— Il a les yeux vert ou bleu M.Snoper ? demandai-je à Mathilde en plaçant trois skittles jaunes pour terminer la chevelure blonde de notre ancien prof d'histoire.

— J'en ai aucune idée ! Pourqu... me répondis ma voisine avant de remarquer mon chef d'œuvre de bonbons. Qu'est-ce que c'est que ce truc ?

— Je me suis pourtant appliqué, déclarai-je faussement vexé en replaçant quelques skittles noirs pour accentuer l'aspect crochu du nez du professeur. Tu vois vraiment pas de qui il s'agit ?

— Je vois surtout que les skittles vont fondre, fit-elle remarquer dégouté.

— Justement !

Au début de l'année, nous avions découvert que notre cours d'histoire du mardi matin se passait juste avant celui de notre ancien prof, M.Snoper que nous détestions de tout notre cœur à cause de sa tirarie. Mon pote, Manu et moi avions donc décidé de pourrir à chaque fois la classe pour qu'à l'heure suivante M.Snoper se retrouve avec la classe la plus crasseuses au monde. Nous collions donc nos chewing-gums bien en évidence, faisions exploser des cartouches d'encres contre le mur, et laissions trainer nos vieux mouchoirs usagés.

Je sais, je sais, ce sont les femmes de ménages qui nettoient les salles de classes et que ce n'est pas un métier de tout repos. Mais j'ai deux bonnes excuses pas vraiment pas terribles pour justifier nos actes : nous étions jeunes et en suite nous détestions vraiment ce prof.

C'était à un tel point que même Mathilde s'était joint à nous, dans une moindre mesure bien sûr, elle se contentait de laisser sur sa table ses pelures de gomme et ce fut malheureusement que pendant une courte période. Une fois que Mme Marnot, notre prof d'histoire actuelle et au passage la personne la plus gentille au monde appris de la part de ce rageux de Snoper que je cite : « certains de ses horribles gorets d'élèves prenaient sa classe pour porcherie », la Mathilde rebelle disparu aussitôt. Manu et moi, nous calmâmes également quand nous reçûmes une jolie invitation à nettoyer cette classe que nous prenions en plaisir à saccager. Depuis nous nous contentions de graver de méchants commentaires sur nos bureaux. J'avais même fait pétition intitulée ; « Détestez-vous Snoper ? ». J'avais obtenu seize « oui ».

Mais, là, avec ces bonbons, j'allais enfin réaliser ma vengeance. Je sais qu'en disant vouloir profiter de mes derniers jours de libertés, beaucoup d'entre vous ont dû penser que j'allais aller à toutes les soirées de mai sans me soucier des cours le lendemain, ou ou justement tous les sécher , et j'avoue moi-même y avoir pensé. Mais déjà pour les soirées, même si bien sûr je comptais bien profiter de certaines d'entre elles, je savais que la fac proposait beaucoup plus d'option ce côté-là, aussi préférais-je me concentrer sur des projet plus personnel. Ensuite, le but n'était pas de me faire punir de toutes sources de joie par mes parents au bout de deux jours car je me serais montré trop inconséquent. Il fallait la jouer rebelle mais fine.

— Les yeux de Snoper sont vert ! finit par me lancer Mathilde me sortant au passage de mes songes.

— Merci ! répondis-je en cherchant deux bonbons de la bonne couleur. Y a plus de verts !

— J'les ai tous mangé, me répondit mon amie. Allez, maintenant range ton bazar et sors tes livres.

— Merci, maman ! marmonnai-je en prenant deux bonbons bleus pour dessiner avec les skittles le visage de la jeune fille avant de manger un par un les bonbons.

Ils avaient un goût amer, que Mathilde ne me soutienne pas était quelque chose de très amer.