Chapitre 31-2
— Rose, ça va ? me demanda Uriel, vaguement inquiet.
Comment lui répondre ? me dis-je tandis que je remuais vaguement la tête et commençais à descendre les marches. En l'absence de Nicolas, nous étions les deux Alphas de meutes alliées et j'aurais dû lui parler de mes inquiétudes et de mes soupçons, mais comment lui expliquer ? Même moi je ne comprenais pas ce qu'il se passait, ni comment nous pouvions communiquer ainsi entre nous...
— Rose, quoi qu'il se passe, tu peux me le dire.
La main d'Uriel sur mon bras me stoppa alors que nous parvenions au bas des marches.
— Nicolas et Storm sont en danger, lui balançai-je dans un murmure précipité, espérant avoir fait le bon choix.
— Où ça ?
— Je ne sais pas exactement. Quelque part dans le bois autour de la propriété. Ils sont bloqués par un glissement de terrain.
— Sorcière de l'esprit.
En entendant la voix d'Azaldée, nous nous tournâmes tous les deux vers elle dans le même mouvement.
— On ne vous a jamais appris à ne pas écouter aux portes ? lui lança Uriel, d'une voix irritée.
— Si, mais je ne vois pas de porte, ici ?! lui répliqua-t-elle avec ce petit ton suffisant qui commençait à me taper sur les nerfs.
— Ce n'est vraiment pas le moment de faire de l'esprit ! la rabrouai-je sèchement. Que vouliez-vous dire exactement ?
— Que vous êtes certainement une sorcière de l'esprit, rétorqua-t-elle, ajoutant une petite grimace faussement contrite sur le mot « esprit ». Cela expliquerait votre facilité à entrer dans les rêves et les souvenirs et votre... soudaine télépathie.
— Comment vous pouvez savoir ça ?
— Simple déduction. Vous n'avez aucun moyen de savoir ce que vous avancez sans avoir pu joindre Nicolas ou Storm. Personne ne les a encore retrouvé, toutes les lignes sont coupées et il n'y a plus de réseau. Ajoutons à cela que vous n'êtes pas une menteuse et que je suis accessoirement une sorcière, moi aussi. Lorsque votre nouveau pouvoir s'est éveillé, je l'ai senti.
— Pourquoi n'avez-vous rien dit, dans ce cas ?
— J'ai pensé que vous m'en parleriez de vous-même. Et puis, avec ce qu'il s'est passé...
Le regard que me lança Uriel était pensif et concentré à défaut d'être suspicieux et surpris comme j'aurais pu m'y attendre. Pourtant il ne dit rien et se contenta de partir devant sans un mot, me laissant seule avec Azaldée. J'empruntai le couloir d'un pas rapide la sorcière sur les talons et débouchai sur le hall d'entrée totalement méconnaissable. Le plafond effondré en plusieurs endroit, bloquait la porte principale et la plupart des accès. De la poussière en suspension saturait l'espace rendant l'atmosphère difficilement respirable. Quelques silhouettes méconnaissables essayaient de déblayer la porte, chiffons sur la bouche et outils de fortunes à la main.
— Où sont les autres ? demandai-je à Azaldée en toussotant.
Plutôt que de me répondre, elle me fit signe de la suivre. Les yeux rivés au sol pour éviter les gravats je progressai lentement, plus consciente à chaque pas de l'horreur qui venait de se produire. Plusieurs corps méconnaissables gisaient, partiellement ensevelis, sous les décombres.
— On sait qui s'est ? demandai-je d'une voix enrouée par les larmes et le chagrin.
— On a préféré s'occuper des vivants d'abord, me répondit Grant en apparaissant en haut d'un nouvel escalier.
Son visage grisâtre était marqué par la peine et la fatigue. Le souffle court, il se tenait d'une main au mur et semblait au bord de l'évanouissement. Je me précipitai vers lui et d'autorité, glissai mon épaule sous son bras.
— Vous allez vous écrouler, il faut vous reposer.
— Pas le temps. Il y a au moins une dizaine de personnes coincées en bas et nous devons trouver un moyen de sortir d'ici avant que tout ne finisse par s'écrouler pour de bon. Je venais voir où ils en étaient, me dit-il avec un petit signe de tête en direction de la porte.
Une des silhouettes nous aperçut et se détacha du groupe pour venir nous rejoindre. Je reconnu Shane lorsque, dans un cri, il arracha le chiffon qu'il avait devant le nez et dans une étreinte d'ours, me serra brièvement contre lui d'un seul bras.
— J'étais tellement inquiet ! murmura-t-il dans mes cheveux, enfouissant sa tête dans mon cou.
— Uriel et Luc ne t'ont pas dit qu'ils m'avaient retrouvé ?
— Je ne savais même pas qu'ils s'en étaient tirés, me répondit-il d'une voix douloureuse et blessée en se reculant.
— Désolé Shane, c'est de ma faute ! intervint Grant. Je n'ai pas pensé à leur dire où tu étais. Je...
— Ce n'est rien, s'empressa de l'interrompre ce dernier. Ce n'est de la faute de personne. C'est le chaos et le principal, c'est que vous soyez vivants. Des nouvelles des autres ?
— On devrait bientôt réussir à déblayer un passage jusqu'à la cave. C'est de la maçonneries relativement ancienne, elle devrait avoir résistée. Et vous, vous en êtes où ?
— Sans outils, on n'arrivera à rien. Je venais te voir justement pour te proposer quelque chose. Le mur de droite, il est porteur ?
— Oui, pourquoi ?
— Je voudrais essayer de faire sauter la portion se situant entre la porte et ce mur. Vue la configuration de l'éboulement, les risques son minimes.
— Tu es fou ! Encore une secousse et tout risque de nous tomber sur la tête.
— Justement, mieux vaut contrôler le phénomène. J'ai eu une formation d'artificier à l'armée, je sais doser les explosifs. Grant, si nous ne mourront pas écrasés, nous allons finirent asphyxiés, nous devons sortir d'ici.
Grant, pesant de plus en plus lourd sur mon épaule, hésita de longue secondes avant d'acquiescer lentement. Shane n'attendit pas plus longtemps et après avoir serré mon bras dans un geste réconfortant, partit vers le fond de la pièce.
— Grant ! On a besoin d'aide ! appela quelqu'un depuis le sous-sol.
— Allez-y, accompagnez-le, me dit aussitôt Azaldée ayant capté mon hésitation. Je vais voir comment va Thomas.
Sincèrement touchée, je la remerciai d'un pauvre sourire avant de m'engager dans les marches avec Grant. Nous ne parvînmes qu'à la moitié de l'escalier, où un projecteur éclairait les gravats presque comme en plein jour. Une corde, solidement arrimée à un morceau de ferraille tordu sortant du mur, disparaissait dans un trou sommairement creusé au milieu des débris. Un jeune homme, debout à l'entrée de la cavité, s'échinait à tirer sur la corde, sans résultats apparents. Dès qu'il entendit nos pas il se tourna vers nous, le soulagement le disputant à la panique sur son visage.
— Alyss a réussi à passer mais depuis, je n'ai plus de nouvelle et la corde semble coincée. Alyss ?! Tu m'entends ? cria-t-il de nouveau, manquant m'éclater les tympans lorsque l'écho se répercuta dans l'espace exiguë.
— Arrête de hurler, ils ne peuvent pas nous entendre, le rabroua Grant.
C'est alors que la corde se mit à bouger. De petites secousses mais synonymes d'espoirs surtout lorsque des bruits de reptations se firent entendre dans le boyau obscur. Nous retînmes notre souffle jusqu'à ce qu'une petite main apparaisse à l'entrée du tunnel. Nous l'aidâmes à sortir et Elijah me tomba dans les bras, sanglotant de tous son corps.
— Ça va aller, lui murmurai-je bêtement pour le réconforter tout en le serrant contre moi. Que s'est-il passer en bas ? lui demandai-je au bout d'une bonne minute, le temps que ses sanglots s'apaisent. Tu peux nous dire s'il y a d'autres survivants ?
Le petit garçon hocha la tête, nous arrachant à tous un soupir de soulagement.
— Tu peux nous dire qui ? lui demanda Grant avec douceur malgré l'appréhension sourde contenue dans sa voix.
— Ma sœur, Abby, le... le médecin mais... maman... ma maman...
— Ta maman est blessée ?
— Elle... elle bouge plus... elle voulait pas se réveiller.
Un silence de mort suivit les paroles heurtés du jeune garçon dévasté. Il ne voulait pas se l'avouer mais il avait déjà compris que sa mère ne se réveillerait jamais. Mia émergea du boyau à cet instant. Le visage poussiéreux et strié de larmes elle s'extraya sans aide et aida aussitôt Abby qui la suivait de près à sortir à son tour. Son frère sauta presque de mes bras pour se ruer dans ceux de sa sœur, où il se remit à pleurer de plus belle.
— Le médecin, Cooper je crois, est en train d'agrandir le passage pour que les adultes puissent passer, nous dit Abby d'une voix éraillée et tremblante.
— Accompagne les enfants là-haut, ordonna Grant au jeune homme dont je ne connaissais toujours pas le nom. Ils seront mieux là-haut auprès de Spéra.
Au début, Mia refusa de bouger. Les yeux rivés sur le tunnel elle le fixait comme si elle espérait en voir surgir un miracle. Finalement, avec l'aide d'Abby elle finit par détourner le regard et suivre le jeune homme dans l'escalier comme un zombie. La suivante à émerger fut une jeune métamorphe que je ne connaissais que de vue, certainement la fameuse Alyss. Le visage plein de poussière et couverte d'égratignures elle se laissa tomber sur le sol, le souffle saccadé.
— Il reste cinq personnes en bas, mais le passage est très étroit et l'une des cinq est gravement blessée, nous expliqua-t-elle d'un ton haletant. Je ne sais pas si elle parviendra à passer.
— Il reste qui exactement en bas ?
Elle allait nous répondre lorsqu'un nouveau cri résonna.
« Attention !!! » nous parvins la voix de Shane alors qu'une explosion retentissait et qu'un nouveau tremblement secouait la maison.
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