Chapitre 14 - I just wanna keep calling your name
Lundi 12 décembre
Aujourd'hui c'est le jour J. La présentation du dossier Royal Beauty a lieu à 11h et c'est un euphémisme que de dire que je suis stressée. Je n'ai jamais été aussi angoissée de toute ma vie. Pas même lorsque j'ai passé mon permis de conduire pour la quatrième fois. Pas même lorsque j'ai dû annoncer à ma mère que je ne ferais pas médecine après le bac et que j'allais ainsi ruiner tous ses espoirs de "voir un jour sa fille devenir quelqu'un de respectable". Et pas même lorsque j'ai soutenu mon mémoire de fin d'études devant un jury de professionnels reconnus mais surtout devant ma mère qui me rabâchait sans cesse que j'allais échouer. Tout cela n'est rien comparé à l'état dans lequel je me trouve en cet instant.
Cette présentation ne représente rien d'autre que mon ticket d'entrée définitif dans cette entreprise. Si j'échoue, mon contrat de travail sera rompu et je retrouverai mon quotidien ennuyeux et déprimant qui me révulse tant aujourd'hui. Cette option est absolument inenvisageable. Je dois réussir, je n'ai pas d'autre solution. J'ai tant travaillé sur ce dossier que je refuse de baisser les bras maintenant.
Lorsque mon maudit patron m'a confié cette affaire, c'était dans le seul but de me voir faillir et de me prouver que j'étais aussi incompétente qu'il le pensait. Il a ensuite usé de son ascendant hiérarchique pour profiter de moi lors de nos séances de travail et comme une idiote, j'ai craqué. Une fois. Une seule et unique fois qui reste à ce jour la plus grosse erreur que je n'ai jamais commise. Je veux aujourd'hui lui prouver que la potiche qu'il voit en moi n'existe pas et qu'il va devoir me compter parmi ses salariés car je vais remporter la bataille. Cette présentation sera ma façon de lui dire que je suis plus forte qu'il ne le croit et qu'il n'a pas le droit de me traiter différemment des autres employés.
Comme j'en ai maintenant pris l'habitude ces dernières semaines, je suis arrivée très tôt au bureau ce matin. J'ai profité d'être seule pour répéter à haute voix mon discours et m'entraîner ainsi à maîtriser les trémolos de stress qui obstruent ma voix d'habitude si calme et posée. J'ai relu une bonne cinquantaine de fois mes notes et je ne tiens plus en place depuis quelques minutes. Je me lève, fais nerveusement le tour de mon bureau, range frénétiquement mes dossiers déjà classés à la perfection puis me rassois quelques instants avant de me relever, ne supportant pas d'être immobile. Les minutes passent comme des heures et je ne supporte déjà plus cette appréhension qui me ronge de l'intérieur. Je ne suis pas seulement stressée à l'idée de jouer ma place ici dans quelques heures, je suis également complètement terrifiée à la simple idée de recroiser Mr Archer.
Après avoir passé un agréable moment samedi à bruncher avec Gabriel, je me suis définitivement raisonnée. Mon épouvantable moment d'égarement hante encore mes pensées mais je me suis promise de refouler mon attirance déplacée pour mon patron et de ne plus le laisser m'approcher. Je dois absolument me concentrer sur Gabriel qui est tout simplement l'homme qu'il me faut, ma meilleure amie a raison. Il est physiquement agréable et il est toujours souriant, sympathique et bienveillant. Cet homme ne pourra que prendre soin de moi, contrairement à l'homme-dont-je-refuse-de-prononcer-le-prénom. Je me répète ce mantra depuis deux jours et j'en suis presque convaincue aujourd'hui. Cette pensée me laisse croire que je serai assez forte pour ne rien ressentir lorsque mes yeux se poseront sur mon patron.
J'avais tort. Il vient juste d'arriver et ma respiration s'est coupée au moment où je l'ai aperçu, plus beau que jamais. Ses longues jambes musclées délicieusement vêtues d'un jean brut taillé à la perfection le rapprochent un peu plus de mon bureau à chaque pas qu'il fait tandis que sa chemise grise lui dessine un torse sculptural que j'ai eu la chance de parcourir brièvement. "Bien trop brièvement !" me crient mes envies. Ses yeux sont rivés sur son téléphone et à en juger par ses sourcils froncés, j'ai l'impression que ce qu'il y lit ne doit pas lui plaire. En revanche, sa mimique contrariée lui confère encore plus de charisme qu'il n'avait déjà. Mes yeux descendent ensuite sur ses lèvres charnues qui m'ont transportée au paradis puis en enfer et c'est alors que je remarque ce qui le rend si irrésistible aujourd'hui. Il arbore une fine barbe de quelques jours qui le rend encore plus viril et excitant, comme si cela était encore possible! Sa beauté est tout simplement démoniaque.
Je peine à reprendre mes esprits tandis que mon boss traverse le couloir avec la plus grande indifférence à mon égard. Il ne lève pas les yeux vers moi, il ne s'arrête pas à hauteur de mon bureau, il continue simplement son chemin jusqu'à atteindre son antre. Mon esprit est chamboulé par toutes les sensations interdites que j'ai ressenties en quelques secondes à peine et ma réaction m'effraie au plus haut point. Bon sang, ce que cet homme m'atti... Gabriel est l'homme qu'il me faut. Gabriel est l'homme qu'il me faut. Gabriel est l'homme qu'il me faut. Gabriel est l'homme qu'il me faut.
Alors que je suis en pleine séance d'auto-persuasion, j'entends les talons de Mme Saint-Martin qui martèlent le sol s'approcher. Elle passe furtivement la tête dans mon bureau et me sourit chaleureusement.
-Bonjour Candice, vous êtes prête ? J'ai hâte de découvrir le fruit de votre travail.
La pression qui est déjà à son paroxysme monte encore d'un cran et je me demande sérieusement si je vais tenir jusqu'à 11h !
-Bonjour. Oui c'est le grand jour, tout est prêt. J'espère ne pas vous décevoir, je lui lance d'une voix marquée par l'angoisse.
-Je l'espère aussi Candice, ce dossier est crucial, me répond-t-elle avant de tourner les talons et de rejoindre son bureau.
Moi je n'ai qu'une envie: celle de disparaître sous terre le plus rapidement possible ! Heureusement pour moi, Marina arrive peu de temps après. Sans doute remarque-t-elle la détresse qui s'est emparée de mon visage puisqu'elle accourt dans mon bureau pour m'apporter son soutien. Nous passons l'heure suivante à réviser ensemble pendant que l'agitation caractéristique du lundi matin envahit le second étage.
Décrétant que je suis prête et qu'il faut que je me détende, Marina me propose d'aller me chercher une tasse de thé. J'accepte avec plaisir et au moment où je m'apprête à l'accompagner, Alessandro m'apostrophe dans le couloir pour me demander comment je me sens.
-Je n'ai jamais été aussi stressée de toute ma vie ! je lui réponds dans un petit rire nerveux.
Mr Archer passe à cet instant à côté de nous sans nous saluer et continue sa route jusqu'aux ascenseurs. Alessandro pose sa main sur mon bras tout en se rapprochant légèrement de moi pour me réconforter. Je n'apprécie pas du tout cette proximité et m'empresse de reculer d'un pas, mal à l'aise. Machinalement, mon regard se pose sur l'homme sur lequel les portes de l'ascenseur se referment et qui n'a rien manqué de toute cette scène. Il me semble que son regard est noir et ses sourcils froncés mais la machine l'engloutit avant que je ne puisse comprendre quoi que ce soit.
Alors que je peine à me débarrasser de mon collègue un peu trop familier à mon goût, un bruit tonitruant résonne tout à coup au bout du couloir, suivi d'un cri aigu. Paniquée, j'accours en direction de là où me semble provenir ce vacarme quand j'aperçois Marina, par terre au milieu des escaliers et entourée d'un liquide brun qui s'est apparemment échappé de ses mains. Le visage de ma collègue dépeint toute la douleur qui a pris possession d'elle lors de sa chute et je m'empresse d'aller lui porter secours.
-Marina ! Que s'est-il passé ? Comment te sens-tu ?
Ma collègue grimace en essayant de se relever, en vain.
-J'ai trébuché dans les escaliers et j'ai fait tomber nos tasses de thé. Mais je crois surtout que je me suis fait mal à la jambe, me répond-t-elle en faisant de nouveau la moue.
Alessandro m'aide à essayer de la relever et nous la conduisons jusqu'à la première chaise qui se trouve sur notre chemin. Marina s'appuie sur nos épaules et avance à croche-pied. Elle est apparemment incapable de poser le pied gauche par terre. Arrivée à hauteur de la chaise, elle s'assoit rapidement et essaie d'observer son pied. Je lui enlève sa bottine et mes yeux s'écarquillent immédiatement. Sa cheville a triplé de volume et est en train de se colorer d'une inquiétante teinte bleue. Voyant que notre collègue s'est sérieusement blessée, Alessandro part appeler un médecin.
Il revient quelques minutes plus tard, une poche de glace dans la main et accompagné de nos deux supérieurs. Mme Saint-Martin s'enquiert immédiatement de l'état de Marina tandis que Mr Archer examine en détails sa cheville et lui ordonne de ne pas bouger. Elle semble réellement souffrir et la glace ne la soulage qu'à moitié. Je reste à ses côtés, une main sur son épaule et une immense panique commence à s'emparer de moi.
Je tente de me calmer, de me forcer à inspirer et expirer calmement mais je perds le contrôle. Ma présentation, tout le stress accumulé ces dernières semaines, l'attitude exécrable de mon boss, ses mots blessants, ses lèvres si délicieuses, notre étreinte si envoûtante, le trouble et le désarroi que j'ai ressenti juste après, ma réaction quand je l'ai vu ce matin, sa froideur, la blessure de Marina... c'est trop. Beaucoup trop pour moi.
Les pompiers arrivent à peine cinq minutes après l'appel d'Alessandro et ils nous demandent de sortir de la pièce. Moi, je suis incapable de bouger. Sans m'en rendre compte, mes doigts se sont crispés sur le dossier de la chaise de ma collègue, ma respiration saccadée ne m'apporte plus aucun oxygène, mes jambes ne me portent plus et le sol se dérobe sous mes pieds. Je n'arrive plus à reprendre mes esprits, j'ai cédé à la panique et je ne sais plus comment revenir à la réalité.
L'agitation s'empare maintenant du second étage et je crois qu'un pompier me pousse délicatement vers la sortie. Je ne comprends pas vraiment comment mais mes jambes me conduisent maladroitement jusqu'au couloir. Les tremblements ne s'emparent plus seulement de mes mains mais ils envahissent maintenant tout mon corps. Je suffoque. Je ne comprends plus ce qu'il m'arrive. Il me semble que je me retiens au mur à ma droite mais une poigne chaude et ferme attrape mon bras et me guide très délicatement dans la petite pièce attenante.
Lorsque j'entends la porte se verrouiller, je sors de ma transe. Je me tiens debout, droite face à mon patron qui m'a isolée dans le local ménager de l'étage. Il se retourne et pose son regard sur moi. Il semble inquiet, ses yeux me scrutent en détails comme s'ils cherchaient à me comprendre. Je suis absolument incapable de prononcer le moindre mot, incapable d'esquisser le moindre geste. Je sais que mon cœur ne devrait pas s'emballer comme il le fait, que mes mains ne devraient pas vouloir le toucher et que mes lèvres ne devraient pas le réclamer. Mais je crois que mon corps n'en fait qu'à sa tête et que je ne le maîtrise plus.
Il s'approche tout doucement de moi, comme s'il voulait m'apprivoiser et je ne sais plus si mes tremblements sont dus à ma crise de panique ou à sa présence. J'ai tout à coup peur de moi-même, de ce que je pourrais faire si je me laissais aller. Je dois immédiatement sortir de cette pièce. Le souffle coupé, j'avance tout en me décalant pour éviter tout contact physique avec mon fantasme incarné et lorsque je le dépasse de manière totalement frénétique et désordonnée, il attrape mon bras. Par réflexe, j'essaie de le récupérer dans un geste brusque et violent qui le cloue sur place. Il ouvre grand les yeux, surpris par ma réaction sans doute disproportionnée. Il faut me comprendre, notre isolement est beaucoup trop dangereux.
Ses deux mains capturent maintenant mes bras avec douceur et il plante son regard interrogateur dans le mien.
-Candice ? Vous allez bien ?
Ma respiration est toujours hachée et mon corps soubresaute sous les assauts de la panique qui ne veut apparemment plus me quitter. Je refuse de le regarder dans les yeux et tente de m'échapper, en vain.
-Candice, répondez-moi s'il vous plaît. Vous allez bien ? Que se passe-t-il ?
Il a sincèrement l'air soucieux de mon état et cette réaction me trouble encore plus. N'est-il pas censé jouer avec moi ? Alors pourquoi s'inquiète-t-il tout à coup de me voir comme cela ? Un tas d'interrogations nait dans mon esprit et m'empêche de m'ancrer dans cette réalité que je refuse de toute façon de vivre en cet instant. Voyant que je suis toujours en pleine crise de panique, il se rapproche légèrement de moi et me susurre:
-Candice.... dites-moi quelque chose. Calmez-vous... respirez lentement... suivez mon rythme... faites comme moi...
Il glisse lentement ces mots à mon oreille et je ne peux empêcher mon corps de se connecter au sien. Je calque difficilement mes respirations sur les siennes et j'autorise mes yeux à se poser sur son torse. Cette vision me fait un bien fou. Cet homme me paraît en cet instant si rassurant ! Il est mon roc et je tente de m'accrocher à lui comme si ma vie en dépendait. Mais mon cerveau m'envoie des signaux de danger et m'empêche de me calmer. Mes inspirations sont toujours aussi secouées de spasmes.
Voyant que mon état ne s'améliore pas, les mains d'Ethan glissent délicieusement de mes bras jusqu'à mes mains qu'il empoigne avec la plus grande quiétude pour poser délicatement mes paumes sur sa chemise. Sous ma peau, je sens son torse se soulever paisiblement au rythme de sa respiration. Les battements de son cœur s'écrasent contre mes mains et cette sensation se répand dans tout mon corps pour m'apporter un apaisement salvateur. Je ferme les yeux et me laisse enfin aller, me détendant instantanément grâce à ce contact. Ethan libère un long souffle et je sens son corps se décrisper imperceptiblement sous mes doigts.
Ma respiration retrouve petit à petit un rythme normal tandis que les tremblements qui s'étaient emparés de tous mes membres semblent se calmer. Je n'ai plus l'impression de défaillir, au contraire je retrouve la sensation de mes pieds ancrés dans le sol. L'impression d'étouffer est remplacée par d'exquises inspirations remplies d'oxygène. Et mon cœur ne tremble plus de panique mais de contentement. Malgré tout, je n'ose pas enlever mes mains de sa poitrine, j'ai trop peur de replonger. De toute façon, même si je le voulais, je ne le pourrais pas. Ses mains tiennent les miennes aussi fermement que délicatement.
Nous restons ainsi de longues minutes, sans bouger. Nos respirations sont synchronisées et les pouces d'Ethan caressent nonchalamment le dos de mes mains. Nos corps ne sont séparés que de quelques centimètres et en cet instant, je ne souhaiterais pas être ailleurs. Quand ma crise de panique s'est emparée de moi, il a été le seul à le remarquer. Il a profité de l'agitation générale pour nous isoler et m'apporter le réconfort dont j'avais besoin.
-Merci... je lui murmure d'une toute petite voix.
Pour toute réponse, il serre plus fermement ses mains sur les miennes et baisse la tête afin de me regarder. Moi, je refuse toujours de parcourir ses sublimes iris, j'ai bien trop peur de me laisser envoûter. Sa main droite quitte alors la mienne pour se poser immédiatement sur ma joue. Il a agi si vite, comme si ma peau lui manquait déjà. Ses doigts se mettent à cajoler ma joue puis descendent sur mon cou qu'ils parsèment d'infinis frissons. Mes yeux toujours clos se mettent à papillonner sous le plaisir qu'il m'offre. Cela ne lui échappe pas et sa main se positionne alors sous mon menton pour me forcer à relever la tête et à croiser son regard. Je ne dois pas craquer. Je m'autorise seulement à me délecter de son toucher.
Il approche maintenant sa bouche près de mon oreille et me susurre:
-Candiiiiiiice...
Mon prénom dans sa bouche sonne comme une invitation au plaisir. Malgré moi, j'enfonce légèrement mes doigts dans sa poitrine.
-Regarde-moi...
Ses paroles résonnent jusque dans mon bas-ventre qui se contracte instantanément. Je ne dois surtout pas le regarder. Mon cœur bat déjà beaucoup trop vite et le désir commence à sérieusement m'envahir. Il répète à nouveau mon prénom mais cette fois, ses lèvres subtilement humectées se promènent sur ma joue, juste à côté de mon oreille. Son souffle chaud glisse sur mon visage et j'avale difficilement ma salive, trop troublée par ce torrent de sensations exquises mais interdites qui s'offrent à moi. Je rassemble mes dernières forces pour lui répondre:
-J-je... ne peux... p-pas...
Et c'est vrai. Je ne peux pas le regarder car ses mains me brûlent de désir. Je ne peux pas le regarder car je suis perdue. Je ne peux pas le regarder car il est beaucoup trop dangereux. Je ne peux pas le regarder car j'en meure d'envie.
Sa main gauche remonte insoutenablement vers ma nuque qu'elle agrippe tout en emmêlant le bout de ses doigts à mes cheveux. Sa main qui maintenait mon menton se positionne exactement de la même manière de l'autre côté de mon cou et je me sens prise au piège de cet homme si attirant. Il colle son front au mien et ses lèvres ne sont maintenant plus qu'à quelques centimètres des miennes. Habilement, ses jambes guident les miennes en arrière et mon dos se plaque avec douceur contre la porte. Si précédemment une distance peu raisonnable séparait nos deux corps, nos jambes sont maintenant emmêlées et nos torses ne font plus qu'un. Je crois que j'ai définitivement perdu le contrôle de la situation.
Mes longues heures de réflexion ce week-end m'ont convaincue d'une chose: je ne supporterai pas qu'Ethan joue avec moi dans le seul but de me montrer sa supériorité. Cette attitude vicieuse et perverse me répugne et malgré toute l'attraction que je ressens pour lui, je n'hésiterai pas à m'éloigner définitivement de lui.
Prenant mon courage à deux mains, j'ouvre les yeux et plante mes iris verts dans les siens. Ce que j'y lis me laisse perplexe. Son visage est submergé par le désir, ses pupilles dilatées passent frénétiquement de mes lèvres à mon cou puis à mes yeux et ses traits sont tendus. Le rictus arrogant qu'il arbore si souvent est aux abonnés absents et ses gestes sont d'une grande douceur. Remarquant que je l'observe, ses yeux se verrouillent aux miens et sa respiration se coupe l'espace d'une seconde. Je suis parfaitement consciente que c'est le moment où tout va basculer mais je suis incapable de le repousser. Mon corps en manque me hurle de lui donner sa dose d'Ethan et un fulgurant désir obstrue toutes mes pensées.
-Candice...
C'est exactement à ce moment-là que je faillis. Sa voix rauque si sensuelle et gorgée d'excitation qui prononce mon prénom comme s'il s'agissait là d'une urgence vitale... C'en est trop pour moi. Sans réfléchir davantage, mes mains agrippent le col de sa chemise et j'écrase ma bouche contre la sienne. Mon dieu, que c'est délicieux ! J'ai passé le week-end à essayer de me convaincre que cet homme est néfaste pour moi mais la sensation qui m'envahit en cet instant balaie tout sur son passage. C'est comme si je donnais enfin à mon corps ce qu'il attendait désespérément depuis trois jours. Un mélange d'excitation et de bien-être s'empare de moi et je le laisse m'emporter loin de mes tourments.
Nos lèvres se retrouvent enfin, elles se montrent à la fois impatientes et joueuses et nos langues ne tardent pas à s'entremêler. Nos souffles se mélangent, tout comme nos gémissements incontrôlés et cette mélodie remplit encore plus mon corps de désir. Mes mains parcourent frénétiquement son torse, ses épaules puis son dos avant de se poser dans sa nuque. Je sais que les minutes sont comptées alors j'essaie de l'attirer encore plus vers moi pour ne pas perdre une seule précieuse seconde. Ma bouche quitte la sienne pour butiner sa fine barbe et d'innombrables décharges électriques se répandent en moi quand je l'entends soupirer de plaisir. Ne pouvant apparemment pas se passer de mes lèvres plus longtemps, Ethan tourne vigoureusement la tête pour reprendre ce que j'avais interrompu. Ses dents se mettent à mordiller ma lèvre inférieure puis ma langue et je gémis encore et encore. Cet homme me fait tellement vibrer !
Ses mains partent maintenant à l'assaut de mon corps, descendant délicieusement sur ma poitrine qu'elles effleurent puis se posant tour à tour sur mon ventre, mes fesses puis mon dos. Ethan se sépare alors de moi pour me déshabiller du regard de la tête aux pieds avant de planter ses iris gorgés de désir dans les miens.
-Tu es tellement obsédante... tellement excitante comme ça...
Mon souffle se coupe lorsque ses mains descendent langoureusement sur ma jupe puis sur le haut de mes cuisses. Chaque millimètre carré de ma peau se recouvre d'une exquise chair de poule qui me rend plus fébrile encore. Ses lèvres se baladent sur mon cou puis mon visage et je ne peux m'empêcher de fermer les yeux pour profiter encore plus de cette symphonie qu'il m'offre. J'ai réellement besoin de savoir s'il partage la même urgence que moi et lorsque ma main descend sur sa poitrine pour s'imprégner de chaque battement que son cœur m'offre, mon ventre se contracte. Le rythme effréné et erratique de son organe vital fait écho au mien et l'évidence me frappe de plein fouet: nous ne pouvons rien faire contre cette irrésistible attraction qui nous lie.
Tandis que sa bouche retrouve la mienne avec passion, je ne peux m'empêcher de me cambrer pour connecter encore plus mon corps au sien. J'ai besoin de le sentir entièrement, dans chaque partie de mon corps. Mon mouvement le fait immédiatement gémir et son bras droit passe derrière mes épaules pour m'emprisonner encore plus. Je me fonds alors dans cette étreinte et je me délecte de son souffle chaud qui m'envahit. Les gestes d'Ethan sont remplis d'un désir tellement brûlant qu'ils en deviennent brusques et désordonnés. Sa main gauche auparavant positionnée sur ma cuisse entame une insoutenable ascension qui me rend immédiatement pantelante. Ses doigts passent sous le tissu de ma jupe et remontent sensuellement le long de mes bas noirs, relevant l'étoffe au passage.
Mon Apollon déplace alors ses lèvres vers mon oreille et me chuchote:
-Regarde-moi Candice.
Cette fois-ci, je n'hésite pas, je lui obéis. Ses yeux se font interrogateurs, comme s'ils me demandaient la permission de continuer cette douce torture. Pour simple réponse, je positionne mes mains de part et d'autre de son visage et mes lèvres retrouvent leur place favorite, moulées sur les siennes. Je suivrais cet homme jusqu'en enfer pour qu'il continue de me toucher de la sorte.
Galvanisé par mon baiser fougueux et mes incessants gémissements, Ethan laisse ses mains prendre possession de mes cuisses et ses doigts rugueux trouvent maintenant la dentelle de mes bas. Le son guttural qui sort de sa bouche se répercute instantanément dans mon bas-ventre et entre mes cuisses.
-Tu veux me rendre fou, c'est ça ?
Sans attendre la moindre réponse, ses doigts s'enfoncent dans la chair de ma cuisse, m'offrant ainsi la plus délicieuse des douleurs. Mes mains quant à elles sont toujours agrippées à sa nuque et le bout de mes doigts tiraille les fines mèches de cheveux qu'elles peuvent atteindre. Nos gestes se font à la fois doux et langoureux. Nous planons. Nous respirons le même oxygène. Nous sommes seuls, tous les deux, ensembles.
La chaleur entre nous monte encore d'un cran quand une de ses mains remonte pour atteindre ma poitrine qu'elle masse en douceur. Sa bouche s'attaque à mon cou tandis que les boutons dorés de mon chemisier bleu sautent un à un. Je perds le sens de la réalité lorsque les lèvres humides de mon homme commencent à picorer délicieusement la peau de mes seins pendant que ses mains retournent sous ma jupe taquiner la sensibilité de ma peau.
A cet instant, je ne saurais dire ce que je ressens réellement. Aucun mot n'est assez fort pour décrire le vacarme que font mon cœur affolé, mes respirations désordonnées, mes jambes tremblantes et ma bouche entrouverte. Je commence à décoller, à quitter la terre ferme et à me laisser emporter dans cette bulle de plaisir qu'Ethan a bâti de ses lèvres enivrantes et de ses mains possessives qui se rapprochent dangereusement de mon intimité.
Je n'ai jamais, absolument jamais, offert à un autre homme tout ce que je donne à Ethan. Je lui offre mon désir, mon excitation, ma vulnérabilité, mon corps et mon plaisir sans tricher, sans me dérober et sans penser à son regard. Je me dévoile telle que je suis, sans avoir envie de me cacher ou de prétendre être une autre pour lui plaire. Pour la première fois de ma vie, je me mets à nu. À vrai dire, je n'ai jamais eu envie de donner tout ceci à un autre homme car jamais personne ne m'a traité comme Ethan le fait. Malgré son attitude dédaigneuse et blessante, lui aussi s'offre à moi dès que nos corps se connectent. Il me traite en cet instant comme si j'étais son oxygène. Ensemble, nous créons une osmose entêtante.
Le plaisir que cet homme m'offre est incomparable. Mon corps en réclame plus, toujours plus, et je relève ma jambe droite afin de l'enrouler à la sienne et de coincer mon escarpin entre ses jambes. Ma jupe qu'Ethan a préalablement remontée dévoile entièrement mes bas. Je dois sûrement avoir l'air d'une dépravée dans cette position mais je m'en fiche, je veux qu'il me libère du torrent de plaisir qui gronde en moi.
Ses lèvres s'attaquent maintenant à la pointe de mon sein qu'elles ont libérée et je m'arqueboute de plus belle sous cet assaut des plus exquis. Ma poitrine pratiquement entièrement dévoilée par mon chemisier ouvert est recouverte de ses lèvres et d'une de ses mains. Son autre main, toujours entre mes jambes, se pose enfin sur la dentelle de mon sous-vêtement et commence à me caresser, m'offrant ainsi de divines sensations. Je ne peux alors plus me retenir et mes lèvres s'entrouvrent pour libérer ce qu'elles retiennent depuis de longues minutes maintenant.
-Ethaaaaaaaaaan...
Mon gémissement le stoppe net. Ses lèvres quittent ma poitrine, sa tête se redresse et ses yeux injectés de désir se verrouillent aux miens. J'ai peur d'avoir tout gâché mais ses doigts accentuent la pression de leurs caresses à travers mon sous-vêtement quand il me lance:
-Redis-le !
Je ne comprends pas très bien ce qu'il veut, je suis perdue dans le tourbillon de plaisir qui s'accumule entre mes jambes et qui ne va pas tarder à exploser. Voyant que je ne réponds pas, mon homme passe sa main sous mon boxer humide et entame la plus enivrante des tortures en promenant ses doigts le long de mon entrejambe mouillé tout en me susurrant à l'oreille :
-Redis-le Candice... je veux t'entendre gémir mon nom...
Une boule de feu menace de déferler dans mes veines à l'entente de ces mots. Mon excitation est pratiquement à son paroxysme quand ses lèvres se mettent à attaquer à nouveau les miennes tout en murmurant:
-Redis-le Candice... je veux que tu ne puisses rien prononcer d'autre que mon prénom.
L'action de ses doigts mêlée à ses paroles et ses baisers dominateurs me fait perdre pied. Je gémis son nom encore et encore et encore et encore et encore et encore. Dans un grognement sourd, sa bouche retrouve ma poitrine qu'elle malmène délicieusement. Tantôt ses dents me mordillent, tantôt sa langue trace un sillon humide sur mes seins et j'ai tout simplement l'impression qu'il imprègne mon corps de son venin. Je devrais sans doute me débattre mais je préfère me cambrer encore davantage et continuer de gémir son nom.
Ethan plante alors son regard affamé dans le mien en me pénétrant de ses habiles doigts rugueux. Il entame de lents va-et-vient avec son index et son majeur qui décuplent instantanément toutes les sensations torrentielles qui s'accumulent dans mon bas-ventre tandis que son pouce vient dessiner de parfaits cercles sur mon point le plus sensible. Ma bouche gémit à nouveau son nom d'une manière totalement primaire et passionnée tandis que mon homme ne peut se retenir de grogner contre la peau de mes seins. Je laisse mes mains se perdre frénétiquement dans ses cheveux et mes doigts s'agrippent désespérément à ses mèches brunes comme si ma vie en dépendait. Je veux me fondre en lui, c'est la seule pensée qui m'obnubile en cet instant.
C'est à ce moment précis que mon délicieux tortionnaire décide de m'assener le coup de grâce en accélérant le mouvement de ses doigts et de sa bouche. Ses lèvres voraces m'accompagnent au paradis lorsqu'il crochète ses doigts pour atteindre un point que je n'avais jusqu'alors jamais connu. La bulle de désir logée dans mon ventre explose tel un incendie ravageant tout mon être alors que ses dents mordillent plus fortement mes tétons durcis par le plaisir que mon homme me procure. Instinctivement, je me cambre contre son torse, mes ongles se plantent dans son dos tandis que je rejette ma tête en arrière en fermant les yeux pour savourer le plaisir qui s'infiltre en moi. Je laisse mon orgasme m'engloutir complètement et mes lèvres ne cessent de ronronner son prénom tandis que mon sexe se contracte délicieusement autour de ses doigts.
Le plaisir qui se déploie dans chaque parcelle de mon corps est foudroyant. Tous mes membres tremblent, mon cœur est proche de la syncope et mon bas-ventre se contracte si fort que je manque de tomber. Une vague de jouissance se déploie dans mon corps, partant de mon intimité pour engloutir mon ventre, mon cœur, mes bras et mes jambes. Je tremble sporadiquement pendant que le plaisir s'infiltre en moi et mes lèvres entrouvertes ne peuvent s'empêcher de murmurer son prénom pendant mon orgasme. D'un bras, Ethan me maintient fermement contre son corps puissant tandis qu'il continue de me torturer de l'autre. J'agrippe frénétiquement ses lèvres des miennes et je laisse un profond bien-être prendre possession de mon corps.
-Ooooooh Ethan !
Je peine à reprendre ma respiration et je prends peu à peu conscience que mes doigts crispés doivent avoir lacéré son dos pendant mon orgasme. Lorsque j'esquisse un mouvement pour me décoller de lui, il grogne et me plaque plus fort contre lui. Il enfouit son nez dans mes cheveux, positionnant ainsi ma tête dans sa nuque. Je me délecte alors de son odeur si virile et ferme les yeux. Nous reprenons tous les deux lentement notre respiration et la réalité se fraye un chemin dans mon esprit.
Mon patron vient de me conduire au septième ciel sur notre lieu de travail, à quelques minutes de la présentation la plus importante de toute ma vie, avec tous mes collègues seulement à quelques mètres de nous. Oh mon dieu ! Qu'est ce qu'il m'a pris ?
U
Ethan me tient toujours fermement tandis que mes yeux s'écarquillent de stupeur. Mes membres se figent et je desserre mon étreinte. Il faut que je parte. Tout de suite. Sentant mon changement d'attitude, il redresse la tête et plante son regard interrogateur dans le mien. Il doit y lire toute la panique qui m'a envahi puisqu'il fronce immédiatement les sourcils. Sans réfléchir davantage, j'use de toute ma force pour le repousser de mes deux mains et mon geste violent le prend de court. Sans avoir le temps de réagir, il se retrouve projeté contre le mur à côté de nous et j'en profite pour littéralement m'échapper.
Je cours comme une folle en regagnant le couloir de l'étage et j'atteins mon bureau en quelques secondes à peine. Par chance, je ne croise personne. Je peine à verrouiller ma porte tellement mes mains tremblent et quand j'y parviens, je plaque mon dos contre celle-ci, ferme les yeux et me prends la tête entre les mains.
J'ai commis la plus grosse erreur de toute ma vie. J'ai donné ma vulnérabilité à un homme autoritaire, blessant et sans doute manipulateur. Je me suis mise dans la pire des positons juste avant le moment le plus stressant de ma vie qui va sûrement devenir le moment le plus humiliant de toute ma vie. Je m'en veux terriblement !
Mais... si je suis totalement honnête avec moi-même, je dois avouer que je n'ai jamais ressenti autant de plaisir sous les mains d'un homme. Pire encore, je n'ai jamais connu une telle osmose avec un autre homme. Ces sentiments ambivalents mettent mon cerveau sens dessus dessous et je ne peux empêcher quelques larmes de rouler silencieusement sur mes joues. J'ai tellement peur de la manière dont mon patron va utiliser ma faiblesse pour me détruire !
Essayant difficilement de retrouver toute ma consistance, je me lance dans des respirations profondes et contrôlées puis j'ouvre les yeux. La panique m'envahit de plus belle lorsque je remarque que ma jupe est toujours remontée sur mes hanches et que les boutons ouverts de mon chemisier dévoilent presqu'entièrement ma poitrine. La tenue que Cass m'a offerte pour mon anniversaire est complètement débraillée et je ne peux m'empêcher de penser à la déception qui gagnerait ma meilleure amie si elle savait l'effet que son cadeau a eu sur l'homme qu'elle maudit. Je m'empresse de me rhabiller et j'ordonne à mon cerveau d'enclencher le mode 'pilote automatique'.
Rapidement, je me recoiffe puis me remaquille et je rassemble tous les documents relatifs au dossier bleu. Je jette un œil à l'horloge affichant 10h58 et je réprime une intense nausée qui tente de m'envahir.
Bon, Candice, tu oublies absolument tout ce qui s'est passé ce matin et tu te concentres sur ta présentation. Faire semblant, sauver les apparences et encaisser les joutes verbales, tu sais le faire. Alors, redresse la tête et bats toi pour ton poste !
C'est ainsi que je pars affronter mon avenir. Toute l'équipe commerciale au grand complet est déjà assise autour de l'immense table de réunion. Ethan est en train de griffonner je-ne-sais-quoi sur un document mais lorsque j'entre dans la pièce, il relève vivement la tête et ses yeux tentent de pénétrer mes pensées. Son visage est fermé et je rassemble toutes mes forces pour éviter soigneusement son regard. Assise à ses côtés, Mme Saint-Martin s'approche de lui et pose sa main sur sa joue en frottant sa peau. Je crois comprendre qu'elle lui murmure "tu as une marque rouge là" et je tourne immédiatement la tête pour cacher l'embarras qui me monte aux joues. Mon patron a une marque rouge sur le visage car j'ai tapissé sa fine barbe de mes baisers. Je refoule l'envie d'hurler "Enlevez votre main de sa peau" qui me submerge en cet instant et je m'installe en bout de table, face à l'assemblée.
Ma présentation dure quarante-cinq minutes pendant lesquelles je me surprends moi-même. Bien sûr, mon assurance et ma combativité sont restées au placard - ou plutôt dans le local ménager - mais ma voix est assez posée et j'enchaîne les sujets telle une automate. Je réponds à toutes les questions de ma responsable commerciale et de mes collègues. Seul Ethan garde le silence et continue de prendre des notes.
Quand l'assemblée a reçu toutes les réponses qu'elle attendait, Mme Saint-Martin se penche à l'oreille de mon boss et ils chuchotent ainsi de longues minutes. Moi, je plante les doigts dans mon dossier et je reste stoïque, attendant un retour de leur part. Au bout d'un trop long moment, Ethan prend la parole et sa voix grave encore enrouée par notre moment de folie résonne dans la pièce tandis que ses yeux me scrutent avec intensité.
-Merci pour ce moment Mlle Dumin, c'était très agréable. Nous allons mettre en pratique vos initiatives et sachez que vos arguments ont été entendus.
Sur ces paroles plus que troublantes, il se lève et mes collègues en font de même. Ethan quitte la salle de réunion tandis que ma responsable commerciale s'approche de moi.
-Je suis très satisfaite de votre travail, Candice. Vous avez su relever ce défi avec brio et vous nous avez prouvés aujourd'hui que vous étiez une collaboratrice fiable et compétente. Je suis ravie de travailler avec vous.
Mon cœur bat la chamade alors qu'elle me sourit chaleureusement en se dirigeant vers la sortie avant de se retourner et de rajouter:
-J'allais oublier de vous prévenir... Marina a apparemment une double entorse à la cheville et sera donc dans l'incapacité d'occuper son poste dans les semaines à venir. Je vous demande donc de la remplacer et de prendre en charge ses dossiers.
-Bien sur, je lui réponds avec empressement.
-Très bien. Je vous enverrai donc le détail du voyage ainsi que les horaires des vols par mail cet après-midi.
Je blêmis en comprenant immédiatement ce que cette dernière phrase signifie. Le déplacement à Londres. Avec Ethan. Tous les deux. Rien que nous deux. C'est impossible !
-Excusez-moi mais... si je pars... personne ne sera au bureau pour s'occuper des dossiers en cours. Peut-être serait-il plus sage que je reste ici et que Mr Archer fasse le déplacement seul, non ?
-Ne vous en faites pas, vous ne partirez que trois ou quatre jours, je ne sais plus. Les dossiers pourront attendre, en revanche Mr Archer a besoin d'une assistante pour l'épauler dans tous ses rendez-vous.
Je me liquéfie sur place en voyant l'étau se refermer sur moi. Mme Saint-Martin s'apprête à quitter la pièce quand elle me lance en riant:
-Ne vous en faites pas pour Mr Archer, il peut se montrer bourru mais il ne mord pas !
Si, juste mes lèvres lorsque nous nous embrassons !
Seule dans cette grande pièce vide, je prends alors conscience du piège dans lequel je suis tombée. Ces quatre jours s'annoncent terrifiants. Je vais passer mes journées seule avec celui qui me brûle plus fort qu'un incendie et duquel je dois m'éloigner au plus vite. Il va falloir que je me montre forte et distante mais ces résolutions me semblent insurmontables en cet instant. Le cauchemar continue...
Afin de me changer les idées, je me dirige en direction du réfectoire pour déjeuner avec mes collègues. En temps normal, j'aurais immédiatement sauté sur mon téléphone pour partager ma joie d'avoir réussi ma présentation avec ma meilleure amie mais la culpabilité et l'humiliation que je ressens sont telles que je sais que je serais incapable de faire illusion. Cassiopée me connaît trop bien et elle sentirait tout de suite que quelque chose cloche rien qu'au son de ma voix. Et comment lui expliquer que je me suis laissée aller avec l'homme que j'avais promis d'éviter ?
Ma pause déjeuner se déroule paisiblement, mes collègues me félicitent brièvement puis nous discutons de nos week-ends respectifs. Cette heure me fait le plus grand bien. Je réussis à passablement me détendre et à faire taire mon cerveau qui me malmène depuis ma prise de conscience dans ce local ménager. Quand je regagne mon bureau, j'en profite pour téléphoner à Marina et prendre de ses nouvelles. Elle me confirme qu'elle est immobilisée au moins trois semaines et donc qu'elle ne va pas reprendre le travail avant l'année prochaine. Ma collègue s'excuse pour son absence et je lui mens en lui assurant que ce voyage à Londres ne me dérange pas. Tout en continuant de discuter, je m'assois à mon bureau et mes yeux se posent sur une enveloppe blanche posée en évidence sur mon clavier d'ordinateur.
Intriguée, j'abrège ma conversation téléphonique et raccroche tout en ouvrant cette enveloppe. Je plonge la main dedans et en retire une liasse de cinq billets de 100€. Je vérifie à nouveau que l'enveloppe ne contient rien d'autre et reste un moment immobile, à fixer ces billets sans comprendre leur signification.
Puis tout à coup, je blêmis quand des images de ce matin me reviennent en mémoire. Les mains d'Ethan sur mon corps, nos baisers impétueux, mon corps qui se cambre sous l'action de ses doigts et de sa langue, le plaisir qui s'immisce en nous, l'osmose que je croyais deviner entre nous, son regard brûlant, ses gestes possessifs...
Le constat qui s'offre à moi m'anéantit sur place. Cet homme avec qui je croyais avoir partagé un moment charnel unique m'a en réalité traitée comme une prostituée. Il a assouvi son envie et me gratifie avec des billets écœurants.
Une rage sourde se met à gronder en moi et je me lève brusquement, faisant tomber ma chaise à la renverse. J'agrippe furieusement ces maudits billets et je martèle le sol de mes pieds enragés pour atteindre son antre. Le calme qui règne au second étage m'informe que mes collègues n'ont pas encore rejoint leur poste. De toute façon, je me fiche de croiser quelqu'un, la seule pensée qui guide mes pas c'est de montrer à cet enfoiré de patron que ses méthodes me répugnent.
J'entre dans son bureau telle une furie et fais claquer la porte derrière moi. Mes yeux lui lancent des éclairs fulgurants tandis que j'approche de lui à grandes enjambées. Apparemment, je suis en train d'interrompre une conversation téléphonique mais je m'en contrefiche. Je contourne son bureau, lui prend son smartphone des mains et le jette par terre. Le bruit du téléphone qui se brise le fait sursauter tandis qu'il ne fait que nourrir la fureur qui me submerge. Je pointe mon index sur son torse et appuie aussi fort que je le peux. Ethan semble totalement surpris par mon attitude et ses iris bruns m'interrogent silencieusement. Oh ne t'en fais pas, tu vas vite comprendre à qui tu as affaire !
-Vous êtes la pire des ordures et vous me dégoûtez ! Tenez, reprenez vos immondes billets et ne vous approchez plus jamais de moi, je lui hurle tout en lui jetant l'argent à la figure.
Mon patron ouvre de grands yeux et reste immobile. Cet être répugnant ne trouve même pas le courage de me répondre. Je me fais donc une joie de continuer à vider mon sac.
-Je ne suis pas l'une de vos poules à qui vous pouvez donner quelques billets après avoir pris du bon temps. Regardez-moi et souvenez-vous bien d'une chose: vous ne reposerez plus jamais les mains sur moi !
Je sors en trombe de son bureau en refrénant l'envie d'imprimer la marque de mes doigts sur ses joues. En claquant à nouveau la porte, je me promets de ne plus jamais me laisser embobiner par ce démon. Je ne suis la traînée de personne et je n'accepterai jamais de me faire entretenir par un homme en échange de mon corps.
Les images de ses mains sur ma peau obsèdent mes pensées et me donnent envie de vomir à présent. Je n'ai qu'une envie: prendre une douche pour me laver de son toucher qui m'a tant salie. Pour la deuxième fois de la journée, d'amers perles salées dévalent mes joues. Je me dégoûte tellement.
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Petite pensée à JulBrad , tu peux arrêter ta grève de la faim, j'espère que tu as eu ta dose !😉😘
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