Chapitre XXIV


Cela faisait plus de dix minutes que j'étais sur mon téléphone, je n'avais jamais été aussi reconnaissante du fait que ce petit objet existe. C'était mon unique échappatoire dans cette situation embarrassante.

Mes jambes étaient serrées, craignant d'entrer en collision avec d'autres corps étrangers.

Je venais de me créer un compte Instagram. Je n'avais pourtant jamais été attirée par le monde des réseaux sociaux. Ça prenait beaucoup trop de temps et d'énergie, avec mon travail c'était une distraction dont je préférais me passer au risque de ne jamais respecter mes délais.

Cependant, avec cette histoire de photo postées par Maria, ma curiosité était désormais piquée, et je ne regrettais pas de m'être créer ce compte. Le compte Instagram de Marie Anne était une véritable mine d'or et si j'avais été ne serait ce qu'un minimum au fait de ce qui se passait dans la sphère people j'aurais reconnue la célèbre Marie Anne dès le premier jour où je l'avais rencontré. Elle comptabilisait un nombre de followers vertigineux et on retrouvait quelques rares photos d'elle et Kendall, sans que jamais elles ne soient intimes. Cependant il n'étaient pas vraiment nécessaires qu'elles soient intimes pour qu'elles me fassent grincer des dents.

En commentaires de « la photo » qu'Emma m'avait fait découvrir je pouvais lire :

« Vous êtes si belles ensemble, nous espérons de tout coeur vous voir de nouveaux réunies. Définitivement mon couple préféré »

Ou encore :

« Couple Goal ! »

Je levais les yeux au ciel en sortant de son profil, ce n'était franchement pas ce dont j'avais besoin à cet instant.

Je soupirais en relevant le nez, Kendall et tante Naïra étaient plongées au coeur d'une discussion sur la récente collaboration entre les Enseignes Jones et Edward Miller tandis qu'Emma ne faisait que les observer avec cette étincelle d'admiration dans les yeux. Bon sang, encore un peu et je lui offrais un portrait de Madame Jones. Arya quant à elle avait les yeux scotché à l'écran de son téléphone. Tout comme moi, elle devait sentir l'air manquant dans cette pièce.

Je regardais les différentes assiettes, le repas n'était pas près d'être fini. Peut être que si Kendall mangeait un peu plus qu'elle ne parlait nous pourrions clôturer !

En soupirant de nouveau, je me replongeais dans l'univers de mon téléphone, et je ne pus m'empêcher de taper Kendall Jones sur la barre de recherche Instagram. Mon coeur se mit alors à battre la chamade comme si je n'avais pas cette femme à quelques centimètre de moi, à ma droite, comme si je ne la côtoyais pas si souvent, comme si je n'avais pas été sa soumise.

Il n'y avait pourtant rien d'incroyables sur ce compte, essentiellement des photos officielles et professionnelles, avec des collaborateurs ou des personnalités influentes, quelques célébrités. On retrouvait également des photos avec son frère Marc ou encore avec son père dont elle semblait être très proche. Je vis également des photos avec la femme de l'autre jour, cette Raessah. Aucune trace de Marie Anne en revanche, et honnêtement cela me réconforta.

On sentait très clairement que Kendall contrôlait parfaitement son image, si bien qu'il était impossible de commenter ses photos. A mon grand étonnement elle avait bien plus de followers que Marie-Anne ce qui pouvait être assez déroutant quand on connaissait le personnage. Elle était tellement sublime sur ces photos : je ne pus m'empêcher de les zoomer sur son visage pour la contempler de plus près.

- Serait-ce trop te demander de poser ton téléphone Atlantis ? Surtout quand l'objet de toute cette attention se trouve à quelques centimètres de toi.

Je sursautais face à ce ton autoritaire étrangement familier en verrouillant l'écran de mon téléphone.

Le regard de Kendall pesait sur moi. Elle n'avait pas parlé fort mais elle n'avais pas non plus pris la peine de peine de parler à voix basse.

Mon dieu, la honte !

Mon regard affolé fit le tour de la table, étrangement, tante Naïra semblait particulièrement concentrée sur le découpage de sa tranche de boeuf et Emma tentait de discuter avec une Arya distraite qui m'observait du coin de l'oeil.

Je pris mon courage à deux mains pour me plonger dans les yeux de Kendall, ils avaient une lueur joueuse et un sourire moqueur avait prit place sur ses lèvres. J'espérais simplement qu'elle n'entendait pas les battements de mon coeur accélérer à un rythme incontrôlé.

- Je crois ne pas être la seule à avoir un certain penchant pour l'espionnage, continua Kendall la voix un degré en dessous.

Je détournais le regard, les joues brulantes. C'était bien ce qu'on appelait un parfait timing : quelques instants auparavant elle me repoussait et puis pour m'enfoncer dans mon ridicule il avait fallut qu'elle me surprenne en train de baver devant ses photos sur Instagram. Qu'est-ce qu'elle allait croire maintenant, que j'étais désespérée à ce point ?

Le sort était vraiment contre moi !

- Je crois que tu surestimes grandement l'intérêt que je te porte, chuchotais-je en lui lançant un sourire plein de venin.

La mâchoire de Madame Jones se serra, et elle fit une grimace étrange avant de reporter son regard vers son assiette, elle semblait contrariée ou en colère, je ne savais pas vraiment. De toute manière je ne comprenais rien à la « Kendall-sciences ».

Même si chacune à cette table faisait comme si elles ne nous avaient pas entendu, je savais pertinemment qu'elles nous avaient écoutés. Seule Arya faisait comme si nous n'existions pas. Elle attrapa d'ailleurs ses écouteurs Bluetooth posés près de son assiette et elle les mit. Sa mère lui fit alors de gros yeux, auxquels elle répondit par un faux sourire qu'elle ne manqua pas de m'adresser à mon tour.

Kendall était toujours figée, elle n'avait pas retouché à son assiette et son regard était plongé dans le vide. Je posai alors doucement mon téléphone sur la table, et...

Il fallait vraiment que je sorte de là.

- Je vais me chercher un canette, est-ce que quelqu'un en veut ? Dis je avec une voix sans doute un peu trop fausse.

Personne n'eut le temps de répondre puisque Kendall bondit de sa chaise et enfila sa veste, auparavant sur le dossier :

- Je vais devoir me retirer mesdames. Merci pour le repas c'était délicieux. J'espère que vous aurez rapidement des nouvelles de Derreck.

Elle avait parlé d'une voix très mesurée mais son ton avait était tellement froid que j'eus l'impression que sa voix avait résonné, j'étais sans doute la seule à l'avoir remarqué.

Arya leva les yeux au ciels en poussant un profond soupir et Tante Naïra se leva rapidement ce que je fis également par réflexe.

- Mais enfin Kendall, restez ! Vous avez à peine toucher à votre assiette.

Madame Jones déclina poliment avant de lancer un « aurevoir » global et intrusif, qui je le savais avait vocation à ne pas exclure Arya. J'appréciais cette attention aussi futile pouvait elle paraître.

Je ne comprenais pas vraiment ce revirement soudain, il y avait encore quelques instants on aurait crut que Kendall était chez elle tant elle paraissait à l'aise et maintenant c'est presque si elle prenait ses jambes à son coup.

- Je, je te raccompagne dis-je maladroitement.

Elle se contenta d'acquiescer d'un bref hochement de tête et elle me laissa passer devant elle. Madame Jones paraissait soudain tellement glaciale, je sentais ses yeux froids ancrées dans mon dos.

J'ouvris doucement la porte, avec très peu d'assurance.

- Euh, je suis navrée de l'incident avec Emma et merci d'avoir pris la peine de venir c'est..

Un rictus sur le visage de Kendall me contraignit à me taire. Sur le pas de la porte elle me détailla de haut en bas, l'air grave.

- C'est normal, répondit elle simplement en finissant ma phrase à ma place.

Je déglutis doucement face à sa posture parfaitement droite.

Est-ce qu'elle cherchait à m'impressionner ? Parce que ça marchait.

Je m'appuyai sur le cadran de la porte d'une manière presque vitale. Je hochais lentement la tête pour acquiescer ne sachant plus vraiment quoi dire, je me demandais vraiment comment Marie Anne pouvait penser que son plan fonctionnerait parce que Kendall comme moi semblions être assez douées au jeu du « chaud-froid/chaud-froid ».

- Tu surestimes mon indifférence. Déclara t-elle d'une voix cinglante.

Je n'eus pas le temps de répondre puisque Madame Jones disparut juste après avoir dit ça. Surprise par ses paroles je restai plantée là pendant un petit moment.

Est-ce que ce que j'avais dis un peu avant l'avait vexé ? C'est pour ça qu'elle était partie de cette manière, aussi subitement ?

Je refermai doucement la porte, puis m'adossais contre celle ci en fermant les yeux.

Quand vais-je saisir cette femme ?

- Atlantis ! Il y a Darren au téléphone, il est avec Derreck, cria soudain la voix d'Emma, me sortant de mon état de confusion. Viens vite !

Ma poitrine s'abaissa de soulagement. Enfin quelque chose de familier, de réconfortant, dans ce grand brouillard.

...

Kendall jeta un coup d'oeil à sa montre, elle affichait 19h38.

Son regard fit le tour du restaurant où elle se trouvait, elle aimait bien s'y rendre, c'était comme un havre de paix dans ce brouillard urbain new yorkais. Le Masa : sans doute le meilleur restaurant japonais qui existait et il avait de surcroît la qualité d'être l'un des restaurants les mieux protégés et surveillés du secteur en raison du fait qu'il accueillait de nombreuses personnalités. Mais contrairement à d'autres restaurant qui recevait ce genre de clientèle, il n'était en rien extravagant. Bien au contraire c'était un petit havre de paix dans ce brouillard New Yorkais, avec son ambiance épurée, calme et apaisante. Il y avait très peu d'endroit ou Kendall se sentait aussi bien. Et puis il fallait avouer que se faire servir par le chef en personne n'était pas des moins agréable.

Elle le vit d'ailleurs arriver vers son espace, d'avantage isolé du reste du restaurant, avec un plateau sur lequel était déposé différents types de mets, recouverts d'une immense feuille fraîche de Bananier. Kendall se leva en signe de respect afin de le saluer. Ils firent tout deux une légère révérence.

- C'est toujours un immense plaisir de vous recevoir Madame Jones, bienvenue ! Lui adressa t'il en ponctuant sa phrase d'un large sourire.

Kendall lui rendit son sourire.

- Chef Tsu tout le plaisir est pour moi, repondit t'elle d'une voix quasi professionnelle.

Le chef déposa alors le plateau en bambou sur la table. C'était coloré et terriblement appétissant.

- Voici notre printemps de saveurs. annonça le chef en désignant les apéritifs.

Ne se souciant plus du retard de celle qu'elle attendait, Kendall emboucha un nem raffiné.

- Hum.. c'est délicieux, ce délecta Kendall, comme de coutume, elle s'essuya les doigts avec l'une des serviettes en lin posées sur la table.

Le chef ne put s'empêcher de sourire de toutes ces dents, hautement satisfait de ce retour. Il connaissait la réputation de Kendall en matière culinaire. Et pour cause c'était l'un des meilleurs chefs du pays qui tenait la cuisine personnelle de la jeune femme.

- Désirez-vous passer commande maintenant ? Continua le chef.

Kendall pinça les lèvres, les retards avait le don de l'énerver au plus au point.

- Je ne suis pas seule ce soir, finit par répondre la jeune femme aux cheveux noir. Mais je vais passer commande en espérant que...

Une jeune femme fit une entrée plutôt remarquée dans l'espace où se trouvait Kendall et le chef Tsu. Effectivement, son manteau en chinchilla long jusqu'à ses chevilles n'était pas vraiment un gage de discrétion.

Kendall exaspérée, laissa son dos s'affaisser sur le dossier.

- Eh bien je crois que finalement l'attente ne sera pas nécessaire, ironisa t'elle.

L'autre jeune femme se défit théâtralement de son manteau ansi que de son chapeau assortit, dévoilant un sublime Kimono sous lequel on pouvait deviner ses formes voluptueuses. Kendall la fixait ne sachant si elle devait rire ou faire abstraction de son attitude.

Chef Tsu s'empressa de faire une petite révérence à l'invitée de Kendall, en joignant ses mains devant lui, salutation à la quelle la jeune femme répondit en la personnalisant d'un clin d'œil malicieux.

- Dites donc Chef Tsu vous êtes ravissant, le complimenta Raessah de sa voix mélodieuse.

Ce dernier, les joues rosies, la remercia timidement.

Raessah porta enfin son attention sur Kendall, en prenant place en face de cette dernière, en toute élégance.

- Une femme doit savoir se faire attendre, lança t'elle le plus naturellement du monde.

- Tu pourrais simplement t'excuser de ton retard, rétorqua Kendall, en répondant à un message de son père qui la contraria, sur son téléphone.

Raessah soupira d'une manière exagérée, en ricanant avec dédain.

- Chérie, j'ai déjà du m'excuser pour t'avoir dit le fond de ma pensée l'autre jour et tu n'as accepté mes excuses que ce matin, donc je pense que mon égo agonise déjà suffisamment. Alors pour le revigorer tu vas lui faire le plaisir de m'offrir le meilleur champagne dont dispose ce charmant restaurant.

Raessah avait ponctuer ses derniers mots de son éternel sourire agicheur vers le chef Tsu.

Elle n'aimait vraiment pas s'excuser et surtout pas quand elle savait qu'elle avait raison, cependant elle savait que si Kendall l'avait rappelé c'était parce que c'était sa manière à elle d'admettre que d'une certaine, même moindre, la jeune Jones n'ignorait pas que ce qu'avait dit son amie Raessah n'était pas totalement infondée. De toute manière, même s'il leur arrivaient d'être en désaccord, les deux jeunes femmes ne le restaient jamais très longtemps car Reassah derrière sa personnalité exubérante camouflait une attache amicale sincère et profonde envers Kendall. Cette dernière était la seule et unique personne à ne lui avoir jamais tourné le dos. Même lorsque son père était tombé pour des histoires de blanchiment d'argent et que tout New York avait eu sa famille dans le collimateur.

Kendall, rigola légèrement suite aux mots de Raessah.

- Chef, pour le repas, comme d'habitude je vous fais confiance, laissez parler votre talent. Et pour madame faites nous parvenir votre meilleur champagne.

L'amie de Kendall ne put s'empêcher d'ajouter d'une manière sensuelle :

- Je trouverai bien quelque chose à fêter entre temps !

...

- Je crois être légèrement dépassée, déclara Kendall la voix grave.

Le champagne était arrivé, le repas succulent disposé d'une manière élégante et délicate, le chef c'était surpassé. Le tout se déroulait bien même si c'était essentiellement Raessah qui parlait.

Cette soudaine réplique de Kendall l'avait donc coupé dans son monologue animé, mais elle l'avait surtout figé. Ce n'était pas vraiment le genre de Kendall de dire ce genre de chose, même à Raessah qui était son amie.

La jeune Jones gardait son éternel visage inexpressif, les bras croisés. L'intensité de la froideur qu'elle dégageait à cet instant là, troubla tant Reassah qu'elle déposa ses baguettes.

- Tu, tu veux en parler ? Demanda t'elle avec énormément de précaution.

Elle n'avait jamais eu ce genre d'échange avec son amie et elle avait peur que cette dernière se braque.

Kendall avait ses yeux plantés dans ceux de Raessah, elle ignorait pourquoi elle avait formulé sa pensée à voix haute mais c'était comme ci il avait fallut que ça sorte. Et puis, elle n'avait pas de réponses à ses questions et en dehors de Jack, de Marc et de son père Raessah était la seule personne en qui elle avait confiance.

- Erika Jones me fait chanter.

Raessah ouvrit grand ses yeux, jamais elle n'avait entendu Kendall évoquer sa mère. Elle fut si choquée qu'elle ne su lui répondre. Kendall enchaîna d'une manière mécanique tout en recommençant à manger :

- Elle a revendu 50% des parts de l'entreprise à des actionnaires qui ne sont rien de moins que ses marionnettes. Expliqua Kendall d'une voix détachée, mais il suffisait de voir à quel point sa main venait de se crisper sur le verre d'eau qu'elle venait d'attraper pour savoir que cela l'affectait énormément.

Reassah fronça les sourcils.

- Mais comment est-ce possible ? Comment a t'elle pu les revendre ? Et puis quel en est l'interêt ? Enchaîna l'amie de Kendall d'une voix affolée.

Sa question était sans doute un peu naïve mais les affaires ça n'était pas vraiment son truc.

Kendall continua de manger, tout en lui expliquant :

- En appelant mon entreprise « Jones », dont le nom est une propriété de mon père, j'ai lié nos patrimoines et en raison de la réputation de confiance économique dont il jouit j'ai accepté, à mes débuts, de faire une répartition des actions en 50-50. Mon père me reverse l'argent des actions qu'il perçoit par mon entreprise par la suite. C'était la seule solution qui était à notre disposition afin que je puisse utiliser mon nom. Répondit t'elle comme si elle récitait une leçon.

Raessah hocha doucement la tête de haut en bas, sa coupe de champagne à la main, montrant qu'elle suivait.

- C'est tout de même ironique de se dire que j'ai du passer par ce genre de fourberies simplement pour pouvoir avoir mon nom de famille écrit en grandes lettres au sommet d'une tour. Tout ça parce qu'Erika Jones a convaincu mon père de breveter son nom comme une marque.

Kendall se mit alors à rire d'une manière incontrôlée, au point qu'elle mit plus d'une minute à reprendre ses esprits. Raessah ne su vraiment comment elle devait réagir tant la situation était étrange.

- Kendall ? Appela t'elle d'une voix douce.

Cette dernière avait la tête entre ses mains.

- Kendall, ca va ? Demanda de nouveau Raessah.

N'obtenant aucune réponse, elle tenta de déposer sa main sur le bras de Kendall. Cette dernière le retira immédiatement.

- Je me demande comment mon père peut être aussi brillant mais pourtant si idiot dès qu'il se retrouve en face de sa femme. Grogna Kendall d'une voix glaciale.

Raessah l'écoutait et la regardait avec une attention particulière. Elle temps. En même temps comment aurait-elle pu ? Kendall était impénétrable.

-  Je ne sais pas comment mais elle a revendu petit à petit les parts de mon père à son insu. Continua madame Jones. Ça ne fait pas partie de leur patrimoine commun.

- Et tu l'as dis à ton père ? Qu'est ce qu'il va faire ? S'indigna Raessah.

Kendall la regarda alors droit dans les yeux, la mâchoire crispée.

- Mon père comme de coutume, est tombé de sa haute tour d'estime et d'amour pour sa femme. Une procédure judiciaire a été enclenchée mais bien évidemment il a omit de citer sa chère épouse et l'ennui est que les transactions étaient parfaitement légales car on retrouve la signature de mon père sur tous les documents.

Un rictus prit forme sur les lèvres de Kendall.

- Bien évidemment mon père n'a pas signé ces documents mais tant qu'il n'admettra pas la responsabilité de ma mère qui a imité sa signature, la procédure est bloquée faute de preuves.

Raessah soupira, une moue désolée sur le visage.

- Mais étant donné que tu es l'actionnaire principale et la fondatrice ça ne change rien à l'organisation de ton entreprise, je me trompe ?

Kendall expira fortement.

- Pas tout à fait car aujourd'hui, je suis dans la contrainte de faire passer chacune des décisions de l'entreprise face à un conseil qui réunit tous ces actionnaires, or d'une part je ne les connais pas donc je n'ai aucune envie de discuter de la gestion de mon entreprise avec eux et d'autres part je n'ai aucunement confiance en eux. Et.. souffla Kendall. Si nous n'arrivons pas à tomber d'accord je dois attendre un délai de 72h afin de pouvoir faire valoir mon droit d'actionnaire principale. Je perds tu temps, de l'argent.

Sans que Raessah ne s'y attende, Kendall attrapa sa coupe de champagne.

- Et ma dignité, conclut Kendall dans un murmure.

Elle rapprocha ensuite la coupe de sa bouche.

- Non Ken, ne fais pas ça, cria Raessah, en bondissant de sa chaise.

Kendall ne l'écouta pas et elle descendit ensuite d'une traite la coupe en grimaçant. Elle s'empara ensuite de la bouteille de champagne malgré les tentatives Raessah de l'en empêcher.

Madame Jones pour se dégager, se leva et se dirigea vers une fenêtre parfaitement dégagée de leur espace. De l'extérieur les vitres étaient teintés.

- Bordel Kendall, lâche ça, tu n'en as vraiment pas besoin !

Raessah était dépassée.

- Dans un élan de gentillesse Erika m'a proposé de me rendre toutes mes actions si j'accepte d'épouser un bon parti pour redorer mon blason et sauver mon honneur, déclara Kendall avec cynisme en ignorant les remontrances de son amie.

Debout, le regard dans le vide elle se servit de nouveau une coupe de champagne. Elle en but quelques gorgées avant de fermer les yeux, la tête penchée en arrière. Elle laissait le liquide irriguer chaque parcelle de son organisme, mettant fin à trois années de pure sobriété.

Raessah se leva doucement, en s'approchant de son amie.

- Kendall, j'ignorais tout ça, je suis vraiment désolée pour l'autre jour je croyais que c'était cette fille qui te mettait dans tous ces etats mais je n'aurais jamais imaginé que..

A hauteur de Kendall, Raessah tenta doucement de nouveau de récupérer la bouteille des mains de celle-ci, mais son amie était rapide, elle fit un tour à 180 degré, esquivant habilement la tentative de Raessah.

- Atlantis est sans doute l'unique personne qui semble m'apporter un peu de réconfort ces derniers jours, affirma Kendall d'une voix étrangement douce.

Raessah observa son amie qui remplissait de nouveau la coupe, les mains de cette dernière tremblaient et ses yeux étaient devenus légèrement rouges.

Elle se disait que si Kendall ne cessait de boire elle allait devoir appeler Marc, car elle ne savait pas gérer une Kendall ivre et en colère.

- Comment ça se passe entre vous ? Se contenta de demander Raessah pour changer un peu de sujet.

Kendall haussa les sourcils en souriant, elle se promenait d'une manière nonchalante autour de la salle.

- Nous sommes amies, confia t'elle à l'autre jeune femme.

Raessah gloussa en reprenant place sur son fauteuil.

- Mais je dois bien admettre que je me retiens de la plaquer contre un mur à chaque fois que mes yeux se posent sur elle, lui concéda Kendall.

Raessah ne pu se retenir de rire de nouveau.

Elle proposa alors à Kendall de reprendre Atlantis  comme soumise mais cette dernière lui affirma que c'était impossible, sans lui donner d'avantage d'explication. Elle lui confia qu'elle essayait de moins la voir mais que sans vraiment savoir pourquoi, ça lui était difficile.

- Quand l'as tu revu pour la dernière fois ? Demanda Raessah qui avait succombé aux derniers makis abandonnés sur le plateau.

Kendall lui raconta alors l'épisode de la disparition de Derreck.

- Mon dieu, s'exclama Raessah d'une voix lasse, et où est ce qu'il était ? Enfin est ce qu'ils l'ont retrouvé ?

Kendall revint s'affaler sur le fauteuil dans lequel elle était assise, l'alcool qu'elle avait consommé commençait à faire effet.

- Oui, son petit ami l'a retrouvé. Derreck était partit à cause de leur rupture qu'il n'a pas supporté, il s'est laissé aller.

Raessah haussa alors un sourcil, dubitative.

- Je n'y suis pour rien, il l'a retrouvé par ses propres moyens, assura Kendall en levant sa main libre en l'air.

Raessah s'essuya la commissure des lèvres avec sa serviette, son visage montrait bien qu'elle n'était pas convaincue.

- Et comment tu sais tout ça alors ? Tu t'investie trop Kendall.

Kendall ne répondit pas, enchaînant une autre flûte.

- Je t'envoie quelqu'un demain, amuses toi avec elle et tu passeras à autre chose.

Kendall déposa bruyamment la bouteille et la flûte sur la table.

- Je ne peux pas Rae, je ne peux pas ! Elle m'obsède, craqua Kendall la voix rauque. Aucune femme auparavant ne m'a fais cet effet, ça m'effraie.

Ses mains tremblaient davantage, elle ne contrôlait plus ce qu'elle disait et toutes ses émotions lui remontait subitement à la figure.

Raessah envoya un message à Jack, lui intimant de venir les récupérer immédiatement et composa le numéro de Marc.

...

Kendall ouvrit lentement et difficilement ses yeux.

Elle sentait une certaine chaleur à sa gauche, elle bondit lorsqu'elle réalisa que quelqu'un se trouvait près d'elle. Elle retira d'un coup la couverture, afin de découvrir l'identitité de la personne couchée près d'elle, elle détestait que l'on dorme sur son lit et Raessah le savait.

Elle poussa un profond soupir lorsqu'elle s'aperçut qu'il ne s'agissait que de son frère. L'idée d'avoir dormis avec cet idiot qui se ferait un plaisir de lui faire la morale dès son réveil ne l'enchantait pas vraiment. Elle avait seulement quelques vagues souvenirs de cette fin de soirée et c'était sans doute mieux ainsi.

Elle recouvra son frère de nouveau avec la couverture, ce dernier n'avait même pas bronché : il dormait à poing fermé.

Kendall s'en voulait terriblement d'avoir rompu son voeu de sobriété, d'avoir craqué à ce point. La seule fois ou elle avait craqué avant celle ci c'était le jour de son (non) mariage.

Dans un excès de rage elle se leva brutalement de son lit, amplifiant la sensation de "barre au milieu du front" qui la faisait terriblement souffrir.

Kendall retira violemment ses vêtements de la veille avec lesquels elle avait dormi car fort heureusement de Marc n'avait pas eu la prétention de la faire se changer.

Elle se plaça sous le pommeau de couche encastré qu'elle activa sans précaution.

C'était sa première douche chaude depuis des lustres. L'eau brulante frappa son visage, se mêlant au larmes qui inondaient ses joues.

Peut être était il temps de cesser les douches froides.

Peut être était il temps de s'autoriser à vivre de nouveau.

...

Je passais et repassais ma main dans les cheveux de Derreck, j'vavais été tellement heureuse de retrouver mon grand frère, je ne voulais plus le quitter. Ça avait d'ailleurs été très compliqué pour moi de me rendre au travail ce matin là, je n'avais pas voulu le laisser seul.

Lorsque Derreck était « réapparu » l'avant veille c'est comme si j'avais pu respirer de nouveau. Nous nous étions enlacés durant de longues minutes.

- Je suis désolée avait murmuré mon frère, tellement désolée, ne cessait t'il de répéter.

Plus tôt dans la journée, en rentrant du travail, je m'étais directement dirigée vers la chambre de mon frère. Ce dernier dormait encore, ça ne m'étonnait pas : lorsqu'il était revenu des cernes énormes avaient pris place sous ses yeux. Je lui avait demandé ce qu'il y avait, où il était durant ces trois jours, pourquoi il était partit de cette manière, il m'avait alors promis de tout me raconter, avec Darren, dès qu'il se serait reposé. J'était sceptique et anxieuse mais si Derreck m'avait dit qu'il m'expliquerait alors il le ferait, je n'en doutais pas.

Tout ce que j'espérais c'est que ça n'était rien de grave, mais en même temps seul quelque chose de grave pouvait faire faire ce genre de chose irrationnel à mon ainé..

Je contemplais mon frère, son visage d'habitude si angélique, était déformé par la fatigue mais il restait magnifique. Je le serrai davantage contre moi, me demandant comment j'avais pu autant m'éloigner de lui ces derniers temps. Je comptais bien ne plus rien laisser mettre autant de distance entre nous. Et pour ça il allait falloir que lui comme moi arrêtions les secrets.

Tout le monde était rentré et Arya était retournée chez ses parents pour quelques jours encore, cela nous laissait le temps de profiter l'un de l'autre. Loin de toutes les choses ou plutôt des personnes qui me tourmentaient.

De son côté après s'en être allée comme une voleuse, Kendall, ne m'avait reparlé qu'une seule fois et notre échange avait été extrêmement bref :

"Bonsoir Atlantis.  J'espère que vous avez du nouveau concernant Derreck. Bonne soirée" avait elle écrit.

" Bonsoir. Il est rentré, et il va bien, merci. Bonne soirée"

Elle n'avait rien ajouté et moi non plus. A vrai dire c'était la première fois depuis notre rencontre que j'avais pu passer trois jours sans penser à elle à tout instant.

Bon c'était sans doute dû au fait que j'étais épuisée après avoir passé plus de 24h sans dormir en raison du fait que j'étais inquiète pour mon frère mais également parce que j'avais éteint mon téléphone jusqu'à ma reprise afin que Marie Anne ne m'importune pas. Et j'avais bien fais car lorsque je l'avais rallumé, je constatai qu'elle m'avait envoyé plusieurs messages, que je n'avais pas ouverts bien évidemment.. J'avais de surcroît été noyé par mon travail toute la journée.

Tout en continuant à caresser le cuir chevelu de Derreck, j'observais le ciel par la fenêtre. Le soleil se couchait, nous faisant la faveur de ses derniers rayons. C'était sublime, d'un rose qui se mêlait à un mauve doux. C'était si apaisant, et je ne sus pourquoi mais j'eus envie à cet instant précis d'appeler Kendall, juste pour lui demander comment elle allait.

Non je ne pouvais pas, c'était ridicule.

Mon téléphone sonna à cet instant là, alors que je le tenais encore en main, hésitante. Lorsque je vis « Kendall Jones » s'afficher sur l'écran de mon iPhone les battements de mon coeur accélérèrent.

Synchronisation, coïncidence, hasard, espionnage, magie...peu importe mais l'adrénaline me prit au coeur et des pulsions se firent sentir au niveau de mes tempes.

Je mis plusieurs secondes avant d'appuyer sur l'écran tactile pour prendre l'appel.

- Allo ? dis-je doucement afin de ne pas réveiller mon frère.

Je me relevais doucement afin de m'asseoir. Elle aurait presque pu entendre mon coeur battre à l'autre bout du fil.

- Salut, répondit Kendall d'une voix presque timide.

Un petit sourire se dessina sur mon visage. Salut ? C'était bien trop trivial pour Kendall ça.

Je me raclai doucement la gorge afin d'impulser mon sarcasme.

- J'ai cru que tu t'étais déjà rétractée concernant notre amitié et que tu avais supprimé mon numéro de ton répertoire.

Le rire légèrement rauque de Kendall retentit.

- Aucunement. J'ai simplement pensé que tu aurais sans doute besoin de te retrouver avec ton frère.

Je ne répondis pas, car le fait que Kendall y ait pensé et qu'elle soit si.. attentionnée réchauffa quelque chose en ma poitrine. J'ignorai cette sensation, et un petit silence gênant prit place.

- Tu vois comme le ciel est beau ce soir ? Me questionna soudain Kendall, comblant ce petit blanc.

Je me levais du lit de mon frère afin de m'approcher de la fenêtre pour mieux admirer le ciel. J'acquiesçais doucement, un sourire niais sur le visage. Je plaçais une mèche de mes cheveux derrière mon oreille de ma main libre en me mordant la lèvre afin d'éviter de lui dire que ce beau coucher de soleil m'avait fait penser à elle.

- Je ne te pensais pas aussi romantique, soufflais-je. Enfin, au-au sens littéraire du terme, m'empressais-je d'ajouter, embarrassée.

Kendall rigola de nouveau. Je m'empourprais en tapant mon front de la paume de ma main.

- Romantique je ne sais pas, mais en bas de chez toi, je peux te l'assurer, se moqua t'elle. Regarde plus bas.

Je mis quelques secondes avant de réaliser ce qu'elle venait de dire et de m'approcher de la fenêtre. En regardant plus bas, je la vis. Adossée à une sublime mercedes grise.

Non mais comment faisait-elle ça ? Sans doute aurais-je du m'inquiéter... mais je n'en eu pas le temps car Kendall releva le menton vers la fenêtre de ma chambre de mon frère en enchainant :

- Accepterai-tu de venir faire un tour avec moi ? Demanda t'elle d'une manière solennelle.

Je gloussais timidement.

Ce que j'aurais voulu dire était que c'était mignon à m'en faire fondre mais je me retenais.

- C'est très gentil Kendall mais je suis seule avec Derreck, je ne veux pas le laisser, me justifiais-je doucement.

Il y eut un bref silence.

- Je te promet d'être une vrai gentlewoman et de te ramener bien assez tôt.

Je regardai vers mon frère quelques instants, il dormait encore profondément, il ne se réveillerait sûrement qu'en plein milieu de la nuit. Et puis il y avait des restes du repas que j'avais préparé la veille dans le frigo.

Je réfléchissais longuement en observant Kendall par la fenêtre. Elle avait toujours le visage levé vers la fenêtre de la chambre de mon frère. En raison de la hauteur je ne la voyais pas parfaitement mais je pouvais presque sentir ses iris ambres me transpercer. Mon sang circulait bien trop vite dans mon corps pour que je puisse réfléchir convenablement.

- Très bien, j'arrive ! Tranchais-je d'une voix calme qui contrastait avec l'excitation qui s'était emparée de mon corps.

J'enfilai un manteau, et mis une paire de botte, je ne pu m'empêcher de mettre un peu de poudre, du mascara et du gloss. Oui ce n'était qu'une sortie entre amies mais...

Peu importait.

J'embrassai le front de de Derreck à qui j'avais laissé un mot avant de quitter l'appartement à pas de loup.

Lorsque j'arrivai en bas de l'immeuble, j'observais Kendall discrètement derrière la porte vitrée : elle était sublime comme à son habitude, ses cheveux étaient tirés en arrière. elle portait un pull gris et avait relevé ses lunettes sur ses cheveux. Quelque chose était différent sur son visage, elle paraissait moins rigide que de coutume, plus apaisée.

Alors que je la dévorais encore du regard, absorbée par ses traits sublimes, Madame Jones regarda soudainement dans ma direction et nos regards se croisèrent. Je détournais, les yeux terriblement gênée. Ce bref échange avait suffit à me troubler.

Je fus dans l'obligation, pour ne pas m'enfoncer dans mon ridicule, d'appuyer sur le bouton qui ouvrait la porte automatique de l'immeuble afin de me diriger vers elle d'un pas faussement assuré.

Kendall ne souriait plus, elle me fixait simplement avec intensité comme elle savait le faire, j'enfonçais mes mains dans les poches de ma veste tant cette manière qu'elle avait de me regarder me faisait perdre mes moyens.

Lorsque je fus en face d'elle, Madame Jones me tendit sa main.

Je grognais intérieurement : encore cette attitude stricte et protocolaire.

Je balayais mes pensées d'une traite et lui tendit également ma main, mais quelle fut ma surprise lorsque que Kendall se pencha légèrement en avant afin de baiser ma main d'une délicatesse qui fit se tordre mon ventre.

Mon coeur menaçait de me lâcher et mon visage avait certainement du changer de couleur.

- Tu m'obsèdes, murmura t'elle d'une manière dont elle seule avait le secret, en se redressant.

Je déglutis doucement sans la quitter des yeux. Je ressentais une explosion de sensation au niveau de ma poitrine.

- Kendall...articulais-je doucement, des frissons sur la peau.

Je détournais le regard.

- On fait n'importe quoi, tu ne sais pas ce tu veux et moi non plus, expliquais-je d'une voix qui traduisait mon impuissance. Tout ceci n'a aucun sens, nous sommes amies mais pas vraiment, distantes mais pas vraiment, proches mais pas vraiment, tout mais absolument rien ! M'écriais-je.

Je la vis alors se tendre légèrement.

- Toi, c'est toi que je veux Atlantis. Assura Kendall d'une voix tranchante. Pas ton corps, pas ta soumission, mais toi.

Mes yeux s'écarquillèrent et ma respiration se fit plus lourde.

Moi ? Mais qu'est ce que ça voulait dire ?

Bạn đang đọc truyện trên: AzTruyen.Top