Chapitre 4
Merci de continuer à suivre cette histoire, en espérant qu'elle vous plaise.
Bonne lecture!
xxxxxxxxxxxxxxxxx
Le mercredi suivant, Andy vérifia son sac pour la centième fois et marcha lentement en direction de la boutique. Elle avait l'impression que son courage allait s'enfuir d'un moment à l'autre et que sa timidité allait en profiter pour l'étouffer. Hésitante, elle poussa la porte de sa main tremblante, s'appuyant sur sa canne pour ne pas tomber. Le magasin, encore désert à cette heure si matinale, amplifia le stress d'Andy. Elle pensa alors à faire demi-tour, lorsque Amélia la rejoignit.
-Bonjour Andy. C'est rare de te voir si tôt.
-Oui, mais, je voulais discuter un peu. J'ai lu le numéro spécial de Magnolia et ...
Elle inspira profondément et sentit le rouge lui monter aux joues. C'était maintenant ou jamais. Elle baissa les yeux et fixa ses chaussures.
-Je suis très heureuse d'en avoir appris plus sûr toi et c'est une bonne nouvelle que tu aimes aussi les filles. Enfin, tiens voilà.
Elle tendit à la fleuriste une petite peinture avec des magnolias roses, symbole d'un amour timide que l'on n'ose avouer à haute-voix. Elle leva doucement la tête et tomba sur un sourire d'Amélia.
-Cela signifie que notre prochaine session de jardinage pourra être considérée comme un premier rendez-vous ?
Andy acquiesça timidement, heureuse et soulagée. Son frère avait raison, elle aussi méritait sa part de bonheur.
Stressée par ce premier vrai rencard, Andy tournait en rond dans sa cuisine. Elle savait qu'Amélia se moquait pas mal de la quantité de poussière ou de la vaisselle sale, mais la jeune femme avait tenté de tout nettoyer au mieux. Elle n'avait que de quoi payer deux heures de ménage par mois, et bien que reconnaissante, cela ne suffisait clairement pas. Elle avait aussi choisi de se maquiller un peu et de se coiffer correctement. Pour une fois, elle avait eu envie de se sentir présentable. Perdue dans ses pensées, elle sursauta lorsque la sonnette retentit.
-Bonjour Andy.
La jeune femme ne répondit pas immédiatement, hypnotisée par les boucles brunes de la fleuriste. Pour la première fois en plus d'un an, elle la voyait les cheveux détachés et son cœur n'y était pas préparé.
-Andy ?
-Désolée... Tes cheveux m'ont perturbée.
Amélia laissa échapper un petit rire et déposa un léger baiser sur la joue de son hôte.
-Tu sais, tu n'avais pas à dépenser de l'énergie pour te maquiller ; bien que ça t'aille extrêmement bien.
Andy, embarrassée, murmura un remerciement et invita la fleuriste à s'installer dans le salon.
-Je vais être honnête, mis à part deux amourettes ratées pendant mon adolescence, je n'ai vécu aucune histoire.
Amélia posa doucement sa main sur son avant-bras.
-Je m'en moque. Et puis, les miennes ont été tout l'inverse d'une réussite. Par contre, mes parents sont morts d'inquiétude.
-A cause de moi ?
-Oui, car ils ont peur qu'une fois encore, je tombe sur quelqu'un de mauvais. J'ai essayé de les rassurer en leur parlant beaucoup de toi, mais, pour l'instant ils n'arrivent pas à avoir confiance. Ne t'en fais pas, ça viendra.
Andy lui tendit une tasse de thé.
-C'est normal qu'ils soient inquiets.
Amélia mordit dans l'un des muffins.
-Hier, la libraire m'a dit que vous vous étiez disputées. C'est vrai ?
La jeune femme grimaça à ce souvenir.
-Elle organisait une fois par semaine des cours de calligraphies. Je m'y étais inscrite, mais, à cause de mes crises, j'ai commencé à rater des séances. Je me suis excusée en expliquant la raison. Elle a exigé des certificats médicaux. Je lui ai expliqué une seconde fois le principe de crises et de maladies chroniques. Elle m'a virée du cours et a refusé de me rembourser les mois restants. C'est à ce moment-là que j'ai perdu mon calme. J'ai eu le même problème à des cours de dessins dispensés par la mairie. J'ai finalement décidé de me contenter de cours en ligne. Là au moins, personne ne me juge.
Amélia se rapprocha d'Andy sur le canapé.
-Je peux ?
-Oui, il ne faut juste pas me serrer trop fort.
La fleuriste sourit et enlaça délicatement son hôte.
-Je suis désolée qu'il y ait des personnes si bêtes et méchantes.
Andy resserra son étreinte.
-Si tu savais ...
Il fallut une semaine entière à Andy pour réaliser qu'elle était désormais en couple, tant elle avait imaginé rester seule pour le restant de ses jours. Sa bonne humeur fut toutefois de courte durée, tuée par un appel de ses parents. Ceux-ci avaient réservé un chalet pour un week-end à la montagne. L'endroit, bien que superbe, n'était accessible que par des escaliers beaucoup trop raides et ne disposait que d'une baignoire standard. La jeune femme fit remarquer qu'elle ne pourrait se laver seule dans une telle salle de bain.
-Tu exagères Andréa.
-Je ne peux pas monter dans une baignoire. Pourquoi crois-tu que j'ai une douche à l'italienne et un tabouret ?
-Parce que tu es trop fainéante. Tes petits problèmes articulaires ne sont qu'une excuse.
Andy se retint d'insulter sa mère.
-Maman, pour la énième fois, je suis malade. Et pour changer ma stomie, des toilettes handicapées sont beaucoup plus pratique.
-Ne sois pas si difficile. Ton père et moi aimerions que tu cesses de faire ta diva. Tu parles comme si tu avais un cancer.
Des larmes de rage coulèrent silencieusement sur ses joues.
-Ne me comptez pas pour ce voyage. Au revoir.
-Nous reparlons de tout ça Andréa.
Andy raccrocha et éclata en sanglots. Le validisme dont faisait preuve ses parents était pour elle le plus blessant et le plus destructeur. À cause d'eux, elle se blessait régulièrement faute d'équipements adaptés. À cause d'eux, elle avait perdu sa liberté car elle refusait d'utiliser un fauteuil roulant. Elle s'allongea dans la pénombre de sa chambre et envoya un message à Amélia. Elle seule serait capable de lui redonner le sourire.
La fleuriste la rejoignit juste après la fermeture. Ayant, par sécurité, un double des clés au cas où Andy fasse un malaise, la jeune femme entra doucement dans la maison. Elle toqua à la porte de la chambre.
-Tu vas bien ? Je peux entrer ?
Son hôte, blottie sous les couvertures, acquiesça d'une voix faible.
Amélia déposa ses chaussures près du lit, avant de s'y installer à son tour.
-Cela arrive souvent ce genre de situation ?
Andy, dont les larmes s'étaient taries, soupira.
-Malheureusement oui. Ils n'acceptent pas ce qui ne rentre pas dans leurs normes. Même mes cheveux rouges avaient créée un véritable drame, si bien que j'avais dû très rapidement y renoncer.
-C'est dommage, j'ai l'impression que ça doit t'aller à merveille.
La jeune femme eut un petit rire gêné, toujours mal à l'aise quand on lui adressait un compliment.
-Merci. C'est aussi de leur faute si je me force à garder les cheveux un peu long, alors que je suis bien mieux avec ma coupe au carré, comme lorsque l'on s'est rencontrées.
-En quoi cela les gênent-ils ?
-Et bien, je cite, "Andréa tu es une femme nom de Dieu ! Déjà qu'avec tes abominables tatouages et ton manque de maquillage tu n'es pas féminine, n'en rajoute pas!"
-Sache que j'adore les tatouages et que je trouve ça particulièrement sexy. Mais, ôte-moi d'un doute. Tu sais que tu es très jolie, n'est-ce pas ?
Andy s'assit correctement contre son oreiller, les joues légèrement roses quant au précédent compliment.
-Je m'estime dans la moyenne.
-Andy, chacune est féminine à sa manière. Toi, tu l'es énormément sans t'en rendre compte. Tes tatouages qui apparaissent parce que ton T-shirt trop large glisse sur ton épaule, tes ongles longs et vernis qui tapotent sur le haut de ta canne ... Je pourrais te citer des dizaines d'exemples. Chaque femme a sa propre vision de sa féminité. Il n'existe pas qu'une version de la féminité. (1)
La jeune femme sourit à la fleuriste et posa sa main sur sa joue droite.
-Je peux ?
-Évidemment.
Pour Andy, ce fut son premier baiser souhaité. Pour Amélia, ce fut son premier baiser empli de confiance.
Les deux jeunes femmes furent rapidement réveillées par le téléphone de la fleuriste.
-Oui ? Oh, maman, bonsoir. Désolée, je ne voulais pas vous inquiéter.
Elle se redressa et commença à enfiler ses bottes.
-Je m'excuse maman, je me suis endormie chez Andy. Oui, oui, à tout à l'heure.
Elle raccrocha en soupirant.
-C'est le désavantage de vivre encore chez ses parents à vingt-six ans.
-Ils ne me connaissent pas. C'est normal qu'ils soient méfiants.
-Merci d'être aussi compréhensive.
Andy n'eut de nouvelles de sa petite amie que deux jours plus tard. Cette dernière avait tout essayé, sans succès, pour convaincre ses aînés du bien-fondé de leur relation. Après des heures de discussions, ils étaient enfin parvenus à un compromis.
-Andy, j'ai un service à te demander.
Amélia semblait, fait rare chez elle, gênée. Elle avait attendu sa pause déjeuner pour discuter avec la jeune femme.
-Avec mon passif de relations toxiques, mes parents ont du mal à accepter que je ne sois pas encore tombée sur une personne mauvaise et manipulatrice. Ils sont morts d'inquiétude et refusent que je reste trop longtemps chez toi. Ainsi ...
Elle se mordit la lèvre inférieure.
-Ainsi, ils aimeraient te rencontrer ce samedi.
Andy resta silencieuse sous le poids de cette demande. Et si les parents d'Amélia la détestait ? S'ils pensaient qu'une handicapée ne méritait pas leur fille ?
-C'est d'accord.
La fleuriste laissa s'échapper un soupir de soulagement.
-Je sais que ça te coûte beaucoup, alors merci.
Andy sourit timidement, sentant son anxiété lui enserrer le cœur.
xxxxxxxxxxxxxxxxxx
(1) Natasha Birds, La féminité (shortfilm)
Merci d'avoir lu. Evidemment, n'hésitez pas à laisser un vote ou un commentaire, ça fait toujours extrêmement plaisir.
Je vous dis à très vite pour l'autre moitié de l'histoire.
Bạn đang đọc truyện trên: AzTruyen.Top