qui s'approche à ma gauche et lorsque je tourne la tête, je remarque que Gabriel est réveillé. Il s'est emmitouflé dans un large manteau et son regard protecteur m'enveloppe à la seconde où il pose ses yeux sur moi. Il m'offre un sourire sincère mais ses petits yeux ainsi que ses cheveux légèrement ébouriffés m'indiquent qu'il vient tout juste de se lever. Je ne peux m'empêcher de l'observer, il est si captivant en cet instant. Il me regarde comme si j'étais la huitième merveille du monde et qu'il était soulagé que je sois encore à ses côtés. Il positionne alors une chaise à côté de mon fauteuil et me lance, tout en regardant fixement droit devant lui.

-Belle vue, n'est-ce pas ?

-C'est sublime... où sommes-nous ? je lui demande en pivotant la tête de son côté.

-Dans le vieux chalet de mes grands-parents, sur les hauteurs du Lac Léman. Je viens ici toutes les années fêter le nouvel an avec tous mes cousins mais d'habitude j'arrive la veille du 31. Cette année, grâce à toi, je vais enfin pouvoir profiter de cet endroit plus longtemps.

Son sourire dégage tellement de gentillesse que je ne suis pas sûre de le mériter. Il fait semblant de profiter de cette situation alors que je lui l'ai imposée sans scrupule. Je m'en veux et je me sens soudainement très gênée.

-Écoute Gabriel... je suis vraiment désolée pour hier soir. J'étais... mal et... je... je ne savais plus qui appeler...et...

-Je t'arrête tout de suite. Si tu comptes t'excuser de m'avoir appelé, je refuse de t'écouter. Tu comptes énormément à mes yeux, je te l'ai déjà dit et je suis content d'avoir pu t'aider. Tu peux compter sur moi, je serai là pour toi à n'importe quel moment.

Ces mots me mettent instantanément mal à l'aise car je distingue aisément toute l'affection qu'il me porte. Mais je suis tellement brisée que je ne suis pas sûre d'être capable d'accepter tout ce qu'il veut m'offrir. Je n'ai plus rien à lui donner, je ne sais plus qui je suis ni ce que je veux. Je sais juste que je suis une femme seule et perdue.

-Gabriel... je... je...ma vie est plutôt confuse ces derniers temps et... je ne pense pas être capable... de m'ouvrir à nouveau. Je... je... j'ai tellement mal !

Je lâche ces derniers mots dans un sanglot et je ne peux plus retenir mes larmes qui déferlent tel un tsunami en pleine tempête. Immédiatement, mon voisin attrape ma main droite et la presse fort entre ses deux paumes tout en s'installant sur l'accoudoir de mon fauteuil afin de me prendre dans ses bras.

-Chut... Ça va aller Candice, calme toi...

-Mais non ! Rien ne va ! Plus rien ne va ! Je n'ai plus personne... je ne suis plus personne...

J'ai crié ces mots dans un mélange de rage et de pleurs sans doute totalement pathétique mais tellement révélateur de mon état actuel. Je suis une pauvre fille si pathétique que même mes parents, les deux seules personnes sur terre censées m'aimer inconditionnellement, ne ressentent plus que dédain et mépris lorsqu'ils me voient. Alors comment pourrais-je aimer un homme si je ne suis pas capable de m'aimer moi-même ? Comment pourrais-je offrir quoique ce soit à un homme si je ne sais plus qui je suis ? Mais ne l'ai-je seulement déjà su ?

Gabriel me rapproche de lui et m'entoure de ses bras si chaleureux. Il me laisse pleurer un moment contre son torse tout en me caressant les cheveux et lorsque mes larmes commencent à se tarir, il ne desserre pas son étreinte. Il se contente simplement de me parler, tout bas.

-Je ne sais pas ce qu'il s'est passé pour que tu sois dans cet état mais ça me brise le cœur. Tu n'es pas seule Candice, je suis là, Cassiopée est là et je suis sûr que toutes tes amies rappliqueraient à la seconde si tu les appelais.

Il s'arrête quelques instants puis penche sa tête afin de me chuchoter ces mots à l'oreille :

-Le jour où tu seras prête à me dire ce qui te ronge, je serai là pour t'écouter. A n'importe quelle heure du jour ou de la nuit. Et si tu n'as pas envie de me parler, parles-en à quelqu'un. N'importe qui mais il faut que tu fasses sortir tout ce qui te bloque. Libères-toi de tes démons, ne les laisse pas te consumer à petit feu.

Sa présence et ses mots me font du bien. Il me laisse la possibilité de m'ouvrir à lui à mon rythme et je lui serai toujours reconnaissante de m'avoir aidée dans ce moment si compliqué de ma vie. Blottie dans ses bras, je me sens à l'abri de mes tourments. Sa douceur fissure doucement ma carapace et je sais que je vais bientôt me confier à lui.

-A partir de vendredi tous mes cousins arrivent petit à petit pour fêter le nouvel an ici. Mes grands-parents possèdent plusieurs petits chalets comme celui-ci dans les alentours et nous les squattons tous les ans, nous ne dérangeons personne ici !

Je sens ma bulle éclater au fur et à mesure qu'il m'explique que ce cocon loin de tout sera bientôt envahit par sa famille. Je ne sais pas si je suis prête à faire semblant devant tant de gens, je n'en ai plus la force.

-Cette année, Cass et Max passent également le nouvel an ici et ils devraient arriver dans la soirée de vendredi donc c'est à toi de décider si tu veux rester ici avec nous ou si tu préfères rentrer sur Paris. Candice, regarde-moi. Il passe son pouce sous mon visage afin de me faire relever la tête puis il plonge son regard sincère dans le mien. Je veux juste que tu te sentes mieux, alors si tu préfères rentrer chez toi à la fin de la semaine, tu n'as qu'un mot à dire et on prend la route.

Cette proposition plus que tentante me trotte un moment dans la tête mais je culpabilise. Je ne peux pas lui demander d'être mon taxi et de gâcher son séjour ici, ce serait bien trop égoïste.

-Ça va aller, ne t'en fais pas.

Ces faibles mots sont les seuls que je parviens à prononcer tout en lui offrant un sourire forcé. Ma pauvre tentative de persuasion échoue lamentablement quand je remarque Gabriel froncer les sourcils.

-Ne me mens pas s'il te plait. Si tu veux rentrer, on rentre.

-Je ne peux pas t'en demander tant Gabriel. Je ne sais pas combien d'heures de route nous séparent de Paris mais je suis à peu près sûre qu'un tel aller-retour te prendrait la journée. Alors, je vais faire de mon mieux pour me remettre et faire la fête avec vous en fin de semaine.

La fin de ma phrase n'a jamais sonné aussi faux et nous en sommes tous les deux conscients. Mais Gabriel ne s'avoue pas si facilement vaincu. Tout en me déposant un léger baiser sur les cheveux, il me murmure :

-Nous sommes à six heures de Paris et si c'est ce qu'il te faut pour t'aider alors je suis prêt à passer la journée sur la route, pour toi. Mais si tu préfères, tu peux aussi rentrer en train. Comme ça, tu arrêteras de culpabiliser sans raison et tu pourras te détendre.

Mon cœur blessé pèse un peu moins lourd dans ma poitrine à chaque seconde que je passe auprès de Gabriel. Je passe mes bras dans son dos pour l'enlacer et pendant que je le remercie à maintes reprises, je ferme les yeux lorsqu'il dépose une multitude de baisers sur le haut de mon crane.

Cet homme rassurant me donne tant d'affection que je commence à me réconcilier avec la vie. Toujours blottie contre son torse, je rouvre les yeux afin de contempler la vue magnifique qui nous fait face. Au loin, je distingue le lac Léman briller de mille feux sous les rayons francs du soleil et je me surprends à penser que le chemin de ma reconstruction sera peut-être long mais qu'il existe, ici quelque part entre ces montagnes et ces sapins.

Les gargouillements du ventre vide de Gabriel brisent le silence paisible qui nous entourait jusque-là et nous nous mettons tous les deux à rire. Je me détache de lui et il se lève pour aller chercher quelque chose à grignoter.

-As-tu mangé un bout en te levant ? Hier soir, j'ai rempli les placards pour que tu puisses te servir ce matin.

-Oui, oui j'ai picoré un petit quelque chose, je m'empresse de lui mentir.

Je sais pertinemment que si je lui avoue que j'ai le ventre vide depuis plusieurs jours, il va me forcer à me nourrir et je n'en suis pas encore capable. Je n'ai jamais rejeté la nourriture de la sorte mais l'épreuve que je suis en train de traverser me bouleverse tellement que je n'arrive plus à apprécier un quelconque goût. Ma réponse semble le satisfaire puisqu'il s'éloigne en direction de la cuisine, un sourire apaisé accroché à ses lèvres.

Quand il revient quelques minutes plus tard avec deux tasses fumantes à la main, je me demande déjà comment je vais pouvoir refuser cette attention sans le froisser. Cependant, cet homme persévérant a plus d'un tour dans son sac et je le découvre lorsqu'il me met la tasse entre les mains. Je reconnais immédiatement le sachet de thé que je bois tous les matins au petit-déjeuner et je relève immédiatement la tête vers lui. Son petit sourire en coin me prouve qu'il est ravi d'avoir réussi son coup.

-Tu ne m'en veux pas mais hier soir j'ai fouillé tes placards afin de trouver ce que tu aimes prendre au petit-déj'. Je me suis dit que cela te ferait plaisir de retrouver des goûts familiers.

Si j'arrive à lui sourire sincèrement et à le remercier de tout mon cœur en cet instant, c'est uniquement grâce à lui et sa dévotion sans faille.

J'avais raison, Gabriel est un ange... mon ange gardien.

Après ce petit-déjeuner improvisé, Gabriel me demande de le suivre sans poser de questions et j'accepte sans rechigner. Je peux au moins faire ça pour lui. Nous nous armons de vêtements chauds et de nos bottes de neige et nous partons nous balader à travers les plaines enneigées. Nous marchons tranquillement, sans nous presser et j'ai tout le loisir d'admirer toutes les merveilles qui nous entourent. La neige craque sous nos pas, les oiseaux virevoltent autour de nous et le silence qui nous entoure accentue cette sensation de sérénité qui nous accompagne. Au bout de deux heures, nous atteignons le bord d'une falaise qui surplombe le lac léman. La vue est grandiose. Debout au bord du précipice, j'ai tout bonnement l'impression que mon horizon s'élargit. Mon quotidien triste et solitaire n'existe plus en cet instant, je ne vois plus que la douceur de l'eau et la chaleur des petits chalets aux cheminées fumantes.

Gabriel me sort de ma contemplation en me prenant délicatement la main et il nous dirige vers un petit refuge pour randonneur qui se trouve à une dizaine de mètres. Il sort alors de son sac-à-dos toute une réserve de victuailles qui me déclenche immédiatement un haut-le-cœur. Remarquant ma réaction, il éloigne tout de suite la nourriture de moi et se contente de me dire :

-Prends seulement ce qui te fait envie, mais mange un petit peu quand même. Nous devons encore marcher plus de deux heures pour rejoindre le chalet.

Je me force à avaler quelques bouchées de pain accompagnées d'un bout de jambon et le poids de ces aliments sur mon estomac vide me dérange sur-le-champ. Cependant, je me fais violence pour ne pas inquiéter Gabriel outre mesure, lui qui est si content que je me nourrisse.

L'après-midi passe à une vitesse folle. Nous n'échangeons aucun mot pendant que nous regagnons le chalet mais l'atmosphère entre nous est chaleureuse. Je remarque à plusieurs reprises que Gabriel me couve du regard et je me sens légère à ses côtés. Je respire à plein poumon afin de m'imprégner de la magie de ces lieux. Moi qui, hier encore, était complètement anéantie et brisée, je me surprends aujourd'hui à découvrir les petits plaisirs d'une vie simple. Je me délecte du soleil qui lèche ma peau, du bruit de mes pas s'enfonçant dans la neige, de l'air froid qui purifie tout mon être et de ce paysage idyllique qui me transporte loin de mes turpitudes.

Nous passons la soirée au coin du feu, Gabriel déniche un jeu de cartes et me propose de m'initier au poker. Cet agréable moment prend fin lorsque, tombant de sommeil, je décide de rejoindre ma chambre. Malgré la fatigue et la journée bucolique que j'ai passée, je peine à m'endormir. Dès que mes paupières se ferment, le visage blessé d'Ethan se mêle inlassablement aux paroles destructrices de mes parents et je ne peux retenir mes larmes. Tout en sanglotant, je crois que je finis par m'assoupir.

La semaine se poursuit sur le même rythme, je me lève tous les matins avant Gabriel et j'en profite pour observer la nature se réveiller, installée sur mon rocking-chair et bien enveloppée dans une épaisse couverture. Je pars tous les jours me promener pour découvrir les alentours et ces moments passés seule avec moi-même me permettent de me redécouvrir petit à petit. Au détour d'une balade, je réalise que mon appareil photo me manque cruellement et que j'ai très envie de me retrouver à nouveau derrière l'objectif. Je commence à réfléchir à ce que j'aimerais faire pour me sentir réellement bien dans mon quotidien et la vision de ma pile de livres non entamés s'impose à mon esprit. Je me fais alors la promesse de respecter de bonnes résolutions afin de profiter pleinement de la vie et de me faire plaisir. Lecture, photographie, danse... tous les hobbies que j'avais étant petite ont toujours une place particulière dans mon cœur et ils ne demandent aujourd'hui qu'à être exploités. Je prends alors doucement conscience que je ne réussirai à me reconstruire que le jour où j'apprendrai à vivre pour moi-même.

Mon travail à la soierie me satisfait et le fait d'avoir réussi le projet Royal Beauty a renforcé la confiance que je porte envers mes compétences professionnelles. Le seul point problématique sur mon lieu de travail reste... Ethan et notre relation très particulière que nous avons tissée au fil des semaines. Malgré toute l'attirance et l'attention que je lui porte, je sais que je dois absolument m'éloigner de lui au plus vite. Il n'a pas de place pour moi dans sa vie et il n'a pas hésité à me mentir pour me faire croire le contraire. Les derniers évènements qui ont ponctué ma vie m'ont fait prendre conscience d'une chose importante : je dois arrêter de me sacrifier pour faire le bonheur des autres. Ethan ne peut pas m'apporter un quelconque bonheur et je refuse de le laisser me briser le cœur.

Chaque soir, je dine avec Gabriel au coin du feu après avoir cuisiné pour nous deux. J'ai toujours aimé concocter de bons petits plats et renouer avec ce plaisir simple m'aide à retrouver la quiétude qui m'a tristement quittée. Pendant le repas, j'écoute Gabriel s'ouvrir et me faire une place dans sa vie tout en me demandant si je la mérite réellement et si je serais un jour capable de lui donner tout l'amour qu'il devrait recevoir.

Jeudi soir, nous passons notre dernière soirée en tête à tête. J'ai passé toute la semaine à m'oxygéner dans la nature et à me recentrer sur mes envies les plus profondes. J'ai réalisé que la présence de Gabriel et ses attentions me permettent de reprendre confiance en moi et de me sentir valorisée. Il pose toujours sur moi un regard rempli d'affection et de tendresse qui me réchauffe le cœur. Il a su me laisser l'espace dont j'avais besoin cette semaine tout en gardant un œil protecteur sur moi et j'ai réussi à digérer l'attitude dévastatrice de mes parents. Je ne ferais jamais leur fierté, j'en suis tout à fait consciente, mais je commence également à intégrer le fait que je ne dois pas construire ma vie pour eux.

Alors que je suis en train de sortir le gratin du four, Gabriel sort chercher quelques buches pour raviver le feu. J'entends alors un cri sourd et je me précipite dehors pour le trouver étalé dans la neige. Il commence à rire tout en se relevant et en m'expliquant qu'il s'est emmêlé les pieds dans ses lacets défaits quand tout à coup, il tombe à nouveau la tête la première dans la neige. Je ne peux alors plus réprimer un sincère et profond rire qui me traverse de la tête aux pieds. Je ris à gorge déployée, je ris de tout mon être et je dois même me tenir le ventre tellement je ne peux plus m'arrêter. Gabriel se relève et me pousse à l'intérieur du chalet tandis que je ris toujours aux éclats et nous mettons un moment à nous remettre de cette crise de fou rire. Mon dieu, que cela est agréable de rire le cœur léger !

-Arrête de te moquer de moi et passe à table, me lance Gabriel avec un clin d'œil.

Il nous sert deux verres de vin et nous trinquons.

-C'est notre dernière soirée rien que tous les deux... je lui murmure sur un ton nostalgique.

-Si je te manque trop les prochains soirs, tu pourras toujours t'incruster dans ma chambre, me répond-t-il sur un ton grivois.

Je rougis instantanément, plus gênée que jamais mais Gabriel n'en a pas fini avec moi.

-J'adorerais découvrir ton beau visage au réveil, enroulé dans mes draps ou dans mes bras, comme tu préfères...

Il me regarde intensément et je devine aisément qu'il ne joue plus. Il ne m'a jamais caché ses intentions envers moi et notre proximité s'est accentuée cette semaine. Cependant, je n'ai pas encore oublié Ethan et je ne suis pas prête à tourner la page et à m'engager auprès d'un autre homme.

-Pour l'instant, à part nos moments de complicité actuels, je ne suis pas sûre d'être capable de t'offrir plus. Tu m'as récupérée alors que j'étais au plus mal et je dois prendre soin de moi.

-Je t'ai toujours dit que je te laisserai tout le temps qu'il te faudra, ma jolie Candice. Et crois-moi, je serai là pour toi, comme je l'ai été dimanche soir.

Je relève la tête et lorsque mes yeux plongent dans les siens, je comprends qu'il est temps pour moi de lui ouvrir mon cœur. Il le mérite. Alors je ferme brièvement les yeux, j'inspire profondément et je me lance.

-Depuis que je suis toute petite, mes relations avec mes parents ont toujours été... compliquées. Ils en attendaient énormément de moi, ils avaient des ambitions gigantesques pour moi et je n'ai pas réussi à les satisfaire. Plus les années passaient, plus ils se montraient autoritaires et exigeants. Je mettais un point d'honneur à être la meilleure dans tout ce que j'entreprenais et j'y parvenais, la plupart du temps. Mais ils avaient toujours des reproches à me faire. Quoiqu'il arrive, je n'étais jamais assez bien pour eux. Alors je me suis construite en suivant leur dictat et en calquant leurs envies sur les miennes. Puis les années ont passé et j'ai pris mon indépendance. J'ai découvert alors ce qu'est de vivre paisiblement mais ce répit n'a été que de courte durée. Ils sont régulièrement revenus à la charge, me rappelant que je les décevais constamment. J'ai toujours réussi à garder la face même si au fond de moi, leur mépris me détruisait petit à petit. Mais dimanche...

Ma gorge se noue tandis que Gabriel attrape ma main et la serre fort pour me donner du courage.

-Dimanche, ils se sont montrés plus exécrables que jamais. Je n'ai rien fait pour mériter leur méchanceté et je crois que je ne comprendrais jamais leur attitude envers moi. J'ai essayé de me montrer forte mais leurs attaques étaient d'une telle violence que j'ai échoué. Je me suis écroulée et je me suis enfuie.... Il faut que tu comprennes que... j'ai toujours agi pour eux, comme eux le souhaitaient et au final, je ne sais plus vraiment qui je suis. Pour la première fois de ma vie, je dois vivre pour moi-même et je suis perdue. Je suis en train de me découvrir et cet endroit où tu m'as emmenée...

Je lève les yeux et contemple ce petit chalet chaleureux qui m'a accueillie alors que j'étais au plus mal.

-Ce petit coin de paradis que tu m'as offert ainsi que ta gentillesse et ta tendresse m'ont permis de réaliser que la vie est faite de plaisirs simples qui créent à eux seul une bulle de bonheur. Et je veux construire ma propre bulle de bonheur. Je le veux vraiment... et je ne pourrais jamais assez te remercier pour tout ce que tu as fait pour moi ces derniers jours... je ne sais pas si tu t'en rends compte mais... tu m'as sauvée... tu m'as sauvée du froid, de la solitude et de moi-même.

Pour la première fois depuis douze jours, je ne verse pas de larme. Je me sens tout à coup beaucoup plus légère et mes lèvres s'étirent pour offrir à Gabriel un sourire éclatant. Il tient toujours ma main fermement dans la sienne et ses yeux sont brillants. Nous sommes tous les deux émus mais pas pour les mêmes raisons. Gabriel esquisse un geste pour que je me lève et je m'exécute. Il me fait assoir sur ses genoux puis sa main quitte la mienne pour venir se poser sur ma joue. Rapidement, ses deux paumes encerclent mon visage alors que mon rythme cardiaque s'accélère. Pas d'excitation mais simplement parce que je ne suis pas prête et que j'ai profondément peur que la magie de cette soirée ne s'envole à tout jamais.

Délicatement, Gabriel pose ses lèvres sur mon front puis dépose un tendre baiser appuyé. Mon cœur peut se calmer, une fois de plus cet homme si avenant a su agir en parfait gentleman. Sa bouche toujours collée à mon front, il susurre :

-Merci de me faire à ce point confiance Candice.

Nous restons ainsi silencieux un moment, seulement bercés par le crépitement du feu dans la cheminée. Je réalise alors que demain, ses cousins envahiront notre quiétude et je ressens un léger pincement au cœur lorsque je comprends que cette parenthèse s'achève bientôt. Dans quelques heures, je serai entourée de personnes joyeuses venues faire la fête et je me promets de faire tout mon possible pour ne pas plomber l'ambiance. Je vais essayer de m'amuser, vraiment m'amuser. Je penche alors la tête pour lui chuchoter à l'oreille :

-Je crois que je suis prête à faire la fête avec vous demain...

Instantanément, Gabriel me sert plus fort contre lui et je vois ses lèvres s'étirer en un beau sourire. Il colle alors à son tour ses lèvres à mon oreille pour me glisser ces mots :

-Par contre ma jolie Candice, il faut que tu arrêtes de coller ta sublime poitrine contre moi parce que je ne sais pas si je vais réussir à terminer sagement la semaine !

Je me redresse immédiatement et quitte ses genoux dans la seconde. Gabriel quant à lui m'offre un petit sourire en coin qui n'a rien de sage tout me demandant « Bah quoi ?! ».

Je retrouve le Gabriel dragueur de nos débuts et je ne sais absolument pas comment je vais parvenir à le tenir à distance jusqu'à la fin de la semaine.

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Je voulais juste tous vous remercier , vous êtes de plus en plus nombreux à me lire et vous n'imaginez pas le bonheur que vous m'offrez. Le prochain chapitre est pratiquement terminé et si vous êtes des petits dingos à m'inonder de votes et de commentaires, je pourrais sûrement vous le poster plus tôt que prévu 😉...

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