Automne 1974 : condamnés

Un jour...


La pluie de novembre s'abattit ; fine et lente, elle retenait les couleurs des jours et les contours de l'air, elle laissait délicatement oublier la lumière. Les Maraudeurs cartographiaient à longueur de journée, entre deux leçons - pendant les leçons, jusque tard le soir près de la cheminée, amusés par les Gryffondor s'entraidaient dans leurs devoirs avec les mêmes expressions que leurs enseignants. Des fredaines nocturnes avec Mowgli s'ensuivaient, dans le froid des murs de pierre, pour s'assurer de ne rien oublier. On les retrouvait à somnoler dans la bibliothèque, du chocolat partagé en douce sous la table. Les écharpes passaient d'un cou à l'autre, leurs affaires s'éparpillaient sur le sol, les parchemins punaisés dans l'air pour le regard enfiévré de Sirius qui ne s'arrêterait pas avant d'avoir terminé.

« Oh ! Mais qui voilà... » murmura James, le sourire jusqu'aux oreilles.

Mais c'était Snape, évidemment, ou peut-être Lily ? James fit une moue circonspecte. Les deux amis discutaient tout bas au coin d'une allée discrète que seuls les Maraudeurs pouvaient scruter. Un Serpentard passa, leur jeta un regard. James ne vit pas ce qu'il dit, mais il s'arrêta un instant et haussa des épaules, comme pour demander à Snape de réagir. Alors Snape délaissa Lily et le suivit. Son regard se ferma en un clin d'oeil, il sembla balbutier, tritura la lanière usée de son sac mais il le suivit, le pas sec, le dos voûté, incarnation de la maussaderie. James avança en tapinois entre les rayons pour l'espionner. Ses camarades de maison ne se poussèrent même pas vraiment pour l'accueillir, alors il se tassa de son mieux au coin de leur table. 

« Ça se fait pas, ça se fait trop pas...»

Remus leva un sourcil.

« Comment est-ce qu'elle peut à chaque fois retourner avec ce... »

Peter donna un coup sur ses fesses tendues avec un rouleau de parchemin.

« Bon, Jim, écoute-moi, fit Sirius en balayant de la main les feuilles qui entouraient son champ de vision. Je propose qu'on lance le sort d'homunculus ce soir, dans la salle commune, sur la Tour de Gryffondor. La carte doit rester au repos plusieurs jours, le temps d'imprimer les personnes. Si ça marche, on fera le reste ensuite. »

James se jeta au cou de Sirius, l'étouffa dans une étreinte et retourna espionner Lily et Snape. Sirius sortit de sa besace, avec une précaution touchante, un dernier parchemin neuf. Il l'avait acheté à Pré-au-Lard avec Remus, chez Scribenpenne dont il avait avait longtemps contemplé et effleuré, plusieurs fois, tous les papiers. Ses doigts s'étaient épris du velouté de cette feuille, son odeur âcre flottait autour de lui avec des promesses dans les nuées, dans ses marbrures transparentes qu'il contemplait encore, là, les yeux et les doigts fatigués et injectés d'encre, de sang, d'envie. Pour la première fois, il n'osait pas commencer. Il consulta une série de croquis qu'il avait réalisés en guise d'étude. Les tours et les créneaux, les arcs-boutants, les voûtes. Sirius plongea sa plume dans l'encre. Il s'appliquait. Le dessin seul connaissait ce privilège et la bibliothèque aurait pu lui tomber dessus, lui, perdu dans les proportions, les hachures des ombres à mesurer, la précision du trait qui l'appelait et attendait d'être révélée, se fût laissé ensevelir. Et là encore, il eût dessiné. Remus, la joue posée dans la main, n'attendait pas : il soutenait. James qui s'ennuyait un peu ensorcela le livre que feuilletait Snape, s'amusant à faire glisser les pages au fur et à mesure que sa victime les tournait, sous le rire étouffé de Peter. Sirius leva enfin les yeux, se frotta le visage, laissant une griffure d'encre sur sa joue, peinture de guerre, observa son dessin, les yeux gris sévère. Il inscrivit encore, de sa belle calligraphie, au moment où James faisait flapflap avec le grimoire dans le (long) nez de Snape :

« La Carte du Maraudeur »

Les yeux baissés, il fit glisser la page vers Remus. Il avait, stupide stupide, laissé sa main dessus, exprès, épaule droite contre son épaule gauche, le bras tendu sur la table bien devant lui, le sourire désolé à peine, interrogateur surtout. Remus parcourut les lignes des yeux, les lèvres mordues d'admiration, le bras de Sirius contre sa poitrine. Il refaisait quelques contours audacieux avec les doigts, pour ne pas s'égarer en compliments qu'il ne savait pas, pas encore formuler. Son autre main remonta doucement dans le dos de Sirius qui s'offrait si proche, sans y - si, bien sûr qu'il y songeait, la honte l'écrasait de son voile implacable et ses gestes se décourageaient à cette poisse amère. Hey, vous là, chut, je vous en prie, je vous en prie. Je voudrais juste respirer, la main sur son dos. Son cœur et son souffle, toute la magie et l'art bourdonnent en lui, je voudrais toucher et voir tout cela, je n'arrive plus à penser tant il est vivant. James chassa les songes en glissant la tête entre leurs deux têtes, les bras sur leurs épaules, pour s'extasier sur le talent de son ami. Essayer fugacement de se raisonner, de comparer à quand c'est James que je touche mais on ne sait plus comment faire, quand on est allés trop loin comme ça, comme un élastique distendu.

« Mais il y a notre nom dessus, on sera grillés si quelqu'un la trouve !

- Il faudra la protéger par un mot de passe, on y réfléchira.»

Ils se levèrent en même temps, Sirius fit un bisou de loin à Remus qui leva les yeux au ciel avant de tirer la langue rose rouge à croquer oh mon dieu ne fais pas ça c'est

un jeu

c'est un jeu

&


« A nos champions ! »

James et Sirius tombèrent dans les bras de Mila, Félicie et Charlotte qui leur offraient une accolade à chaque fois qu'ils se croisaient avec de grands effets dramatiques et sonores. Ce drôle de rituel s'était mis en place quasi spontanément au début de la semaine et le groupe de copines variait parfois dans la journée. Elles profitaient de l'arrivée du premier match de l'année pour glisser leurs mains sur le bras de Sirius, prolonger une étreinte, une oeillade, sous-entendre qu'il y avait une place à prendre. Il leur répondait avec de petites impertinences parce qu'elles étaient chouettes et pleines d'esprit ; les embrassades étaient de loin ce qu'il appréciait le moins chez elles. Il regardait Remus parfois, dans leurs bras. Remus secouait la tête, gêné pour elles, cela permettait un grand éclat de rire.

« Oh non, ne sois pas vexée, c'est Remus qui fait des grimaces, tu n'as rien à voir avec ça... »

Elles semblaient parfois croire que c'était parce qu'il était trop timide. Il était charmant d'un charme insaisissable, dangereux et donc irrésistible.

« Tu ne manges pas, Sirius ? C'est le stress du match ?

- Moi, stressé ? Jamais ! »

C'est que mon cœur se dilate, ravi à tes effervescences, elles me rendent invincible, explosent en essaims à chacun de tes sourires. C'est le chaos, là-dedans, et la lourde sentence du directeur croit pouvoir endiguer ça ?

Jamais.

En remontant vers la salle d'étude des runes, ils croisèrent un groupe de Serdaigle, et Remus eut un léger déséquilibre étourdi en les évitant. Sa main frôla celle de Sirius. Un pardon du bout des lèvres, une boutade, les yeux au ciel. Sirius fit de même, comme il se fût amicalement vengé d'un croche-pied maladroit. Il n'y avait pas grand monde pour voir et, sous leurs longues capes noires, il n'y avait rien à voir. Remus ne put s'empêcher de sourire, le taquina du bout de l'index avant de se dérober, les mains croisées dans le dos. Sourcils froncés de frustration et moue espiègle, Sirius se mit alors à réciter sa leçon à voix haute et ses mains voltigèrent devant le nez de Remus pour asseoir son explication. Remus dut bien la chasser. Et ils se saisirent au vol, muets de stupeur tout à coup. Leur pas s'accéléra, ou bien peut-être seulement l'essoufflement, ils ne savaient plus comment, vraiment le monde, la distance et le temps ? Ils essayaient l'un après l'autre de s'enfuir parce que c'était trop fou, et qu'on se croyait sous le coup d'un Pur Feu, qu'on perdait la tête à continuer ça, ce n'est pas pour moi, dans trois pas j'arrête, à la prochaine dalle, au prochain pilier. J'arrête. Leurs doigts entrelacés maladroitement et qu'ils n'osaient plus bouger commençaient à faire mal, à devenir moites, et ils serraient.

Reste avec moi. 

Je suis avec toi.

 Ils ne verront jamais et je chéris ce secret, il roule dans mes veines, se rit des interdits

Je me moque bien des filles, si je renonce c'est avec courage, puisque maintenant je sais. 

Comment pourrais-je ?

Dis, est-ce que je nous condamne ?


&


Le jour du match, c'était la tempête. Peter, habillé d'une capeline ensorcelée pour repousser la pluie, éclaboussait partout à chacun de ses gestes, et plus personne ne l'approchait à part Remus. Edgar lui-même lui lança des regards désolés en rejoignant un groupe de Serdaigle. A cause du vent, les joueurs étaient ballottés dans tous les sens. La plupart étaient habitués à jouer dans des conditions pénibles mais aucun n'avait à la fois la capacité à se risquer au déséquilibre et la hargne suffisante pour contrer les éléments comme les avait Sirius. Il ressemblait à un guerrier viking. Il voyait les cognards sous la pluie, il devançait leurs rebonds aléatoires et les frappait d'un geste impérieux, précis, les envoyait où il voulait. On tremblait à voir son coup de batte, même si l'on n'entendait rien. Et cela semblait facile.

Il regardait son frère parfois. Regulus était livide, le haut des pommettes à peine glacé de rose vif, le regard brûlant. Il en oublia d'acclamer son équipe quand Roan fit un mouvement objectivement admirable pour enlever le souafle à James. Ça le démangeait, ça le brûlait crépitait sous sa peau. Au moins, le doloris, ça finit par s'arrêter.

Quand Gryffondor l'emporta, James et Sirius, dégoulinaient de boue, ils s'acclamèrent avec leurs camarades en riant et s'en étalaient partout, petites furies joyeuses après la fougue brute du match. Sirius, moqueur, ouvrit grand les bras quand Remus accourut pour le féliciter. Son ami le repoussa en riant, la main sur son cœur, une seconde de trop, la main de Sirius sur la sienne, oeil inquisiteur de Dumbledore, en haut des gradins. Il se détourna, Sirius soupira, bientôt porté par les camarades. Les Serpentard persiflaient :

« Ah ouais, ça aime bien la bourbe, les Gryffondor, hein !

- Si rester propre signifie perdre, crois-moi, j'hésiterai pas à me salir ! » exulta Sirius.


&


« Je peux peigner tes cheveux, Sirius ?

- Non, moi, j'ai une lotion à l'huile de coco !

- Allez, s'il te plait ! J'ai une potion à la mangue !

- Mais vous comptez me manger ou quoi ? glapit Sirius en bondissant sur la table. Personne n'a le droit de toucher à mes cheveux ! »

Il pointa du doigt chacune des filles qui riaient, posa les poings sur les hanches, "Ouais, j'aime mieux ça !" et, d'un saut leste, retrouva Remus par terre devant la cheminée pour laisser sécher ses boucles qui embaumaient la verveine.

« Comme Samson, sourit Remus.

- Qui ?

- Un personnage de la Torah – un livre religieux, précisa Remus en voyant le regard interrogateur de Sirius.

- Comme la mythologie ?

- A peu près... Bref, il faisait partie du peuple juif et Dieu lui avait donné une force surhumaine à condition qu'il ne se coupe jamais les cheveux.

- Yeah !

- Et qu'il ne boive pas de vin.

- Le vin, c'est pour mon père, je déteste ça... Mais la bièreaubeurre ?

- N'est pas spécifiée.

-  Il lui arrive quoi ?

- Il tue un lion à mains nues...

- Ça se fait pas !

- ... pour aller demander une fille en mariage.

- Ça se fait encore moins, gloussa Sirius tout bas.

- Non mais dis donc, monsieur Black ! s'écria Mila.

- Mélusine... soupira Remus. Il finit par l'épouser, ça tourne mal, je te la fais vite. Mais après, il y a une deuxième fille, Delilah, et elle est aussi convoitée par un peuple ennemi. Trois fois, elle lui demande le secret de sa force et il lui ment et je ne sais pas comment il ne se rend pas compte qu'elle essaie le stratagème à chaque fois mais passons. La quatrième fois, il révèle la vérité et elle lui coupe les cheveux dans son sommeil.

- Cancrelarde !

- Il perd toute sa force, ses ennemis lui crèvent aussi les yeux, histoire de tant qu'à faire. Il est emprisonné, sorti parfois pour servir de distraction pendant les fêtes. Un jour, il demande à Dieu de lui rendre sa force une dernière fois. Sa prière est exaucée et il pousse les piliers du palais qui s'effondre sur ses ennemis et lui-même.

- Eeeh... murmure Sirius incertain.

- J'avais un livre avec la version pour enfants.

- C'est pas pour les enfants.

- Parmi d'autres récits. Mais c'était celui-là mon préféré. »

Sirius eut un sourire de diablotin, les ombres du feu dans ses fossettes.

« Oui, tu avais déjà un faible pour les gars musclés aux cheveux longs... »

Remus eut un hoquet scandalisé.

« Chut. »

Sirius rit doucement, sans le quitter des yeux, il doit savoir, il sait qu'il est magnifique, n'est-ce pas ? Remus détourna le regard, s'efforça de réprimer son sourire, Sirius continuait en effleurant sa cheville du bout des doigts, caché par la table.

« Mais nous on ne va pas couper tes cheveux, Sirius ! »

Remus ne s'était pas rendu compte que tout le monde avait écouté son histoire.

« Mais arrêtez ! s'écria-t-il, théâtral. De toute façons, il ne faut plus peigner mes cheveux, ça défait les boucles. Ils sont plus brillants quand je les laisse libres.

- Ah bon ? se dressa Marlène, très intéressée, sa tignasse blonde de hard rockeuse trop indisciplinée à son goût.

- Oui mais tes boucles à toi sont plus fines, il faudrait que tu utilises la potion Lissemplis.

- Ouais ouais ouais, tout ça pour faire de la pub... Tu crois que je ne sais pas que c'est le père de James qui la fabrique ?!

- Merci Sirius, intervint James qui surgissait dans la conversation, tu as gagné une bière ! »

Il se tailla une place par terre devant lui et lui donna sa bouteille entamée. Sirius fit une moue désabusée.

« Allez fais-moi un massage et je t'en donnerai une, vraiment !

- Je boirai la tienne quand même, hein... »

Mais il n'avait pas besoin de se faire prier car il ne refusait jamais rien à James. 

« Aaah... soupira ce dernier lorsque son coéquipier malaxa ses épaules, sous les sourires de tous, fier comme un hippogriffe.

- Remus, si tu vas masser Sirius, on pourra commencer une chaîne ! se réjouit Peter.

- Hein, pourquoi moi ?

- Je croyais que t'étais bon en massage, c'est toi qui as appris à Sirius.

- Ouais...

- Si tu n'y vas pas, murmura Peter en lu donnant un petit cou de coude, ce sera moi. Ou quelqu'un d'autre. Elles ? »

Remus donna une petite bourrade à son ami qui s'esclaffait. Il avança vers Sirius, mal assuré. Son ami renversa la tête en arrière quand il arriva, sourire jusqu'aux oreilles, ses boucles noires toutes fraîches encore caressaient ses tibias. Remus se pencha et prit en coupe dans ses mains le crâne de Sirius, les doigts immergés dans la soie fraîche et noire, et du bout des doigts il pressa la nuque. Sirius soupira d'aise. Il rouvrit des yeux plus sincères, se dressa pour laisser Remus s'asseoir derrière lui.

« J'ai les mains froides...

- Chut. »

Il repoussa sur une épaule la masse de sa chevelure, caressa longuement ses omoplates de ses grandes mains bien ouvertes dont les doigts faisaient de toutes petites pressions, enveloppa le rond de ses épaules, sans appuyer : Sirius était trop tendu. Il recommença, au rythme d'une chanson qu'il avait dans la tête, remonta sur la nuque et quand il arriva aux tempes, la tête de Sirius reposait presque sur son épaule.

« Eh, n'arrête pas ! » rouspéta James.

Sirius soupira avec exagération et pinça les côtes de James avant d'ébouriffer ses cheveux et de tomber en arrière dans les bras de Remus qui tremblait de peur, ses bras sur les bras, les doigts à deux doigts de s'entrelacer, les doigts effrontés qui effleurent le poignet, Sirius, tu ne sauras jamais arrêter. 

Mais il calculait. Il se releva juste à temps, juste quand il eût montré ce qu'il fallait d'amitié, avant que les soupçons ne surgissent, laissa Remus là, désemparé et soulagé.


&


« Tu l'as ici, ce livre de contes avec Samson ?

- Non, j'y penserai la prochaine fois.

- Tu as quelque chose à me prêter ? Je n'ai pas envie de dormir. »

Remus posa le livre qu'il venait d'ouvrir et regarda dans sa table de chevet.

« Hum... Tu as lu L'île au trésor ?

- Oui, et Jekyll et Hyde aussi.

- Sherlock ?

- Pas envie maintenant.

- Je n'ai rien d'autre.

- Tu lis quoi ?

- Oliver Twist. Enfin, je commence tout juste, je... »

Remus considéra attentivement le visage impassible de Sirius. Une fossette finit par apparaître, puis l'éclat blanc des dents, la flammèche inextinguible de sa malice dans son oeil clair.

« Tu veux lire avec moi ? Tu rêves. Je lis trop vite pour toi.

- Ça m'étonnerait.

- Ah ouais ? »

Remus eut un regard vers le lit de James. Il dormait. Sirius alla fermer les rideaux. Il revint au chevet de Remus, demander presque confirmation.  

« On lit, hein.

- Qu'est-ce que tu veux qu'on fasse d'autre ?

- ... Ne me chatouille pas. »

Sirius eut un petit frisson de rire, tout enivré aux vapeurs de ce vin nocturne. Ils se poussaient du coude, en tee-shirt, bras nus, se bagarraient afin de mieux s'appréhender, tirer la couverture innocente du jeu. Ils lurent n'importe comment pour rivaliser de vitesse, leurs mains se disputant le coin des pages, tu déconnes, lâche, tu ne peux pas avoir déjà fini ! Oliver fut bientôt abandonné dans tous les sens du terme et échoua par terre. James grogna. Ce fut le silence et l'immobilité des accusés pétrifiés. Remus avait baissé la tête, il frottait ses ongles. Sirius tendit le bras hors du lit.

« Tu t'en vas ?

- J'allais ranger ton livre. Tu veux que je m'en aille ? »

Le silence de Remus vibra dans l'air, ses ondes s'insinuaient en Sirius sans résistance et court-circuitaient les battements de son coeur. 

« Range le livre. »

Il ferma aussi les rideaux. Remus s'était terré sous la couverture, désemparé de ne pas réussir à fuir, à renoncer. Il cachait son visage dans ses bras repliés. Sirius se coucha près de lui.

« Tu me chatouilles. » murmura Remus. 

Il faut que tu comprennes, j'ai toujours vécu dans la honte Les paroles de Dumbledore, c'est comme une nouvelle griffure sur mon visage : il a dit qu'il voyait et qu'il mentait pour moi, comment pourrais-je ? Il faudrait que je sois raisonnable pour tous ceux qui ont fait du mal pour moi, ceux qui ont eu assez pitié pour me préserver. Je n'en peux plus de la honte, elle roule dans mes veines, lourde et grumeleuse, elle grimpe pour s'enrouler dans mon esprit. J'étouffe et je me sens disparaître, tout n'est qu'un jeu, un rôle derrière lequel je disparais et tant qu'il y aura un spectateur, ce n'est pas moi, ce ne sera jamais moi.

Sirius contemplait sa silhouette. Il résistait au désir de déplier le bras et l'attirer contre lui. Il se sentait si petit, maladroit, ses doigts osaient à peine caresser la peau froissée des poignets de Remus, c'était déjà trop, cet amour inespéré, insoupçonné, qui le submergeait.

Il glissa le bras sous sa nuque.

Inconvenant, c'était William.

Remus ? Chaotique. De ce chaos des étoiles qui, en se rencontrant, explosent pour créer un nouvel univers. Un monde à nous.

Jamais, Remus ? Jamais ? Mais tu as déjà tout changé. 

Vous ne pourrez pas nous arrêter, Dumbledore, toute votre magie ne pourra pas m'arrêter

Rien au monde ne pourra, nous sommes allés trop loin, nous l'avons 

dépassé, le monde, nos âmes là-haut se sont embrassées depuis longtemps

Alors condamnez-nous, je prends la condamnation s'il le faut mais

C'est vous qui en porterez le poids :

Nous n'avons rien fait de mal.



"Tu me chantes une chanson ?"

&

"Dans mes rêves, je te fais mourir,
je n'y peux rien, et ça me fait pleurer
je voudrais tant vivre pour toujours et tenir mes promesses,
avec toi pour toujours

Dans mes rêves je te vois vivre,
Ouvre les yeux pour me pardonner
comment puis-je vivre avec tant d'amour ?
alors je chante

Sois ma Wendy, je serai ton Peter Pan
Mon amour, prends-moi la main
Nous pouvons toujours marcher si nous n'avons pas envie de voler
Nous pouvons vivre, je n'ai pas envie de mourir

Allez mon amour, il n'y a rien pour nous ici
Est-ce que c'est bien ? Tu connais toutes les réponses
Dans mes rêves, je te vois m'embrasser
Au réveil, tu me manques déjà

Nous sommes si proches, mais nous avons grandi séparés
Toutes les maladies commencent dans le cœur
Un petit quelque chose dans le sang
Je ne peux pas vivre avec tant d'amour à chanter"

&

C'est une traduction libre de la chanson d'Arcade Fire. Elle est sortie en 2017 alors Remus n'a pas pu la chanter, mais je la voulais là.

https://youtu.be/cG4H5N5n2yM

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