✨ Chapitre 3 ✨
Je retiens ma respiration comme lors de mon rêve. Je le regarde, me disant que ce ne peut être lui. Pourtant cela ne fait aucun doute, c'est bien lui avec sa bouche rose parfaite en alignement avec ses joues creuses. Et puis, il y a ses yeux. Les plus beaux je pense. Bleu océan, tellement profond qu'on croirait voir des vagues à l'intérieur. De ma place, je ne les vois pas, mais tous les souvenirs de mon rêve refont surface. Comme dans ces derniers il a les cheveux ébouriffés, ce qui le rend encore plus magnifique ! Il n'est habillé que de noir : veste en cuir noire, T-shirt noir, baskets noires et, bien sûr, pantalon noir. Tout pourrait le rendre ténébreux et, pourtant, à mes yeux il ne l'est pas.
Certes, il a la carrure du garçon macho, habillé en noir, qui fait peur à tout les autres et qui fait tomber toutes les filles. Mais ce n'est pas l'effet qu'il me donne. Il me déstabilise, mais je vois autre chose dans sa façon de faire et de se tenir, quelque chose de très mystérieux...
Quand nos regards se croisent, je ne peux faire autrement que de plonger mes yeux dans les siens. Il me fait son plus beau sourire mais mon visage reste impassible. Je ne sais pas ce qui m'arrive. Une boule s'est formée dans mon ventre.
Après quelques instants, j'arrive à détacher mes yeux des siens pour tourner la tête vers ma classe. Toutes les filles de ma classe, y compris Claire, sont en admiration devant ce garçon. Les garçons, eux, le regardent avec envie.
En temps normal, je me serais moquée d'eux. Mais là, je ne trouve la situation vraiment pas drôle du tout. Comment un garçon qui a failli m'embrasser lors d'un rêve peut-il arriver le lendemain dans mon collège et qui plus est dans ma classe ? Je trouve cette situation totalement délirante !
- Sur ce, j'espère que vous allez bien l'intégrer et qu'il se fera beaucoup d'amis. Bonne journée M. Colin, termine le principal.
- Merci, à vous aussi ! répond notre professeur.
Le principal quitte la pièce. Nous sommes toujours debout. J'ai encore envie de me frotter le bras mais beaucoup moins que tout à l'heure. C'est supportable. Notre professeur demande au nouveau venu :
- Comment t'appelles-tu jeune homme ?
Il a quelques secondes d'hésitation avant de répondre :
- Moi c'est Raphaël.
« Raphaël ? Quel prénom de prétentieux ! », je pense en levant les yeux au ciel.
- Bonjour, Raphaël donc. Nous allons te trouver une petite place pour que tu puisses suivre le cours avec nous.
M. Colin fait le tour de sa classe avec ses petits yeux noirs avant de les poser sur la place vide qui est à côté de moi. Le seul mot qui me vient à l'esprit à ce moment précis c'est « NON ! ». Il ne manquerait plus qu'il vienne s'assoir à côté de moi. Je ne peux absolument pas. C'est juste impossible. Mon cœur bat à cent à l'heure et je commence à transpirer.
- Il y a une place à côté de Mademoiselle Selena, si tu veux bien ? proposa M.Colin.
- Bien sûr, merci beaucoup, répondit Raphaël.
Je suis outrée, M. Colin ne m'a même pas demandé mon avis avant de lui dire de s'installer à côté de moi. Toutes les filles le regardent s'avancer à ma table et Claire croise mon regard et me fait un clin d'œil pas très discret.
- Vous pouvez vous rassoir, je termine l'appel, dit
M. Colin en tapant des mains pour rétablir le silence. Le silence se fait et il continue :
- Selena Wild ?
- Présente, je lui réponds.
Raphaël s'installe à côté de moi, pose ses affaires et ouvre son cahier tel un élève modèle.
- Selena ?
Je me tourne légèrement pour lui faire face.
- Quoi ?
- Je trouve ton prénom très joli, me dit-il avec un petit clin d'œil. Et puis, il te va très bien.
- Merci, je lui réponds simplement en posant ma tête sur ma main.
Notre professeur termine l'appel et il commence à nous rappeler les cours que nous avons étudiés la semaine précédente. Je l'écoute d'une oreille distraite. Ce qui me préoccupe en ce moment même, c'est l'attitude de Raphaël. Je le sens qui m'épie et j'ai l'impression que mon âme est mise à nu. Il me déconcentre durant tout le cours. Mais je ne peux m'empêcher de penser à lui, à nous deux, pendant mon rêve. Mais je ne sais vraiment pas comment aborder le sujet. Surtout que j'ai peur que ce ne soit pas lui et qu'il me prenne pour une folle. Je me torture l'esprit pour imaginer ce qu'il pense en ce moment-même.
La sonnerie retentit, je prends mes affaires et quitte vite fait la salle de cours. Je suis dans le couloir et Claire accourt vers moi. J'accélère le pas mais elle se place devant moi, pour m'obliger à m'arrêter. Je la contourne et elle me tire par l'épaule pour me forcer à m'arrêter.
- Qu'est-ce qu'il y a ? je lui demande.
- Déjà d'une, pourquoi tu es énervée contre moi ? Qu'est-ce que je t'ai fait ?
- Je ne suis pas énervée, c'est juste que le comportement de Julien ce matin m'a vraiment blessée...
- Oh, je comprends maintenant. Mais je te connais trop pour savoir qu'il n'y a pas que ça qui te trotte à l'esprit. J'ai raison ?
Elle me donne un petit coup de coude amical. Je passe ma main dans mes cheveux pour remettre quelques mèches en place. Ma main tremble légèrement mais Claire ne le voit pas. Je mets un long moment avant de répondre :
- Tu sais, Raphaël ?
- Oui... D'ailleurs t'es une sacrée veinarde toi ! Je t'avais pas dit qu'il était CA-NON ?
- Ouais, enfin... Bref, c'est pas ça le souci. Le truc, c'est que je suis sûr de l'avoir déjà vu quelque part.
Je suis obligée de dissimuler la vérité, sinon, je la connais, elle ne me lâchera jamais.
- Sérieux ? demande-elle, l'air étonné.
- Et bien oui, mais bon là, j'ai autre chose à faire, si tu veux bien me laisser le passage.
Je m'écarte avant qu'elle puisse me retenir encore plus longtemps.
Je sors dans la cour et je cherche quelqu'un en particulier. Raphaël ? Non, lui j'essaie de l'éviter à ton prix. Je ne veux pas retomber dans le piège de ses beaux yeux bleus. Et je ne veux pas non plus avoir affaire à la conversation de mon rêve. Je suis complètement troublée. Il me perturbe, c'est pas possible d'être comme ça !
Je fais un tour sur moi-même, je monte sur un banc pour essayer de voir plus loin et là, je le trouve enfin. Julien est assis, derrière un arbre, les mains sur la tête et celle-ci dans ses genoux. Il faut absolument que j'aie une conversation sérieuse avec lui. S'il me renvoie, dans ce cas-là, je ne lui adresserai plus jamais la parole. Il m'a déjà assez blessée comme ça.
Je cours pour aller à sa rencontre et je m'assoie à côté de lui. Il lève la tête, sûrement pour savoir qui cela peut être. Je croise son regard et je vois que ses yeux sont redevenus normaux. Plus de traces des contours oranges et de ses yeux pâles.
- Tu n'as pas entendu ce que je t'ai dit ce matin ? dit-il.
- Si, je l'ai très bien entendu et c'est d'ailleurs pour cela que je viens te voir. Pourquoi m'as-tu dit ça ?
Je rajoute :
- Le jour de mon anniversaire en plus.
Son silence me fait peur, mais je ne me décourage pas pour autant. Je me déplace et me mets en face de lui. Je prends ses mains qui sont blanches et glacées. Un frisson parcourt mon dos. Il lève la tête et j'en profite pour lui demander :
- Qu'est-ce qui t'est arrivé ?
Il m'observe bizarrement. Ces yeux sont suppliants, j'arrive à comprendre que, lui-même, il n'a pas voulu me dire ce qu'il m'a dit ce matin.
- Je ne peux pas te le dire mais en aucun cas tu ne dois faire confiance à celui que tu ne connais pas.
- Mais de quoi tu parles Julien ? Tu es sûr que tu vas bien ?
- Je ne vais pas bien du tout, c'est sûr mais je ne peux vraiment pas te dire pourquoi. Quant à la personne que tu ne connais pas, il s'agit d'un garçon...
- Je-je ne comprends pas... Qu'est-ce qui t'est arrivé, bon sang ? J'appelle ta mère !
J'attrape mon portable mais Julien me l'arrache des mains à une vitesse fulgurante.
- Mais qu'est-ce que tu fais ? Rends-moi ça immédiatement !
Je commence à perdre patience et à m'inquiéter aussi.
- Ne fais pas ça ! C'est tout ce que j'ai à te dire !
Sa voix est devenue plus rocailleuse. Comme celle de ce matin. Je reprends mon portable en y mettant toute ma force et appelle la mère de Julien pour la prévenir de son état. Je m'éloigne de l'arbre mais tourne le dos à la cour car je ne veux pas être prise au téléphone par les surveillants ou le principal.
Bizarrement, Julien me voit faire mais il ne dit rien. Je commence sérieusement à m'inquiéter. Des larmes commencent à couler sur mes joues. C'est trop d'émotions et de sentiments d'un seul coup. Je tremble en appuyant sur la touche "appel". Dès la seconde sonnerie, quelqu'un décroche. Je reconnais immédiatement la voix de la mère de Julien.
- Allô ? demande-t-elle.
- Bonjour Mme Nicen, c'est Selena.
- Selena ? Je n'en connais aucune. Qui êtes-vous ?
Je suis complètement troublée.
- Q-quoi ? Comment ça, vous ne me connaissez pas ? Mais je suis la meilleure amie de votre fils, Julien !
- Je n'ai aucun enfant, mademoiselle. Vous avez dû vous tromper de numéro. Au revoir.
Elle raccroche aussitôt sa phrase dite. Je ne comprends plus rien à la situation. Je vérifie quatre fois le numéro mais je ne me suis pas trompée. C'est bien le numéro de Mme Nicen.
Je me retourne vers Julien. Il ne bouge pas. Je m'avance à grands pas pour le rejoindre rapidement. Je me rassois en face de lui. J'ai envie de lui poser un millier de questions mais rien ne sort de ma bouche.
Je sais qu'il s'est passé quelque chose d'anormal ici et Julien en a été la victime. Je relève la tête de ce dernier. Ses yeux recommencent à s'éclaircir, le contour orange revient. Je regarde Julien et il a l'air de se sentir très mal. J'ai l'impression que son visage n'est qu'une peinture et qu'il présente une face de lui-même qu'il n'a pas envie de montrer de son propre gré.
Ses yeux redeviennent normaux et puis le côté orangé revient. J'ai l'impression qu'il est possédé, mais cela est impossible. Ça n'existe que dans les livres et les films !
- Garçon...classe...piège...tuer...
Il tousse violemment, mais tout le monde autour de nous n'a l'air de se rendre compte de rien. Comme si nous étions invisibles.
- Julien, Julien, est-ce que ça va ? je lui demande en le secouant dans tous les sens et en lui tapant le dos.
Il ne répond pas, il a l'air de se concentrer sur ce qu'il va me dire :
- ...regard...charme...beau...
Et puis plus rien. Il est toujours assis contre l'arbre, l'air absent. Je ne sais pas à quoi il pense, ni ce qu'il fait.
Il regarde devant lui. Je tourne la tête dans la même direction que lui, mais je ne distingue rien du tout à part le grillage qui a toujours été là. Il secoue sa tête violemment et s'arrête d'un coup. On dirait un fou. C'est le mot. Je m'éloigne un peu de lui, par peur. Oui, j'ai peur de lui.
Et puis il remet ses bras sur sa tête et celle-ci entre ses genoux. Et moi, je reste là, à le regarder, comme s'il n'était pas réel, comme si le monde venait de s'arrêter...
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