Chapitre 2


L'image en couverture (libre de droit), représente parfaitement Amélia.

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     Amélia avait attendu Andy toute la journée ; si bien que dès le lendemain, elle se permit de sonner chez la jeune femme. Elle espérait sincèrement que cette dernière se portait bien. Andy jura. Qui pouvait bien la déranger à l'heure du repas ? Ses yeux verts s'écarquillèrent de surprise lorsqu'elle aperçut la fleuriste. Elle inspira profondément avant d'ouvrir le portail.

   -Salut.

   - Andy ! Je suis soulagée de voir que tu vas bien. Je me suis terriblement inquiétée après ton absence d'hier. J'ai eu peur que ta santé t'ait conduite à l'hôpital.

     La jeune femme fut sincèrement touchée par ces paroles et invita Amélia à entrer.

   - J'avais trop honte pour me montrer, après la fuite de ma stomie la fois dernière. Je suis désolée, le ménage n'est pas fait.

   - Ce n'est pas de ta faute, j'ai simplement été surprise. Et ça me ferait vraiment plaisir que tu reviennes à la boutique. Pour le ménage, peu m'importe.

     Andy sourit. Qu'avait-elle fait pour qu'une personne si bienveillante entrât dans sa vie ?

   -Mercredi, je serai là.

     La fleuriste sourit et son regard se posa sur la montagne de médicaments éparpillés sur la table. Bien qu'elle ne fit aucun commentaire, Andy la devança.

   -Oui ,je prends beaucoup de médicaments. Si j'avais su que tu passerais, je les aurais caché. Désolée.

     Amélia voulut poser sa main sur son avant-bras, mais stoppa son geste.

   -Je peux ?

    Andy hocha la tête et son cœur fut exalté par ce simple contact.

   -Je suppose que ce traitement te permet de pouvoir sortir et de te tenir là, devant moi. Ainsi, j'estime qu'il est très important . Je suis contente qu'il existe et que tu puisses le prendre.

    La jeune femme, déjà ébranlée pour tant de gentillesse, ne put retenir ses larmes. Elle qui subissait sans cesse critiques et validisme, même de la part de ses proches, voyait en ces paroles une lumière, l'espoir qu'une personne l'accepte enfin, elle et sa maladie.

     Sept mois après l'ouverture, Andy hésitait, pour la première fois, à pénétrer dans la boutique, écrasée par sa timidité. Elle devait trouver le courage d'offrir ce cadeau à la fleuriste. Fixant la porte avec angoisse, elle sursauta lorsque celle-ci s'ouvrit.

   -Andy ? Quelle surprise de te voir un vendredi ! Tout va bien ?

     La jeune femme se contenta de hocher la tête, stressée. Amélia l'invita à entrer, la pluie commençant à tomber violemment. Cette dernière avait d'ailleurs fait fuir tous les clients et un calme olympien régnait dans le magasin. Andy se retint de se mordre la lèvre jusqu'au sang et tendit, embarrassée au possible, un petit paquet à la fleuriste. Elle murmura un "joyeux anniversaire" avant de baisser les yeux. Le parquet semblait soudain particulièrement intéressant.

   -Oh, merci beaucoup. C'est adorable d'y avoir pensé et de t'être déplacée exprès.

    Amélia défit avec précaution l'emballage bleu et découvrit un superbe jardin, mélange d'aquarelle et d'encre de Chine. Son regard s'illumina.

   -Tu m'avais caché que tu étais une artiste si douée. J'adore cette peinture, merci beaucoup.

     Face à de tels compliments, l'estime de soi d'Andy fut comblée de bonheur. La jeune femme releva enfin les yeux, rassurée et heureuse.

   -Puis-je te faire la bise ?

   -Oui, oui, bien sûr. Merci d'avoir demandé.

    À cet instant, Andy sut, sans aucun doute possible, que son cœur était tombé pour la charmante fleuriste ; bien que son esprit ait bien trop peur de l'accepter. Elle n'avait pas le droit d'accentuer sa différence, sa famille ne lui pardonnerait probablement pas.

     Les fêtes de fin d'année approchaient à grand pas, pesant lourdement sur le moral d'Andy. Elle aimait sincèrement sa famille et elle se savait chanceuse de pouvoir les avoir tous réunis. Toutefois, mentalement, Noël était probablement l'une des célébrations les plus difficiles à supporter pour elle. Trop de bruit, trop d'agitation, trop de nourriture qu'elle ne pouvait manger. En ces jours où la joie était obligatoire, sa douleur et son épuisement, eux, ne prenaient pas congé ; l'obligeant à dépenser une énergie qu'elle n'avait pas pour avoir l'air d'aller bien. Elle se cacherait derrière un maquillage sophistiqué et une jolie tenue, se forçant à sourire pour ne pas gâcher la fête. Andy redoutait également les éternelles questions de ses proches auxquelles elle se contenterait d'acquiescer en soupirant. Une fois encore, elle ferait semblant de vouloir un petit-ami. Une fois encore, elle mentirait sur son état de santé. Une fois encore, elle pleurerait en rentrant chez elle.

    La jeune femme se demanda si Amélia appréciait Noël et quelles étaient les traditions de sa famille. Bien que la fleuriste ne parle jamais d'un·e partenaire, Andy avait bien du mal à imaginer qu'une personne si charmante et bienveillante puisse être célibataire. Elle aurait aimé lui demander, mais elle n'osait pas, craignant trop la réponse. Et puis, que penserait Amélia si elle découvrait son attirance pour elle ? Elle ne souhaitait pour rien au monde perdre cette amitié qui illuminait désormais sa vie.

    Onze mois après l'ouverture, Amélia rendait visite à Andy tous les lundi après-midi, afin de l'aider à jardiner. La jeune femme voyait ces quelques heures de calme et de bonheur comme un formidable cadeau, des instants où elle pouvait rester elle-même. Jamais la fleuriste n'avait commenté le désordre dans le salon ou son absence de maquillage. Jamais elle ne l'avait critiquée sur ce qu'elle parvenait ou non à faire. Jamais elle ne s'était moquée des bruits embarrassant provoqués par Hilda, sa stomie. Désormais habituées, elles s'arrêtèrent aux alentours de seize heures pour boire un thé.

   -Bon anniversaire Andy. Je n'ai pas oublié.

    La jeune femme fut plus que surprise en apercevant le paquet.

  -Merci beaucoup. Mais comment as-tu su ?

  -Grâce à ta carte de fidélité. Désolée, je n'ai pas résisté.

    Andy rit doucement.

   -Aucun problème. C'est super gentil de ta part.

    Elle arracha peu délicatement le papier rouge et observa avec stupéfaction son cadeau. Devant son silence, Amélia paniqua.

   -J'ai une passion pour la couture et sur internet j'ai vu qu'il existait des sortes de housses pour stomie. Du coup, je me suis dit que ça pourrait être un cadeau parfait pour toi. Alors j'ai regardé plein de tutoriel car je n'en ai jamais vu en vrai ... Pardonne-moi, c'était peut-être indélicat de ma part.

    Andy serra brièvement la fleuriste dans ses bras.

   -C'est absolument génial. Le tissu est extra et ce motif ... J'adore les magnolias. Merci beaucoup. C'est tellement rare que l'on m'offre quelque chose en rapport avec mes pathologies.

    La fleuriste poussa un soupir de soulagement.

   -Je suis heureuse que ça te plaise autant. Je craignais que tu le prennes mal.

   -Non, au contraire. Cela prouve que tu acceptes le fait que je sois malade et ça me touche.

   -Tu veux l'essayer? Je veux dire, comme je n'y connais rien, j'espère que ça ira.

     Andy ne put s'empêcher de sourire. Au fil des mois, sa timidité envers Amélia avait fondu grâce à la patience et la prévenance de cette dernière.

   -Attends-moi là, je reviens.

     À son retour, elle souriait.

   -Regarde, c'est parfait ! Avec un tel accessoire, j'oserai peut-être retourner à la plage.

     La jeune femme réalisa alors que c'était la première fois qu'elle montrait son ventre à quelqu'un d'autre depuis son opération. Elle baissa son T-shirt, légèrement gênée.

   -Je suis contente. Je pourrais même t'en créer d'autres. Ah et ... Joli piercing.

     Andy ne put s'empêcher de rougir et Amélia la gratifia d'un clin d'œil.

     Aujourd'hui, jour pour jour, une année s'était écoulée depuis l'ouverture de la boutique d'Amélia. Andy se félicitait d'avoir poussé la porte, ce mercredi-là. En douze mois, son estime et sa confiance en elle avaient commencé à guérir, grâce à la bienveillance de la fleuriste. Pour la première fois, elle avait rencontré une personne qui ne la jugeait pas et, plus important encore, qui essayait de comprendre au mieux ses pathologies.

    En ce jour anniversaire, le magasin était envahi par des habitués et des nouveaux clients. Andy aperçut Amélia, son éternelle queue de cheval qui s'agitait de gauche à droite, donner quelques astuces de composition florale. Après quelques minutes, la jeune femme se sentit oppressée par le monde et par le bruit. Ses oreilles commençaient à la faire souffrir et elle sentit quelques larmes naître au coin de ses yeux verts. Ne souhaitant en aucun cas gâcher la célébration, elle opta pour la fuite.

   -Andy, attends !

     Amélia l'avait rattrapée, à peine avait-elle mis un pied dehors.

   -Désolée, mais il y a trop d'animation et de bruit pour moi.

   -Aucun souci, mais je voulais te donner quelque chose.

     La fleuriste sembla gênée lorsqu'elle tendit un magazine à Andy.

   -Magnolia ? C'est une revue de jardinage ?

   -Normalement oui, mais il s'agit d'un numéro spécial. Il y a plusieurs interviews de femmes travaillant dans ce domaine et racontant le combat de leur vie, quel qu'il soit. Et, euh ...

     Andy était persuadée qu'elle n'avait jamais vu son interlocutrice rougir.

   -J'ai participé et il y a mon interview. Donc je me disais que peut-être tu voudrais la lire. Enfin ,avec les autres bien sûr.

   -Avec plaisir. Merci.

     Amélia sembla soulagée et sourit.

   -J'attends ton avis avec impatience.

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