Printemps 1975 : célestes

Art : blvnk

Un jour...



James contracta les biceps, tapa dans ses mains, tapa dans le dos de Sirius qui lui répondit de même, ils se cognèrent le torse en sautant avant de frotter leurs thorax endoloris, secoués par le même rire.

« C'est pas possible, qu'ils sont bêtes...

- Gryffondor !

- Équipe en OR ! »

Des harangues éclatèrent dans l'équipe, couronnées d'étincelles rouges qui virevoltaient comme des fées.

« Toi, tu vas finir capitaine ! prédit Margot qui devait quitter l'école à la fin de l'année.

- C'est vrai ?!

- Ah ben, je ne sais pas, j'imagine. McGonagall ne t'a rien dit ?

- Non...

- Mais si ! s'écria Sirius.

- Quoi ?! J'aurais oublié ?!

- Elle a dit que tu devais gagner en modestie.

- ...

- ...

- Effectivement, j'avais oublié. »

Il ricana avec Sirius.

« En piste ! En scène, en... Terrain !

- En l'air !

- Ouuuuuh !

- Hinhinhin.

- Eh, tu sais qui commente aujourd'hui ? Marlene ! »

À l'entrée du stade, leurs pieds s'enfonçaient plus délicieusement que d'habitude dans la terre. Le mois de juin suintait de soleil, il craquait dans les fissures embaumées, coulait de la terre charnue, de la toile des tentures, du bois des gradins.

Une fois sur le balai, après le coup de sifflet, la concentration prend le dessus, et s'il y a quelques moments glorieux – une excellente passe, des applaudissements, le signe amical d'un coéquipier - les sensations sont toutes polarisées sur le jeu, et c'est seulement après que l'excitation peut rejaillir. Durant la partie, on fonce dans l'instant sans le vivre. On comprend tout plus tard, quand c'est terminé.

Sirius tira la langue à James qui éclata de rire et fit une cabriole. Margot leva les yeux au ciel. Bibine libéra les balles et leurs esprits se galvanisèrent. Sillonner, sinuer, viser, cibler, armer, choc, comme une apogée. L'air tiède peinait à rafraîchir le visage, James projetait de la sueur quand il virait. Le cuir grinçait sur les bras bouillonnants de Sirius. C'était désagréable mais pour rien au monde ils n'eussent cessé de tenir la ligne, c'était même au contraire, un défi supplémentaire. Il piqua aux côtés de son ami. Sans ciller, James poursuivit sa course, tout droit. Il ne quittait pas sa trajectoire des yeux, et tout au fond de cette apparente impassibilité, brillait sa confiance. James osait défier le monde parce que Sirius surveillait ses arrières.

« Prêt ? »

Ils filaient, talonnés par les poursuiveurs Serdaigle. Sirius ne perdait pas les cognards des yeux. Il en attira un, le fit légèrement rebondir sur le manche de James pour s'accorder l'angle dont il avait besoin et effectua le revers le plus spectaculaire qu'on vît jamais à Poudlard. Tout Gryffondor et la plupart des Poufsouffle se dressa pour applaudir et le long cri de victoire de Marlene ne prit fin que parce que Chourave, les oreilles légèrement vrillées, lui assurdiato la voix temporairement.

C'était le dernier match de l'année, la coupe des Quatre Maisons leur était assurée. Sirius se jeta dans les mêlées de ses coéquipiers cognant très fort, criant pour faire durer l'euphorie, alors que l'amertume se répandrait lourdement dans ses veines. Déjà ? Allez quoi, un peu de répit ! Sa voix cessa de vibrer, ses pulsations ralentirent, irrémédiablement. Il leva un regard mutin vers Remus, descendu le féliciter d'une main sur l'épaule, le bras bien tendu, distant, voilà. Sirius sourit, idiot, marmonna - encore plus idiot puisque Remus n'allait pas le prendre dans ses bras devant tout le monde :

« Je sens le fauve.

- Certains l'aiment chaud... » murmura-t-il, laissant Sirius lire sur ses lèvres.

L'équipe se dirigeait vers les vestiaires, quelqu'un héla le batteur. Sirius posa la main sur celle de Remus, toujours mutique, tira doucement pour se blottir contre lui, la main fermée sur son poignet. Ils avancèrent bras-dessus, bras-dessous, le souffle court, prêts à bondir sous un banc des gradins, l'esprit rayé comme un disque par cette idée lancinante. De la vapeur s'échappait des douches, quelques exclamations joyeuses. Sirius tapota sa main mais Remus ne le laissa pas partir. Il ricana, le ventre noué quand il serra un peu plus fort sa prise sur lui. Remus jeta un regard aux alentours, furtivement et rabattit la porte sur eux. Dans la pénombre du seuil, il s'abreuva dans ses lèvres au goût de sureau et dans son cou moite.

« Il fout quoi, Black ? demanda une voix, à côté.

- Il est resté traîner, je crois.

- Ce soir ? bredouilla Sirius tout bas, avant de partir.

- Tu veux... Tu veux recommencer ? »

Sirius retint un gloussement ému, il fusa dans les flammèches de ses yeux :

« Merlin, Remus... Merlin de oui... »


« James, entre : renoncer à un truc maintenant, pour mettre toutes les chances de ton côté pour un truc que t'es pas sûr de réussir mais qui fera plus de bien plus tard, et :

profiter de maintenant en renonçant à un truc que tu devras faire plus tard mais que tu sais pas quand tu réussiras,

tu choisirais quoi ? »

James fronça les sourcils et considéra son dilemme avec un sérieux très honnête avant de répondre :

« En fait, j'ai pas compris la question. »

Sirius remplit son verre en riant, comme s'il venait d'oublier ou d'entendre une bonne plaisanterie. Il leva un regard furtif vers Remus, et son ivresse tripla sans boire.

J'ai peur d'être au camp quand il y aura de l'orage

J'ai peur de revoir William

Remus dansait dans le kaléidoscope des lumières magiques, il y riait avec Lily qui lui confiait des secrets, qui souriait quand Elijah, un sixième année, s'approchait d'elle pour lui montrer une carte, lui faire goûter un bonbon, la chatouiller. Jaloux, James cessa de lui fournir des bonbons. Sirius retrouva les joues de Remus dont les zébrures disparaissaient presque dans les rayons mouvants et colorés. Ils échangeaient des bêtises tempe contre tempe car la musique était trop forte pour s'entendre, se parlaient dans l'oreille, une main sur l'épaule en longeant le ruban de la complicité. Ils flirtaient ainsi un instant, s'éloignaient pour rire avec les autres et boire, dansaient encore, se croisaient par hasard en attendant la nuit. Les néons violets et turquoise déguisaient leur impatience en espoir.

Un rien de pensée magique, lie desséchée au fond du cœur de Sirius lui fait espérer qu'il réussira peut-être à y échapper, s'échapper et sinon,

Sept semaines d'été, hein ça passera vite, promets moi que ça passera vite

Puisque les semaines d'école filent comme le sable entre les doigts !

Seule ta silhouette me retient, entre les deux mondes depuis hier, encore plus aiguisé dans les rires menteurs et un peu plus absent au milieu des autres, dans mon corps plus dense. James se moque de ta tête dans la lune, Peter déplore ta taciturnité, ils devinent que quelque chose a changé sans discerner la tresse nocturne qui nous unit.


« Incendio ! »

Le carré de guimauve planté au bout de la pique de Peter se boursoufla et caramélisa. Il la précipita dans sa bouche avant que ses coulures ne tombassent par terre.

« AAAAH ! J'me suis brûlé ! Glaciendo ! GLACIENDO !

- Ne mets pas le feu ici !

- Et pourquoi pas, on dansera dans les flammes ! »

Remus le toisa de son air de ne-me-cherche-pas. James le fixa de son air de tu-m'connais-bien, et il craqua le premier pour frotter les cheveux de son ami. Sur les murs de la Cabane Hurlante dansait le halo des flammes orange. Sirius, assis au piano, cherchait vaguement les notes d'une mélodie, rhapsodie de Bohème.

« Ne parle pas des vacances ! glapit-il.

- On ne parle pas des vacances ! bondit James hors du cercle comploteur qu'il avait formé avec Remus et Peter, on parle du Plan ! Et ça on peut en parler parce que. Tout le monde. Aime. Les. PLANS !

On va venir te kidnapper... On va s'infiltrer dans les camps comme des espions ! Avec la cape de mon père, on fera une attaque surprise ! Avec Emmeline et Athenray, on va leur faire écouter du Bon Gros Rock !

... Elle y retourne, d'ailleurs Emmeline ? C'est pour un ami. »

Sirius ne répondit pas, il frappa le piano plus fort et s'effondra dessus.

« Je vais me cacher ici, s'éleva sa voix au milieu des cordes et des marteaux.

- Eh, mais ça c'est une idée ! approuva Peter en allumant sa baguette pour faire griller la friandise de Remus.

- Cache-toi au Château plutôt, répliqua Remus. Il y a assez de cachettes pour passer inaperçu tout l'été, et tu pourras te servir à manger dans les cuisines.

- En vrai, je suis capable de venir te chercher en balai, insista James qui se débattait avec des fils de caramel.

- Ça va te faire une sacrée route de chez toi, ricana Sirius.

- Eh bah je le ferai quand même ! C'est ça rigole, rigole, tu ne me crois pas. Prends de la cheminette, viens chez moi, tu connais l'adresse. Mais je préférerais venir te chercher en balai. »

Sirius secouait la tête en souriant.

« Le jour de mes dix-sept ans... On fera la fête la plus sauvage que ce monde ait jamais connue.

- Eh bien, entraînons-nous d'ici-là ! »

Ils burent de la bièraubeurre que James et Sirius avaient dérobée à Pré-au-Lard la semaine précédente, coururent dans les escaliers de bois qui craquaient sévèrement, chantèrent faux, accompagnés par le vieux piano affreusement désaccordé, alors ça tombait bien. Allongé sous le toit défoncé, sur le plancher poussiéreux, Sirius alluma une cigarette et la proposa à James qui fuma, fit la grimace : « Bof, ça fait drôle dans la tête, mais le goût est affreux ! » Il frotta sa langue pour s'en débarrasser. Peter crâna mais toussa dans la cigarette, et projeta du tabac partout. Sirius la répara d'un coup de baguette, la ralluma et la tendit à Remus, qui la saisit, avec tant de familiarité dans le geste, dans le petit regard qu'ils échangèrent, que James eut un genre de - pas un pressentiment mais l'impression détestable d'assister à quelque chose d'inconvenant.

La nuit était encore bien sombre quand Remus décida de ramener Peter, puis James, en dépit des protestation de ses amis. Des protestations en carton : on ne discute pas de ce que dit Remus, on fait juste griller une dernière guimauve chacun en perdant du temps à entremêler les fils, mais on finit par se résigner. Ils étaient venus en balai cette fois, sous la cape, un à un, de la fenêtre de la salle de bains. Remus revint chercher Sirius en volant plus vite qu'il n'avait jamais volé. Il manqua de tomber dans les virages, se fit très peur, arriva les mains crispées sur le bois du manche, fébrile. Sirius l'attendait en-dessous du saule dont on sentait le mouvement, le menton sur les genoux, au milieu des racines qui brassaient ses pensées sombres dans les profondeurs de la terre.

Le balai tomba, trop lourd, encombrant, de ses mains tremblantes qui s'accrochèrent aussitôt aux vêtements de Sirius. Il souriait très faiblement, un sourire pour se rassurer. Il poussa Remus contre le mur et tout monta très vite : la salive à la bouche, le sang dans le ventre, les mains sous le pull, l'odeur fétide de la terre et la moisissure. C'est étrange, ça ne dissipe pas bien le malaise, ça le mélange à quelque chose d'un peu plus sordide, pressé, furtif, au son des vêtements à peine écartés, aux phalanges qui qui crissent, des halètements, comme des animaux impatients, terrés dans le sol.

Les images cognent dans la tête. Ces saletés, autant les mélanger, les confondre, les tiennes, mes pensées sombres, c'est comme une expérience alchimique

On s'entête à défier l'amertume, à vouloir réparer, transmuter

Quel orgueil

Il leur semble qu'un rire mauvais gronde dans les ténèbres de la terre, prêt à les y étouffer

Remus posa la tête sur l'épaule de Sirius. Son ami crut qu'il pleurait, mais il soupira seulement. Ils se détachèrent avec une maladresse froide, sans trouver quoi que ce fût à dire, et Sirius discernait la panique qui voilait ses yeux. Il saisit le balai. Les bras de Remus s'enroulèrent autour de sa taille. Dans la nuit tiède, il chantait "Sebastian"

And your view of society screws up my mind like you'll never know

Lead me away, come inside, see my mind in kaleidoscope

Somebody called me Sebastian

Love me sublime, mangle my mind, do it in style, so we all know, oh yeah

You're not gonna run, babe, we only just begun, babe, to compromise


Sous les étoiles, il mordit doucement son cou. Cela voulait dire

J'ai envie

Ils recommencèrent dans le grenier, quand James et Peter furent endormis.

Bruts et impatients, puis brefs et lents, silencieux et

Éclatants

« Encore. Encore... Mille fois. Mille et une... Autant qu'il y a d'étoiles... »

Ils recommencèrent jusqu'à la dernière nuit

Viens sous ma peau, viens, ne me laisse pas partir, ne me laisse pas te quitter

Prends mon corps sans pitié

Pour qu'il continue de trembler chaque fois que je penserai à toi



https://youtu.be/vcc4aRKP0TM

~ Fin de la quatrième année ~


Et les autres ne seront pas si longues,

Cachu, neuf mois.

C'est que j'ai autre chose à écrire


stressed out


freaked out

Bạn đang đọc truyện trên: AzTruyen.Top