Chapitre 16 : S'éloigner pour mieux se retrouver

Après avoir consulté brièvement Jimin, l'infirmière a appelé les urgences. Un camion l'a alors emporté sans que je n'aies pu l'accompagner étant donné que je ne fais ni parti de sa famille, ni du corps enseignant. Je suis alors retourné au dortoir pour m'écrouler dans ma chambre, trop troublé pour continuer ma journée de cours. J'ai passé le reste du temps là, en ne faisant rien d'autre que dormir lorsque le sommeil me prenait et rêvasser quand mes yeux se rouvraient. Je n'avais ni l'envie ni la motivation d'enquêter sur ce soi-disant lutin et ne suis sorti de mon lit que le lendemain matin.

Je ne sais exactement ce que le prince a. De ce que l'infirmière a bien voulu me confier, il aurait attrapé un virus à cause du froid de la neige qui aurait affaiblit son système immunitaire et au vu du temps qu'il a passé dehors, son état s'est aggravé. Les circonstances de son évanouissement dans un endroit pareil lui sont floues et elle suppose que la fatigue a pu être l'un des symptômes. Ce jour-là, des hommes en costards sont entrés dans le dortoir des secondes et en sont ressortis avec des valises en mains. 

Cela fait maintenant deux semaines que Jimin n'est pas revenu. 

Les gens partent les uns après les autres au fil des heures qui séparent la fin des cours de ce Vendredi (ils se sont tous terminé à dix heure en hommage aux vacances). Bientôt, il ne reste plus qu'une vingtaine de personnes dans tout l'établissement. Moi, j'étudie dans la salle à cet effet depuis deux heures déjà, tentant de chasser de mon esprit la sensation désagréable qui me prend au cœur à chaque fois que je réalise que, une fois de plus, je passerais les fêtes dans cet endroit. 

   — Monsieur Jeon !

Je lève la tête, tiré de mes pensées. La directrice adjointe.

   — Oui, madame Booth ?

   — Une voiture vous attend depuis plusieurs minutes déjà. Ne comptez-vous pas partir ?

Perplexe, je fronce les sourcils.

   — Une... voiture ? Pour moi ?

   — Oui, dépêchez vous, il n'est pas poli de faire un chauffeur patienter !

Par automatisme je commence à plier mes livres, réfléchissant à toute vitesse à une possibilité que ma famille m'ait fait une mauvaise blague en prétextant ne pas pouvoir me faire venir. Mais dans ce cas, j'aurai pu marcher vers la gare, pas besoin de m'y emmener en voiture, encore moins avec un chauffeur ! 

   — Excusez moi, madame Booth, mais... puis-je vous demander à qui appartient ce véhicule ?

   — À la famille royale ! s'exclame-t-elle avec excitation, elle s'est chargée de contacter vos parents pour obtenir leur accord et a expédié vos valises à leur résidence depuis aujourd'hui huit heure ! Ne vous a-t-on pas prévenu ?

                                                                            ***

Assis dans une limousine noire, des apéritifs arrangés sur une table à ma gauche et un mini-bar rempli de sodas à ma droite, je regarde la route défiler à toute vitesse depuis la fenêtre. Je ne sais que penser de tout ça, si je dois me réjouir ou m'attendre à passer un sale quart d'heure étant donné que Jimin pense certainement que je suis celui qui a propager cette merde. 

Je soupire.

Enfin bon, ça ne sert pas à grand chose de cogiter sur des choses qui ne dépendent pas de moi. Je devrais simplement profiter de mes possibles dernières heures d'existence et dormir un peu. 

Je me réveille, légèrement secoué par les mouvements de la voiture qui s'enfonce superficiellement sur du gravier, avant d'entendre le bruit sourd d'un frein. La limousine s'affaisse un peu sous l'effet de l'arrêt du moteur et je comprends que l'on est arrivé. Je m'apprête alors à sortir lorsque l'on m'ouvre la portière avant que je ne le fasse. Un peu déboussolé, je parviens néanmoins à réagir vite et descend du véhicule pour venir constater une énorme baraque en face de moi.

Haut de deux étages, le château est construit en brique rose chair et blanche tandis que son toit se compose de tuiles noires aux reflets bleutés. À chaque étages, de grandes fenêtres étirées transpercent les murs dans toute leur longueur, reflétant à présent la lueur bientôt orangée du soleil de cette fin d'après midi. Autour de moi se tient un jardin parfaitement taillé, aux buissons artificiellement arrondis et à la pelouse minutieusement unifiée malgré la neige qui fond dessus. Un peu plus au fond, on peut deviner une forêt dense qui a certainement été reculée lors de la construction du domaine.

On m'invite à entrer. Inutile de décrire l'intérieur aux lustres somptueux, au plafond vertigineux et au parquet étincelant ; ni même les immenses portraits, les magnifiques vases ou encore les extravagants fauteuils et canapés d'un salon que je parviens à entrevoir depuis le hall. 

   — Vos valises ont été monté dans la cinquième chambres du premier étage, Messire Jeon, m'informe un homme qui a tout l'air d'un majordome, en s'inclinant.

« Messire » ?

   — Hum... merci beaucoup, je... j'irai leur rendre visite... ?

Bordel, mais qu'est-ce que je raconte ? Cet environnement est juste... hyper intimidant ! Le majordome sourit et m'invite à le suivre.

   — On m'a informé que Son Altesse royale le prince est actuellement dans la cuisine. Je suppose qu'il apprécierait accueillir son invité lui-même.

Bon point : c'est Jimin qui m'a fait venir. Ce qui me laisse l'espoir que sa famille n'est pas au courant de cette rumeur et donc que je ne suis pas ici pour être sermonner par le roi. 

Je marche donc derrière cet homme, m'étonnant toujours plus du luxe des lieux, et on finit par atterrir devant une porte close, sans verrou. Le majordome frappe trois fois.

   — Votre Altesse ?

   — Entrez, Sebastian !

Il acquiesce et pousse la porte en bois poli et sculpté tandis que je me tends à l'entente de la voix du prince. Je le vois alors apparaître dans cette énième pièce à la richesse indécente. Seul un pantalon à carreau bleu accroché au début de ses hanches beaucoup trop visibles, son buste à la taille étroite et au ventre presque creusé complètement nu, sa paume écrasée sur le bar de la cuisine pour que son bras droit soutienne son corps, son visage complètement fatigué et ses cheveux sauvagement bouclés allant dans tous les sens, Jimin dévore de la nourriture sur le comptoir.

Il semble sortir du lit, son corps entier est luisant de sueur et sa respiration est agitée. Face à lui se tient une large planche de bois sur laquelle gis des restes de toutes sortes de fromage, de noix et de morceaux de pain complet ; ainsi qu'une coupe de fruit complètement renversée, aux raisins déchiquetés, aux fraise massacrées et aux pommes éventrées. Il tient des preuves de son carnages dans sa main gauche tandis que ses joues sont remplies de toutes sortes de choses. À cette vue, je ne peux m'empêcher de sourire, à deux doigts d'éclater de rire.

Avant que Sebastian n'ait le temps de faire remarquer au prince ma présence, une femme en tablier et à la silhouette épaisse entre en trombe dans la pièce, me bousculant maladroitement.

   — Votre Altesse ne devrez pas quitter sa couche tant qu'elle n'est pas guérie !

Jimin se dépêche de vider ses joues et de se débarrasser de ce qu'il a entre les doigts pour venir lui crier :

   — Eh bien je préfère mourir de maladie que de faim !

   — Votre Altesse a un plateau repas dans sa chambre, pourtant !...

   — Écoute, Marie, si j'ingère encore une cuillère de ce foutu porridge une fois de plus, je risque de...! 

Amusé par la situation, je ne peux m'empêcher de pouffer de rire. Jimin se fige à l'instant où il pose les yeux sur moi. Son visage se décompose, son regard se perd dans le vide comme s'il venait de se rendre compte de l'état dans lequel il est et il marmonne :

   — Que... ?

   — Salut, princesse.

Le majordome se racle la gorge et arbore une posture des plus impeccable pour faire face au prince.

   — Votre Altesse a invité Messire Jeon Jungkook à passer les fêtes de fin d'année au palais secondaire.

   — Oh... ? Sommes-nous déjà vendredi ?

   — C'est exact, Votre Altesse.

Jimin essuie rapidement ses doigts dans une serviette en tissu déjà sacrément froissée, et se dirige vers la sortie en me faisant signe de le suivre. J'exécute donc sa demande, tentant de marcher à son rythme pressé et automatisé par l'habitude. 

   — Je ne t'embrasse pas, je ne me suis pas encore douché. 

   — À quatre heure de l'après-midi ?

   — Je viens de me réveiller. Dans mon esprit il n'est même pas six heure.

Je ricane doucement en même temps qu'on monte les escaliers. On tourne ensuite à gauche, longe un couloir à la moquette rousse, et pénètre dans une chambre. Meublée d'un immense lit double défait sur lequel se trouve un plateau avec le fameux porridge, d'un bureau à la fenêtre et d'un petit salon en coin, la pièce dégage une ambiance un peu sombre qui disparaît à l'instant où Jimin tire un épais rideau en velours pourpré. 

   — Tu peux visiter le temps que je me prépare ou m'attendre pour que je te  serve de guide, m'informe-t-il en s'appuyant sur une porte qui mène certainement à une salle de bain.

   — Message reçu.

Il disparaît alors dans la pièce d'à côté tandis que je me laisse tomber sur son lit. Comment est-ce qu'un être humain peut être aussi... Je repense alors à la scène à laquelle je viens d'assister et sens mon visage s'enflammer à toute vitesse. Sexy ? Une telle nonchalance dans son attitude, dans sa façon de se tenir, de manger serait tellement révulsante chez n'importe quelle personne vivante, mais chez lui, c'est affreusement charismatique.

Non, plus que du charisme je pense que ma vision erronée par mon grave penchant pour lui l'a rendu extrêmement obscène. Une sorte d'obscénité malgré lui, insouciante même. Celle qui renvoie à quelqu'un qui se réveille après une nuit... agitée disons : les cheveux en bataille, les yeux épuisés, les lèvres enflées, le corps transpirant et les vêtements accrochés comme ils peuvent. Je me mords la lèvre, l'esprit brouillé par des images tout droit tirées de mes fantasmes les plus extrêmes.

Je dois avoir un sérieux problème mental.

Je me redresse en même temps que Jimin sors de la salle de bain. Pieds nus, un pantalon noir recouvrant ses fines jambes jusqu'à la fin de ses hanches, une chemise blanche un peu mal mise rentrée à l'intérieur et les cheveux brossés et lissés, il semble briller de mille feux alors qu'il peine à ajuster un bouton de sa manche. Mon cœur rate un battement. Je l'aurai bien comparé à un prince s'il n'en était pas déjà un.

   — Approche, je parviens à prononcer.

Il marche vers moi avant de s'arrêter, intrigué. Je glisse alors mes doigts dans sa nuque pour venir arranger son col. Il me laisse faire, me dévisageant sans retenue. Je me demande bien à quoi il pense. Je tire ensuite légèrement sa chemise pour atténuer les plis qui se forment à cause de la façon dont il l'a enfouie dans son pantalon, et égalise la hauteur de chaque passerelle. Puis, je baisse son pantalon d'un centimètre afin qu'il tombe parfaitement sur ses chevilles, resserre sa ceinture d'un cran et, enfin, prends sa main pour attacher ce bouton qui lui donnait tant de fil à retordre. J'observe minutieusement le résultat, en profitant surtout pour admirer sa silhouette si bien dessinée, avant de répondre à son regard. 

   — J'allais l'ajuster seul.

   — Peut-être mais j'avais envie de le faire pour toi.

   — Si tu pouvais cesser de faire ce qui te chante, je t'en serais reconnaissant.

Je souris et me redresse juste assez pour pincer ses lèvres avec les miennes, délicatement. Il ne bouge pas, pressant simplement sa bouche contre la mienne avant que je ne nous détache aussi rapidement que je l'ai embrassé.

   — On sait tous les deux que ça t'arrange bien.

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À suivre...
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Voilà pour ce chapitre ^^

J'espère qu'il vous aura plu ~

En attendant le prochain, on se dit à bientôt pour de nouvelles aventures de lutinerie ~♧









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