Une histoire de récit
Le roi jubilait. Alors elle se souvenait de tout. Mais encore fallait-il savoir tout à quel point. Se souvenait-elle de ses mots destinés à faire en sorte qu'elle tue son propre père de sang froid ? Se souvenait-elle des yeux de sa mère terrifiée par la violence de sa fille ? Se souvenait-elle de cette rage qui coulait en elle et de celle provoquée chez sa mère ? Il n'en pouvait plus d'attendre de savoir. Cette rage, il veut la revoir brillée dans les yeux de M. Il veut voir ses doux yeux d'orage lui prouver qu'il avait vu juste.
- Raconte moi, ordonna t il. Et puis surtout enlève ces lentilles ridicules !
M n'avait pas le choix, elle enfila sa bague, et retira ses lentilles de couleur. Elle savait que si il la frappait encore elle ne pourrait pas retourner au camp. Alors elle plongea dans ses souvenirs, des souvenirs de sang. Elle voulait encore un peu de répit avant de retourner au tortures physiques et émotionnelles de ses tuteurs légaux.
M avait dix ans, son père, soucieux de sa sécurité, l'avait entrainée au combat. Sa mère n'était pas d'accord, c'était trop dangereux. Du moins c'est la raison qu'elle invoquait devant sa fille pour la ramener à l'intérieur.
M a toujours pensé qu'il y avait une autre raison à cet entrainement, de la torture au maniement des armes, en passant par le combat au corps à corps. Elle devait savoir tuer, comme si elle allait à la guerre ou à l'armée, mais M est trop jeune pour ça et elle le sait. La petite fille de l'époque, encore emplie d'innocence, avait surpris une partie de discutions de ses parents, ils semblaient inquiets. Mais là encore rien ne l'éclairait sur les motivations de son père à la préparer au combat.
- Elle est de plus en plus violente, elle ne contrôle pas, murmura sa mère, persuadée qu'elle dormait bien au chaud sous sa couette.
- Au contraire, et puis c'est nécessaire, bientôt le roi reviendra, il la veut pour ses yeux. Il a parfaitement conscience de ce que ça implique, avait dit le père d'une voix blanche.
- Ce regard violet qui me regarde avec innocence, je n'arrive pas à croire qu'il recèle tant de violence si on ne le contrôle pas.
- Elle apprendra avec le temps, mais pour l'instant elle doit rester ici, en sécurité.
La petite Mimosa de l'époque ne comprenait pas ce qu'ils disaient. Cachée derrière le canapé elle était trop jeune pour comprendre tous les enjeux politiques qu'elle représentait. Pourtant elle ne tarderait plus à le savoir.
Une semaine plus tard, le roi arriva. Il avait commencé à menacer son papa, il la voulait elle. M ne comprenait pas, mais elle attrapa un couteau pour le défendre, c'est sa famille, son héro, son papa et sa maman. Elle le tenait d'une main tremblante, elle avait si peur.
- Allez-vous en, déclara-t-elle de sa petite voix, aussi tremblante que ses mains.
- Tu veux que je partes mon ange ? répondit innocemment le roi. Tu ne veux pas savoir ce que ton petit papa chéri a fait ?
- Mon papa c'est le meilleur des hommes, répondit la jeune fille de l'époque avec aplomb.
- Oh non ma puce, ton papa il a tué des gens innocents pour le plaisir de tuer et que tous craignent ses yeux d'orage. Les mêmes yeux d'orage que les tiens.
La petite fille devint folle de rage, et ses yeux d'orage semblaient plus violets encore. Elle saisit son couteau d'une main plus sûre, se retourna et l'enfonça de façon à atteindre le coeur de son père. Elle blessait son coeur comme il avait blessé le sien.
Dans ses yeux se lisaient la haine. L'homme dans lequel elle avait placé tous ses espoirs en le monde l'avait déçue au plus haut point. Son papa était couvert d'un sang innocent, pas d'un sang souillé comme il l'avait prétendu. Il n'était pas venu s'installer ici pour sa petite princesse mais pour lui, pour se cacher de ceux qu'il avait blessés. Son héro se transforma en monstre assoiffé de sang.
Pourtant dès qu'elle eut enfoncé ce couteau, la jeune M vit le sourire de son père. Il lui glissa dans la main une lettre qu'elle garda précieusement. Le cri de sa mère ne fit rien, elle était complètement choquée. Elle glissa la lettre en boule dans son dessous.
Elle releva les yeux et pris la main du roi, ce dernier avait un beau sourire aux lèvres. Rien ne semblait pouvoir le défaire de sa bonne humeur.
La petite fille vit dans les yeux de sa mère une colère et une haine. Elle savait qu'elles lui étaient destinées.
M pourtant ne se laissa pas démonter. Ses petites mains tremblaient, couvertes du sang de son papa. Le roi la conduisit dans une chambre et dès qu'elle fut seule M lut le mot de son père.
《 Mimosa, ma douce fille.
Le roi va venir ce soir, il va me faire passer pour un monstre, mais je ne ferais rien pour arrêter ta colère, tes yeux sont une malédiction, mais en me tuant tu n'auras plus soif de sang.
Ne regrette rien ma petite princesse. Tu es sauvée et c'est tout ce qui importe. Ne dit pas à ta mère que je me suis sacrifiée, c'est pour toi comme pour elle. Ne te laisse pas influencer par le roi. Cet homme est mauvais jusqu'au plus profond de son âme. Ne le laisse pas faire. Soit forte, et surtout dès que tu verras tes yeux violets rappelle toi qu'ils ne seront plus jamais un fardeau. Ils seront ta force.
Je t'aime ma chérie. Chéri mon souvenir et fait en sorte que ta mère te haïsse. J'ignore quelles épreuves t'attendent, mais je sais que tu les surmonteras avec brio.
Je ne t'abandonnerai jamais. Je serais toujours avec toi, dans ton coeur.
Ton papa qui t'aime》
M ne dit rien de cette lettre, mais son souvenir était gravé dans sa mémoire. Chaque mot était gravé dans son coeur et dans son âme. Il avait raison, sa soif de sang s'est éteinte avec lui. Mais M sait qu'il ne se doutait pas des épreuves qui lui étaient destinées. Elle ne lui reproche rien. Elle a fait le bon choix, car malgré la culpabilité elle sait qu'elle a obéit à son père et qu'elle a protégée sa mère.
- Tu te souviens de vraiment tout, sourit le roi. Alors maintenant réveille cette soif de sang. Bientôt tu pourras l'assouvir.
Il souriait carnassier. Pourtant son plan avait un défaut, et pas des moindre. Cette envie de mort n'existait pas.
M sortit de la voiture et se réfugie dans sa chambre. Bien caché dans un double fond de la boîte à bijoux, seul vestige de sa vie avec son père, elle sortit une lettre dont elle connaissait chaque mot par coeur.
- Je ne te décevrai pas papa.
Elle embrassa la lettre d'une larme solitaire et la remis à sa place, en sécurité.
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