Chapitre 5
Un grognement insatisfait brise le silence régnant dans le petit appartement. Cela ne va pas. Rien ne lui vient. Il a les idées, pourtant. Mais impossible de formuler celles-ci, d'y mettre un ordre. Découragé, il laisse alors la partie supérieure de son corps s'affaler sur la table, sur laquelle est posé un ordinateur portable dont l'écran affiche une page Word blanche, vide. En deux heures, il a préparé son espace de travail, s'est installé, a longuement réfléchi à la tournure qu'il désire donner à son écrit, tapé quelques mots qu'il a effacé, s'est de nouveau perdu dans ses pensées, levé pour se préparer un chocolat chaud, a laissé son esprit vagabonder sur les réseaux sociaux avant de revenir à son point de départ. Dernièrement, Izuku se retrouve confronté à un insupportable syndrome de page blanche lui empêchant d'avancer dans son projet, celui de l'écriture d'un récit. Il s'est lancé dedans au milieu du mois d'Août, possède les idées depuis encore plus longtemps que cela. C'est seulement sous les encouragements de ses amis qu'il a décidé de sauter le pas et de coucher par écrit les fantaisies courant de manière incessante au sein de son imagination. Il ne s'agit là de rien d'exceptionnel, de son point de vue. Une simple histoire d'héroïque-fantasy comme on peut en retrouver partout. Cependant, cela ne l'empêche pas d'y tenir, à cette histoire, ce conte qu'il n'aurait pas commencé sans les nombreuses incitations de ses proches. Abandonner signifierait trahir les espoirs qu'ils portent en lui, du point de vue d'Izuku. Peut-être a-t-il tout simplement besoin d'une petite pause. Tenter de forcer comme il le fait actuellement n'apportera certainement rien de bon. Pourtant, il a envie d'écrire. De laisser ses doigts parcourir le clavier de son ordinateur, chaque frappe laissant une lettre apparaître, jusqu'à noircir la page de celles-ci et former un récit qu'il jugera satisfaisant.
Pataud, il se redresse sans pour autant quitter l'écran du regard. Inutile de s'acharner, ce soir. Rien ne lui viendra. Il secoue la tête, attrape la tasse posée à côté de lui et porte celle-ci à ses lèvres, buvant quelques gorgées de la boisson désormais tiède, presque froide.
« Je devrais me mettre au lit, j'ai besoin de repos. » soupire-t-il en se frottant les yeux de sa main libre.
Il ne va sûrement pas dormir dans l'immédiat : Katsuki ne rentre jamais bien tard lorsqu'il sort alors, généralement, il l'attend avant de déclarer l'extinction des feux. Mais pouvoir s'allonger et poser son cerveau de côté lui fera du bien. Il éteint alors son ordinateur, termine son chocolat et, après avoir nettoyé la tasse, s'apprête à se rendre dans la chambre lorsqu'il entend des clés pénétrer la serrure de la porte d'entrée. Il ne lui en faut pas davantage pour dévier en direction de cette dernière en trottinant joyeusement. Il est plus tôt que d'ordinaire, mais cela ne le gêne pas le moins du monde, bien au contraire !
Arrivant au niveau de son amoureux, il s'empresse de le prendre dans ses bras...et de le relâcher presque immédiatement dans un frisson arrachant un rictus au blond en profitant pour se débarrasser de ses chaussures.
« Tu feras gaffe, j'suis peut-être un peu froid : il neige, dehors.
- J'avais remarqué. » marmonne Izuku en reculant d'un pas.
Maintenant que Katsuki le mentionne, il peut effectivement apercevoir quelques flocons s'accrochant désespérément à ses jolies mèches blondes ainsi que des teintes rouges s'étalant sur son visage, notamment son nez et ses joues. Son manteau, lui aussi, est parsemé de petites taches blanches commençant à fondre à cause de la température intérieure. Une raison de plus pour laquelle Izuku est bien heureux d'être resté à la maison : il n'est pas très friand du froid, encore moins de la neige.
Sans se départir de son sourire moqueur, le blond dépose un bref baiser contre les lèvres de son petit ami, laissant contre ces dernières un léger arôme alcoolisé lui faisant plisser le nez. Puis il quitte l'entrée tout en retirant sa parka qu'il dépose sur l'une des chaises de la salle à manger. Il est tout de même mieux ici, dans cet environnement calme et familier, que là où il se trouvait quelques minutes plus tôt. Ne manque plus que la douceur de son lit ainsi que la chaleur de son amoureux contre lui.
« Tu rentres plus tôt que d'habitude, lui fait-il d'ailleurs remarquer. Ca s'est mal passé ?
- Pas vraiment. On était pas à l'endroit habituel. Trop de monde à mon goût et j'aimais pas trop l'ambiance. Ugh, j'aurais su, j'aurais refusé direct.
- Ah, je vois...
- Et toi alors, Deku, t'as fait quoi en attendant ? »
A la question lui étant adressée, Izuku ne peut empêcher un soupir de passer entre ses lèvres. Il détourne le regard, une main venant frotter sa nuque tandis que le souvenir de sa session d'écriture infructueuse le fait soudainement se sentir très fatigué.
« J'ai essayé d'écrire mais...
- Toujours rien ?
- Non... Je comprends pas, je sais où je veux aller avec mon récit, pourtant. Mais je n'arrive pas à formuler la bonne manière d'y amener le lecteur.
- Hum... Te force pas, ça viendra sûrement à un moment ou un autre.
- C'est ce que j'essaye de me dire mais ça me frustre de pas réussir à avancer...
- Tu sais quoi ? Pendant les vacances, à moins que tu sois frappé d'un soudain éclat d'inspiration, je t'interdis de toucher à ton récit. T'as besoin d'un peu d'recul par rapport à ça, j'pense.
- Mmh... »
Izuku croise les bras sous sa poitrine, un air contrarié sur le visage. En le voyant ainsi, Katsuki s'approche de lui et le prend délicatement dans ses bras, l'une de ses mains parcourant longuement son dos dans le but de l'apaiser, ce qui semble fonctionner à en juger par ses épaules se relâchant ainsi que la façon qu'il a de se blottir contre lui.
Ils conviennent ensuite tous deux qu'il est temps d'aller s'emmitoufler sous les couvertures. Izuku s'y rend en premier tandis que son amoureux décide de passer par la case douche avant de l'y rejoindre. Lorsqu'il s'installe finalement à ses côtés, une dizaine de minutes plus tard, le plus petit vient directement caler son corps contre le sien, ravi de sentir un bras entourer sa taille ainsi qu'une jambe venir se glisser entre les siennes. Son visage se lève vers celui de son petit ami, ce qui lui vaut de recevoir un délicat baiser, cette fois-ci mentholé, auquel il répond avec tendresse. Suite à cela, leurs lèvres s'entrechoquent plusieurs fois, mouvant à l'unisson jusqu'à ce que Katsuki ne décide d'attraper celle inférieure d'Izuku entre les siennes, lui valant une petite complainte vocale de ce dernier. Pour se venger, il se dégage avant de directement repasser à l'attaque, plaquant sa bouche désormais entrouverte contre celle de son partenaire, sa langue manifestant timidement sa présence, dans l'espoir de se voir octroyer le droit de passer afin de rendre visite à sa jumelle. Cependant, celle-ci la devance, venant directement à son contact, faisant alors s'entamer entre elles une lente danse pendant laquelle elles se caressent, s'entremêlent, s'explorent comme s'il s'agissait de leur première rencontre alors que, en vérité, celle-ci s'est avéré être bien plus maladroite que cela.
Izuku se souvient encore de la surprise ressentie ce jour-là, de la bouffée de chaleur l'ayant envahi lorsqu'il a senti ce muscle humide pénétrer sa bouche beaucoup trop fermement, comme si on le forçait à avaler quelque chose risquant de l'étouffer. Bien sûr, ils s'étaient mis d'accord au préalable, aucun d'eux ne désirant faire quoi que ce soit pouvant mettre l'autre dans l'inconfort. Cependant, même s'il savait ce qui l'attendait, l'inexpérience de Katsuki en la matière mêlée à la sienne ont rendu ce moment bien plus étrange qu'agréable. Aucun d'entre eux ne s'est retrouvé en mesure de guider l'autre, de lui indiquer quoi faire. De ce fait, ils ignoraient comment s'y prendre, se contentant de laisser le bout de leur organe buccal s'effleurer quelques secondes avant de mettre fin au baiser...recommençant quelques secondes plus tard dans l'espoir de mieux y parvenir, sans grand succès. Aujourd'hui, après ces deux années d'expérience, la chose est beaucoup plus naturelle, plaisante.
Au cours de leur échange, le tacheté finit par se hisser au-dessus de l'autre garçon tandis qu'un deuxième bras s'enroule autour de ses hanches, lui faisant ainsi garder son bassin collé contre celui de son amoureux. Il peut sentir la température grimper entre eux, une petite tension faire son apparition. D'ordinaire, c'est lui qui prend les initiatives. Qui mène le jeu. Il possède même quelques accessoires, rangés dans une boîte sous le lit, dont il se serre ou non selon la manière dont ils décident de danser. Mais ce soir, il a envie de se laisser aller. Que l'on s'occupe de lui. Et en l'occurrence, que Katsuki s'occupe de lui. Il éloigne sa bouche de la sienne et l'approche de son oreille afin d'y susurrer quelques mots, suite auxquels leurs positions se retrouvent soudainement inversées. Puis, les grandes mains de son partenaire commencent lentement à remonter sous le haut de son pyjama, glissant le long de ses côtes, s'attardant un instant sur sa poitrine. Son cou se retrouve parsemé de baisers, de petites morsures lui arrachant chacune un petit couinement. La soirée s'annonce bien plus plaisante qu'originellement prévue.
Bien plus tard dans la nuit, dans les rues désertes recouvertes d'une fine couverture de neige, une fille tente de rentrer chez elle, accompagnée d'un garçon frôlant le mètre quatre-vingt-dix de haut. Elle s'accroche à lui tandis qu'il la guide comme il le peut dans ce paysage sombre et enneigé, la maintenant contre lui chaque fois qu'elle manque de perdre l'équilibre à cause de la fatigue ainsi que de l'alcool qu'elle a pu ingérer. Elle lui a pourtant promis de ne pas trop boire. Résulat, la voilà titubant, à deux doigts de s'endormir debout à chaque pas, baragouinant parfois des mots que son ami ne comprend pas. Il baisse le regard vers elle et pose une main sur le dessus de son crâne qu'il caresse un instant sans pour autant chercher à ralentir le pas. S'arrêter, c'est prendre le risque de ne plus parvenir à la faire bouger.
Il a bien fait de l'accompagner et de ne pas la laisser s'y rendre seule. Certes, pour lui, cette sortie n'a pas été des plus amusantes, malgré l'agréable rencontre qu'il a pu faire au cours de celle-ci. Mais il préfère largement cela que de s'imaginer son amie complètement ivre, ne sachant pas retrouver le chemin de son appartement. D'un autre côté, peut-être a-t-elle décidé d'abuser tout en sachant que Tamaki serait là pour s'assurer que tout irait bien.
« On y est presque, encore un petit effort, Nejire. » murmure-t-il à la jeune fille qui répond par un gloussement.
Il peut déjà apercevoir la résidence dans laquelle elle vit. A cette heure-ci, toutes les lumières sont éteintes et la plupart des volets fermés. Il ignore à quel moment de la nuit ils se trouvent exactement et il ne veut pas risquer de lâcher Nejire pour vérifier l'heure sur son téléphone, mais il doit probablement être plus de quatre heures du matin. Ils n'iront sûrement pas en cours, le lendemain matin. En tout cas, il est sûr que, s'il trouve par miracle la volonté et l'énergie d'y aller, il n'y verra pas sa camarade. Dans ce genre de cas, elle reste généralement au lit jusqu'à la fin de l'après-midi et demeure totalement déphasée pour le reste de la journée.
Une fois devant l'entrée de la résidence, Tamaki s'assure que son amie est bien accrochée à lui et s'autorise à attraper le sac de cette dernière afin de l'ouvrir et d'attraper ses clés, passant le badge devant le boitier déverrouillant la porte à la reconnaissance de celui-ci. Ils se dirigent alors vers l'ascenseur, l'appellent avant de pénétrer en son intérieur et d'indiquer le cinquième étage. Encore un peu. Encore un peu, et elle pourra tranquillement rejoindre les bras de Morphée. Elle manque de régurgiter le contenu de son estomac à cause du mouvement de l'élévateur mais parvient à se contenir grâce aux mots d'encouragement du plus grand. Il lui frotte le dos en voyant son visage blêmir.
« Ca va aller. Tu vois, on y est. Maintenant, sors de l'ascenseur, lentement. Tu vois, la porte est là. On y est. »
Il continue de lui parler tout en ouvrant la porte en question. Puis, une fois qu'ils se retrouvent tous deux à l'intérieur, il referme celle-ci et se hâte d'amener Nejire aux toilettes. Ce qui s'en suit n'est pas forcément des plus ragoûtants, mais il fait en sorte de demeurer à ses côtés, de tenir ses longs cheveux bleutés tandis qu'elle est penchée au-dessus des toilettes, en proie à la réaction de son estomac, se contractant à cause des muqueuses irritées par l'alcool. Puis, il l'aide à se rincer la bouche et la conduit jusqu'à son canapé-lit, où il la fait s'allonger après lui avoir retiré chaussures et manteau. Il la recouvre de sa couverture ainsi que d'un plaid et s'affaire à lui apporter le sceau entreposé dans la salle de bain qu'il dépose auprès du lit, à sa portée. Ce n'est pas la première fois qu'il a à s'occuper d'elle dans cet état, alors il sait à peu près comment gérer la chose.
Une fois le tout mis en place, il observe un instant son amie, emmitouflée, somnolant visiblement déjà. La voir aussi paisible, elle qui tenait à peine debout quelques instants plus tôt, ne manque pas de lui étirer un sourire. Cette fille est un véritable ouragan. Tout son contraire. Pourtant, il ne regrette pas de rester à ses côtés, même si elle lui en fait souvent voir de toutes les couleurs.
« Bien. Temps de rentrer. » soupire-t-il pour lui-même.
Il ne vit qu'à deux rues de là, dans une petite chambre étudiante non-loin de l'université. Y retourner ne lui sera pas bien compliqué. Et puis, il n'a rien pour dormir ici, donc ce n'est pas vraiment comme s'il avait le choix. Il s'apprête à faire volte-face lorsqu'il sent quelque chose attraper son poignet, l'empêchant de s'éloigner. Un marmonnement lui parvient. Dans son sommeil, Nejire lui demande de rester. Il rit doucement, se penche lentement vers elle et fait en sorte de se défaire de son emprise aussi délicatement que possible.
« Je reviens demain, promis. » lui assure-t-il, sans même être certain qu'elle parvient à l'entendre.
Cela doit être le cas malgré ses paupières closes car elle fronce les sourcils et lui attrape le bras, cette fois-ci à l'aide de ses deux mains, pour le tirer vers elle, le faisant trébucher sous l'effet de la surprise. Il se retrouve ainsi à moitié sur le canapé-lit, maintenu contre celui-ci par la force invraisemblable de sa camarade.
« Reste... ! grogne-t-elle.
- Nejire...
- Mnh... »
Visiblement, il n'a pas le choix. Il enfouit son visage contre le matelas, poussant un soupir exaspéré, puis se redresse et décide de céder à la demande de la plus petite. Il n'est pas en état de lutter. Têtue comme elle peut l'être d'ordinaire, il n'imagine même pas ce que cela peut donner lorsqu'elle se retrouve en état d'ivresse. Comment peut-elle encore avoir autant de volonté en étant si clairement épuisée ?
« D'accord, d'accord. Laisse-moi juste retirer mes chaussures. »
Les traits de la jeune fille s'adoucissent. Sa poigne se fait soudainement moins forte, permettant à Tamaki de se relever. Il s'assied sur le rebord du lit et s'exécute avant de s'y allonger, se glissant à son tour sous la couverture. Il se tourne dos à Nejire, de sorte à ne pas la surprendre en se retrouvant face à elle si d'aventure elle venait à se réveiller le lendemain en ne se souvenant de rien. Dans ce qu'il interprète comme étant un gargouillement satisfait, elle se colle à lui, frottant son visage contre ses omoplates, ce qui lui arrache un nouveau soupir.
« Sérieusement... »
Sa main va farfouiller dans la poche de son pantalon, duquel il sort son téléphone. Cinq heures moins le quart. Il n'ira très probablement pas aux cours de la matinée non plus.
Il s'apprête à le déposer au sol lorsqu'il se souvient de ce garçon avec qui il a échangé son numéro, plus tôt dans la soirée. Ce rouquin lui ayant tenu compagnie mais étant, malheureusement, parti bien avant eux. Il lui a dit qu'il s'appelait...Shouto, s'il se souvient bien ? Effectivement, il l'a bien enregistré sous ce prénom, constate-t-il en se rendant dans ses contacts. Il se demande s'il aura l'occasion de le revoir. Il n'aurait rien contre. Au contraire.
Esquissant un léger sourire, il décide de lui envoyer un message pour le prévenir qu'il vient de rentrer et lui raconte brièvement ses mésaventures avec son amie. Il ne le lira probablement qu'à son réveil, mais il espère que cela lui permettra de démarrer la journée avec ne serait-ce qu'un sourire.
Une fois sa tâche accomplie, Tamaki verrouille son téléphone et la pose à ses côtés, gardant la main sur celui-ci. Lentement, ses paupières se ferment, la fatigue le happant et l'autorisant enfin à se reposer après cette soirée mouvementée.
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