Raconte moi ta réalité
" Cher Raph ❀
Alors désormais je t'appellerai Raph', j'espère qu'un jour j'arriverais à le prononcer à voix haute. Tu as dit que ça te ferait perdre tous tes moyens, non ? J'ai bien envie de tenter pour le voir alors. J'aimerais faire pétiller ton cœur d'exaltation tout comme tu y parviens si bien avec moi. Écrire ça me rend timide, c'est idiot mais je sais que je suis en train de rougir comme un adolescent en train de faire sa première déclaration. C'est peut-être indirectement ce que je suis en train de faire en réalité...
Tout ce que tu as écrit sur mes possibles remarques ambiguës et sensuelles m'a énormément rassuré. Ça m'a fait beaucoup de bien de lire que quelqu'un me respectait de la sorte. Tu as certainement raison, je joue malgré moi avec cette tension entre nous parce que je te désire ? Ça n'est pas impossible, tu es un très beau garçon après tout. Je crois que plus j'y pense plus j'ai envie de me laisser aller, te témoigner que tu me plais et que même si je ne me sens pas à la hauteur, j'aimerais te prouver que je vaux quelque chose. Que j'en vaux la peine. Je sais que je suis très probablement un fardeau... Et j'ai vraiment peur que tu viennes à penser ça. Je ne parle ou très peu, je ne veux pas de sexe pour le moment, je suis interné en psychiatrie, j'ai arrêté les cours, j'ai tenté de me suicider... Rien de tout ça ne donne franchement envie de flirter avec moi et quand je me retrouve face à cette réalité le soir tout seul dans ma chambre ça me rend triste... Je n'essaie pas de te faire t'apitoyer sur mon sort ! Pas du tout, j'essaie juste pour une fois de m'ouvrir face à mes sentiments... C'est ce que ma psy m'a dit de faire, elle veut que je parle de ce que je ressens, que je pose des mots sur ce qui me tourmente pour qu'elle m'aide à aller mieux. Mais je n'y arrive pas. Je lui en veux...
Je suis frustré à cause d'elle et cet HP. Je leur ai demandé mon portable pour communiquer avec toi car tu me manques et que j'en ai marre d'être contraint à te parler par lettres par-ci par-là. Alors j'ai commencé à montrer mon mécontentement. Bien sûr je n'arrive pas à parler alors mes actions sont limitées et ça n'a peut-être pas un gros impact mais c'est la manière que j'ai trouvé pour me ''rebeller''. Je ne comprends pas pourquoi je devrais obéir sans ronchonner et faire ce qu'on me dit alors que eux ne respectent pas mes désirs. Je ne demande pas grand chose pourtant : seulement à te parler plus... Je n'ai même pas quémander à te voir alors que j'en meurs d'envie.
Donc jusqu'à ce qu'ils m'écoutent je fais la grève de la faim et reste muet face à la psychiatre. Je ne veux pas lui parler de mes problèmes tant qu'elle refusera de m'aider comme j'en aurais besoin.
Moi aussi j'avais trouvé ce baiser intime et intense... Tu n'es pas bizarre. Tu dis que tu l'es à quelqu'un qui est complètement fou et interné dans un HP, ne t'inquiète pas, tu es parfaitement normal. Ou au contraire tu es peut-être aussi fou que moi ? Va savoir mais j'ai également apprécié ce contact entre toi et moi, j'avais des papillons dans le ventre si tu veux tout savoir...
J'ai beaucoup aimé que tu me parles de ta vie à la fac et ce que tu faisais pour t'occuper, je suis réellement content d'apprendre à te connaitre un peu plus. Ça n'est pas franchement en étant enfermé que je pourrais te découvrir alors même si c'est petit à petit par courrier, ça me convient.
Léo ❀ "
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" Cher Léo ❀
J'aurais aimé te voir rougir. Tu es mignon quand c'est le cas. J'ai peut-être l'air d'être plus à l'aise et plus assuré mais lorsque je suis face à toi je dois être tout autant rouge en réalité. Je ne sais pas si tu l'as remarqué..."
Oui je l'ai remarqué. Et à chaque fois que je le vois rougir ça déclenche quelque chose de particulier en moi. Je ne saurais pas comment l'expliquer mais c'est comme si tout mon corps réagissait. En particulier mon ventre qui s'amuse à faire des loopings. Il est très charmant quand il rougit. La fois où c'était le plus visible était lorsque nous étions tous les deux dans le couloirs à parler parce que j'allais mal. Lorsqu'il a quitté son bonnet parce que j'ai dit qu'il était très bien sans il avait profondément rougi, cette image est gravée dans ma mémoire. Je reprends ma lecture, essayant de ne pas trop me perdre dans mes pensées.
" Si tu prononces mon prénom j'aurais probablement envie de t'embrasser, comme cette fois dans cette chambre d'hôpital..."
Je m'arrête de lire sentant mon cœur s'accélérer et me faire perdre tous mes moyens pendant plusieurs secondes. Je me fais de l'air, ayant l'impression de manquer de souffle et de mourir de chaud en même. Mon dieu mais qu'est-ce qu'il lui a pris à me dire ça ? Il se rend compte de l'effet que ça me fait ? Je suis certainement rouge comme les pivoines maintenant ! Malgré la gêne que je ressens je me sens content. C'est l'une des premières fois où on me témoigne du désire et c'est spécial. Ce que ça déclenche en moi est puissant. Se sentir attirant et désiré me fait chaud au cœur et au bas ventre. Je me mords doucement la lèvre inférieure pour tenter de camoufle le profond sourire qui prend place sur mon faciès mais rien n'y fait, je me mets à sourire de manière béat. Je souffle longuement pour reprendre mes esprits et me concentre à nouveau sur sa lettre ornée de fleurs qu'il a dessiné lui-même.
" Tu me fais une déclaration ? C'est adorable ❀ Tu ne préférerais cependant pas attendre de me voir ?
Sache que ce que tu mérites d'être respecté tu sais. Tu as écrit que tu étais content que quelqu'un te respecte et c'est vrai que lire ça est un peu révoltant... Car cela sous-entend que tu as eu à faire à des personnes qui ne t'ont pas respectés et pour être honnête ça m'énerve et ça m'agace de lire cela. Tout être humain sur cette planète se doit d'être chéri, tu ne fais pas exception. Tu m'as dit avoir eu une mauvaise expérience avec quelqu'un je m'en rappelle... Je sais que tu n'es pas prêt à m'en parler mais le jour où tu le seras je serai là pour t'écouter et panser tes blessures.
Je voulais juste te dire que peu importe ce que tu as subi ça n'était pas de ta faute, ça n'est toujours pas de ta faute et ça ne le sera jamais. Tu es précieux et tu mérites d'être traité comme tel."
Je m'arrête de lire sentant les larmes me monter aux yeux. Je renifle pour m'empêcher de céder, je ne veux pas tâcher sa lettre. Je sens que mes mains tremblent, je pose alors sa lettre plus loin essayant de me remettre de mes émotions. Lire ce qu'il me dit, que je suis précieux, que ça n'était pas de ma faute, toutes ces choses sont lourdes à encaisser émotionnellement. Je pleure doucement en silence me rappelant certaines choses et essayant de me dire qu'il a raison, que je ne le méritais pas mais c'est plus fort que moi. Malgré tout je suis heureux qu'il me l'ai dit. Ça me fait pleurer, c'est vrai mais ça me touche également énormément. C'est dur à lire mais cela n'en retire en rien à la pureté de ses mots et au bienfait qu'ils ont sur moi. Depuis tout ce qu'il s'est produit avec lui et tout ce qu'il m'a fait j'ai rêvé qu'on me console, qu'on me dise que tout ça n'était pas de ma faute. Alors cette lettre est une sorte d'exutoire, c'est difficile mais c'est également libérateur. Je sèche maladroitement mes larmes et reprends la lettre en moi pour en lire la suite :
" Oh non Léo... ne fais pas ça s'il te plaît. Ça n'est vraiment pas une bonne idée... Premièrement tu te fais du mal sans même t'en rendre compte, tu te prives de nourriture et c'est vraiment une mauvaise chose. Si tu fais cela et que tu boycottes l'HP ça ne fera qu'empirer les choses et leur témoigne que tu souffres bel et bien d'un trouble qui n'est pas guéri. Ça ne va pas leur prouver que tu vas mieux. Tu peux pas faire ça si tu veux espérer me parler plus ça. Je suis pas d'accord avec cette manière de faire."
Je me tends. Il est en train de m'engueuler ? Je pensais simplement bien faire... Je voulais juste passer plus de temps à lui parler moi... Comment il peut me reprocher cela ?! Ça n'est pas comme si je faisais ça pour une stupide raison ! Je fais ça pour lui pourtant ! Je fronce les sourcils et continue :
" J'insiste sur le fait que c'est pas responsable. Toi aussi tu me manques mais ça n'est pas de cette manière qu'on va pouvoir passer du temps ensemble ou plus se parler. C'est idiot Léo..."
Je m'arrête et décide de ne pas continuer la lettre me sentant profondément blessé et attaqué. Je plie alors à nouveau la lettre, ravalant mes larmes et laissant cette boule de tristesse me nouer la gorge. Une fois la lettre pliée je la remets dans son enveloppe à sa place, sans un mot, sans un sanglot. Dans la dure brutalité du silence. Je me sens sincèrement triste. Cette lettre commençait pourtant si bien et au final il s'est juste mis à m'engueuler. Voilà, je le savais je ne suis qu'un boulet. Je savais bien que j'étais instable et complètement stupide. Lui-même le pense, il l'a dit à la fin.
En réalité je suis complètement toxique, un bon à rien. Je suis parfaitement minable, ces pensées m'envahissent et je sens que la noirceur de mes idées s'intensifie.
Ça toque.
Je me ressaisis et sursaute. Alexis entre dans la chambre et me fait signe de la main avec un grand sourire sur le visage. Moi je tourne simplement la tête tentant de calmer mes tremblements et toute la douleur qui me traverse. Je savais bien que je n'aurais pas du survivre ce soir-là. J'en étais sûr, je suis voué à être un simple poids, une personne médiocre qui ne mérite rien et certainement pas Raphaël. Cette pensée m'arrache le cœur. J'ai envie de pleurer à chaudes larmes, de hurler toute ma souffrance et d'arracher mes sutures.
- Ça va ?
Je laisse passer un bref son de ma bouche comme pour lui dire que oui et que je veux simplement qu'il s'en aille et me fiche la paix. Je veux être seul, me noyer dans mon chagrin et dans le mal être qui me tient en haleine. J'ai si mal au cœur... Je jette un bref coup d'œil vers Alexis quand je remarque qu'il a un sac rempli d'affaires. Qu'est-ce qu'il fiche ? Je ne pleure pas, je reste simplement choqué et le toise longuement. Alexis qui s'affale sur le lit face au mien semble remarquer que mon regard est braqué dans le sien.
- Me tue pas avec ton regard je te ferais signaler que c'est toi qui m'a pris ma chambre. On m'a bougé d'ici quand tu es arrivé pour faciliter la transition, tu avais l'air de souffrir de phobie sociale alors on m'a fichu ailleurs mais d'après la psychiatre je peux revenir maintenant.
Je ris à voix haute. Alexis semble confus. Il fait une tête étrange me témoignant qu'il est perdu face à ma réaction. Je ris fortement de manière âpre et parfaitement perdu à mon tour. On se fiche de moi ? C'est ma journée ou quoi ?! Le sort est vraiment en train de s'acharner.
- C'est une blague, j'y crois pas...
Laissais-je passer tout en continuant à rire comme si j'étais complètement fou, parfaitement dépassé par les évènements et par mes sentiments.
- Ça va pas ? Tu ris, c'est super chelou. Tu ris pas, toi, moi je ris, pas toi.
Je me redresse hors de mon lit comme pour évacuer toute ma frustration. Je tourne en rond, mains sur les hanches et parfois mains agrippant mon visage. Je ne sais pas comment réagir, mon corps bouge tout seul mais je ne comprends pas ce qu'il se passe. J'ai l'impression de ne plus être moi-même. Je veux juste faire taire cette petite voix dans ma tête qui me dit de m'arracher mes sutures, de tirer dessus et de céder à cette pulsion morbide. Mes mains tremblent, elles essaient de se poser n'importe où sur mon corps loin de mes cicatrices mais elles essaient de s'y diriger. Je sens que cette envie est forte, qu'elle m'appelle et me crie de céder. Alexis semble remarquer ma détresse puisqu'il s'approche vers moi, sourcils froncés.
- Hey Léo...
Comment il sait comment je m'appelle ? Je me frotte les cheveux pour tenter de garde mes mains occupées. Alexis s'avance de plus en plus vers moi. Je respire plus fort, je me sens complètement différent, absolument plus maitre de moi-même. Pris d'un élan de folie et de désespoir je pose une de mes mains sur une de mes cicatrices mais Alexis bondi sur moi et m'agrippe par les épaules.
- Fais pas de connerie.
Ce contact me gèle sur place. Je me fige, posant mon regard dans le sien qui est doux et réconfortant. J'ai envie de me retirer de son emprise mais j'en suis incapable. J'ai juste envie de fondre en larmes. Je ne vais pas bien... Pas bien du tout alors pourquoi je le nie, pourquoi je ne vais pas simplement voir la psy pour lui dire que je souffre... ?
- Je veux mourir...
C'est tout ce que je dis, avec peine et souffrance. Alexis me détaille, son regard semble se porter sur l'enveloppe qui est sur mon lit.
- Vous vous êtes disputés ?
Je me défais brusquement de son emprise, n'aimant pas être touché par n'importe qui. Son contact ne m'a pas fait peur, il est vrai mais malgré tout je veux qu'il me lâche. La seule personne dont j'accepte le toucher est Raphaël mais comme un con j'ai tout fait foiré. J'ai tout gâché.
- J'ai tout gâché, je suis vraiment qu'une merde.
Ma voix craque. Je ne contrôle plus rien, pas même ma parole, les mots sortent sans me consulter. Je me surprends à parler alors que je n'en ai pas envie mais au final c'est plus fort que moi, je prononce ces mots.
- Arrête, dis pas ça... Je sais ce que c'est que de vouloir mourir. Je comprends dans quel état tu es mais tu veux vraiment faire ça ? Tu as une solution facile, tes points de suture sont loin d'être solides mais c'est vraiment ce que tu veux ?
- Mais je fais n'importe quoi, j'en ai marre d'avoir envie de crever à chaque seconde de cette vie.
- Alors fais quelque chose. Depuis que tu es ici tu luttes contre tout le monde. Et pourtant tout le monde est là pour t'aider. La psy se préoccupe vraiment de toi, elle n'attend qu'une seule chose, que tu lui dises que tu vas mal pour te prendre en charge comme il se doit.
- Elle en a rien à foutre de moi, je suis qu'un chiffre dans ses stats' de médecin.
- Tu dis n'importe quoi. Si elle s'en foutait elle t'aurait laissé partir le soir où tu as fait ta TS. Tu connais le nombre de médecin et de psy qui ne prenne pas au sérieux les TS et laisse simplement la personne s'en aller ? Le nombre est effarant, si elle t'a suggéré de te faire interner c'est parce qu'elle veut t'aider, sinon elle t'aurait laissé partir.
Je le regarde, fuyant malgré tout son regard. Il a probablement raison... Pourquoi j'ai toujours tort ? C'est quand même fou, je ne suis pas capable de réfléchir avec mon propre cerveau ou quoi ? La question c'est est-ce qu'au moins j'ai réellement un cerveau ? Oui un cerveau stupide qui n'est visiblement pas capable de fonctionner décemment.
- Et quand est-ce que je vais sortir hein ? Regarde toi un peu, t'es toujours là !
- C'est que t'es carrément bavard en fait !
Je serre les poings, je ne sais pas ce qu'il me prend. Oui je parle, bien trop d'ailleurs. Je n'ai jamais autant parlé pas même avec Raphaël alors que j'ai tissé quelque chose avec lui. Et pourtant dans mon état de folie je me laisse aller avec Alexis et je m'exprime sans penser à rien. Comme si j'étais dans une phase incontrôlable.
- Et puis mon histoire est pas vraiment comparable, je peux pas sortir, j'ai mes raisons. Je suis enfermé ici, c'est vrai mais ça ne veut pas dire que je ne vais pas mieux. Je suis guéri, je le sais, je le sens. C'est juste que je peux pas sortir mais ça n'est pas que je suis retenu contre mon grès, c'est plus compliqué que ça. Je dois attendre ma majorité pour sortir.
- Donc tu n'es pas libre de sortir si tu veux sortir demain par exemple ?
- Non.
- Ah mais c'est génial ça ! Je vais rester bloqué ici toute ma vie bordel...
Mes larmes affluent sur mon visage, je dois être incroyablement moche. Quoique, pas bien plus que d'habitude. Ça n'est pas comme si j'avais un charmant visage après tout. La voix douce d'Alexis retentit dans la pièce et transperce la panique qui me gagne :
- Mais non c'est juste que pour me protéger. J'ai un beau père violent... Il s'arrête un instant et puis reprend : sur le plan physique, psychologique et sexuel. Il est passé en justice, cette histoire est passé en procès et alors que lui est en taule il a été décidé que je serais pensionnaire en HP jusqu'à ma majorité.
Je me calme à l'entente de ce qu'il me dit. Je renifle bruyamment et reste choqué par ses paroles. Je ne pensais pas qu'il me dirait ça de manière si directe et ouverte. Alexis s'assied sur mon lit et il tape dessus pour que je fasse de même. Je reviens m'asseoir machinalement me sentant pleinement lavé de toutes mes forces. Je m'affale sur mon lit et le détaille, une expressions sincèrement peinée sur le visage.
- C'est horrible...
- Arrête de me regarder comme ça, rit-il. Je vais vraiment mieux. J'ai été abusé pendant de longues années mais j'ai réussi à aller mieux. Avec l'aide de la psy notamment j'ai pu comprendre que ça n'était pas de ma faute et j'ai réussi à m'ancrer ça dans le crâne. Les viols que j'ai subi par mon beau-père et même le fait qu'il me battait maintenant ça va je les encaisse. Ça fait parti du passé.
J'ouvre grand les yeux, à nouveau les mots sont bloqués. Je veux lui poser plein de questions, chercher à comprendre comment il peut parler si ouvertement de choses aussi cruelles et dures mais rien y fait. La parole m'a à nouveau quitté. Maintenant que je suis calme, je ressens à nouveau toutes les défaillances de ma santé mentale : la parole n'est qu'une illusion qui vient de disparaitre. J'attrape alors rapidement une feuille sur ma table de chevet ainsi que mon stylo et écris :
" Comment tu peux dire tout ça de manière si ouverte et décontractée comme si de rien était... ? Ça semble si facile pour toi de raconter ça..."
Je montre le papier à Alexis qui lit mon mot. Ce dernier a un petit rictus.
- Faut pas croire que ça s'est fait du jour au lendemain. Je me suis pas réveillé un beau matin en me disant que oui j'avais été abusé mais que c'était rien, c'était ok, ça n'avait pas à m'atteindre. Au début je n'arrivais pas à en parler, c'est trop dur. J'étais incapable de mettre des mots sur ce qui m'était arrivé, je voulais pas y croire. C'est comme si je refusais la réalité alors je la fuyais et bannissais ces termes : viols / abus / violenté. Je m'étais renfermé sur moi-même, j'étais mort de honte et je voulais pas raconter tout ça.
Je bois ses paroles. Alexis n'est pas triste, je peux le voir, il me raconte ça de manière neutre. La seule chose que je remarque cependant est qu'il ne croise pas mon regard. Le sien est braqué sur la fenêtre, il regarde dehors. Je me sens plus calme. Je respire à nouveau normalement et même si mes joues me brûlent encore à cause du torrent de larmes salées que j'ai versé, je suis apaisé. Cette crise aiguë est passée.
- Mais avec le temps j'ai fini par comprendre. J'ai fini par comprendre que c'est uniquement en mettant des mots sur les choses qui nous sont arrivées qu'on peut y faire face et les combattre. C'est lorsqu'on met des mots sur les actions et qu'on les prononce qu'on parvient à prendre réellement conscience dans leur existence et c'est la première étape pour aller mieux. Parce que tant qu'on ne les nomme pas ces traumatisme, ils restent coincés en nous. Ne pas les nommer, c'est les fuir. Alors j'ai appris à en parler, maintenant je peux dire ce que j'ai vécu sans problème parce que je sais que c'est dans mon processus de guérison et que de toute manière maintenant je sais que je ne méritais pas tout ça. Je l'ai compris. Mais ça prend du temps.
Alexis me regarde à nouveau, je me sens pris au dépourvu. Ses paroles me touchent, j'ai à nouveau envie de pleurer parce que je me vois au travers lui. Son passé ressemble au mien sauf que ce que j'ai vécu ne m'a pas été fait par un membre de ma famille mais par un ancien copain. Alexis me sourit comme s'il voulait me réconforter.
- C'est dur d'aller mieux, je le sais mieux que quiconque, j'ai été à ta place. Je sais que l'envie de mourir est si forte qu'elle nous fait presque perdre la raison mais je sais aussi que la vie est super belle quand on prend le temps de l'observer.
Ses paroles sont si belles. Il est une personne qui dégage une positivité incroyable et je m'en veux d'être si faible à côté de lui. Il est tellement fort et quand je le vois comme ça, avec ce beau sourire sur le visage que je veux aller encore mieux. Raphaël et lui sont deux vecteurs qui me donnent de l'espoir. Quand je regarde Alexis je vois qu'on peut sortir de la dépression, qu'on peut s'en remettre et qu'il est possible de vivre une vie pleine de positivité. Je veux expérimenter cela. J'attrape le papier :
" Tu es fascinant. Tu es tellement positive et c'est inspirant pour être honnête... Même si je pense que je n'arriverais jamais à mettre des mots sur certaines choses..."
- Tu en as l'impression maintenant parce que ton traumatisme est encore jeune et que tu n'as pas appris à le maitriser et à y faire face de manière saine mais ça viendra. Ça prendra le temps qu'il faut mais le temps permet de guérir tous le maux. Tu sais, la clé pour aller mieux c'est la volonté. Tu en as de la volonté ?
Je fais oui de la tête. J'en ai quand je pense à Raphaël même si je lui en veux et que je me trouve nul. Je suis toxique dans sa vie et lui cause des soucis et je m'en veux car j'aimerais être un être de lumière comme Alexis.
- Alors si tu as de la volonté tu peux y arriver. Tu n'es pas obligé de dire ce que tu as traversé à voix haute tout de suite. Si tu n'es pas prêt ça viendra quand il le faudra. Moi j'ai eu besoin de mois pour ça, j'étais vraiment en miettes quand je suis arrivé et regarde maintenant je vais super bien.
Je me mets à sourire délicatement. Il a réussi à me calmer et il me parle sans tabou, sans chercher à arrondir les angles et ça me permet de prendre conscience d'énormément de choses.
" Mettre des mots sur ce qu'il nous est arrivé est indispensable ?"
- Oui, c'est la phase la plus dure parce que c'est celle qui fait pleinement prendre conscience de la réalité mais une fois fait, tout n'est que plus simple. C'est un long processus mais c'est plus simple.
Sa voix est d'une douceur inconcevable, j'adore l'entendre me parler. Il est presque plus efficace qu'une psy, peut-être justement parce qu'il a été à ma place et qu'il sait parfaitement de quels mots j'ai besoin pour aller mieux ? J'attrape à nouveau mon stylo et le serre fortement dans mes doigts. Je l'appuie sur le papier, je tremble fortement. Je déglutis difficile mais tente malgré tout de rester calme et de franchir une nouvelle étape dans ma vie.
" Demain"
Pour l'instant ma phrase s'arrête là. Je n'arrive pas à écrire plus. Je refoule un flot de larmes et continue lentement mon supplice :
" j'irai parler à la psy "
Je lâche le stylo et regarde la réaction d'Alexis. Il fait oui de la tête comme pour me témoigner qu'il a bien compris ce que j'ai écrit. Je me sens complètement honteux à l'idée de raconter à quelqu'un ce qu'il m'est arrivé. Je ne sais pas si j'arriverais réellement à m'exprime avec la psy... Mais j'aimerais tenter parce que j'en ai marre d'être tenu en laisse par mes démons.
- C'est déjà une grande étape ce que tu viens de faire. Il sourit.
**********
Pour cette semaine j'aurais donc posté 3 chapitres (sur 3 jours à la suite au final aha), j'espère qu'ils vous ont tous plu ! Celui-là était pas le plus joyeux, c'est vrai mais j'espère malgré tout que vous avez apprécié toutes les nouvelles informations qu'on a dans ce chapitre !
Aviez-vous imaginé que c'était ce qui était arrivé à Alexis ? J'aime tellement ce personnage ~
J'ai également fait un autre dessin avec le personnage que je vous ai présenté hier ! Merci d'ailleurs pour tous vos retours dessus. Même si mon style n'est pas un style que vous appréciez nécessairement aha, tant pis ~
J'ai donc crée le pairing de mon perso et je vous le présente dans ce chapitre. J'ai également pu trouver un semblant d'histoire à ces deux personnages ! Il va falloir que je réfléchisse plus amplement sur ce que je pourrais créer mais c'est déjà un début ! Et puis qui sait, ça pourrait être ma prochaine histoire sur WP ~ Ou pas, car j'ai déjà trop d'idées pour mes prochaines fictions xD Je dois avoir sans exagérer une bonne dizaines de synopsis xD Peut-être que je vous présenterai bientôt toutes leurs couvertures pour que tu choisissiez l'histoire qui semble vous inspirer le plus ~ ;)
EDIT : PTDR Je me suis fait strike mon dessin :)))) Et ce avant même que ce chapitre ne soit publié, j'ai un peu la haine (spoiler : en réalité beaucoup). Ce dessin n'était même pas érotique, seulement quelques peu suggestif, j'en ai marre de WP qui sanctionne n'importe quoi. Je suis désolé mais mon dessin ne méritait pas de se faire supprimer et que je recoive ENCORE un avertissement, à côté de ça il y a des histoires malsaines, toxiques basées sur la violence et le viol et ça, il y a pas de soucis, personne les retire. Donc je suis énervée, parce que j'ai catégorisée cette histoire comme ''mature'' donc au bout d'un moment s'il y a du contenu mature et donc des dessins suggestifs faut me foutre la paix. Bref, j'ai beaucoup de haine. Mes idéaux collent sincèrement de moins en moins avec cette plateforme...
Je suis déçue, j'aurai voulu avoir des retours... Je n'ai personne à qui montrer ce dessin du coup...
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