Chapitre 14 : Trahison ou déraison ?
Hier soir, lorsque Jungkook et moi nous sommes couchés, il était tard. Je n'avais pas beaucoup dormi la nuit d'avant et la journée avait été éprouvante. Alors il était normal que je fus épuisé, non ? La chaleur de son corps qui anesthésiait le froid du soir, les vibrations de sa voix dans ma poitrine qui me berçaient tendrement et le calme du silence imposé — tout justifiait que je me sois endormi durant notre conversation...n'est-ce pas ?
Et pourtant, au petit matin, lorsqu'il n'était déjà plus là, je me suis maudit pour être tombé dans les bras de Morphée avant même d'entendre sa réponse. Comment ? Comment ai-je pu m'assoupir après avoir posé une question aussi risquée ?
J'ai cependant commencé ma journée malgré tout, me réveillant une heure plus tard grâce à mon emploi du temps selon lequel je n'ai jamais cours le mardi à sept heure trente, en semaine A. Puis j'ai petit-déjeuner normalement, me suis préparé pour être en classe cinq minutes en avance et ai survécu jusqu'à l'après-midi.
J'ai essayé de croiser Jungkook dans les couloirs mais je me suis très vite rendu compte que je n'avais aucune idée de ceux qu'il empruntait. Alors j'ai tout aussi rapidement abandonné cette idée.
L'heure du déjeuner retentit, les gens se précipitent vers le réfectoire tandis que je le redoute un peu. Je crains tout autant la présence du lutin que son absence. Comment savoir si mon invitation a été bien ou mal reçue lorsque je n'ai même pas pu voir sa réaction ? J'arrive à la cantine, accable mon plateau de ce qui me semble comestible et survole la salle des yeux.
La première chose qui attire mon attention est le fait que toute les tables sont surchargées et que ma technique de « m'assoir à un endroit qui n'éveille ni la pitié, ni un sentiment d'intrusion » est tout bonnement impraticable (ça m'apprendra à trop traîner pour aller au self.) La deuxième n'est autre qu'un groupe de seconde composé du délégué et de quelques élèves de ma classe. Et la troisième, celle qui me pétrifie sur place, le fameux cercle de terminales qui rassemble Hoseok, Jackson, San, et bien sûr, Jeon Jungkook.
Mon cerveau se met à réfléchir à toute vitesse, luttant intérieurement à la recherche d'une réponse à mes inquiétudes de ce matin, lorsque, finalement, un regard me sauve de mon dilemme. Je prends alors la meilleure décision et m'installe à une table.
— Je t'ai gardé une place au cas où tu voulais venir avec nous, m'informe Wooyoung en me regardant amicalement.
— Merci.
Je lui rends son sourire et saisis mes couverts pour commencer à manger. Néanmoins, plus le temps passe, et plus je me sens mal à l'aise. Les gens autour de moi semblent me zieuter bien trop souvent et chuchoter bien trop discrètement. Une sensation d'inconfort m'envahit en même temps que je tente de faire abstraction de tous ces regards. Après tout, ce n'est pas comme si je m'étais incrusté. Non seulement le délégué m'a invité, mais en plus il s'agit de ces mêmes personnes qui m'ont suppliés de venir à la lutinerie au cube ou je ne sais quoi en me faisant presque culpabiliser de les faire risquer de « manquer la chance de leur vie » !
Alors pourquoi ? Pourquoi me fixent-ils de la sorte ? Est-ce ma posture qui est trop relâchée, mon noeud trop serré ou ma façon de manger trop anodine ? Ou bien mon titre les intimident-ils toujours ? Ou au contraire, se moquent-ils de mon incapacité à me socialiser au point d'en être réduit à accepter la charité d'un délégué ? Et si Wooyoung ne m'avait invité qu'en réponse à une demande d'un professeur qui aurait remarqué le mal que j'ai à m'intégrer parmi mes pairs ? Rient-ils donc à ce sujet ? Mais alors...
— Son sang n'est pas cent pour-cent Royal, j'entends prononcer.
Mes oreilles se mettent à bourdonner, mon coeur à fracasser ma poitrine et le monde à tourner violemment autour de moi. Je déglutis. C'était donc ça. J'ai l'impression que chaque pupilles m'épient sans relâche, que chaque conversation n'est que moquerie envers moi et que chaque rire nait de moi.
Ma fourchette grince sur mon assiette en même temps que mes souvenirs refont surface telle une vague dévastatrice.
« — Ce n'est qu'un bâtard.
D'un coup de pied, je renverse la table de rage, l'obligeant à se lever pour ne pas se retrouver écrasé en dessous. Les yeux se braquent sur moi, affolés et indignés. Lui, qui vient de parler avec tant de dédains affiche une mine aussi surprise qu'amusé.
— Qu'est-ce que tu as dis ?
— D... de quoi ?
— Fais pas l'idiot et répète si t'as des couilles.
Son visage trahit la peur et l'embarras. Il sourit de cet air qui révèle plus de l'inconfort que de la confiance, hésitant à feindre l'ignorance. Mais, entraîné par les regards pesants de la foule, et par ma provocation, le nombre de ses possibilités ne cesse de diminuer. Finalement, il se redresse fièrement, le torse bombé d'arrogance, et répond :
— Tu n'es qu'un sale bat...
Il n'a pas finit sa phrase que, animé par une rage profonde, j'écrase mon plateau contre son visage et me rue sur lui pour continuer à le frapper. Il tombe à la renverse, se protégeant de mes coups comme il peut tandis que l'on tente de m'arrêter.
— Il a perdu la tête ?
— Que quelqu'un fasse quelque chose !
— C'est un prince, ça ?
Plus les mots fusent, plus les gens me prennent pour un fou, et plus ma colère s'accentue. Je tremble de tout mon corps, j'ai peur, je suis seul, ça les fait rire— pourquoi personne ne comprends ma souffrance ?
À plusieurs, on m'éloigne de l'élève en sang mais je me débat en insultant chaque personne de toutes mes forces et toujours plus animé par l'effroi de mon propre comportement. Plus je lâche prise sur ma retenue en me disant que tout est déjà perdu, et plus je me rends compte que, si je m'étais arrêté une seconde avant, j'aurai pu gardé quelque chose de ma réputation. Mais les regrets arrivent après les actes alors je ne cesse de m'enfoncer.
— Lâchez moi, putain ! Je vais le défoncer ! Ne me touchez pas ! C'est lui qui a commencé, bordel !
Une silhouette bien trop familière s'immisce dans la foule. Elle s'arrête en face de moi. Je me fige et la regarde droit dans les yeux. Hyungsik.
— Arrête, Jimin, tu fais honte à ta famille.
Mon corps entier se met à trembler d'un trop plein d'émotions. J'ai mal partout. Au cœur, à la poitrine, au crâne. Tout m'est douloureux, tout raisonne en moi telle cette vérité que j'ai du mal à assumer. Après tout, comment pourrais-je me l'avouer ? J'ai tant rit, tant pleuré et tant vécu avec lui. On s'est fait d'innombrables promesses en se regardant droit dans les yeux. C'est lui qui m'a toujours réconforté, qui m'a tout appris, que j'ai toujours adoré de toute mon âme et avec toute la sincérité de l'univers.
Comment puis-je retirer ce filtre de perfection que mon amour le plus pur pour lui a construit ? Accepter que l'on me l'arrache de force, qu'il me l'arrache lui-même pour m'obliger de me rendre à une évidence si cruelle ? Je veux maintenir mes yeux détournés, empêcher mon cerveau de relier les informations, me réveiller et constater qu'il ne s'agit que d'un cauchemar. Car, devant moi se trouve un traitre.
— Enfoiré...
Je profite du relâchement de mes aggripeurs pour me précipiter vers lui. J'ai juste le temps de lui lancer un coup de pied en pleine poitrine avant que l'on ne me maîtrise à nouveau. Il se relève. Je me débat en essayant d'avancer vers lui. Il se trouve là, à un mètre de moi, et je ne peux même pas l'atteindre.
— Je vais te tuer ! Putain de salope, affronte moi si t'es un homme ! Lâchez moi, putain !
Plus je tente de m'approcher de lui, et plus on m'en éloigne. Lui, me regarde en souriant narquoisement.
— C'est comme ça que tu veux la jouer ? Réponds moi, connard ! T'es vraiment tombé aussi bas, Hyungsik ?!
À présent, on m'entraîne vers l'extérieur de la pièce. Je dois les retenir en trainant des pieds et en lançant des coups un peu partout.
— Tu veux que je racontes à tout le monde ce que tu m'as fais ce matin ? Hein ? C'est pour ça que tu agis comme un connard, enfoiré ? Ou parce que t'as peur que je leur dise que t'es qu'une sale pédale ! »
Encore une fois, j'ai fais confiance à la mauvaise personne. Le seul de qui je suis un peu proche dans cette école, le seul à qui j'ai accordé bien trop de choses — le seul devant qui je me suis montré faible : Jeon Jungkook.
Étrangement, tout s'éclaire, la raison pour laquelle il était si déterminé à rester près de moi, celle qui justifierait chacun de ses gestes, chacune de ses paroles ; alors que je craignais que ce soit l'amour, ce n'était rien d'autre qu'un piège.
Ce type, je l'ai détesté d'une colère puérile et amère durant des jours entier. Puis, ses baisers m'ont calmé et m'ont rendu vulnérables. J'ai lutté, par peur du passé et de mes propres désirs. Je l'ai laissé prendre le dessus au point où j'en suis venu à lui réclamer sa chaleur. Et à présent que je me suis mis à nu, voilà que je regrette d'avoir été humain face à lui.
Je ne suis pas énervé. Je ressens pourtant les mêmes sensations qu'il y a quelques mois : tremblement, douleur et remords. Mais, à présent, je n'ai plus la force d'extérioriser ma peine.
Je me lève, des vertiges me prenant affreusement. Je n'entends rien. J'ai chaud. Je marche. Je peine à avancer, me tenant aux murs tant le monde semble se déformer autour de moi. Je ne sais plus où aller alors je m'enfonce toujours plus dans cet établissement aux couloirs infinis. La sueur perle sur mon front, mon corps souffrant me hurle de lui accorder un peu de répit. Je marche. J'ai la nausée.
Je pousse une porte sans poignée si familière à ma peine. Les rosiers sont à présent recouverts de neige et la nimph enfermée dans sa cage semble encore plus pitoyable qu'avant. La fraîcheur et le calme m'apaise. Je m'écroule là où le froid pourra anesthésier mes brûlures et la fatigue m'emporte.
___________
À suivre...
___________________________________________
Voilà pour ce chapitre ^^
J'espère qu'il vous aura plu ~
En attendant le prochain, on se dit à bientôt pour de nouvelles aventures de lutinerie ~♧
PS : puisque ce chapitre n'est pas très clair, je vais vous faire une petite explication =
Après s'etre endormi sans entendre la réponse de Jungkook à son invitation, Jimin arrive au self et s'assoit à la table des secondes composée de son délégué Wooyoung et d'autres personnes avec qui il était allé là la lutinerie au carré.
Sauf que Jimin a l'impression que tout le monde le regarde et chuchote pour se moquer de lui. Il essaye de comprendre pourquoi lorsqu'il entend quelqu'un dire « son sang n'est pas royal à 100% ». Sachant qu'il y a un gros mystère autour de sa naissance puisqu'il serait potentiellement le fils de sa nourrice, Jimin panique, craignant qu'une rumeur se répande à ce sujet.
Dans son angoisse, il repense à la dernière fois qu'il a vécu une situation pareille : dans son ancien lycée (et on sait qu'il y a eu un scandal là bas qui l'a forcé à aller autre part).
Dans son souvenir, quelqu'un le traite de batard (donc de ne pas avoir un sang purement Royal) et Jimin le frappe avec son plateau jusqu'à ce que l'on doive le maîtriser. Puis il voit son ami d'enfance Hyungsik et comprend que c'est lui qui a dit à tout le monde son secret (donc le fait qu'il soit potentiellement pas le fils de la reine).
Donc il insulte Hyungsik et donne beaucoup d'informations qui seront élucidées plus tard. fin du souvenir.
Retour au présent. Jimin est dans la cantine, il ne se sent pas bien parce qu'il réalise que, encore une fois, on l'a trahi. Et ça ne peut être personne d'autre que Jungkook puisque c'est le seul à qui Jimin a parlé de son secret.
Donc Jimin se sent mal mais, contrairement a il y a quelques mois (donc dans son ancien lycée d'où il s'est sûrement fait virer), il ne pète pas un plomb mais quitte le self pour venir se réfugier dans un jardin. Trop mal en point, il s'écroule dans la neige.
J'espère que c'est un peu plus clair maintenant... ^^'
Bạn đang đọc truyện trên: AzTruyen.Top