Chapitre 31-1

*En ligne jusqu'au dimanche 11 Avril*


Bien au-delà de l'inquiétude, je sombrais un peu plus dans l'hébétude et le désespoir en suivant Luc et Uriel dans les couloirs dévastés. Cat était restée auprès de Thomas pendant que nous cherchions des survivants parmis les vestiges du premier étage. Hormis la chambre où ils avaient découvert Ethan et l'humain ensevelis sous le plafond écroulé, ils n'avaient pas eu le temps de pousser plus avant leurs recherches, alertés par mes cris. Partout des débris jonchaient le sol et nous devions être très attentif où nous posions nos pieds. L'escalier principal était inutilisable, barré en son milieu par un éboulement infranchissable.

— Comment êtes-vous montés ? demandai-je alors que nous passions sur le palier.

— Par l'escalier de service, me répondit Uriel. Il est en béton et a mieux résisté mais si ça continu de trembler comme ça, il finira bien par être inutilisable lui aussi. Le mieux serait de ne pas traîner ici.

Nous recommençâmes à avancer, ouvrant les portes et appelant les survivants à se manifester, mais jusqu'à présent, seul le silence nous répondait. Jusqu'à ce que nous nous enfoncions dans le couloir ouest. Nous entendîmes les coups sourds avant les cris. Nous mettant aussitôt à courir, nous arrivâmes dans une portion du couloir où tout un pan de plafond s'était écroulé, bloquant plusieurs portes.

— On est là, on va vous aider ! cria Luc en empoignant l'extrémité de la poutre. Uriel, vient m'aider.

Le jeune loup ne tiqua même pas devant l'ordre sec tandis que des cris de soulagements retentissaient de l'autre côté du panneau bloqué. Malgré tous leurs efforts ils ne parvinrent qu'à la décaler de quelques dizaines de centimètres.

— Cette fichue poutre est encore enchâssée dans le plafond, grogna Luc, sa voix déformée par l'effort. On ne la bougera pas plus que ça.

— Je crois que tu as raison, espérons que ça suffira, lui répondit Uriel en essayant d'ouvrir la porte.

Elle s'entrouvrit d'une cinquantaine de centimètres et un visage apparut avant même que le battant n'aille buter contre le bois. Je ne reconnu pas Spéra immédiatement. Les cheveux défaits, les traits tirés et recouverts de poussière, elle était presque méconnaissable.

— Si vous saviez comme je suis contente de vous voir ! s'exclama la métamorphe dans un souffle soulagé, ses mains tremblantes s'accrochant sporadiquement au chambranle. C'est bon, l'aide est arrivée ! cria-t-elle en se retournant vers l'intérieur de la pièce.

— Nous aussi ont est content de vous voir, lui répondis-je avec chaleur. On s'inquiétait et on a un blessé. Qui est avec vous ?

— Eva et Azaldée. Nous étions venues la convaincre de venir à la fête quand tout s'est écroulé, expliqua-t-elle.

— Elles vont bien ? demanda Uriel alors que Spéra disparaissait à l'intérieur de la chambre obscure.

Elle revint quelques secondes plus tard, accompagnée de la sorcière.

— Moi ça va, mais Eva a une fracture ouverte. Heureusement pour elle Spéra est médecin mais vous allez devoir ouvrir un peu plus la porte pour que l'on puisse passer.

— Tu ne crois pas qu'on l'aurait déjà fait si on pouvait ?! lui rétorqua Luc, acide.

Pour une fois, je ne pouvais pas lui en vouloir de son manque de tact. Apparemment, se prendre une maison sur la tête n'avait pas altéré le caractère d'Azaldée !

— Sort la première, lui ordonna Spéra d'une voix autoritaire. Eva est légère et fine, en faisant très attention, ça devrait aller.

La sorcière fit la grimace mais obtempéra sans tergiverser, pour une fois.

— Si elle se réveille et se remet à hurler et à me taper dessus, je m'en laverai les mains cette fois-ci, maugréa-t-elle entre ses dents alors qu'elle se glissait dans l'interstice étroit.

Elle passa sans trop de difficultés, mais ce fut une autre paire de manche pour Eva. La métamorphe évanouie était un poids mort et la faire traverser sans que son bras blessé ne touche la porte ou le chambranle fut long et laborieux. Nous finîmes par y parvenir, mais alors que Uriel la prenait dans ses bras pour la dégager en douceur, son attelle de fortune s'accrocha à un débris et elle se réveilla en hurlant.

Paniquée et désorientée, elle se mit à se débattre et Uriel dû la maintenir plus fermement pour ne pas qu'elle se blesse davantage. A ma grande surprise, Luc s'approcha et passant doucement sa main sur ses cheveux commença à lui parler calmement à l'oreille. La jeune femme s'apaisa suffisamment pour que Spéra ait le temps de sortir à son tour et puisse venir examiner sa blessure.

— Ça va, l'attelle n'a pas bougé, mais il lui faudrait des antidouleurs, le temps que le processus de guérison ne s'enclenche. 

— Je croyais que cela ne fonctionnait pas sur nous ? s'étonna Luc, caressant toujours les cheveux d'Eva dans un geste apaisant.

— Il faut de fortes doses et ça ne fonctionne pas longtemps, mais dans le cas de telles blessures, cela permet au blessé de ne pas trop souffrir. Pour un méta-humain ce n'est pas une blessure grave, en soi. Son corps pourra la régénérer en quelques jours, mais comme pour un humain classique, ça fait un mal de chien, expliqua Spéra en fixant Luc d'un regard surpris. Je ne vous aurais pas cru intéressé par la médecine, ni même enclin à aider les autres d'ailleurs ?!

— Je ne le suis pas. C'est de la simple curiosité et puis, pour une fois, je suis d'accord avec la sorcière, entendre geindre, ça me saoul ! lui répondit-il d'un ton bourru en s'éloignant d'Eva.

Spéra et moi échangeâmes un regard disant clairement que nous n'étions pas dupe. Luc avait voulu jouer au gros dur devant nous, mais sa réaction première avec Eva avait été naturelle et spontanée. Même si je ne lui avouerai jamais, cela me rassurait beaucoup car, avec un peu de chance, il pourrait peut-être s'intégrer en fin de compte. Quelqu'un capable d'une telle empathie instinctive ne pouvait pas être totalement irrécupérable.

— Tu m'as dit que quelqu'un était blessé ? m'interpella Spéra en levant vers moi son regard fatigué.

— Oui, Thomas. On est tombé dans le vide sanitaire et lorsque je l'ai retrouvé, il ne respirait plus.

Tandis que nous rejoignions le métamorphe, je lui expliquai ce qu'il s'était passé, voyant son visage se fermer un peu plus à chaque détail supplémentaire. Lorsque nous atteignîmes Cat et Thomas, elle avait revêtu son masque impénétrable de médecin et je savais très bien ce que cela voulait dire. Elle s'attendait à devoir m'annoncer une mauvaise nouvelle. La peur nouant mes entrailles, je la regardai examiner Thomas en commençant à faire les cents pas dans le couloir. Uriel, adossé contre un mur, m'arrêta d'une poigne douce et ferme alors que je passais devant lui pour la troisième fois. Dès que sa peau toucha la mienne, ma nervosité recéda légèrement. J'étais toujours terriblement inquiète mais plus posée et plus calme pour y faire face, quoi qu'il advienne.

— C'est l'effet de meute, m'expliqua Uriel avec un gentil sourire lorsqu'il croisa mon regard surpris. D'habitude nous sommes toujours ensemble, donc on ne s'en rend pas compte.

— Comment t'en es-tu aperçu ?

— Lorsque j'ai été soulagé de retrouver l'autre gland ! s'esclaffa-t-il en désignant Luc d'un signe de tête. C'était un indice assez puissant pour que je teste ma théorie avec toi.

Ce dernier lui répondit d'un geste fort peu polie, un mince sourire étirant malgré tout le coin de ses lèvres. Maintenant qu'il le disait, j'étais globalement moins anxieuse depuis que je les avais retrouvé. J'avais mis cela sur le compte du sauvetage et de ma communication avec Nicolas, mais... Uriel avait sans doute raison.

— Alors ? demandai-je fébrilement à Spéra lorsqu'elle se releva pour venir vers nous.

— C'est difficile à dire sans matériel adéquat mais je dirais, traumatisme crânien et hémorragie interne.

— Il lui faut des soins médicaux ?

— En temps normal j'aurais dit oui et même dans ce cas, je n'aurais pas été très confiante. Mais son rythme cardiaque est bon, sa respiration régulière... il a l'air d'être plongé dans un profond sommeil réparateur.

— C'est normal chez les métamorphes, non ? demanda de nouveau Luc, qui semblait avoir soudain changé de personnalité. Un coup sur la tête, sûrement !

— Pas dans des cas aussi grave. Je serais quand-même plus rassurée si on pouvait trouver un dispensaire au plus vite. Grant sait peut-être où il y en a un dans le coin ?

— De toute façon, on va le rejoindre, lui dit Uriel en se décollant du mur. On peut le déplacer ?

— Je ne sais plus trop quoi vous dire mais, je pense que oui.

Sans un mot, Luc s'avança et avec l'aide de Cat et d'Azaldée qui l'aidèrent à le stabiliser, le prit délicatement dans ses bras, comme un enfant. Puis nous suivîmes la métamorphe le long du couloir est, jusqu'à son extrémité où un escalier en colimaçon descendait vers le rez-de-chaussée.

— Qu'est-ce qui s'est passé avec Luc ? demandai-je discrètement à Uriel tandis que nous laissions les autres descendre en premier, attendant notre tour en haut des marches. Le lien de meute n'explique pas tout.

— Il s'est prit une bonne raclée, ça doit être ça ?! m'expliqua Uriel avec un demi-sourire satisfait.

— Une raclée... par toi ? Depuis le... la catastrophe ? bafouillai-je, cherchant mes mots.

— Oui, il a joué au con, comme d'habitude et vu la situation, je n'avais ni l'envie ni le loisir de temporiser.

— Pourquoi n'a-t-il aucune séquelle dans ce cas ?

— Luc se bat bien mais sournoisement comme un voyou des bas quartiers. Ce qu'il ignorait, c'est que je suis un ancien commando, ceinture noire de karaté et de krav-maga. Je sais mettre un mec au tapis, sans bruit et sans marque.

— Pourquoi diable ne l'as-tu pas fait avant ?! m'exclamai-je sans pouvoir me retenir.

— Parce qu'il était sensé être supérieur à moi dans la hiérarchie de la meute et que l'Alpha c'est Nicolas. Il est puissant, très puissant, bien plus que moi mais il n'a pas ma formation militaire. Pour le mater, il aurait dû lui faire très mal, voir le tuer. Maintenant, grâce à toi, je suis le second de la meute et comme Nicolas n'était pas là, j'ai pu le remplacer et le remettre à sa place une bonne fois pour toute. S'il est si calme, je pense que c'est parce que son loup avait besoin de trouver sa vraie place parmis la meute. Maintenant que c'est fait, sa nouvelle personnalité acquise en même temps que son loup devrait se développer. Enfin, ce n'est qu'une théorie.

Je fixai le jeune loup comme si je ne l'avais jamais vu et remerciai un dieu auquel je n'étais pas sûr de croire, qu'il est croisé notre chemin. Quelque part dans mon esprit, je sentis Nicolas approuver et se dire que même s'il disparaissait, nous serions entre de bonnes mains.

Il coupa la connexion dès qu'il se rendis compte de ma présence mais le mal était fait. Storm et lui était en bien plus mauvaise posture qu'il avait bien voulu me l'avouer.

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Je voulais vous remercier pour vos lectures, vos votes et vos coms <3

J'essaye de répondre à tout le monde mais depuis deux jours j'ai de gros problèmes de réseau (merci le confinement !) et mes réponses ne partent pas toujours :-( Mais sachez que je ne vous oublis pas ^.^

Un très bon week-end et à lundi pour la suite (qui devrait être plus longue que prévu !!! Oups =))

Kissssss <3 <3 <3

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