Chapitre 28 - Confrontation

!!! Violence - sang - mort

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La boule au ventre, je rejoins Ella dans son bureau. Max et Simon sont déjà arrivés. Je m'assois autour de la table, juste à côté d'Ella, en attendant les autres. Je me demande comment cela va se passer, j'ai l'impression de me jeter dans la gueule du loup. Ai-je eu raison de capituler si facilement aux exigences de ma mère ?

Je sursaute. J'ai reçu un nouveau message. Nerveusement, je sors mon téléphone de ma poche, que peut bien encore me vouloir ma mère ?

Inconnu : Je t'appellerai ce soir pour te communiquer les instructions.

Les instructions ? Quelles instructions ? Il est clair qu'elle a un plan, une longueur d'avance sur nous. Ma sensation de malaise s'accentue. Je crains que toute cette histoire ne se finisse mal. Je donne un coup de coude à Ella et lui tends mon téléphone. Elle fronce des sourcils et secoue la tête.

— Non, il est hors de questions que nous suivions ses règles. Tu la rencontreras certes, mais sous certaines conditions, sous nos conditions. Attendons de discuter avec les autres avant de lui répondre.

J'acquiesce, cela me rassure un peu. La porte s'ouvre et Lucas et Claire entrent dans la pièce tout sourire. J'entends même ma sœur glousser. Je la regarde et la vois rougir. Elle me fait un petit signe de la main, gênée et va s'asseoir en face de moi à côté de Lucas. Carole arrive une cafetière à la main, suivie de près par Chris portant un plateau rempli de tasses.

— Je pensais qu'un bon café pour commencer la journée nous ferait du bien, nous dit Carole.

Nous la remercions tous pour son attention. Après avoir servi tout le monde, Chris vient s'asseoir à côté de moi et me tend une tasse. Ella se redresse dans son siège, la réunion va commencer. Mon pouls commence à s'accélérer et je sens le stress me tordre le vendre. D'instinct, j'attrape la main de Chris et la serre dans la mienne.

— Maintenant que nous savons qui est aux commandes d'Hygeïa, commence la blonde, il est temps d'agir. Elsa Lupin envoie depuis deux jours des messages à Lola, lui demandant de la rejoindre. Nous savons tous, à quel point Lola est un élément crucial, tant pour Hygeia que pour nous. Nous devons donc tourner cela à notre avantage. Lola a pris une décision, elle va rejoindre sa mère pour lui soutirer des informations.

— Quoi ?! Chris retire sa main de la mienne et me regarde avec des yeux fous. Comme si je l'avais trahi.

— Chris ! Avant de t'énerver, nous devons en discuter. Le plan de Lola est risqué, mais c'est la seule option que nous ayons en ce moment. Nous allons équiper Lola avec des micros, comme cela, nous pourrons nous servir des enregistrements pour dénoncer les actions de l'entreprise, dit Ella

— C'est bien trop dangereux !

Cette fois-ci, c'est Carole qui s'oppose à l'idée. Très vite suivie par les protestations de Lucas et de Chris.

— Attendez s'il vous plaît ! reprend fermement Ella, nous n'allons bien évidemment pas laisser Lola se mettre en danger inutilement. Notre objectif a toujours été de faire tomber Hygeia, mais surtout de protéger les membres de notre groupe. Max, tu accompagneras Lola, il faudra, bien sûr, que tu restes en retrait pour que personne ne te remarque. Tu n'agiras qu'en cas d'extrême nécessité. Je fais confiance à ton expérience et tes talents d'observation pour savoir quand intervenir.

L'homme approuve d'un signe de tête, stoïque.

— Elsa veut appeler Lola ce soir pour lui communiquer les instructions de cette rencontre. Ce n'est pas une bonne idée. Il faut poser nos conditions, sinon, elle ne se rendra pas. Lola, tu rencontreras ta mère dans un lieu public, c'est bien plus sûr. Un café peut-être ? Max pourrait se cacher dans un bâtiment à proximité.

— Il y a « Le café du quai » pas très loin d'ici. Il est surtout fréquenté par des travailleurs. Le bâtiment d'à côté a été fermé il y a peu de temps, ce serait une bonne planque pour Max, suggère Simon.

— Oui, c'est une bonne idée. Demain matin à 09h00. La plupart des gens seront au travail, mais le café ne devrait pas être vide pour autant.

Ella scanne chacun de nos visages avant de reprendre la parole.

— Je vous propose de voter. Lola, étant donné que tu es la première concernée, je pense qu'il est préférable que tu t'abstiennes. Nous allons faire un tour de table. Chris ?

— Contre ! C'est une énorme connerie ! À part mettre la vie de Lola et Max en danger...

Je pose une main qui se veut rassurante sur l'épaule de Chris, mais celui-ci se dégage de mon étreinte et me fusille du regard. Ella nous ignore et reprend la parole.

— Je suis pour. Simon ?

— Je suis pour aussi.

— Moi aussi ! dit Max.

Nous nous tournons vers Carole. Celle-ci secoue la tête.

— Je me range du côté de Christopher. Il a raison, c'est bien trop dangereux.

— Je suis d'accord avec eux aussi, renchérit Lucas.

Trois contre trois. Tout repose sur Claire. Je fixe ma sœur, appréhendant sa réaction. Je suis sa dernière famille, va-t-elle vouloir me mettre en danger ? Quoiqu'elle choisisse, je ne lui en voudrai pas. Claire reste silencieuse quelques instants, perdue dans ses pensées. J'imagine qu'elle doit faire face à un choix cornélien. Au bout d'un moment, elle lève les yeux vers moi. Son regard est déterminé, dur, froid. J'arrive cependant à y percevoir l'inquiétude qu'elle essaye de cacher tant bien que mal. Claire peut toujours tromper nos amis, je la connais par cœur et arriverai toujours à déceler ses sentiments. Cependant, ce flot d'émotions contradictoires ne l'empêche pas de parler d'une voix ferme.

— C'est dangereux, c'est vrai. Mais Lola est la seule qui puisse faire quelque chose. C'est elle le "patient clé", c'est après elle que Maman en a. Et elle connaît notre mère, ses atouts, ses faiblesses. Ma sœur est forte et intelligente, j'imagine que ce plan découle d'une réflexion intense. C'est pour cette raison que je vais voter pour.

Chris se lève d'un bond en jurant. Sa chaise se renverse au sol, mais il n'y prête même pas attention. Après un dernier regard assassin à mon égard, il quitte la pièce en claquant la porte derrière lui. Mon cœur bat la chamade. Je sais que nous avons pris la bonne décision, la seule qui nous permettrait d'atteindre Hygeia, mais la réaction de Chris me fait mal. J'ai blessé mon ami et je ne me le pardonnerai pas. La voix d'Ella me ramène à la réalité.

— Bien, il semblerait que nous ayons choisi. Lola, tu peux contacter ta mère pour lui donner nos conditions.

J'aurais aimé retrouver Chris, mais ce n'est pas le moment. À contrecœur, je sors mon téléphone et écris un message que je montre à tous avant de l'envoyer.

Lola : Je n'attends aucune instruction de ta part. Je te rejoindrai, mais selon mes conditions.

À peine ai-je cliqué sur « envoyer » que mon téléphone sonne. Le numéro est inconnu, c'est ma mère. Je suis étonnée de sa réactivité, comme si elle attendait avec impatience chacun de mes messages. D'une main tremblante, je décroche et mets le haut-parleur. Une voix d'homme, grave et impersonnelle s'élève du combiné.

— Dois-je te rappeler que si tu ne te rends pas, ta sœur en paiera le prix ?

— J'en ai conscience. Mais ne me prenez pas pour une enfant naïve. Je ne vous accorde aucune confiance. J'accepte de me rendre à ma mère, mais je dois discuter des termes de cette reddition avec elle d'abord. Demain, nous nous rencontrerons au café du quai, à 09h00. C'est à prendre ou à laisser.

Un silence de mort s'installe dans la pièce, chacun retient son souffle. Claire et moi nous fixons, je peux lire sa colère et je sais très bien que j'en serai la cible dans quelques minutes, mais cela m'est égal, je suis prête à tout pour la protéger.

— Très bien. La voix sèche de mon interlocuteur se fait à nouveau entendre, puis il raccroche sans me laisser le temps de répondre.

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Après la réunion, je rejoins Claire dans la salle commune. Elle vient vers moi le visage déformé par la colère.

— Maman a menacé de me faire du mal ! C'est pour cela que tu te rends ! Ne le nie pas ! Je te connais, je sais très bien ce que tu as derrière la tête.

— Je ne le nie pas, je réponds calmement, tu aurais voté différemment si tu l'avais su plus tôt ?

— Non, ses yeux se remplissent de larmes, s'il t'arrive quelque chose...

— Les autres seront là pour veiller sur toi. Mais ne t'inquiète pas, Maman n'a pas dans l'idée de me tuer. Si ça devait mal tourner, vous trouveriez une solution, j'en suis sûre.

Claire me prend dans ses bras et me serre fort, enfouissant son visage dans mon épaule. Au bout d'un moment, elle s'écarte et me murmure.

— Tu devrais aller voir Chris. Il avait l'air très affecté par ce choix.

Je frappe doucement à la porte de la chambre de Chris, mais aucune réponse ne se fait entendre. Je décide tout de même de rentrer dans la pièce et trouve Chris, assis au bord du lit, la tête dans les mains. Il ne lève même pas les yeux vers moi quand je viens m'asseoir à côté de lui. Doucement, je le prends dans mes bras et il se laisse faire. J'enfouis ma tête dans ses cheveux et respire calmement son odeur. D'une voix étouffée, il prend la parole.

— Je t'avais parlé de ma plus grande peur. Je t'avais dit que je ne pouvais pas laisser Hygeia prendre une autre personne que j'aime et pourtant... tu t'obstines à te mettre en danger.

— Je sais Chris, mais c'est la seule solution. Et tu le sais aussi.

Il se redresse, plantant son regard dans le mien. Ses yeux sont rouges, son regard plus inquiet que jamais. Il pose son front contre le mien et encercle mon visage avec ses mains.

— Je le sais.

Sa réponse est un simple murmure, à peine audible.

Chris m'enlace, il s'accroche à moi désespérément, comme s'il avait peur que ce soit notre dernière étreinte. Je l'attire vers moi, encore plus près et l'embrasse. Mon cœur bat à cent à l'heure, je n'ai jamais ressenti autant d'attirance pour quelqu'un. Je grimpe sur ses genoux, tandis que ses mains passent sous mon pull, se refermant sur le bas de mon dos. Je presse mon corps contre le sien et nous tombons à la renverse sur le lit nous laissant emporter par notre passion.

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Max est parti tôt le lendemain matin, nous devons arriver à notre destination séparément. Il est 8h30 quand je pars de la base. Lucas a caché les micros sous mes vêtements, je peux sentir le frottement des équipements électroniques contre ma peau.

L'air frais du matin rempli mes poumons. Je marche le long du fleuve, croisant quelques dockers sur ma route. Je passe inaperçue entre eux, ils sont trop absorbés par leur travail et ne me prêtent aucune attention. Le café est à quelques centaines de mètres, je suis presque arrivée. Au fur et à mesure que je m'approche, je sens l'angoisse monter en moi. Ai-je pris la bonne décision ? Je n'avais pas d'autre option de toute façon, il ne sert à rien que je me torture avec ces pensées. J'essaye de me rassurer en me disant que Max est expérimenté, si les choses se corsent, il sera là pour me couvrir. Dans quelques heures, tout sera fini.

Me voilà devant le café, je me concentre, je ne dois montrer aucune faiblesse face à ma mère, je dois porter un masque, comme elle le fait. J'entre dans la pièce, déterminée. Ma mère est déjà à l'intérieur, il y a moins de 10 clients dans les lieux. Elsa est assise à une table au centre de la pièce, face à la porte. Je m'approche et prends place en face d'elle. Je ne suis pas à l'aise, elle a vu sur tout le café, elle peut voir les allées et venues des passants au-dehors. Face à moi, je ne peux voir qu'elle ou le serveur qui s'affaire derrière le comptoir. Ce dernier vient vers nous d'un pas rapide et prend notre commande. Une fois nos deux cafés devant nous, ma mère prend la parole.

— Tu voulais me parler Lola, je t'écoute.

Son ton est calme, serein, elle ne doute pas d'elle.

— Que veux-tu de moi ? Que va-t-il m'arriver une fois que je t'aurai rejoint ?

— Tu sauveras des vies. Je ne te promets pas une vie sans souffrance, mais ta contribution sera bénéfique à l'ensemble de la population.

Aucune émotion n'émane d'elle. Elle semble avoir perdu toute son humanité.

— Tu comptes m'utiliser, comme un cobaye ? ma voix commence à trembler, j'ai peur de me trahir.

— Je compte faire de toi un remède.

Du coin de l'œil, je vois les personnes assises aux tables voisines se lever. D'autres clients au fond du restaurant commencent à prendre une posture hostile. Merde ! C'est un piège ! Ces gens n'étaient pas des clients. Je tente de garder mon calme, Max veille sur moi.

— Et si je refuse ?

— Alors, nous devrons utiliser la manière forte.

À ces mots, la porte s'ouvre derrière moi. Des coups de feu se font entendre. Je me retourne et vois Max, arme à la main, tirer sur les faux clients du café. Instinctivement, je me jette à terre les bras au-dessus de la tête pour me protéger. Recroquevillée sur le sol, je lève les yeux, un corps tombe devant moi. Sa tête est tournée vers moi, son regard et vide. Je remarque alors une trace rouge en haut de son front, un impact de balle, l'homme est mort.

Mon regard est attiré par le serveur derrière le comptoir. D'une main, il sort une arme et vise quelqu'un derrière moi. Je me retourne, Max ! Je me lève d'un bon et cours vers lui. Alors que je m'approche, son corps se tord. Une balle l'a atteint dans le torse et le sang commence à couler sur ton t-shirt. Il tombe à genoux, tendant le bras pour tirer une dernière fois sur ses assaillants. Je crie alors que je vois le corps de Max s'écraser au sol, inerte.

La voix de ma mère s'élève, mais je ne comprends pas ce qu'elle dit. Je lui fais face bien décidée à l'affronter. Elle a un sourire satisfait sur ses lèvres, ses derniers mots résonnent à mes oreilles.

— Tu ne fais pas le poids, Lola.

J'amorce un mouvement vers elle, quand un bruit sourd se fait entendre. Je ressens une douleur vive dans mon cou. Le monde s'efface, mes jambes perdent leur force, ma tête heurte le sol, l'obscurité m'engloutit.

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