Chapitre 26-2
*En ligne jusqu'au dimanche 28 Mars*
S'ensuivit aussitôt une discussion mouvementée et bruyante qui raviva mon mal de crâne. Chacun campait sur ses positions, les pro-sécurité d'un côté et ceux qui voulaient surtout des réponses, de l'autre. Etant partie prenante dans les deux camps, je ne pouvais qu'observer, impuissante, priant pour que ce brouhaha insupportable cesse et qu'il en ressorte enfin quelque chose de concret. A bout de patience je m'apprêtai à leur hurler de se taire lorsque Nicolas me devança.
— Ça suffit ! rugit-il. Toutes ces discussions stériles ne mènent à rien, il faut agir maintenant. Si cette femme est notre seul moyen de comprendre vraiment de quoi il retourne, alors, nous n'avons pas le choix, Rose doit la rencontrer.
— Et si elle fait partie des sorciers qui tentent de nous déstabiliser ? demanda Lyn.
— Je vous dis et je vous répète qu'elle est digne de confiance, s'emporta de nouveau Azaldée.
— Et moi je vous dis et je vous répète que je n'ai pas confiance en votre jugement ! la contra aussitôt Lyn. Pas plus que Grant et nous sommes chez lui ici. Même si je suis la première à vouloir savoir ce qui arrive à Rose, je ne pense pas qu'introduire une puissante sorcière dans notre refuge soit une bonne idée. Il en va de la sécurité de tout le monde.
— Lyn a raison, finis-je par intervenir. Il n'est pas question de faire venir cette femme ici, mais croyez-vous qu'elle accepterait de me recevoir dans votre convent, par exemple ? demandai-je à Azaldée.
— Les étrangers à notre culture sont rarement admis à l'intérieur de nos congrégations, mais je peux demander... enfin, si on me laisse approcher d'un téléphone !
— Je suppose qu'il faut demander à Grant, son approbation ? soupira Lyn en se dirigeant déjà vers la porte.
— Non, sinon on ne s'en sortira jamais ! lui dit Nicolas. Azaldée, allez passer votre coup de fil, j'en prends la responsabilité. Je vous fais confiance pour ne pas révéler le lieu où nous nous trouvons, ne me décevez pas.
La sorcière lui jeta un regard vexé avant de quitter la pièce mais heureusement ne fit pas d'autres commentaires.
— Ma pauvre Rose, je ne t'ai pas été d'une grande aide, cette fois-ci, soupira doucement Waahana en se levant. Cette petite à la tête dure mais c'est quelqu'un de bien, même si elle m'exaspère. Je pense que vous pouvez lui faire confiance.
— Ce n'est pas en elle que l'on n'a pas confiance, c'est en son jugement et en la confiance aveugle qu'elle porte aux siens.
— Tu sais, Lyn, n'importe qui peut trahir, même des personnes en qui tu as toute confiance. Ce n'est par pour cela que tu vis en recluse, toute seule dans ton coin ? Et après tout, elle a peut-être raison ? Pourquoi les membres de son convent seraient-ils forcément mauvais ou corrompu ? Bon, je vais allez rejoindre Cooper et voir si je peux l'aider un peu à l'infirmerie, ajouta-t-elle avec un sourire avant de quitter la pièce à son tour.
— Quant à moi, je suis peut-être cynique et bornée, mais le monde des bisounours, ça n'existe pas ! Je préfère allez voir ce que mijote notre sorcière d'opérette ! souffla Lyn d'un ton agacé en suivant Waahana dans le couloir.
Je savourai le calme retrouvé en me laissant aller contre Nicolas. Nous restâmes là, un temps indéterminé, dans les bras l'un de l'autre, savourant ce moment simple et rassérénant. Je regardais le ciel par la fenêtre se trouvant derrière Nicolas et la nuit qui tombait me ramena à l'instant présent.
— Pourquoi crois-tu que l'on m'ait jeté ce sort ? lui demandai-je en m'installant plus confortablement, la joue contre son épaule. Peut-être que je suis dangereuse ?
— Je pense plutôt que c'était pour te protéger, me répondit-il doucement. Tu as remarqué que tous les souvenirs dans lesquels tu te perds sont liés à ta mère ?
Sa question me surpris et spontanément je failli répondre « non ». Pourtant, si l'on ne tenait pas compte des rêves mais uniquement des souvenirs, il avait raison, réalisai-je avec stupeur en m'écartant doucement pour pouvoir le regarder. Ses yeux sages et remplis d'affection me fixaient patiemment, attendant que je comprenne ce qu'il essayait de m'expliquer sans me brusquer.
— Tu penses que c'est ma mère qui a jeté le sort ?
— Ce serait logique et aussi compatible avec l'idée qu'elle pourrait être toujours vivante, me répondit-il prudemment.
— Mais si c'était réellement le cas, pourquoi m'avoir laisser croire à sa mort ? Pourquoi ne pas tout me révéler, dans ce cas ?
— Certainement pour la même raison, te protéger une fois de plus. A moins qu'elle n'en ait pas eu le temps ? Elle t'avait paru anxieuse ou inquiète peu avant son accident ?
— Je t'avoue que je n'ai plus beaucoup de souvenirs des jours précédents le drame. Voir pas du tout en fait. Le psy disait que c'était dû au choc et qu'ils reviendraient progressivement, mais...
— Ce n'est certainement pas une coïncidence enchaina Nicolas, alors qu'un flash de douleur me poignardait l'œil avant d'exploser dans mon crâne.
Je me recroquevillai en gémissant, essayant de bouger le moins possible en attendant que la réverbération passe.
— Encore mal à la tête ? me demanda Nicolas en posant doucement une de ses mains dans mon dos.
— Je crois qu'il vaudrait mieux éviter de parler de ma mère pour le moment, réussis-je à lui répondre d'une voix essoufflée.
— Ça t'arrive à chaque fois que l'on parle d'elle ?
— Non, plutôt à chaque fois que j'y pense ou que j'essaie de me rappeler quelque chose la concernant, lui expliquai-je, prenant conscience du phénomène à mesure que les mots sortaient de ma bouche.
Un petit ding émana soudain de la poche arrière droite de Nicolas, d'où il dégaina son portable plus vite que son ombre.
— C'est Cooper, me dit-il en tournant brièvement l'écran vers moi. Allistaire est réveillé. Je vais descendre voir ce qu'il en est.
— Je t'accompagne, lui dis-je en relevant doucement les paupières.
— Tu devrais peut-être te reposer un peu ?
— Tu plaisantes, je sors d'une sieste et puis on vient de dire que j'avais besoin de penser à autre chose. Des problèmes de loups-garous bizarre, c'est parfait !
Nicolas s'esclaffa puis m'aida à me lever. Il avait beau sourire, je voyais bien l'inquiétude dans ses yeux lorsqu'il me regardait. Je chancelai légèrement sur les premiers pas mais le temps que l'on atteigne la porte j'avais retrouvé ma stabilité et pus lâcher Nicolas. Le temps que l'on arrive à la cave, ma migraine ne se résumait plus qu'à une légère pulsation, désagréable mais gérable.
Allistaire, enfermé dans l'une des cellules sécurisées de Grant, se leva de son lit de camp dès qu'il nous vit apparaître. Ses cheveux blonds, plus en batailles que jamais, et son look mal rasé, lui donnait l'air d'un surfeur plutôt que d'un flic. Pourtant son regard lorsqu'il attrapa à pleines mains les barreaux de la cellule ne laissait aucune place au doute.
— Laissez-moi sortir d'ici ! nous ordonna-t-il aussitôt. Pourquoi vous m'avez enfermé là-dedans ?
— Vous ne vous rappelez pas vous être évanoui en arrivant ici ? lui demanda Nicolas, essayant de masquer sa surprise.
— Non, répondit Allistaire, perplexe. Ça fait longtemps que je suis là ? Personne ne veut rien me dire !
— Une douzaine d'heures environ, répondis-je à sa question, voyant que Nicolas ne le faisait pas.
— Douze heures ?! Merde ! Il faut que je sorte d'ici.
— Si vous êtes là, c'est pour votre sécurité. On ne sait toujours pas pourquoi vous vous êtes évanoui. Et l'évanouissement, chez les loups-garous, ce n'est pas normal ! intervint Cooper, en pénétrant dans la pièce par une porte située dans le fond.
— Mais je ne peux pas manquer mon rendez-vous avec L.N, ça foutrait toute mon infiltration en l'air.
— Votre rendez-vous n'est que dans deux jours, non ? enchaina Cooper. Ça nous laisse le temps d'essayer de comprendre ce qui ne va pas.
— Je ne peux pas débarquer le jour même du rendez-vous, comme une fleur, ils se méfieront. Je suis sensé être un mec lambda.
— Et bien, le mec lambda il va calmer son loup-garou et ranger ses griffes déjà. Car si vous vous comportez comme ça devant les fidèles de L.N, vous pourrez de toute façon lui dire au revoir à votre affaire !
Lentement, Allistaire baissa les yeux vers ses doigts où d'énormes griffes déparaient ses mains encore humaines mais recouvertes d'une fine toison brune. L'incrédulité puis la peur s'imprimèrent sur son visage, alors que pour la seconde fois, son pouvoir explosait telle une grenade.
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