°2017°

L'ambiance festive résonnait à plusieurs mètres aux alentours, l'alcool obstruait la raison de nombreux lycéens et les voix se perdaient dans un affreux mélange de bruits réduit en bouillie. C'est l'ambiance qui faisait trembler la maison des Kang lorsque Beomgyu, Soobin et Kai arrivèrent enfin. Ils avaient décidé de faire leur apparition séparé de Yeonjun, celui-ci avait pénétré la fête il y a dix minutes et des cris de joie célébraient sa venu.
Personne ne fit attention au trois garçons qui passaient le pat de la porte. Ils n'étaient pas les seuls élèves plus jeune à s'être invité à une fête organisé par les dernières années. Après un rapide regard sur le salon ravagé, ils purent même affirmer que nombreux étaient ceux qui ne fréquentaient pas leur lycée.

Beomgyu fut le premier à oser se frayer un chemin à travers la foule. La maison n'était pas faite pour accueillir autant de monde, il dû se glisser entre les corps pour atteindre une table où il trouva gobelets et boissons. Il se servit un verre, peut-être trop chargé, il n'avait pas la moindre idée de la manière dont il fallait doser. Il n'avait bu de l'alcool qu'une seule fois dans sa vie, un soir chez Heeseung ils avaient sorti l'une des bouteilles de la cave des parents de son ami pour la boire à deux. Ils avaient fini pas se partager la cuvette des toilettes pour vomir, puis s'étaient endormi à même le carrelage de la salle de bain. Beomgyu avait été malade toute la journée du lendemain, prétextant une gastro devant son père suspicieux.
Mais ça remontait à un an, peut-être que depuis son corps supporterait un peu mieux l'alcool ? Il prendrait garde à ne pas trop boire, juste le strict nécessaire.

Il servit des verres à ses amis, prenant soin de verser moins d'alcool. Soobin semblait malade sans avoir bu, le bruit et le monde ne lui réussissaient pas, Beomgyu lui donnait à peine une heure avant d'être incapable de supporter cette ambiance. Quant à Kai, il regardait les alentours avec un mélange de stupéfaction et de malaise. Il ne savait visiblement pas où se mettre, sautillant d'un pied à l'autre.
Aucun d'entre eux n'avait jamais assisté à une telle fête.

- Vous avez vu Taehyun ? Demanda Beomgyu.

Ses deux amis secouèrent la tête, le jeune Kang ne donnait plus signe de vie depuis plusieurs heures. Un peu plus tôt Yeonjun l'avait harcelé de message, sans réponse, ils avaient donc décidé de venir sans attendre le feu vert du garçon.
Beomgyu observait toute part de la pièce, de plus en plus inquiet. Taehyun avait peut-être perdu son téléphone quelque-part dans la foule ? Peut-être s'était-il embrouillé avec sa soeur ? Peut-être devraient-ils monter voir s'il se trouvait dans sa chambre ?

Il avait beau tourner la tête de droite à gauche, aucune trace d'un petit brunet au visage masqué par des lunettes. Tout ce qu'il pu apercevoir fut la touffe de cheveux bleus de Yeonjun qui dépassait depuis la foule. Leur ami se trouvait au centre d'un cercle, tout les regards convergeaient vers lui. Une canette de bière à la main, cigarette dans l'autre, il riait avec les élèves de son âge. Il ne lui avait même pas fallut un quart d'heure pour se fondre dans la masse, il était dans son élément, il brillait plus que quiconque. Beomgyu pu même apercevoir que la soeur de Taehyun se trouvait parmi les filles qui cherchaient l'attention du garçon.

Il grimaça et avala son verre d'une traite. Sa gorge se mit à brûler, il se retient de justesse de tousser, puis se tourna vers Soobin et Kai. Ces deux-là se tenaient plus collé que jamais, n'ayant même pas effleuré leurs boissons des lèvres, ils donnaient l'impression de vouloir s'en allez.

- Je vais voir s'il est dans sa chambre, leur annonça-t-il.

Ses amis hochèrent à peine la tête, il n'attendit pas de réponse concrète pour se déplacer. Il se servit un nouveau verre et se mit en quête du plus jeune.
À force de faire des soirées tout les cinq dans cette maison, quand les parents et la sœur de Taehyun s'absentaient, il commençait à connaître les murs par cœur. Chaque recoin de la demeure devenait familier, agréable et confortable, Beomgyu aimerait même dire qu'il se sentait chez lui ici.

S'en était presque absurde quand on se souvenait de sa distance avec celui qui vivait réellement ici.

Il gravit les escaliers en slalomant parmi les diverses personnes qui y étaient adossé, heureusement personne n'avait encore prit l'initiative de rejoindre l'étage. Cela ne tarderait sûrement pas, dans les films et les séries on voyait toujours des couples se cacher dans des chambres sans penser à qui pouvait bien être le propriétaire.
Beomgyu frappa à celle de Taehyun, une fois, deux fois, puis entra malgré l'absence d'autorisation. La pièce était plongé dans le noir, par sécurité il l'éclaira d'abord avec son téléphone, puis alluma la lampe quand il fut persuadé qu'elle soit vide. Aucune trace de son ami entre les quatre murs.
Surement aurait-il dû faire demi-tour, mais il s'avança en fermant la porte derrière. En aspirant une gorgée de sa boisson, encore trop chargé, il admira la décoration minimaliste de la pièce comme s'il l'a découvrait pour la première fois. Ça ressemblait à sa propre chambre, à la différence près que Beomgyu n'avait pas le choix du décors. Si ça ne tenait qu'à lui des posters envahiraient ses murs, des albums de musique couvriraient le sol, sa belle guitare serait accompagné par d'autres instruments et son placard déborderait de vêtements. Il détestait la simplicité de sa chambre, et pourtant c'est un regard attendrit qu'il posait sur celle de Taehyun.

Ça lui allait bien, cette allure soigné tout en restant confortable.

Beomgyu se laissa tomber dans le fauteuil qui faisait face à la fenêtre, il avala encore quelques gorgées, sa tête commençait à gagner en légèreté, une brume glissait dans son esprit. Il termina son verre et se leva, rejoignit le bureau et commença à observer les livres qui s'y accumulaient. La majorité traitait de cours, mais il en repéra quelques-uns dont les sujets se tournaient vers le mystique, aux titres colorés de magie. Son épaule commença à picoter, il l'a massa, puis attrapa un album photo repéré dans un coin.
Les pages se remplissaient d'image d'une famille heureuse, parfois parasité par des clichés représentant des groupes de collégiens, Yang Jungwon en particulier. Et tout ces visages disparaissaient à la fin, remplacé par cinq autres. Beomgyu ne pu retenir son sourire en admirant leurs photos. Il continua à tourner les pages, découvrit des moments vécu par Taehyun qu'il ne connaissait pas. Comme cette série qui le représentait avec Kai dans un photomaton, les jolies images où il posait avec Soobin dans le parc, ainsi que des selfies prit avec Yeonjun.

Et une photo, une seule, où Beomgyu apparaissait en duo avec le jeune Kang.

On les voyait assit à côté, leurs corps légèrement penchés pour maintenir une faible distance, et les regards levés vers le photographe. Ils semblaient mal à l'aise, gêné et crispé.

Beomgyu ferma l'album, le coeur refroidit, et observa son verre vide. Il pensa aux paroles de Kai un peu plus tôt dans la journée, au fait qu'il ne pouvait pas contrer l'évidence.

Pourquoi aimait-il quelqu'un de si différent de lui ? Pourquoi aimait-il quelqu'un de qui il était si peu proche ?

Pourquoi s'acharnait-il à aimer Kang Taehyun ?

Il quitta la pièce, descendit les escaliers sans craindre les gens qu'il bousculait, et se rendit compte que Soobin et Kai n'étaient plus où il les avait laissé.

Dépité, il se servit un verre, puis deux, trois.

Il ne saurait pas dire à quel moment il avait arrêté de compter.

Kai:
Taehyun, où est-ce que tu es ?
22h47

Vu par Taehyun

Taehyun en train d'écrire...

- Lâche ton portable p'tit.

Taehyun eu à peine le temps de taper le début de son message que l'écran quitta ses yeux, un garçon de dernière année avait saisit son téléphone pour le remplacer par une petite balle en plastique. Même s'il aurait voulu protester on ne lui en laissa pas l'occasion, il se retrouva tiré au centre de l'attention, devant la table de la cuisine sur laquelle étaient aligné des verres.
Depuis le début de la soirée il n'avait pas une seule fois réussi à fuir les amis de sa soeur, qui s'étaient multiplié comme des cafards envahissant. Il était une attraction suffisamment amusante pour les distraires sans fin, ces lycéens de trois ans ses aînés semblaient trouver particulièrement amusant de faire découvrir la saveur des excès à un garçon plus jeune. Il n'arrivait pas à leur échapper et Eunbi n'était pas venu à son secours, elle avait disparu dans la foule depuis plusieurs heures.

Taehyun voyageait en plein cauchemar.

Il avait plusieurs fois essayé d'envoyer un message à ses amis mais à chaque fois on lui retirait son téléphone pour lui faire goûter une boisson ou le confronter à un nouveau jeu. Un peu plus tôt il avait cru être sauvé en apercevant Beomgyu dans l'escalier, mais son aîné ne l'avait pas remarqué. Au moins cela signifiait que les autres étaient quelque-part dans la maison, s'il parvenait à trouver Kai ou Soobin il pourrait peut-être disparaitre avec eux.

- Vise un verre, on va voir si t'es doué, clama l'une des amies de sa soeur.

Toute les personnes attroupées autour de la table le regardaient, et Taehyun commençait à avoir mal au ventre. Sa tête tournait, son corps suait, les bouffées de chaleur qui échappaient à sa peau coloré en rouge l'étouffaient. Il parvenait à peine à voir ce qu'il devait viser, il ne sentait que des yeux brûlant autour de lui, il avait l'impression de sentir le monde se figer pour l'observer.

Un cauchemar, un enfer. Il voulait hurler et se recroqueviller, éteindre le bruit et fermer les yeux.

Il voulait partir, fuir, disparaitre...

- Qu'est-ce que vous faites ? Vous embêtez un plus petit que vous ?

Le monde cessa vraiment de tourner, les voix s'éteignirent et les regards se détournèrent. Taehyun disparu dans l'ombre, sa présence s'effaça, s'écrasa, il pouvait de nouveau respirer.

Yeonjun venait d'apparaitre, la lumière se tourna vers lui, sa présence habita tout l'espace, il écrasait tout ceux qui levait fièrement le menton. Sourire au lèvre, alcool dans l'haleine et allure décontractée, il observait la scène sans laisser échapper le moindres sentiments de contrariété

- Il joue avec nous, on ne l'a forcé à rien. N'est-ce pas Taehyun ? S'exclama l'une des amis de Eunbi, en déposant un bras autour des épaules du jeune Kang.

Sans se défaire de son expression détendu, Yeonjun leur offrit un regard évasif. Il déposa son verre sur la table, puis attrapa le bras de Taehyun.

- Il n'a pas l'air bien, je vais l'accompagner dans un endroit plus calme. Je reviens, ne continuez pas la partie sans moi, je suis un As du bière pong !

Il ne perdit pas une seconde pour tirer le plus jeune loin du groupe, tandis que derrière eux se laissaient entendre des exclamations attendrit qui louaient sa gentillesse. Le grand Choi Yeonjun prenait soin d'un première année qu'il ne connaissait même pas, voilà qui était admirable. Personne ne se douta un seul instant qu'il n'agissait pas comme cela envers un inconnu, personne n'avait pu discerner le rictus crispé qui vibrait derrière son sourire.
Les deux garçons quittèrent le salon à pas de course, esquivant ceux qui désiraient les aborder jusqu'à atteindre un couloir désert. Là le visage détendu de Yeonjun s'effrita, l'inquiétude gagna ses traits quand son regard trouva celui tremblant du plus jeune.

- Ça va ? Demanda-t-il.

- Non, ça va pas du tout.

Taehyun arracha son bras de la poigne, pour passer ses doigts dans ses cheveux trempés de sueur, dont il manqua d'arracher quelques mèches. Il tenta de respirer calmement, inspirer et expirer à une vitesse acceptable, et retenir les sanglots qui saccadaient les efforts de ses poumons.
Il parvient tout juste à retenir ses larmes et releva les yeux vers Yeonjun. Au fond il savait que la meilleures chose à faire serait de le remercier, mais il n'arrivait pas à ressentir autre-chose que de la colère:

- C'est de ta faute ! Pourquoi tu voulais à ce point qu'on assiste à cette fichu fête ?

Son aîné le fixa, abasourdi, s'étant certainement attendu à entendre de la reconnaissance à la place de cette rage brulante.

- Je voulais juste partager un bon moment avec vous, répondit-il.

- On peut même pas être ensemble, à quoi ça rime au juste ? Tu voulais qu'on te regarde t'amuser ?

- À qui la faute si on peut pas passer du temps ensemble ? C'est toi qui veut pas qu'on se parle quand il y a du monde. Si ça ne tenait qu'à moi je crirais sur tout les toits que vous êtes mes amis.

Taehyun s'apprêta à répondre, mais il ravala les mots qui remontaient en une coulé acide dans sa gorge. Il ne devait pas s'énerver, il n'avait pas envie de se disputer maintenant. Il avait besoin d'être seul, de dormir...

De vomir.

Il contourna Yeonjun, bien décidé à rejoindre l'étage et essayer d'oublier ce qu'il se passait dans son salon. Mais son ami le rattrapa:

- Attend...

- Laisse-moi.

- Taehyun...

- Laisse-moi tranquille ! C'est si difficile à comprendre ?

Il ignora les traits vexés de son aîné et parvient enfin à s'éloigner. La direction emprunté était sa chambre, mais à la dernière seconde il se figea, puis se tourna vers la salle de bain.

Il voulait être seul, il voulait dormir, il voulait vomir...

Son doigt effleura ses lèvres, glissa en leur creux, avança doucement, plus profondément, jusqu'à titiller le point de nausée. Il ne lui fallut que quelques secondes pour gagner la cuvette des toilettes et y cracher tout ce qui s'était laissé avaler. Il vidait son ventre jusqu'à n'avoir plus rien à vomir, jusqu'à brûler sa gorge, écraser son corps, inonder sa peau squelettique de sueur.

Et à mesure qu'il vomissait son esprit s'apaisait, sa tête gagnait en légèreté, tout allait mieux.

Il allait mieux quand il se sentait vide.

Kai:
Quelqu'un a vu Beomgyu ? On l'a perdu depuis le début de la soirée.
23h34

Kai:
Les gars, vous allez bien hein ?
23h56

- Je vais au toilette, soupira Yeonjun, en posant son verre plus violement qu'il ne l'aurait voulu.

Personne ne lui répondit, ses "amis" de dernières années ainsi que les multiples personnes qui entouraient la table hochèrent simplement la tête. Malgré l'alcool qui faisait planer les têtes, tout le monde pouvait sentir l'humeur orageuse de celui qu'ils appelaient le roi de leur école, aucun ne ferait la bêtise de lui parler alors qu'il s'éloignait. Surement le pensaient-ils tous mauvais joueur, à force de manquer les cibles pendant le bière pong il devenait colérique, mais ils étaient bien loin de la réalité.

Il bouillait à l'intérieur, pas à cause de sa défaite à un jeu stupide, pas à cause de son crâne flottant dans l'ivresse, pas à cause de la musique trop forte ou encore du fait que plus personne dans cette maison n'avait les idées claires. Non, il bouillait en se retenant de courir à l'étage, retrouver Taehyun et reprendre leurs "conversation" là où le plus jeune l'avait laissé.
Comment osait-il lui hurler dessus alors qu'il lui était venu en aide ? Décidément, Yeonjun n'arriverait jamais à comprendre cet idiot. S'il ne voulait tellement pas assister à cette fête il aurait dû refuser, tout simplement, pas attendre le dernier moment pour lui crier dessus. De toute façon c'était toujours pareil avec Taehyun, quoi qu'il fasse ce n'était jamais assez bien, quoi qu'il dise on le lui reprochait ensuite.
Yeonjun avait beau faire des efforts, on le stoppait toujours dans sa lancé en affirmant qu'il ne "savait pas s'y prendre".

Très bien, puisqu'il ne savait pas s'y prendre, alors il laisserait tomber. Que cet imbécile sombre tout seul, c'était pas son problème après tout. Soobin, Beomgyu et Kai s'occuperont bien de lui, puisque eux, visiblement, ils savaient s'y prendre.

Yeonjun manqua de trébucher lorsqu'il passa la porte d'entrée. Il avait mentit un peu plus tôt, il n'avait pas envie d'allez au toilettes, juste d'être un peu seul.

Il était bourré, totalement bourré. Et s'il ne prenait pas le temps de se calmer il ferait quelque-chose qu'il regretterait.

Comme monter à l'étage et se disputer avec Taehyun, par exemple.

L'air frais de l'extérieur frappa son visage comme une gifle bienvenue, il se sentait toujours flasque et embrumé mais se couper de l'atmosphère festive détendait un peu ses sens. Un soupir attira son oreille, et en tournant la tête il constata ne pas être le seul à avoir voulu prendre une pause.

Quoi que, le garçon vers qui il se dirigeait en souriant n'était sûrement pas rester plus de quelques minutes dans la maison.

- Qu'est-ce que tu fais ici tout seul ? Demanda-t-il, victorieux d'avoir réussi à aligner ces quelques mots malgré le fouilli dans son cerveau.

Soobin se tourna vers lui, copia son sourire, puis murmura:

- J'essaye de voir les étoiles.

Le ciel était sombre, d'un grisâtre foncé, le mélange de la nuit, de la pollution et des reflets des lumières de la ville.

Aucune étoile ne brillait dans le ciel.

- C'est pas trop ton truc ce genre de fête, hein ?

Yeonjun n'avait pas besoin d'attendre que Soobin réponde pour deviner la réponse à sa question. Il soupira et, en s'appuyant contre le mur de la maison, enchaîna:

- Désolé de vous imposer mon caprice.

- Ne t'excuse pas, tu voulais seulement partager ton monde avec nous.

- J'aimerai pouvoir tout partager avec vous, mais tout est toujours compliqué. Je crois qu'on a un don, tout les cinq, pour compliquer les choses.

Cette dernière phrase sonnait tellement criante de vérité qu'ils partagèrent un même rire, mélange de dérision et d'amertume. Oui, ils compliquaient tout, voilà pourquoi derrière leurs nombreux moments de joie, les nuages planaient parfois.

Où souvent.

Peut-être plus qu'ils ne le croyaient.

Yeonjun s'alluma une cigarette, une mauvaise habitude récemment prise lorsqu'il buvait trop en soirée. Il n'était pas accro, il espérait ne jamais le devenir. Le paquet qui séjournait dans sa poche lui avait été donné par une fille de sa classe, il n'avait pas les moyens de s'en acheter.

- Comment ça va ces jours-ci ? Demanda-t-il, en crachant un nuage de fumée dans la direction opposée à Soobin.

Une attention vaine, puisque le vent ramena cette substance toxique contre le visage de son ami, qui grimaça mais ne se plaignit pas.

- Ça va.

- Sur ?

- Oui, pourquoi ?

- J'ai l'impression que tu es fatigué en ce moment, très fatigué. Dès que je te regarde je trouve que les cernes sous tes yeux sont de plus en plus marqué.

Sur ses mots, comme pour illustrer ses propos, il glissa son doigt au-dessus des joues de son ami, sans ignorer le frisson que son geste créait.

- Je fais pas mal de cauchemar ces jours-ci... ça me réveille en pleine nuit, mais...

Yeonjun n'entendait que du bruit, il essayait d'écouter ce que Soobin répondait, mais les sons rentraient sans faire sens dans son crâne. À quel point avait-il bu ? Il ne voulait pas flancher. Habituellement la sensation d'ivresse ne le dérangeait pas, il se fichait de ne plus ressentir ce qu'il se passait autour de lui, de sombrer dans un visqueux mélange avec ses amis fêtards. Mais là c'était différent.

Là, il était avec Soobin.

Tout était toujours différent avec Soobin.

- Mais je vais essayer les somnifères... Peut-être que ce sera utile... Et...

- Pourquoi tu détournes les yeux ? Je suis trop près ?

Yeonjun ne contrôlait plus sa voix, son corps. Il sentait juste le tremblement des frissons sous ses doigts, ainsi que la chaleur des joues qu'il caressait. Il sentait les brûlures qui gagnaient son propre visage, il sentait sa poitrine gonfler à un rythme effréné.
Et il se rapprochait, obnubilé par une seule et même question : est-ce que le coeur de Soobin battait aussi vite que le sien ?

- Non, tu n'es pas...

Il pouvait voir les émotions qui s'emballaient sous les paupières du plus jeune. Celui-ci ne parvenait pas à le regarder plus d'une demie seconde, ni à formuler une réponse correcte.

- Enfin... Si... Non.

- Pourquoi est-ce qu'on fait ça ? Continua Yeonjun.

- Faire quoi ?

- Compliquer les choses ?

Étrangement, malgré les lumières aveuglantes de la capitale et sa pollution qui empêchait d'admirer la nuit, il avait l'impression que les étoiles se mettaient à scintiller.

Elles les regardaient.

- C'est facile pourtant, il suffit d'être plus près, murmura-t-il.

Et il se rapprocha encore, encore et encore, jusqu'à effleurer le minuscule centimètre restant, ce dernier fragment de leur amitié, la dernière distance avant l'effroi d'une autre relation.

Yeonjun avait la réponse à sa question. Le coeur de Soobin battait plus vite que le sien.

- Puis-je simplifier les choses ? Demanda-t-il.

- Comment ?

- Est-ce que tu acceptes que je parle de mes sentiments ? Si ça te dérange je peux me taire et m'éloigner. Dis-moi juste si ça te gêne, dis-moi si ça te dégoute, je m'écarterais.

Soobin ouvrir la bouche, envoyant son souffle caresser les lèvres de Yeonjun. Son souffle seulement, il ne dit rien, il ne réclama pas une distance.

Ils le savaient, l'un comme l'autre, ce centimètre qui les séparait ne représentait déjà plus rien. S'ils le détruisaient, ça ne changerait rien.

Ils le savaient déjà, qu'ils n'étaient plus de simples amis.

- Le jour de notre première rencontre tu as dit que la corne qui me restait sur la tête ressemblait à une couronne, alors que moi je n'y voyais qu'une preuve de monstruosité.... Je me trouvais répugnant, tu m'as fait me sentir si beau.

Sur cette déclaration, Yeonjun attrapa la main de Soobin pour la mener à sa tête, trouver parmi ses mèches bleutés la pointe cassé qui ne l'avait jamais quitté depuis son enfance, une preuve de magie planté dans son crâne.

- Notre premier voyage à Magic Island était comme un rêve, mais moi je refusais que ça en soit un, je vous ai chercher si longtemps. Je t'ai cherché si longtemps, continua-t-il.

Soobin n'évitait plus son regard, il s'était figé. Il l'écoutait, il l'entendait, quelque-chose enroulait les deux garçons dans une bulle qui ne contentait que leurs émotions alignées.

Les étoiles les regardaient, elles admiraient les prémisses de l'amour, elles murmuraient leur tendresse face à ce spectacle.

- J'ai commencé à m'aimer grâce à toi, j'ai commencé à comprendre que je n'étais pas un monstre... Que je pouvais être beau.

l'Étoile les regardait, les admirait, murmurait sa tendresse.

- Et maintenant qu'on s'est retrouvé, c'est toi que j'ai commencé à aimer.

l'Étoile détourna les yeux, le rouge au joue, gêné mais heureuse.

Elle détourna les yeux pour laisser les deux garçons s'embrasser.

Elle détourna les yeux, pour seulement écouter leurs coeurs, et brûler de joie à l'idée que bientôt, très bientôt, elle pourrait rentrer chez elles.

Si, comme à cet instant, les cinq garçons se montraient sincère, s'ils tenaient leurs promesses, s'ils combattaient la noirceur de leurs âmes, alors elle retrouverait sa place dans son monde.

Elle retournerait à Magic Island.