Chapitre 5

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Bonne lecture!

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     Le samedi midi arriva bien trop rapidement aux yeux d'Andy. N'ayant pas réussi à dormir correctement à cause de l'inquiétude, la jeune femme avait passé des heures à choisir sa tenue, pour la première fois depuis longtemps. Devait-elle cacher ses tatouages ? Elle se coiffa avec attention et se maquilla légèrement. Pour une fois, sa mère aurait été fière d'elle. Épuisée par tant de préparation, elle s'installa sur son fauteuil avec un thé, dans l'espoir vain de se calmer. Andy était terrifiée à l'idée de rencontrer les parents de sa petite-amie. Elle qui avait souffert et souffrait encore des critiques et du regard des autres, comment réagirait-elle face aux yeux scrutateurs du couple Ericksen ? Et si elle faisait un crise d'angoisse, de quoi aurait-elle l'air? Et, pire encore, si sa stomie décidait qu'il s'agissait du moment parfait pour fuir ou émettre un bruit disgracieux ? La jeune femme était tellement perdue dans ses pensées mouvementées, qu'elle poussa un cri lorsque la sonnette retentit . Elle ouvrit la porte et reçut un tendre baiser de la fleuriste.

   -Tu es quelqu'un de bien Andy, je suis certaine que tout se passera bien. Je suis garée juste là, allons-y.

     Le trajet, bien plus rapide que ce qu'Andy avait pu imaginer, s'acheva devant une jolie petite villa de banlieue. Amélia poussa le portail en fer forgé et invita la jeune femme à pénétrer dans la maison. Les parents de la fleuriste les attendaient dans un salon à la décoration chargée. Devant leurs visages fermés, Andy eut envie de jeter sa canne et de fuir le plus loin possible.

   -Papa, maman, je vous présente Andy Hambert, ma petite-amie.

     La jeune femme leur tendit sa main libre, en essayant de ne pas trembler.

   -Je suis très heureuse de vous rencontrer et je vous remercie pour votre invitation.

   -Asseyez-vous.

     La voix de Christophe Ericksen était grave et peu avenante, si bien qu'Andy se figea sur sa chaise. Ce fut sa femme, Dahlia, qui poursuivit la conversation.

   -Enchantée Andy. Quel âge as-tu ? Es-tu fille unique ? Et ton travail ?

   -Maman ! Ne lui fais pas subir un tel interrogatoire, elle va s'évanouir de stress si ça continue.

     Andy fut très reconnaissante envers sa petite-amie pour cette intervention.

   -J'ai 25 ans, j'ai un frère aîné qui est déjà marié et qui a une fille. Je peins et je jardine la plupart du temps. Deux fois par semaine, je donne des cours en ligne à des étudiants handicapés et je vends parfois mes dessins. Mes revenus sont modestes, mais je parviens à m'en sortir.

     Le couple Ericksen demeura impassible, et Dahlia poursuivit son questionnaire infernal.

   -Bien, bien. Et tes parents ? Comptes-tu soutirer de l'argent à notre fille ? Pourquoi es-tu en couple avec elle ?

   -Maman ! C'est totalement impoli, tu vas trop loin. Votre inquiétude à tous les deux n'est pas une raison suffisante pour vous comporter ainsi. En plus ...

     Elle s'arrêta net en entendant Andy pleurer.

   -Hey, ne pleure pas. Cette froideur et cette méfiance ne te sont pas vraiment destinées et ...

   -Stop, arrête Amélia. Écoutez-moi, madame et monsieur Ericksen. Je suis une putain d'handicapée qui vivra aussi longtemps que la vie le lui accordera. Je n'ai ni la fortune, ni la santé à offrir à Amélia. Je ne suis pas spécialement jolie et mes parents ne savent même pas que je suis lesbienne. Je ne mérite sans doute pas la bienveillance, la bonté et la beauté de votre fille. Mais je suis tombée amoureuse d'elle et ça, je n'y peux rien. Sachez que grâce à notre rencontre, j'ai réussi à gagner un peu de confiance en moi . Amélia me rend heureuse, aussi bien en tant qu'amie que petite-amie.

     Elle reprit son souffle, épuisée.

   -Si vous le permettez, je vais prendre l'air dans le jardin avant de faire un malaise.

     Tremblante face à cet élan d'audace, Andy se sentait nauséeuse et avait l'impression de suffoquer. La fleuriste lui ouvrit la porte et la laissa seule, sachant que sa compagne avait besoin de calme.

   -Papa, maman, Andy est très timide et vous l'avez poussée à bout. Je vous avais pourtant prévenu qu'elle souffrait d'anxiété!

     Dahlia semblait embarrassée.

   -Je suis désolée ma chérie, mais après les relations désastreuses que tu as pu avoir, ton père et moi, voulions nous assurer de ta sécurité.

   -Cela n'excuse pas tout. Soyez gentils, par pitié.

     Andy revint une dizaine de minutes plus tard, et se rassit sur le fauteuil, en silence. Ce fut Christophe qui prit la parole.

   -Andy, nous te présentons nos excuses les plus sincères. Tu as l'air d'une personne très bien et nous sommes heureux de voir le sourire de notre fille. Sois la bienvenue chez nous.

     Amélia enlaça brièvement ses parents.

   -Je vous l'avais bien dit !

     Andy ,elle, avait rougi. Elle ne parvenait pas à croire que le couple Ericksen l'acceptait.

   -J'accepte vos excuses, évidemment. Mais ... Le fait que je sois malade ne vous dérange pas ?

     Dahlia lui adressa son premier sourire.

   - Si Amélia l'accepte, alors nous n'avons rien à redire là-dessus. De plus, tu n'es en rien responsable de tes pathologies et nous ne pouvons pas te blâmer.

   -Merci beaucoup. Cela me touche bien plus que vous ne pouvez l'imaginer.

     Les deux jeunes femmes passèrent l'après-midi dans cette charmante maison, avant de rentrer chez Andy.

   -Au fait, merci pour cette jolie déclaration d'amour.

     Andy laissa s'échapper un petit rire gênée.


     Un mois plus tard, alors que les deux amoureuses jardinaient en silence, Amélia poussa un soupir devant le stress évident de sa petite-amie.

   -Que t'arrive t-il?

     Andy s'assit sur le tabouret en plastique et posa son sécateur.

   -La dernière fois, mon frère n'avait finalement pas pu aller à Disneyland. Là, il y retourne avec sa fille et adorerait qu'on vienne.

   -Sa femme ne sera pas là ? Attends... Toutes les deux, tu dis ?

   -Non, elle sera en séminaire et n'aime pas les parcs d'attractions. Oui ... Il sait que je ne suis plus célibataire et se doute que tu n'es pas un homme. Je ne lui ai pas fait officiellement mon coming-out mais il a compris.

     La fleuriste sourit.

   -Mais c'est génial ! Je serais très heureuse de vous accompagner.

   -J'adorerais, mais je ne peux pas y aller.

     Amélia s'agenouilla devant elle.

   -Parce que tu ne pourras pas supporter de rester debout et de marcher aussi longtemps ? Parce que tu refuses de louer un fauteuil à l'entrée?

     Andy acquiesça, honteuse de gâcher, une fois encore, une possibilité de sortie.

   -Et si c'est moi qui m'occupais de louer le fauteuil ? Et de le pousser ? Tu accepterais de tester ?

     La jeune femme, surprise, releva la tête. À ses yeux, il s'agissait d'une magnifique preuve d'amour.

   -Tu ferais ça ? Pour moi ?

   -Évidemment.

   -Dans ce cas, j'accepte. Seule, je n'aurais jamais le courage de faire le premier pas.

     Amélia sourit et l'embrassa sur le front.

   -Dis à ton frère qu'on vient et n'oublie pas de lui préciser les commodités dont tu as besoin dans la chambre. Je m'occupe du reste.

   -J'ai la meilleure petite-amie du monde !

     La fleuriste éclata d'un rire joyeux et retourna à sa collecte de tomates.

     Préparer ses valises, même pour trois jours, lorsque l'on était atteint d'une ou, dans le cas d'Andy, plusieurs maladies chroniques, était un véritable calvaire. Rien que pour sa stomie, elle devait emporter tout le matériel nécessaire à la changer, prévoir des fuites et une crise éventuelle. Elle devait aussi penser à son traitement et prendre deux ou trois jours supplémentaires, au cas où ; ainsi que ses attelles, orthèses et autres accessoires indispensables à son bien-être. Un appareil à oxygène serait mis à sa disposition dans la chambre d'hôtel, lui enlevant un souci. La jeune femme devait également penser à des vêtements de rechange et à des en-cas qu'elle pourrait digérer, si jamais ils ne trouvaient rien pour elle. Bien que ce week-end prolongé l'inquiète, elle était heureuse d'y participer. Grâce à Amélia, elle allait oser goûter à nouveau à cette liberté qu'elle se refusait depuis quelques années déjà. Andy espérait que ce séjour se passerait sans encombre et qu'elle ne recevrait pas de regards trop accusateurs ou de remarques désobligeantes.

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