Chapitre 13

Assis sur le canapé, Rogue était pensif. Simplement vêtu de son pantalon, torse nu, il n'arrivait pas à dormir. Le regard perdu dans les flammes de la cheminée, il n'arrêtait pas de repenser au jour où il avait trouvé Lily morte dans la maison dévastée de Godric's Hollow. Parler avec Hermione avait fait remonter de douloureux souvenirs auxquels il ne pensait jamais plus avoir à faire...
Tournant la tête, l'homme regarda la jeune femme remuer sous ses couvertures. Elle était couchée et dormait depuis longtemps. Il était plus de quatre heures du matin, mais lui était incapable de dormir. Soudain, il sentit une présence et leva la tête. Vêtue d'un long t-shirt et jambes nues, Hermione se tenait près du canapé. Se penchant, elle lui prit la main et, sans prononcer un seul mot, lui intima de se lever.

— Non, dit le sombre professeur. Non, miss...
— Venez, vous devez vous reposer, répondit simplement la jeune femme en tirant doucement sur la main.

Rogue regarda la petite main prise dans la sienne puis il ferma les yeux et se leva. Hermione l'entraîna alors jusqu'à son lit où elle se réinstalla. Elle se déporta sur l'autre place et il se glissa dans son dos. Sans un mot, elle revint alors vers lui et se serra contre son torse. Rogue inspira, surpris, puis posa sa main gauche sur l'épaule de la jeune femme en rabattant les couvertures...

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Hermione ouvrit les yeux et se frotta le nez contre le drap un peu dur de son matelas. Elle ramena son bras à elle et se frotta un œil en essayant de déchiffrer les aiguilles de son petit réveil. Il indiquait neuf heures plus quelques minutes et elle soupira profondément. Elle inspira ensuite et roula sur le dos.

— Bonjour, dit alors une voix grave.

La jeune femme sourit et s'assit dans le lit. Ses mèches en bataille lui revinrent dans la figure et elle les repoussa en regardant vers le canapé.

— Dites-moi que vous avez dormi, dit-elle en remettant son t-shirt en place, tout entortillé autour de son torse.
— Pas beaucoup, mais oui, ne vous en faites pas... Ce lit est d'ailleurs très confortable, répondit l'homme avec un mince sourire.

Hermione se souvint alors de la veille et pinça la bouche. Elle repoussa les couvertures et sortit de la douce chaleur du lit. Elle rejoignit le canapé et se glissa sous la couverture que Rogue avait sur les jambes. Il la regarda un peu de travers et elle se frotta le nez.

— Vous êtes levé depuis longtemps ? demanda-t-elle en se calant contre les coussins.
— Deux bonnes heures, je dirais...
— Et vous n'êtes pas rentré chez vous ?
— Je n'allais pas partir comme un amant pris sur le fait, si ?

Hermione sourit en secouant la tête. Elle remarqua alors le verre d'alcool dans la main de l'homme.

— Un whisky au petit-déjeuner ? Drôle de façon de commencer la journée...
— C'est exceptionnel...
— Je m'en doute bien... Vous voulez un vrai petit-déjeuner ?
— Je le prendrais chez moi, répondit Rogue en posant le verre sur la table basse. Si un Elfe monte et nous trouve tous les deux ainsi, il aura tôt fait de répandre une sordide rumeur qui mettra ma réputation à mal... et la vôtre.

Hermione hocha la tête et s'appuya contre le dossier du canapé en ramenant la couverture de laine sur sa hanche.

— Je suis désolée, pour hier soir, dit-elle. Mais quand je vous ai vu assis comme ça, vous m'avez fait de la peine...
— Hum, oui, j'imagine... Je n'aurais pas fermé l'oeil de la nuit si vous... si vous étiez restée sagement couchée et n'aviez pas invité un homme de vingt ans de plus que vous dans votre lit.

Hermione haussa un sourcil puis lui donna un coup de poing dans l'épaule et il sourit doucement en détournant la tête. Soudain, il se leva et s'habilla d'un geste de sa baguette magique. Hermione l'observa et souffla par le nez.

— Revenez quand vous voulez, dit-elle.
— Il ne faudrait sans doute mieux pas...
— D'accord.
— Bonne journée, miss Granger.

Hermione hocha lentement la tête avec une moue étrange, puis l'homme s'approcha de la cheminée et jeta de la poudre de Cheminette dedans. Il appela son bureau et s'engouffra dans les flammes. La Gryffondor s'adossa alors au canapé et grimaça. Elle croisa les bras ; soudain, son ventre gargouilla et elle appela un Elfe de Maison.

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Ayant envie de se changer les idées après la soirée riche en émotions, Hermione décida de passer la journée à Pré-au-Lard, avec Daphné, d'abord, puis avec Harry et Ron qu'ils croisèrent chez Honeydukes. Cela lui fit un bien fou d'entendre parler des bêtises des Gryffondors et quand ils durent se séparer, cela fut moins difficile que d'habitude.

— Tiens, te revoilà, toi ? C'est quand tu retournes à Gryffondor, déjà ?

Hermione serra le poing et regarda les trois Serpentards assis sur l'escalier menant aux étages du château. Malefoy baissa le menton.

— Ce n'est pas parce que je suis dans ta maison, et que tu es le "chef", que ça va m'empêcher de t'en coller une, Malefoy ! Tu t'en souviens, des Sœurs Phalanges, hein ? J'en suis certaine...

Malefoy serra les mâchoires.

— Allez, on se casse, dit-il alors à Crabbe et Goyle.

Hermione hocha la tête en les regardant partir, presque apeurés, du moins pour Malefoy. Elle l'insulta ensuite silencieusement et soudain, une ombre se profila dans son champ de vision externe et elle sursauta.

— Chauve-souris, dit Rogue sur le ton de l'évidence. Venez, j'ai quelque chose pour vous, Miss Granger, dit-il ensuite en se détournant.
— Ah ? À quel sujet ?
— Votre soudaine adhésion à Serpentard. Et je ne relèverais pas votre... discussion avec Monsieur Malefoy, mais évitez de le faire en public à l'avenir.

Hermione haussa les sourcils, surprise, et le rejoignit dans le couloir.

— Vous avez trouvé quelque chose ? demanda-t-elle.
— Peut-être. Une connaissance de la Directrice, a, comme vous le savez, entendu dire que des phénomènes du même type se sont produits dans d'autres écoles magiques d'Europe, expliqua Rogue.

Il s'arrêta devant une porte et l'ouvrit. Hermione entra et découvrit McGonagall dans la pièce, en train de discuter avec une autre femme, une sorcière, à en juger par son apparence... singulière.

— Ah ! dit McGonagall. Venez, Hermione. Je vous présente Sereine Lahmal, une amie d'enfance qui vit en Suisse. Sereine, je te présente Hermione Granger, la jeune femme qui été victime de ce sortilège.
— Oui, bonjour mademoiselle, répondit Sereine en anglais avec un gros accent français un peu étrange à l'oreille d'Hermione. Quand tu m'as envoyé cette lettre, Minerva, reprit la sorcière. J'ai été très surprise de te lire, car je venais d'en recevoir une autre de Balthus, le Mage-en-Chef de l'école de Pologne.
— Et donc ? Gunther m'a parlé de ce phénomène dans son école, à Berlin, mais je ne pensais pas que...
— Mon école à Zurich en a été victime aussi, et malheureusement, pour mon cas, c'est quatre élèves qui ont été touchés... dit Sereine en plissant le nez. Ils ont été brutalement, en l'espace de quelques heures, transférés dans une autre maison que la leur, et deux d'entre eux ne l'ont pas supporté et ont été contraints de rentrer chez eux.
— J'ai moi aussi beaucoup de mal à supporter cette mauvaise blague, intervint Hermione.
— Tu es gentille, ma chérie, mais je parle, lâcha alors Sereine. Je disais donc que...

Surprise, Hermione rentra le menton et regarda Rogue qui lui fit signe de le suivre.

— Sereine Lahmal est la Directrice de l'école royale de magie, en Suisse, située quelque part aux alentours de Zurich, dit Rogue. C'est une femme très gentille, mais elle ne supporte absolument pas que les "enfants" se mêlent des conversations d'adultes.
— Je ne suis plus une enfant depuis longtemps, répondit Hermione en croisant les bras, les sourcils froncés.
— Vous m'en direz tant, lâcha Rogue en la regardant en biais.

Hermione piqua aussitôt un violent fard et Rogue esquissa un sourire.

— Je le connais ? demanda-t-il alors en faisant mine de s'intéresser à la conversation des deux femmes en face de lui.
— Monsieur, c'est une question indiscrète...
— Nous avons dormi ensemble, Miss Granger, et je vous ai raconté des épisodes de ma vie très intimes, alors je pense qu'à ce stade, l'indiscrétion est un accessoire superflu. Je le connais ?

Hermione marmonna en se renfrognant.

— Ah, dit alors Rogue. Oui, bien évidemment... Ce cher Viktor Krum... Si mes souvenirs sont bons, toutes les filles en étaient amoureuses...

La Gryffondor ne répondit rien, mal à l'aise, et se laissa tomber sur un banc. Vexée par l'attitude de la sorcière suisse, la jeune femme ne desserra pas les dents pendant toute l'entrevue, laissant Rogue et McGonagall répondre à sa place. Cependant, elle en apprit bien plus qu'elle ne l'imaginait et réalisa bientôt que son cas était loin d'être isolé, qu'un petit rigolo s'amusait apparemment à provoquer des perturbations dans la veine magique elle-même. Cependant, personne ne savait qui c'était, pis encore, la source de la magie des sorciers du monde entier se trouvait dans un lieu totalement inconnu du grand public, seulement de quelques privilégiés qui en gardaient farouchement les coordonnées...

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— Tenez.
— Merci, Madame...

Hermione prit la tasse de thé et la posa sur ses genoux. McGonagall s'assit en face d'elle, et se servit une tasse.

— Je vous présente mes excuses pour l'attitude de Sereine, dit-elle alors.
— Oui, le professeur Rogue m'a expliqué... répondit la Gryffondor. Mais ce détail ne vaut pas tout ce que nous avons appris...
— En effet, et cela m'inquiète grandement car cela signifie qu'un mage ou un sorcier, ou même une créature magique quelconque, s'amuse à trifouiller dans la source de la magie... Nous allons au devant de grosses catastrophes.
— À ce point ?

Rogue grogna.

— En effet, répondit-il. Nous autres sorciers tirons notre magie de ce qui nous entoure, mais principalement des lignes de force qui parcourent la Terre entière, se croisant et se recroisant sans cesse. Quand plusieurs de ces lignes se croisent au même endroit, cela forme un Nexus, un puits de puissance que tout sorcier qui désire devenir plus fort, peut drainer.
— Voldemort ? demanda Hermione.
— Il a essayé, répondit Rogue. Mais il ne s'y frottera plus, il n'est pas encore assez résistant pour cela.
— Intéressant, répondit Hermione. On peut trouver ces Nexus où ?

Rogue et McGonagall se regardèrent.

— Oh non, Miss Granger, n'y pensez même pas ! dit cette dernière. Il est totalement hors de question que je vous laisse vous approcher d'un Nexus ! Cela vous tuerai !

Hermione serra les mâchoires. Elle posa sa tasse de thé sur la table et se leva.

— Miss Granger, dit Rogue. Nous savons tous que cette situation vous pousse dans vos retranchements, mais par Merlin, ne faites pas une chose que vous pourriez regretter toute votre vie... Si jamais vous y surviviez.

La jeune femme se retourna alors et regarda les deux adultes.

— Un gus, là, dehors, s'amuse à foutre la merde dans la magie elle-même ! s'exclama-t-elle en martelant l'air de son index. Aujourd'hui, des élèves sont changés de maison, ce n'est pas "grave", si j'ose dire, juste perturbant, mais demain ce sera quoi ? dit-elle en tendant le bras vers la fenêtre. Il va faire quoi, perturber les boucliers magiques qui cachent notre monde aux Moldus ? Détraquer les sortilèges de Désillusion qui protèges les Centaures, les Loup-Garou, les Elfes et les autres créatures pour qu'elles puissent vivre comme tout le monde ? Imaginez une seule seconde qu'il touche à quelque chose qui ne faut pas et que cela provoque la dissipation du brouillard qui entoure Azkaban ! Vous croyez que les Moldus vont faire quoi quand il vont voir apparaître cette gigantesque forteresse de pierre au milieu de l'océan ?

La jeune femme se tut et laissa retomber son bras.

— À la limite, être une Serpentarde, je m'en fiche, reprit-elle. Après tout, ce sont mes compétences magiques et cérébrales qui vont me servir plus tard, pas la maison au sang pourri à laquelle j'aurais vraisemblablement appartenu toute ma vie. Mais je ne peux pas laisser un abruti s'amuser avec ce qui fait de moi Hermione Granger !

Sur-ce, elle tourna les talons et quitta la pièce. Rogue fit un mouvement pour la suivre et McGonagall secoua la tête et la porte claqua brutalement en résonnant dans les murs.

— Laissez-lui un moment pour redescendre, dit la Directrice, le menton rentré.

Rogue la regarda puis soupira.

— Elle a raison, vous savez ? dit-il alors. S'il y a bel et bien quelqu'un qui s'amuse à jouer avec la magie, il faut l'arrêter. À la moindre mauvaise manipulation, tout peut s'arrêter, la magie peut disparaître comme on souffle la flamme d'une bougie, Poudlard redeviendra une ruine et nous autres...
— Nous autres finirons nos vies comme des Moldus, acheva McGonagall.

Elle se leva alors et lissa sa robe.

— Je dois envoyer des courriers, dit-elle. Retrouvez Miss Granger et essayez de la convaincre d'attendre d'en savoir plus. Je n'ai pas l'intention de perdre encore une élève, Severus.
— Bien, Madame.

Le sombre professeur tourna les talons et quitta la pièce. McGonagall s'approcha alors de la cheminée par laquelle Sereine était arrivée et repartie, et invoqua un tas de parchemins et une plume...

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