Chapitre 39-1

*En ligne jusqu'au jeudi 06 Mai*


— Vous savez où est ma mère ? m'écriai-je aussitôt. Elle est réellement toujours en vie ?

Mes mains tremblaient presque autant que ma voix alors que je me relevais avec l'aide de Nicolas, les yeux rivés à ceux de Riwanon, attendant sa réponse.

— Je suis vraiment désolée, mais je ne sais pas où est ta mère, ni si elle est toujours en vie.

— Pourtant vous venez de dire que le sorcier qui avait jeté ce sort devait le lever.

— Oui, c'est bien ce que j'ai dit, mais ceci n'est pas l'œuvre de ta mère. Elle était douée mais pas à ce point, du moins pas à vingt cinq ans à peine.

— Alors qui ? Vous le savez ?

— Disons que j'ai mon idée. Vu le niveau de l'enchantement et le secret entourant ta naissance, je ne vois qu'un seul sorcier assez puissant pour un sortilège de cette envergure. Gregor, me dit-elle avec une pointe d'ironie dans la voix.

— Et où se trouve ce Gregor ? demanda Nicolas, qui tout comme moi, en avait sans doute un peu marre des palabres.

— Il est ici, suivez-moi, je vais vous conduire à lui, nous surprit-elle en commençant à remonter la rangé de banc pour rejoindre la sortie.

Après un instant d'hésitation, nous lui emboitâmes le pas. Encore groggy par notre confrontation, je restai accrochée au bras de Nicolas, son soutien m'aidant à ne pas m'écrouler autant physiquement que psychiquement. J'étais épuisée, j'avais froid mais surtout je me sentais blessée et en colère. Ces deux sentiments s'étaient développés lentement une fois le choc des révélations dissipé mais ne cessaient de croître depuis. Même si c'était irrationnel, j'en voulais à Riwanon de m'avoir laissé espérer que ma mère puisse être toujours en vie. Même si c'était plus que probable, nous n'en n'avions toujours pas la preuve. Et surtout, j'en voulais à cette dernière de m'avoir menti. Je comprenais son choix et le besoin de protéger l'enfant que j'étais, mais à partir d'un certain âge elle aurait dû m'expliquer et me laisser le choix. J'étais tellement perdue dans mes ruminations intérieures que je n'en émergeai qu'une fois en haut des marches.

— Où sont Storm, et Allistaire ? demanda Nicolas, immédiatement sur la défensive, alors qu'Uriel apparaissait au détour d'un couloir.

— Avec Éole, ils essaient de joindre Grant et d'organiser le rapatriement. Je suis venu voir si vous étiez toujours vivant, nous dit-il avec un grand sourire. 

— Mais...

— Je suis une sorcière de l'esprit, jeune métamorphe, coupa-t-elle Thomas. Lorsque vous m'avez donné votre accord, je l'ai transmis à Éole par télépathie.

Uriel confirma d'un signe de tête et Nicolas et moi échangeâmes un regard lourd de sens.

— Je vois que vous n'êtes pas surpris par cette notion, releva-t-elle en nous scrutant d'un regard intense. Vous l'avez déjà expérimenté ?

— Oui, mais totalement par hasard, lui expliqua Nicolas voyant que je ne répondais pas. De plus, c'est assez aléatoire et nous demande beaucoup d'énergie.

— C'est parce qu'elle ne le contrôle pas encore, mais c'est normal, s'empressa-t-elle d'ajouter en regardant dans ma direction. Cela demande de nombreuses années de pratique pour le maîtriser parfaitement. Que tu en sois capable sans aucune formation est déjà très impressionnant.

— Vous avez eu de leurs nouvelles, ils vont bien ? demandai-je à Uriel, autant pour changer de sujet que par inquiétude pour mes amis.

— Ils venaient juste d'avoir Cooper en ligne quand je suis parti. Apparemment, ils ont laissé les humains blessés dans un centre de secours de l'armée et ils sont repartis juste avant de se faire contrôler. Pour l'instant ça va, mais toute aide sera la bienvenue.

— Vous pourrez être sur place dans combien de temps ? demanda Nicolas à Riwanon qui continuait à nous guider d'un bon pas à travers des corridors de plus en plus sombres et tortueux.

— Deux voitures sont déjà en route, ils attendaient juste des coordonnées plus précises. Ils devraient arriver sur place d'ici une petite heure.

— C'est quoi vos véhicules, des Ferrari ? s'étonna Uriel avec raison.

Nous n'avions pas vraiment respecté les limitations de vitesse et il nous avait fallu un peu plus de trois heure pour arriver jusqu'ici.

— Disons que la magie ne se limite pas à communiquer par télépathie et à commander aux souris ! rigola Riwanon en s'engageant dans un escalier si petit et étroit qu'elle du se baisser pour descendre.

Coincée entre Nicolas et Uriel, qui durent presque se plier en deux pour ne pas se cogner la tête dans le plafond, Whisper eut un petit moment de panique. Heureusement la descente fut courte et le couloir dans lequel nous arrivâmes, étonnamment large et spacieux. Le plafond vouté ne culminait qu'à deux mètres de hauteur, mais l'impression d'espace était agréable après l'exiguïté de l'escalier. Nous passâmes devant plusieurs portes en bois ferré, la lumière des torches servant d'éclairage donnant une atmosphère particulière à l'endroit.

— Où sommes-nous ? demanda Thomas, lorsque nous nous arrêtâmes enfin devant l'un des vantaux.

— Dans l'aile des cellules de l'ancien monastère. Il était prévu que nous fassions installer l'électricité mais finalement les étudiants trouvent cela plus pittoresque comme cela, nous expliqua Riwanon en frappant trois petits coups sec sur le panneau de bois.

Le son se répercuta dans le couloir vouté comme un écho en pleine montagne, semblant gagner en intensité à chaque rebond. La porte, n'ayant pas de poignée extérieure, paru s'ouvrir comme par magie glissant sans un bruit vers l'intérieur de la pièce. Nous entrâmes à la suite de Riwanon, surpris de ne trouver personne sur le seuil.

La pièce était sombre, éclairé seulement par plusieurs lanternes à pétrole disséminées un peu partout dans le capharnaüm. Un tapis élimé aux couleurs chaudes, couvert de motifs compliqués, recouvrait presque totalement les pavés de pierre et tous les meubles, ou presque, disparaissaient sous des piles et des piles de livres. Au milieu de la pièce, debout devant une table et nous tournant le dos, se tenait un homme de haute stature légèrement vouté. Il se tourna vers nous à notre entrée et son visage ridé se renfrogna en apercevant Riwanon. Puis il me vit et ses traits se figèrent.

— Bonsoir Gregor, lui dit Riwanon avec un sourire éblouissant qui ne montait pas jusqu'à ses yeux. Je vous présente Rosaline, mais vous la connaissez déjà sûrement, lui susurra-t-elle. Rose, je te présente Gregor, ton grand-père, lâcha-t-elle, se délectant à l'évidence de sa petite bombe.

— Un peu mélodramatique comme entrée en scène, même pour vous, bougonna-t-il en se retournant vers le volume enluminé qu'il était en train d'étudier à notre arrivée. Je ne connais pas cette fille.

— Pas de ça avec moi, j'ai reconnu votre signature dans le sort qui entoure son aura. Et qui d'autre à part vous aurait pu lancer un sortilège de cette sorte ? Vous avez bien caché votre jeu en bannissant et en reniant votre propre fille, pour ensuite l'aider à dissimuler son secret.

Gregor ne répondit pas, figé devant sa table comme une statue de sel, les deux paumes posées à plat sur le plateau de chêne et la tête baissée.

— Votre petite fille à besoin de votre aide.

— Pour quoi faire ? tonna-t-il finalement d'une voix de stentor ne cadrant pas du tout avec son apparence de vieillard. Pour réparer une fois de plus vos conneries ? Le sort devait la protéger, la dissimuler aux yeux des sorciers et voilà que vous l'amenez directement dans la gueule du loup.

— C'est elle qui est venue à moi, lui répondit-elle d'un ton sec. La métamorphose à fissuré le sort et ses pouvoirs se sont éveillés.

— La métamorphose ?! reprit-il en faisant brutalement volte-face et en fronçant le nez. Des loups-garous ! cracha-t-il à l'adresse de Nicolas, des étincelles de pouvoirs commençant à crépiter au bout de ses doigts.

Nicolas, par reflexe, me poussa derrière lui tandis qu'il faisait face au sorcier, ses griffes apparaissant déjà à la lueur de ses yeux transformés. Les miens suivirent presque aussitôt et c'est de mon regard émeraude que je fixais avec haine ce grand-père que je n'avais jamais vu. Nous nous affrontâmes du regard, Uriel et Thomas assurant nos arrières.

— Les sorciers noirs sont à sa recherche, son pouvoir les attirent comme une balise, intervint Riwanon pour tenter de désamorcer la situation.

— Et vous, vous voulez que j'annule totalement le sort ! s'esclaffa-t-il dans un rire méprisant, en voilà une stratégie qu'elle est bonne ! De toute façon, les loups ont déjà fait la moitié du travail, ce n'est qu'une question de temps avant que sa bête ne pulvérise l'enchantement.

— Mais en attendant, elle est vulnérable car ses deux natures se combattent au lieu de s'entraider. Vous seul pouvez accélérer le processus, argua une dernière fois la sorcière.

Gregor campa sur ses positions, ses yeux lançant des éclairs de colère. Puis, soudain, il baissa les bras avant de secouer la tête.

— D'accord, mais les loups dégagent le plancher.

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