Chapitre 32 - L'évasion

Vous commencez à connaitre les avertissements : Violence, sang, mort.

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C'est l'effervescence, tout le monde se bouscule, crie, pleure. Je tiens toujours Kathy dans mes bras. Gregory s'approche et je vois la jeune fille glisser la boîte de somnifères sous ses vêtements avant qu'il n'arrive à notre hauteur.

— Allez, viens sujet n°1, je te ramène à ta cellule.

Sa voix est dépourvue d'émotion, mais son expression traduit une vive colère.

— Non, je réponds. Je ne laisserai pas Kathy toute seule. Pas après ce que vous avez fait.

Il a l'air surpris. C'est vrai que, comparé à ces derniers jours, c'est la première fois que je me rebelle. Je me mords l'intérieur de la joue - j'espère que cela ne créera pas de souci, si notre plan tombe à l'eau à cause de cet écart, je ne me le pardonnerai pas. Gregory ne répond pas et me prend par le bras, me forçant à me lever et à relâcher ma prise sur Kathy.

La jeune fille tombe à terre et je ne peux malheureusement rien faire pour l'aider. Je donne quelques coups de coudes à mon gardien, mais rien n'y fait, il est bien trop fort. Je vois un autre garde s'approcher de Kathy, le visage fermé et l'arme au poing. La brune aux yeux d'ébène lui lance un regard glacé. Je peux y lire la haine et l'envie de vengeance. J'ai peur. Elle non plus n'a pas le droit de faire un faux pas maintenant, malgré la douleur. Le meilleur moyen de venger son ami est encore d'attendre. Je la fixe et secoue la tête en signe de désapprobation. Heureusement, elle croise mon regard avant d'agir et au moment où le garde l'attrape par l'épaule, elle ferme les yeux et se laisse faire.

Gregory me traîne le long des couloirs, cette fois encore, il prend un chemin direct. Je me rends compte que contrairement à ce que je pensais, ma cellule et plus proche du réfectoire qu'il n'y parait. La porte s'ouvre et il me pousse dans la pièce. Encore une fois, je me retrouve seule. J'entends du bruit à l'extérieur. Il semblerait que nous soyons tous ramenés dans nos chambres. Abattue, je m'assois sur le lit et attends que le temps passe.

Je fixe encore une fois le plafond. La fissure est toujours là. C'est d'ailleurs le seul élément qui détonne dans cet endroit stérile. Le bâtiment n'est pourtant pas vétuste, d'extérieur il paraît même flambant neuf. Pourtant, si on se fie à la création de l'entreprise, cela pourrait dire que les locaux ont une vingtaine d'années peut être même plus. Je suis tout de même assez étonnée qu'Hygeia ne prenne pas plus soin de ses équipements. Je soupire. J'ai tellement peu de distraction que cette simple fissure est devenue ma seule occupation.

Soudain, j'entends le "clic" familier qui signifie que la porte de ma cellule est déverrouillée. Curieuse, je me rassois sur mon lit et fixe l'entrée de ma chambre. C'est ma mère qui entre, Grégory sur ses talons, comme à son habitude.

— Bonjour Lola, comment vas-tu ? Tu n'as pas été trop choquée par les événements ?

Je fronce les sourcils, son regard semble inquiet, presque aimant. Pour l'instant, je me tais et j'attends de voir ce qu'elle a derrière la tête. Elle s'assoit à côté de mon lit et fait un geste pour prendre ma main. Je me recroqueville à l'autre bout du matelas, entourant mes genoux avec mes bras. Je la vois soupirer, elle croit que j'ai encore peur d'elle. Mais en réalité, je sers mes poings de chaque côté de mes jambes pour m'empêcher de lui sauter à la gorge. Tout ceci est sa faute.

— Lola, ma chérie, il faut que tu te reprennes, ma mère continue d'une voix mielleuse, dis-moi, qu'est-ce que tu voudrais ?

— Je voudrais les sauver, tous, je murmure.

Un sourire satisfait apparaît sur les lèvres fines d'Elsa.

— Je n'en attendais pas moins de toi. Tu es capable de les sauver, tu le sais ? C'est toi le remède.

— Le remède ? je répète dans un murmure.

— Oui. Suis-moi, je voudrais te montrer quelque chose.

Ma mère se lève et je la regarde sortir. Grégory s'approche de moi et est sur le point de me saisir par le bras, quand Elsa parle à nouveau.

— Laisse la Grégory, je pense qu'elle peut marcher toute seule.

Étonnée, je me redresse et avance vers la porte. Grégory me suit de près et je l'entends fulminer de ne pas pouvoir me traîner derrière lui comme il a l'habitude de faire. Je regarde ma mère marcher. Elle a toujours été très belle, grande, élancée. Elle porte un tailleur blanc resserré au niveau de la taille. Rien que son allure montre la confiance qu'elle a en elle. Sa fragilité n'est qu'une façade, et cela a toujours été le cas. Déjà petite, j'avais remarqué que les gens la croyaient vulnérable. Pourtant, d'un seul regard, elle a toujours su obtenir ce qu'elle voulait et se faire respecter. Claire tient cela d'elle. Ce caractère fort et cette assurance. Moi, je tiens plutôt de mon père, discret, réservé. C'est sans doute pour cela que je me suis toujours sentie plus proche de lui. Ma mère s'arrête devant un mur. Au départ, je ne comprends pas puis, ma mère pose sa main sur une console qui se situe près du mur, et celui-ci s'ouvre. Il s'agit d'un ascenseur caché. Intriguée, je la suis à l'intérieur. Il n'y a qu'un seul bouton. Elsa appuie dessus et le mur se referme. Je peux sentir le sol vibrer doucement sous mes pieds, indiquant que l'ascenseur se déplace. Cependant, je suis incapable de dire si nous montons ou descendons.

Les portes s'ouvrent à nouveau et nous arrivons dans un couloir semblable aux autres. Il n'y aucune cellule cependant. Nous marchons sur une centaine de mètres et nous retrouvons devant une double porte close. Ma mère attrape sa broche, accrochée à sa veste, et l'ouvre. Sous mon regard médusé, elle sort une minuscule clé en or et l'insère dans la serrure de porte.

Nous entrons dans la pièce qui est totalement différente de toutes les autres. De grandes étagères se tiennent le long des murs avec des tonnes et des tonnes de dossiers. Au milieu, plusieurs paillasses avec divers ustensiles sont visibles. Ma mère se tourne vers moi, elle a l'air fier.

— C'est ici Lola. Ici, que le remède sera créé, commence-t-elle, c'est aussi ici que les médicaments qui t'ont donné tes aptitudes ont été créés. Dans cette pièce, nous gardons tout ce qui est important. Les tests, les rapports d'expérience, tout.

Je la regarde incrédule. Pourquoi me montre-t-elle cette pièce ? Comme pour répondre à mon interrogation, elle continue.

— À partir de demain, cette pièce sera ton nouveau chez toi. Les premiers essais ayant été concluants, je pense que nous pouvons passer à l'étape supérieure.

J'écarquille les yeux. L'étape supérieure ? Qu'est-ce qu'elle compte me faire ? Ce que je comprends, c'est le fait qu'à partir de demain, je serai enfermée ici et je n'aurai plus aucune issue pour m'échapper. Ma mère s'approche de moi et me serre dans ses bras. Elle approche sa bouche de mon oreille et me susurre.

— Nous y sommes presque Lola, c'est la dernière ligne droite. Je suis si fière de toi.

Tout mon corps se tend et je retiens même mon souffle sans m'en rendre compte. Je dois absolument m'échapper, et vite ! Il faut que je retrouve Kathy, que je lui dise que nous devons mettre en application notre plan dès ce soir, avant qu'il ne soit trop tard.

Nous nous remettons en marche et retournons dans les étages où se trouvent les cellules. Ma mère dépose un léger baiser sur ma joue et se tourne vers Grégory.

— Je serai dans mon bureau si tu me cherches, elle regarde sa montre, c'est déjà l'heure du dîner il me semble. Conduis Lola au réfectoire.

Nous avançons en silence dans le couloir. Cette fois encore, Grégory ne me retient pas par le bras. Aux détours d'un couloir, nous commençons à l'entendre. Un brouhaha s'élève devant nous, en direction du réfectoire. Nous accélérons le pas. Mon gardien à les sourcils froncés et la main à sa ceinture, tenant fermement la crosse de son arme.

Nous déboulons dans le réfectoire et une scène de chaos apparaît devant nos yeux. Des corps allongés par terre, patients comme membres du personnel. Et là, au milieu de la pièce, se tient Kathy avec un petit nombre d'autres détenus, l'arme au poing. Ses yeux sont plein de haine et à ses pieds, gît le corps sans vie de l'un des gardes, celui qui a tué Ludo. Kathy a eu sa vengeance.

Très vite, Grégory dégaine son arme, mais la jeune fille est plus rapide et lui tire dans le genou. La balle ne fait que l'effleurer, mais cela suffit pour le déstabiliser.

— Lola ! Prends son arme !

Son ton est dur et impitoyable. Alors que Grégory se penche en avant, une main sur son genou ensanglanté, je me précipite vers lui et lui arrache son arme des mains. Je me redresse et tiens mon ancien geôlier en joue. Je recule doucement, toujours mon arme pointée sur l'homme pour rejoindre le petit groupe de rebelles.

Une fois au centre de la pièce, je peux observer mes environs. À y regarder de plus près, les corps étendus au sol et sur tables n'ont pas l'air d'être blessés ou mort. Non, ils sont simplement endormis. Je peux même voir la poitrine des personnes les plus proches de moi se relever paisiblement. Tout ne se passe pas comme prévu, mais c'est ma seule chance de fuir et j'espère pouvoir emmener Kathy avec moi. Je voudrais tous les emmener, mais c'est impossible. Je jette un coup d'œil à ma nouvelle alliée.

— Tu sais où est le tunnel ?

La jeune femme acquiesce.

— Oui, suis-moi, elle fait un signe de tête aux autres. Restez ici, essayer de retenir ceux qui viennent dans notre direction.

Je suis Kathy dans le couloir. Je suis impressionnée. Comment une femme si jeune peut-elle dégager un tel charisme ? Les autres détenus semblent lui obéir au doigt et à l'œil. Nous marchons vite et heureusement, jusqu'ici n'avons croisés personne. Enfin, je la vois, une double porte en métal. Kathy et moi rangeons nos armes le temps d'ouvrir les deux lourdes portes.

Un bruit assourdissant, un cri de douleur, un liquide qui m'éclabousse le visage. Je lève ma main à mes joues et quand je les regarde, elles sont pleines de sang. Le cœur battant, je relève les yeux. Deux hommes armés marchent dans notre direction. Kathy se place devant moi et me pousse derrière les portes qui mènent au tunnel.

— Dépêche-toi Lola, fuis !

Je la regarde, estomaquée. Une tache rouge grandissante apparaît au niveau de son épaule. Je tends la main et l'attrape par le bras.

— Non ! Viens avec moi, je lui crie.

La jeune femme secoue la tête au même moment où une seconde détonation retentit, atteignant Kathy dans sa cuisse.

— Vas-y ! Il ne faut pas qu'ils t'attrapent, sa lèvre tremble, mais son regard est déterminé, tu as du monde pour t'aider, pour revenir ici et sauver les autres. Moi, personne ne m'attend dehors.

Usant de ses dernières forces, Kathy me pousse dans le tunnel et referme la porte derrière moi. J'essaye de la rouvrir, mais elle en a bloqué l'accès. Je commence à entendre des coups de feu fuser. Je ne sais pas qui est atteint. Désespérée, je me retourne et commence à courir, tenant fermement mon arme contre mon corps. Je ne vois pas à un mètre devant moi. Je tends mes bras pour essayer de me repérer dans le noir, courant à l'aveuglette pendant ce qui me semble être de longues minutes.

Soudain, je percute un mur. Je le suis des mains essayant de trouver une issue. Ce n'est pas possible ! Je ne peux pas être arrivée jusqu'ici pour rien ! Je continue de tâtonner dans le noir à la recherche d'une porte, d'une fenêtre, de n'importe quoi. Enfin, je tombe sur le métal froid d'une échelle. J'agrippe les barreaux et commence à grimper. Arrivée en haut, je me heurte à une trappe. J'actionne le mécanisme - une simple manivelle - et la pousse de toutes mes forces. J'atterris au milieu de nulle part, sous une lumière aveuglante qui me force à fermer les yeux.

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