Part III - 32
°2023°
Soobin avait longtemps marché.
Laissant la fête derrière lui, laissent les voix le juger au loin, laissant les doigts pointés dans sa direction. Seuls les souvenirs le suivaient, vicieux, attachés à son dos comme les ailes noirs d'un trop lourd fardeau.
Ses pieds nus foulaient l'herbe humide, une brume sombre s'élevait petit à petit autour de lui. Il s'en fichait, il ne regardait pas où il allait.
Il marchait juste. Il pensait. Il se remémorait.
Les regrets accompagnaient sa mémoire.
Les remords ternissaient cette vie qu'il n'avait jamais su comment vivre.
Soobin regrettait d'avoir été un enfant aussi gênant. Stupide et simplet, incapable de s'adapter en société, incapable de rendre fière ses parents, s'accordant leurs angoisses et leurs déception.
Ils l'aimaient, oui, ils l'aimaient plus que tout.
Et ils culpabilisait d'avoir honte de ce fils stupide qu'ils aimaient tant.
Soobin regrettait de n'avoir jamais réussi à être un lycéen comme les autres. De n'avoir connu que peu de soirées, que toute ses premières fois ce soient faite plus tard que les autres, que toute sa bizarreries embêtait sa classe et ses professeurs. Ils prenaient du retard à cause de lui, il n'arrêtait pas de déranger tout le monde. Enfant, adolescent, adulte, il gênait.
Sous ses pieds l'herbe devenait froide, l'humidité se changeait en glace et piquait sa peau. Mais il ne s'en rendait pas compte, il marchait sans savoir où aller, sans vouloir se rendre nul part.
Avancer dans le néant, tout effacer, ne plus exister.
Soobin regrettait de ne pas avoir été un bon petit-ami pour Arin. Elle qui était si gentille, si jolie, si compréhensive, si patiente, et tellement ancré dans leur monde que lui. Elle était son parfait opposé, elle l'avait initié à tout ce qu'il croyait ne jamais avoir droit. Une relation amoureuse ordinaire, des rendez-vous et des fêtes, des groupes de révision à la fac, des projets d'avenir, des projections.
Il n'était pas à la hauteur, ce n'était pas fait pour lui. Il n'arrivait pas à l'aimer, leur couple battait de l'aile, et il savait depuis longtemps qu'elle avait mal d'être avec un copain si peu expressif, si peu intégré, si peu lucide. C'était difficile pour elle, mais elle tenait bon, car elle l'aimait.
Il aurait dû la remercier de l'avoir aimé.
Autour de lui la brume se changeait en neige, les flocons se posaient doucement sur ses cheveux, ses mèches devenaient blanche, comme s'il vieillissait un peu à chaque pas. Et pourtant son visage restait tel quel, pâle et doux, affaissé par le chagrin.
Il ne parvenait pas à disparaitre. La neige atteignait ses chevilles, mais elle ne semblait pas vouloir le dévorer tout entier.
Soobin regrettait de ne jamais avoir réussi à assumer ce qu'il ressentait pour Yeonjun. Ce feu d'artifice amoureux qui le rendait fou, qui lui donnait l'impression d'exploser, qui faisait chavirer son corps, son âme, son être. Il n'avait jamais pu dire ce qui lui plaisait tant chez Yeonjun, il ne saurait donner de raison, de détails, d'impression ou de perception. Il l'aimait, voilà tout, il aimait l'intégralité de ce qu'était Choi Yeonjun. De ses yeux à ses lèvres, de ses mains à ses pieds, de ses sourires à ses excès de colère, de sa sensibilité à sa maladresse, de sa fierté à sa fragilité.
Il aimait tout, tout, chez Choi Yeonjun.
Il l'aimait à en avoir mal.
Il l'aimait à lui faire mal.
Et il regrettait, il regrettait tellement, de ne pas avoir choisi un avenir avec lui.
Un bâtiment en ruine illuminait son chemin, éclairé par des torches enflammés. Il avait de plus en plus de mal à progresser dans la neige, elle atteignait maintenant ses genoux, mais restait légère et malléable. Ralentit, il parvenait quand même à marcher, les ruines l'accueillaient comme une métaphore de tout ce qu'il avait cassé.
Soobin regrettait de ne pas avoir sauvé Kai.
Il regrettait de ne pas s'être levé, de ne pas avoir couru jusqu'à la cuisine, de ne pas avoir défoncé la porte, de ne pas avoir sorti son ami de là.
Kai était mort par sa faute.
Il aurait pu le sauver.
Il aurait dû le sauver.
Tout était de sa faute.
"Oui, de ta faute"
Il entra dans le bâtiment, laissant le froid de la neige. De grandes portes qu'il n'avait pas constaté claquèrent dans son dos, toute la fraîcheur disparu.
"Tu ne fais que des erreurs, tout les malheurs de tes amis sont causés par tes erreurs"
La chaleur accueillait son corps, autour de lui le paysage ressemblait à celui d'un château abandonné. Les torches brûlaient sur les murs, Soobin avança.
"Tu n'as pas pu sauver Kai, il est mort dans cette cuisine à cause de toi"
Soobin avançait vers cette voix qui crachait des horreurs. Il pleurait en la cherchant.
"Tu n'as pas pu sauver Yeonjun. T'a-t-il montré son sang violet ? Il est en train de mourir, et c'est à cause de toi. Tu aurais pu le sauver lui aussi, tu as échoué"
Soobin ne voyait pas où il se rendait, les larmes brouillaient son chemin. Il suivait seulement la voix.
Autour de lui la chaleur devenait plus intense, elle lui rappelait celle qui l'avait saisit sur Magic Island, l'incendit dévorant qui avait consumé son corps.
Était-il en train de mourir ?
Était-il déjà mort ?
"Pas encore, mais ça ne serait tarder. Tu ne mérites que ça. Vous tous, je veux vous voir mort"
Les torches tombaient sur son chemin, brûlant les pierres qui composaient le château. Les murs s'effritaient, les colonnes chutaient.
Soobin avançait.
"Je veux arracher vos vies. Vous voir brûler, percuter, pendu, vider de force, sombrer dans la folie. Je veux tous vous voir périr"
Il se stoppa dans une pièce en partie effondré. Le feu se levait autour de son corps, les fondations du château manquaient de l'écraser, pourtant il restait immobile.
Face à lui il y avait un petit cheval à bascule. Il vacillant d'avant en arrière, violemment.
"Je veux vous voir vous éteindre, devenir de sombre flaque de désespoir. Disparaissez, disparaissez, disparaissez, disparaissez, dispa..."
- Tu as l'air d'avoir mal.
Ce murmure de Soobin figea le vacillement du cheval à bascule. Petit à petit, les yeux de l'animal se mettaient à briller, ils se tournèrent vers lui.
Puis ce jouet tomba, les yeux éteint. La voix n'était plus à l'intérieur.
Le feu brûlait toujours autour de lui, pourtant Soobin ressentit comme un courant d'air froid le traverser.
- SOOBIN !
Yeonjun se trouvait là, à l'autre bout de la pièce. Essouflé, rempli d'égratignures, épuisé. Il hurla encore son prénom, mais Soobin ne se dirigea pas vers lui.
Il se retourna pour faire face à l'Ombre immense qui avait grandie dans son dos.
- ÉLOIGNE-TOI D'ELLE SOOBIN !
Il n'obéit pas. L'Ombre semblait grandir un peu plus à chaque seconde, le dominant de toute sa noirceur. Deux yeux brillant le fixaient, un vert et un violet, et un sourire aux dents pointues se présentait à lui.
"Tu seras le second à périr, Choi Soobin. Kai te manque n'est-ce pas ? Laisse-moi t'aider à le rejoindre"
L'Ombre tandis une main si fine que les doigts ressemblaient à des brindilles osseuses, affublés de griffes acérées. Le sourire grandissait, effrayant, prêt à le dévorer.
Soobin ne reculait toujours pas
- Je sais pourquoi vous faites cela, murmura-t-il.
- SOOBIN, QU'EST-CE QUE TU FAIS ? Hurla Yeonjun.
Il l'ignora, gardant son regard ancré dans celui de l'Ombre.
Les souvenirs lui revenaient, ceux de quatre enfants qui jouaient dans un pays magique, d'un cinquième qui pleurait seul dans une forêt, de leur rencontre, du réconfort apporté à celui qui se prenait pour un monstre, des larmes séchés et de la chaleur de leurs mains liés.
Les cinq garçons s'éloignaient, laissant derrière eux un morceau de corne brisé.
Ensanglanté.
Oublié.
Abandonné.
Les cinq garçons ne se rendaient pas compte qu'ils laissaient derrière eux un éclat de magie pulsant de vie.
Soobin n'en prenait conscience que maintenant.
Depuis leur retrouvaille, depuis leur retour dans Magic Island, la froideur de cette Ombre les suivait. Ce pauvre petit éclat de magie qu'ils avaient laissé derrière eux, seul baignant dans le sang, enfoncé dans une forêt trop sombre. Ils n'y avaient pas pensé, tandis que l'Ombre n'avait jamais cessé de les regarder.
Patientant que l'un d'entre eux se tourne vers elle. La regarde. Lui tende la main.
Et essuie ses larmes à elle aussi.
- Je l'ai senti, votre solitude, votre douleur, votre soif de vengeance. Je sais ce que vous avez enduré, je suis désolé de ne m'en rendre compte que maintenant.
"Tais-toi ! Contentes-toi de disparaitre !"
Soobin se mit à sourire, le même sourire qu'il avait offert à Yeonjun lors de leur première rencontre.
Il tendit la main vers l'ombre, agrippant ses doigts pointus.
- Je peux encore sauver Kai, j'ai compris maintenant, l'espoir n'est pas encore perdu. Et vous, je peux vous aider.
"Disparais !"
L'Ombre se jeta sur lui, l'engloutissant dans l'obscurité.
- SOOBIN !
Il entendit le hurlement de Yeonjun, avant de plonger dans le noir.
Soobin ne voyait plus rien, ne touchait plus rien, n'entendait plus rien. Le noir, partout, l'intérieur macabre de l'Ombre. Elle l'aspirait, le dévorait, elle l'entraînait avec elle dans le néant.
Et Soobin ne la sentait que plus encore, sa profonde et triste solitude.
- Vous êtes en colère, vous vous êtes senti abandonné...Je suis désolé, terriblement désolé. J'aurais dû le voir, j'aurais dû vous ramasser, vous rendre la main. Vous avez dû... vous sentir si seule.
Les larmes parcouraient son visage, tombaient dans le vide obscur. Il tendit les mains sans rien toucher, chercha le moindre éclat de matière, toujours en sanglotant.
Puis il ferma les bras, quelque-chose se pressait contre lui. De froid, de visqueux, il le serra très fort.
- Je suis désolé... Vous avez tellement enduré. Mais vous pouvez arrêter maintenant, vous pouvez vous reposer contre moi, dans mes bras... Pleurez si vous voulez, noyez-moi dans vos larmes... Faite couler votre douleur sur ma peau.
La chose se mit à trembler, Soobin posa son visage par dessus. Ça se réchauffait, la matière changeait, devenait plus douce, plus tendre, plus tremblante. L'Ombre pleurait avec lui, contre lui.
Ses larmes, jusque-là retenues, se déversaient en un flot noire sous leur pied.
Petit à petit L'Ombre rapetissait, vidé de sa tristesse et de son désespoir, elle vomissant sa solitude et sa souffrance. Bientôt la lumière revient briller dans les yeux de Soobin, et entre ses bras une boule de poiles blanche pleurait ses dernières larmes couleur encre.
Lorsqu'une marre sombre eut atteint ses genoux, un coeur léger se mit à battre contre le sien. Entre ses bras se tenait un petit chat blanc aux yeux vert et violet, couleur de l'espoir et de la magie. La corne arraché s'était changé en animal, elle lui adressa un dernier miaulement reconnaissant, puis bondit loin de lui.
Le chat blanc disparu au loin, apaisé, ayant déversé son désir de vengeance dans ce château en ruine.
Soobin resta debout dans l'eau noir, trempé de la tête au pied, frigorifié. Une paire de bras vient entourer son ventre, un corps se pressait contre son dos et un visage tombait dans sa nuque.
- C'est fini, murmura-t-il.
- J'ai eu tellement peur, lui répondit Yeonjun.
Il restèrent ainsi quelques secondes, profitant du calme et de la lumière, leurs jambes enfoncé dans cette eau noire qui finirait par s'évaporer, emportant la tristesse très loin d'ici.
Les coeurs apaisés, heureux de se retrouver, soulagé d'être en vie, d'avoir vaincu le pire de leur tourment.
Soobin ne s'était jamais senti aussi heureux, une euphorie telle faisait bondir sa poitrine qu'il se retourna et saisit le visage de Yeonjun.
Ils s'embrassèrent.
Beomgyu et Taehyun, main dans la main, couraient dans les pièces effondrées du château. Derrière eux les pierres tombaient, les murs s'emiettaient, le monde se détruisait.
Le Chaos démarrait.
Ils entrèrent dans la plus grande salle à l'instant même où le couloir qu'ils franchissaient tomba. Projeté en avant, ils se protegèrent mutuellement des débris. Essouflé, ils échangèrent un regard, avant de baisser leurs yeux sur leurs corps recouvert d'une étrange substance noire. La pièce où ils se trouvaient était inondé de cette eau sombre, elle leur arrivait aux genoux lorsqu'ils se levèrent.
Devant eux se tenait deux garçons qui ne remarquèrent pas tout de suite leur présence, c'est quand ils les appelèrent dans des cris désespérés qu'ils se tournèrent vers eux.
Les coeur de Beomgyu et Taehyun explosèrent de bonheur en se rendant compte que c'était bien leurs amis qui se tenaient devant eux. En chair et en os, indemne.
- Soobin ! Yeonjun !
- Beomgyu ! Taehyun !
Les quatre garçons se jetèrent dans les bras les uns des autres, emmêlés dans une grande étreinte ils se serraient tellement fort qu'ils auraient pu fusionner à cet instant.
Personne ne posa de question sur ce que les uns et les autres avaient vécu, sur la manière dont ils avaient réussi à se retrouver. Tout ce qui comptait c'était d'être ensemble, ils avaient tous suivi des chemins qui les réunissaient, ils avaient tous affronté le danger avec l'unique optique de se réunir.
- On ne doit pas rester là, le château va s'effondrer, annonça Soobin.
- Tout es fini, il faut qu'on parte, enchaîna Yeonjun.
- Mais par où on doit aller ? Comment est-t-on censé partir ? Demanda Taehyun.
- Je connais le chemin.
Les trois premiers garçons se tournèrent vers Beomgyu, qui s'extirpait de l'étreinte et se levait. La détermination tirait ses traits.
- Vous me faites confiance ? S'enquit-il.
Taehyun fut le premier à hocher la tête, il se leva à son tour et reprit sa main. Soobin fut le suivant, lui adressant un sourire dans lequel brillait l'idée qu'il le suivrait jusqu'au bout du monde. Puis Yeonjun se redressa à son tour:
- Évidemment qu'on te fait confiance ! Clama-t-il.
Beomgyu se mit à sourire et tourna son regard dans la direction à prendre. Plus pour masquer ses larmes que pour réellement leur indiquer la route.
- Allons chercher Kai, murmura-t-il.
Il y avait une porte, Quelque-part, avec le nom de leur ami.
Ils devaient la trouver, l'ouvrir, puis prendre le chemin quelle leur offrirait. Qu'importe soit-il.
- C'est la fin de l'histoire.
Kai se tourna vers l'Etoile. Celle-ci, assisse au bout de la table, retournait une carte.
On y voyait un vieil arbre en train de tomber.
- Magic Island va s'éteindre.
Elle retourna une deuxième carte, on y voyait des portes qui se fermaient une à une.
- Les garçons doivent rentrer chez eux.
Elle retourna une troisième carte, on y voyait une fleur violette en train de faner.
- Ils doivent faire vite, où ils resteront coincé ici.
Elle retourna une quatrième quatre, on y voyait des cendres qui recouvraient ce qui avait été autrefois une grande et belle forêt.
- Ils doivent retourner dans le monde réel, puis poursuivre cette vie qu'ils ont choisi.
Elle retourna une cinquième carte, on y voyait un ciel brillant.
- J'espère qu'ils seront heureux.
- Je l'espère aussi.
l'Etoile leva les yeux vers Kai, du moins il devinait que c'était ses yeux. Il ne la distinguait toujours pas, elle était une étoile, faite de feu et de lumière.
Même si, il avait l'impression qu'elle brillait moins fort qu'avant.
- Kai, je suis en train de m'éteindre. Et avec moi Magic Island aussi. C'est la fin, les garçons doivent retrouver leurs vies, ils doivent vivre, ils doivent être heureux. C'est pour ça que j'avais créé cet endroit, pour vous rendre heureux. Mais maintenant vous n'avez plus besoin de venir vous réfugier sur une île magique, vous n'avez plus besoin de vous cacher, de vous éloigner de votre quotidien.
- Je sais. Et j'espère que mes amis parviendront à être heureux.
- Kai, ils ont fait leurs choix. À toi maintenant de faire le tien.
Il haussa un sourcil, puis observa la dernière carte. Le ciel était peu à peu habillé de nuages.
- Je suis mort.
- Plus ou moins.
- Les morts ont droit à un choix ?
- Je te l'ai dit, ici ce qui semble évident et logique dans le monde réel, ne l'est pas. Le temps, l'espace, la vie et la mort, toute ces choses sont différentes ici. Toi aussi, tu as le droit de choisir ton chemin.
La carte était presque entièrement blanche. On y apercevait deux silhouettes, deux femmes.
Kai les reconnaîtrait entre milles.
- Si je choisi de rester ici, de rester mort, alors je rejoindrais ma mère et ma soeur.
- Oui. Elles t'attendent.
- Et si je décide de partir, je peux retrouver mes amis.
- Si vous choisissez tous le même chemin, oui. Ils t'attendent eux aussi.
Kai caressa la carte du bout des doigts, les visages de sa mère et de sa grande-soeur y apparaissaient de plus en plus nettement. Elles semblaient sourire. Oui, elles lui souriaient.
Une larme glissa sur sa joue.
- Maman, Léa... Vous me manquez tellement...
Il cru voir leurs bouches bouger, très légèrement, un mouvement presque imperceptible. Et pourtant il était certain qu'elles répondaient que lui aussi, il leur manquait.
- Je donnerais tellement pour vous voir. Pour vous serrez dans mes bras... Rien qu'une fois.
Elles murmuraient encore. Elles aussi, elles voudraient le serrer dans leurs bras.
- Je vous aime.
Elles aussi, elles l'aimaient.
La main de l'Etoile se posa sur la sienne, il leva les yeux sur elle pour y découvrir son sourire. Elle ne brillait presque plus, ils pouvait presque discerner son visage.
- Merci pour tout, murmura-t-il.
- C'est à moi d'être reconnaissante. Allez, ils t'attendent.
Kai essuya les larmes qui trempaient son visage, puis se leva. À chacun de ses pas un nouveau sanglot le secouait, à chacun de ses pas les murs se mettaient à trembler un peu plus fort, le décors disparaissait un peu plus derrière lui.
Magic Island s'éteignait, ils n'avaient plus besoin d'elle pour vivre, alors elle s'envolait.
La magie vivrait à jamais dans leur coeur.
Dans un soupir, Kai s'empêcha de regarder en arrière. Il savait que s'il se retournait son regard tomberait sur la carte, sur le visage de sa mère, sur celui de Léa, et alors il serait incapable d'avancer.
Il devait les laisser derrière, il devait les laisser dans le passé. Faire un pas en avant dans le présent, progresser vers le futur.
Pas à pas, pour la première fois depuis l'accident qui avait détruit sa vie, Kai choisissait d'avancer.
Il ouvrit une porte, Magic Island disparue.
Face à lui ne s'étendait plus qu'une immensité de nuages blanc, un ciel en pleine journée si lumineux qu'il dû cligner plusieurs fois des yeux pour y voir clair. La porte de fermait, close à tout jamais, et il y en avait une autre devant. À quelques mètres, trop loin pour la rejoindre, même s'il tentait de sauter.
Elle s'ouvrit, quatre personne se trouvaient derrière.
- Kai !
Soobin fut le premier à surgir, il tenta de courir vers l'avant mais Yeonjun le retient de justesse. Entre les deux portes il y avait un vide, une étendue de nuage qui les empêchait de voir à quelle hauteur ils se trouvaient. Un gouffre les séparait, mêmes s'ils sautaient ils ne parviendraient jamais à atteindre la porte d'en face.
Kai sentit ses yeux brûler, les larmes affluaient par centaine en voyant les regards de ses amis sur lui.
- Kai, c'est vraiment toi ? N'est-ce pas ? Demanda Taehyun.
- Kai, tu vas bien ? Tu es en un seul morceau hein ? Tu es... Vivant, hein ? Enchaîna Beomgyu.
- Kai, on était tellement heureux de te voir ! J'ai envie de chialer, tellement je suis heureux ! S'exclama Yeonjun.
- Kai, il faut qu'on parte. Tout les cinq, on va retourner dans le monde réel, on va reprendre nos vies, on ne sera plus jamais séparé, promit Soobin.
Kai était incapable de répondre, il pleurait tellement, ses larmes brûlaient, enflammé par le bonheur.
- Comment on est censé se rejoindre ? Il doit y avoir un truc, un pont magique ou quelque-chose comme ça.
Tout en parlant Yeonjun se penchait légèrement en avant. L'une de ses mains tenait Soobin et son second bras était accroché par les doigts de Beomgyu afin de l'empêcher de tomber par mégarde. La porte s'était fermé derrière eux, ils se tenaient sur une plateforme juste assez grande pour contenir leur quatre corps.
La plateforme sur laquelle se tenait Kai, elle, était juste assez grande pour son seul corps.
- On doit sauter, lâcha Taehyun.
- Même si on saute on arriverait pas à atteindre l'autre bord, il doit y avoir une autres solution, on...
- Je ne parle pas de sauter pour atteindre l'autre porte, c'est là qu'on doit sauter.
Taehyun désigna le vide qui les séparait, l'immensité de nuage.
- Lâcher prise, murmura Beomgyu.
- C'est ça, lâcher prise, répéta Taehyun.
Ils échangèrent un regard complice, puis le premier s'accrocha davantage à Yeonjun, tandis que le second tendait une main en avant.
- Kai, sautes toi aussi, et on sera tous réuni, déclara-t-il.
Il hocha la tête, sans réfléchir à si c'était une bonne ou une mauvaise idée. Ils allaient se jeter dans le vide tous ensemble, s'accrocher les uns aux autres et tomber, tous ensemble.
Kai n'avait pas envie de penser aux possibles répercussions de cette chute, tout ce qu'il voulait, c'était attraper les mains de ses amis.
Alors il sauta, eux aussi.
Les bras en avant, il parvient à saisir la main de Taehyun, puis celle de Soobin, et se laissa attirer au creux de leurs bras.
Entouré de nuage, tous ensemble ils tombaient. Ils ignoraient jusqu'où, ils ignoraient s'ils avaient fait le bon choix, s'il existait un autre chemin, une autre route vers leur destin. Ils s'en fichaient.
Ils pleuraient et souriaient, en tombant tous ensemble. Ils avaient l'impression que les étoiles tombaient avec eux, pleuraient et riaient avec eux.
Le ciel se colorait en un jaune brillant, comme au crépuscule du début de soirée, ou à l'aube du petit matin. La fin, le commencement, il ne faisait plus nuit dans leur monde magique, les étoiles tombaient.
C'est ainsi que les cinq garçons quittèrent Magic Island, définitivement.
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