Chapitre 3-1




— ça te tente un chocolat chaud ? demandai-je à Nicolas alors qu'un silence tendu saturait la pièce.

Les poings serrés le long du corps, les muscles crispés et le regard perdu dans le vague, il n'était que préoccupation et stress contenu. Je savais parfaitement que toute cette tension résultait des derniers évènements ainsi que de l'accumulation de toutes les épreuves que nous venions de traverser. En trois mois nous avions connu beaucoup plus de drames que d'occasions de nous réjouir et je connaissais assez Nicolas pour savoir qu'il ne trouverait jamais le sommeil dans cet état de nerf.

— Un café conviendrait mieux à mon humeur, me répondit-il en détachant enfin son regard du néant pour le tourner vers moi.

— A ton humeur, peut-être, mais vu l'heure, je prescris plutôt un chocolat chaud. A moins que tu ne préfères une des infusions de Waahana ? susurrai-je avec un demi sourire en me dirigeant vers la bouilloire.

Je vois ses poings se décrisper et ses traits se détendre légèrement tandis qu'il fait quelques pas vers moi, avant de s'appuyer nonchalamment au plan de travail.

— Tu sais toujours comment faire pour m'aider à faire retomber la pression, m'avoue-t-il dans un demi soupir.

— C'est parce que je commence à te connaître, monsieur le gros dur en surface mais guimauve à l'intérieur.

— Alors comme ça, tu me compare à une guimauve ?!

Plus vif que l'éclair, et avant que je n'aie le temps ni même l'envie de me dérober, il se décolla du meuble d'un coup de rein, me saisit par le bras et m'attira à lui. Là, dans l'étreinte chaude et rassurante de ses bras, il commença à me mordiller le lobe de l'oreille.

— Une guimauve enrobée de chocolat, je lui susurre dans un souffle. Craquant et fort à l'extérieure et doux et tendre à l'intérieur.

Son étreinte se resserra et ses lèvres s'emparèrent des miennes en un baiser fougueux et passionné avant qu'il ne me soulève d'un seul mouvement pour me prendre dans ses bras et se diriger vers la porte du couloir.

— J'ai une meilleure idée qu'un chocolat chaud pour se détendre, me murmura-t-il d'une voix rauque tout en ouvrant la porte de notre chambre, avant de nous faire basculer sur le lit.

***

Tendrement lovée dans le creux du bras de Nicolas, la joue sur son torse et la peau encore luisante de sueur, je laissais mon souffle s'apaiser lentement en le contemplant. Les cheveux en batailles, les paupières closes et les muscles enfin relâché, il profitait comme moi de cet instant suspendu hors du temps que l'on ressent parfois après l'amour. Malgré les cicatrices qui déparaient toujours son corps, il était à tomber, et il était à moi, m'émerveillai-je une nouvelle fois.

— A quoi tu penses ? me demanda-t-il soudain en ouvrant lentement les yeux.

— A rien de spécial, lui répondis-je en enfouissant un peu plus ma tête dans le creux de son cou. Que j'ai de la chance de t'avoir près de moi.

— Tu te trompes... c'est moi qui ai beaucoup de chance.

Son souffle chaud caressa mon oreille alors qu'il penchait légèrement la tête pour effleurer mes cheveux de ses lèvres.

— Nous n'allons pas pouvoir repousser plus longtemps, ajouta-t-il une poignée de secondes plus tard dans un soupir lourd de sens.

Sentant que notre pause détente était malheureusement déjà terminée, je m'écartai légèrement pour me dresser sur mon coude et pouvoir croiser son regard. Ses prunelles chocolat, de nouveau voilées par l'inquiétude se fixèrent aux miennes, tandis qu'il commençait un lent va-et-vient de ses doigts sur mon épaule nue.

— Je ne sais pas de quoi tu parles exactement, mais tu ne crois pas que cela pourrait attendre le matin ?

— L'équilibre de nos deux meutes. Tu ne peux pas continuer à n'avoir qu'un seul loup dans la tienne, ultra dominant, qui plus est. Nous devons égaliser... harmoniser la composition des meutes.

Un nœud d'angoisse se forme aussitôt dans le creux de mon ventre et je me redresse, m'arrachant à contrecœur à la douce caresse de Nicolas.

— Je le sais bien ça, nous en avons déjà parlé un nombre incalculable de fois et étions tombés d'accord pour attendre encore un peu. Tu disais que c'était trop risqué avec autant de jeunes loups « forcés ».

— Et je le pense toujours. Mais plus les mois passent et plus la situation se dégrade. Il faut se rendre à l'évidence, le nombre de nouveaux loups ne se tarira pas, bien au contraire, il ne va faire qu'augmenter. Et si nous voulons avoir une chance d'arranger les choses et d'éduquer ces nouveaux loups... pouvoir prouver aux humains que nous ne sommes pas uniquement les monstres issus de leurs pires cauchemars et histoires d'horreurs, alors peut-être que...

— Pourquoi maintenant ? lui demandai-je plus doucement, sentant son trouble.

— Parce que les évènements se précipitent. Cette jeune louve, il y a... il y a quelque chose qui cloche. Tu ne l'as pas senti ?

— Si, répondis-je prudemment sentant l'angoisse augmenter encore un peu plus au creux de mon ventre. Son odeur, ce qu'elle dégageait... c'est comme si elle était une louve et en même temps, pas vraiment.

— C'est ça, mais il y avait quelque chose de plus. Vu son jeune âge et sa non-expérience, elle n'aurait pas dû me résister comme elle l'a fait.

— C'est peut-être tout simplement une dominante ?

— Comme tu le sais, les louves très dominantes sont plutôt rares et je peux t'affirmer avec certitude que ce n'est pas son cas. Non, il y a quelque chose d'anormal chez cette jeune fille et je n'arrive pas à me sortir ça de la tête ! grogna-t-il en s'asseyant et en balançant ses jambes sur le bord du matelas.

— Nicolas, tu ne peux pas continuer comme ça ! Tu dois débrancher de temps en temps, te reposer ne serait-ce que quelques heures par jour, sinon tu vas péter les plombs !

Cela avait toujours été mon argument principal pour faire valoir mon point de vue. Car depuis le début de cette période sombre, j'avais toujours été pour le partage des meutes. C'était Nicolas qui s'y était opposé tout net, me tenant tête avec une conviction inébranlable, finissant par me ranger à son avis. Nous devions attendre que les nouveaux loups soient plus acclimatés à leur nouvelle vie et surtout aux liens magiques et pesant de la meute, avant de voir quels caractères accepteraient d'avoir une louve pour Alpha. Raison pour laquelle son empressement soudain m'inquiétait.

— C'est pour ça ? Tu sens que tu perds le contrôle ?

— C'est surtout parce que ce petit con de Luc à raison ! s'emporta-t-il soudain en se levant, avant de commencer à faire les cents pas dans la pièce. Je n'aurais pas dû laisser Shay me défier comme elle l'a fait et surtout ne pas réagir.

— Shay n'est pas une dominante, elle a compris et elle...

— Non tu ne comprends pas, me coupa-t-il en m'illuminant de son regard angoissé pailleté d'or. Ce n'est pas Shay le problème, c'est moi et la réaction des autres loups dominants de la meute. Je n'ai pas réagi comme un véritable Alpha aurait dû le faire tout à l'heure.

— C'est certainement la fatigue ?

— Tu régis encore comme une humaine, s'esclaffa-t-il gentiment d'un petit rire sans joie. Ce que tu n'arrives toujours pas à appréhender, c'est que moi, je ne l'ai jamais été, humain, contrairement à vous. J'ai cet instinct et cette force brute au fond de moi depuis ma naissance. Mes parents ont toujours su que j'étais prédestiné à devenir un puissant Alpha, bien plus puissant que mon père ou mon frère ne le serait jamais et ils avaient commencé à m'enseigner et à me mettre en garde contre les dérives du pouvoir.

— Mais tu sais bien que tu n'es ni un despote, ni un tyran, voyons ! Bien au contraire !

— Justement, il se situe là le problème Rose. Si je ne deviens pas rapidement un despote, comme tu dis, la meute va imploser et j'en perdrais le contrôle. Le souci c'est que je m'y refuse ! cracha-t-il comme un venin, son regard troublé et déterminé à la fois rivé au mien. Ses iris incandescentes semblant m'appeler au secours des tréfonds de son être.

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Je profite de ce chapitre pour vous annoncer que je serais en dédicace au salon de la Rochelle du 23 au 25 octobre. J'espère avoir la chance de vous y rencontrer ^.^

Des bisous  <3 <3 <3

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