Chapitre 10 - Le choix des Carrys

— Qu'est-ce que vous faites là ? s'exclama une voix aigue.

Je pivotais et découvrais trois silhouettes dans la tempête. Elles étaient enveloppées de capes sombres qui voletaient dans l'air chaud et un turban protégeait l'intégralité de leur visage, ne laissant que les yeux.

L'une d'elle fonça sur River. Elle apposa délicatement sa main sur son avant bras. C'était des doigts fins et élégants de jeune fille certis d'anneaux dorée aux falanges. Soudain, on aurait dit qu'une bulle éclatait autour du radiant, projetant toute la Luminescence au loin. L'inconnu aspirait la magie de l'air pour créer un espace sécurisé. C'était une catalyst ! Je tombais dénue.

River secoua ses cheveux bruns et les rejeta un arrière. Ses yeux papillonèrent, comme s'il reprenait ses esprits. Il parcouru la cours des yeux et ses épaules se détendirent.

— Ravi de te voir Lili, dit-il simplement.

J'entendis l'inconnu pousser un soupir agacé et se tourner vers moi pour me dévisager.

— Ce sont vos nouvelles recrues ?

Il hocha la tête.

— Tam et Ell vont s'en occuper pendant que je m'assure que tu récupères sagement. Qu'est-ce qui t'es passé par la tête ?

Un petit sourire taquin éclaira son visage.

— Je m'ennuyais.

Elle lui mit une petite tappe sur l'épaule et il rit. Leur complicité me sauta aux yeux et ma curiosité fut piquée. Etait-ce sa compagne ? En quoi cela me concernait ? C'était de la pure curiosité. J'écrasais violemment le choeurs de voix qui s'étaient mis à brailler dans ma tête. Je regardais River et la catalyste retourner vers les appartements de Maltar comme s'ils étaient seul au monde. Je me sentis vexée. J'étais donc si insignifante ?

Je pensais sincèrement que j'allais finir au fond d'un cachot pour les prochaines heures mais contre toute attente, les deux autres catalysts m'emmenèrent avec eux jusque dans la petite tourelle de la demeure. Placée au deuxième étage, elle surplombait l'ensemble des bâtiments et offraient une vue dégagée sur les abords du marché. Les ouvertures étaient assez étroites pour permettre de surveiller l'extérieur sans être asphyxié par la tempête. L'un d'eux s'installa sur le rebord de fenêtre et l'autre s'assis en tailleur à même le sol. Je fis de même en m'accoudant contre le mur.

— A part cet abruti, tout est calme, annonça le vigile.

Enturbanés comme ils étaient, il était difficile de les distinguer. A la voix, j'avais compris qu'il y avait une femme et un homme. Malgré leur apparence assez froide envers moi, je tentais d'engager la conversation. J'avais besoin de comprendre ce qu'il venait de se passer et qui ils étaient.

— Vous êtes des catalysts ?

Leur attention convergea vers moi, dure. Ils échangèrent un regard et finalement, l'un d'eux dégagea un peu sa tenue pour me dévoiler le visage d'une femme. Je fus déstabilisé par son âge. De petites rides en forme de pâtes d'oies ornaient le coin de ses yeux clairs. Ma surprise la fit sourire et détendit un peu ses traits dure. Cette femme devait avoir plus de quarante ans. Elle avait donc connu la guerre et surtout, elle avait miraculeusement survécue à l'extermination. C'était impossible.

— Quel âges as-tu ? me demanda-t-elle.

— Dix sept ans, murmurais-je.

Toute ma confiance en moi s'était envolée, trop intimidée par l'aura de cette femme.

— Tes parents ont eu l'audace d'essayer de te tenir loin des griffes de l'Empire ?

Je hochais la tête.

— Qu'en penses-tu ?

Je clignais des yeux. Je ne m'étais jamais vraiment posée la question. J'écoutais les grommèlements de Gedd qui voulait nous faire rejoindre l'Empire ou les refus autoritaires de ma mère. Je n'avais jamais cherché à me demander ce que je voulais. J'étais heureuse et je ne voyais pas pourquoi cela devrait changer. Puis les choses avaient changé.

— C'était courageux, dis-je avec hésitation.

Mes parents étaient deux radiants. Ils auraient pu m'abandonner comme une péstiférée. Ils avaient choisi de prendre tous les risques pour un petit être à peine né. Je savais que cette décision avait été conforté par la naissance similaire de Lior et c'est sans doute pour cela que nous partagions un amour fraternel sans limite. Nous étions né sous les mêmes hospices. Alors oui, certains diraient que c'était stupide et téméraire mais je ne voyais que de l'amour et du courage.

— Alors pourquoi parais-tu si surprise que des catalysts protègent des radiants ?

La consternation m'échauffa.

— Ca n'a rien avoir !

— Pourtant, tu te sens trahis de voir les tiens travailler avec des hommes comme Maltar et River.

Je soufflais. Oui je me sentais trahie et j'étais attérée qu'elle ne comprenne pas pourquoi.

— J'ai été enlevé et vendue contre mon gré, m'exclamais-je. Je suis l'esclave d'un homme qui compte se servir de moi pour me faire combattre de force pour le bon plaisir d'autres radiants. Notre peuple a été décimé et depuis, on continue de nous considérer comme des fugitifs. Je dois tous les jours remercier le ciel d'être encore en vie.

Je m'étais laissée emporter et je me renfermais brusquement. J'avais honte de montrer ma rancune. Sous ses yeux scrutateurs, j'avais la désagréable sentiment d'être stupide. Naïve.

— Tu considères tes parents comme faisant partie d'un peuple différent ?

Non. Je savais qu'ils étaient des radiants mais j'étais incapable de les associer à la même image que River. Mon silence répondit à sa question.

— Et nous ? Dans quelques camps nous places-tu ?

Je continuais de fixer mes pieds.

— Je ne sais pas, avouais-je.

Ils n'avaient rien à voir avec l'aura solaire qui enveloppaient chaque radiant. A vrai dire, ils ressemblaient exactement à l'image que je me faisais des catalysts. Enveloppés d'obscurité, calculateurs et plein de sagesse. Lior ressemblait à cela. C'était sans doute pour cela que je me sentais si trahie. J'avais toujours secrètement espérer rencontrer mes semblables et je pensais que ce jour là, ils viendraient nous sauver, nous emmener quelques part où nous pourrions vivre sans la peur de la Rey Ley.

Mais rien n'arrêtait la Rey Ley. Même ici, au confins des méandres dangereux du désert, elle se cachait dans le moindre recoin, telle une épée de Damoclès. Il y avait de la pitié dans leur regard et ça me hérissait le poil.

— Les gens comme toi ont un avenir déjà tracé, dit-elle avec douceur. Tu as eu de la chance de pouvoir vivre avec ta famille aussi longtemps à l'abri du monde. Pas plus tard qu'hier, un catalyst plus jeune que toi a été décapité sur la place du Jugement. Il vivait sur la Bordure. Il a joué de mal chance et les soldats l'ont attrapé.

Mon esprit prit un malin plaisir à imaginer Lior à la place et la douleur comprima mon plexus. Elle avait raison. Gedd avait raison. Et je ne m'en rendais compte que maintenant. Nous avions été surprotégé au point de finir par oublier la réalité, par croire que ce n'était pas si terrible que cela. Nous avions simplement eu de la chance. Hors, je ne pouvais pas continuer à compter sur la chance ou nous finirions tous les deux sur cette place.

Je pris conscience de la réalité de notre situation. Il fallait que je trouve le temps d'en parler avec Lior. Fuir le marché n'avait aucun sens. Ou irions-nous ?

Je comptais bien retrouver mon indépendance mais il était peut-être temps de l'envisager autrement.

— Qui êtes-vous ? demandais-je enfin.

Cette fois, ce fut son acolyte qui prit la parole.

— Nous sommes des Carrys. Nous travaillons au sein du marché pour le protéger des aléas du désert ou des débordements à cause d'un radiant. Maltar nous demande de venir chez lui en cas de Briseuse, au cas ou l'un de ses chéris perdrait la tête.

Il me lança un regard de biais et malgré le turban je vis une lueur amusé dans ses yeux.

— J'avoue que je ne m'attendais pas à tomber sur une petite catalyst. Maltar a plutôt la réputation de nous rapporter des radiants bien énervé.

J'imaginais très bien. J'avais du avoir l'air d'un pauvre petit chaton égaré. Pas étonnant qu'ils me concidéraient avec autant d'insignifiance par rapport aux autres prisonniers.

— Vous êtes un peu comme des mercenaires ? Vous travaillez pour des hommes comme Maltar ?

Elle plissa les yeux.

— Nous ne travaillons pour personne en particulier. Si nous avons choisi de devenir des Carrys c'est par choix. Notre statut nous offre une sorte de passe droit. Grace à nous, la plupart des gens peuvent vivre ici en sécurité. Tant qu'il s'agit de bien de première nécéssités. Pour plus, il nous suffit de passer des accords comme avec Maltar qui nous demande de venir assurer une sécurité renforcée lors des Briseuses par exemple.

Je pris le temps d'intégrer ce qu'elle venait de me dire. Cette femme avait choisi de vivre au sein du marché noir des Mirages, au milieu de ces gens sans foi ni loi et elle participait activement à son maintient. J'étias incapable de la voir autrement que comme quelqu'un de censé et de raisonnable. Il me fallait donc essayer de comprendre comme cette femme avait pu faire ce choix.

— Comment faites-vous ?

Son regard se fit plus dur.

— Pour une fugitive, tu ne connais pas grand chose à la vie. J'ai vu bien pire que ce qu'il se passe ici. Les gens ne sont pas tendre au sein du marché. Ils peuvent se montrer sans pitié et cruel, manipulateur et pervers. Mais tu ne verras personne ici oublier la Loi du Désert.

C'était la première chose qu'on inculquait à tous les enfants. Quoiqu'il arrive, il ne fallait jamais oublié qui était ton ennemi. Qu'importe la situation, il était toujours tapis dans ton ombre, prêt à te dévorer si tu arrêtais de le surveiller. Le désert tuait plus surement que n'importe qui.

Cette loi ne signifiait pas que c'était chacun pour soi. Elle signifiait que lorsque le désert étendait ses languges de feu un peu trop près, tout le monde s'accordait pour survivre avant de reprendre les hostilités. Il ne pouvait y avoir de demi-mesure.

— Lors que nous protégeons le marché, nous protégeons avant tout notre seul endroit où vivre en paix.

Le poids de toutes ses réalités commençait à m'écraser. J'avais l'impression d'être arraché à un long rêve. J'avias toujours cru que ma vie était difficile mais je n'en avais effleuré qu'une minuscule réalité. La présence de Lior a mes côté me manquait cruellement. Il avait toujours été là, pour chaque moment de ma vie et j'étais sans doute en train de prendre l'une des leçons les plus difficiles.

Je sentais que j'avias effleuré un sujet délicat et la tension était palpable dans l'air. Je choisis de changer de sujet.

— Qu'est ce que vote amie a fait autour de River ?

La femme esquissa un sourire.

— Lili a créé une zone d'exclusion, un peu comme si elle avait étendu sa nature de catalyst pour créer du vide et sortir River du surplus de Luminescence.

Je n'imaginais même pas cela possible. Tout mes entrainements s'étaient toujours basé sur l'usage de la Luminescence d'un radiant pour le rendre plus fort. Je réalisais brutalement que Gedd nous avait préparé à nous battre, sachant qu'un jour nous en eurions besoin.

— Je n'ai appris qu'à me battre, expliquais-je.

Je ne sais pas pourquoi j'essayais de me justifier. Je voulais qu'elle comprenne que ce n'était pas ma faute.

— Quelqu'un vous a appris ?

J'avais confiance en cette femme. Peut-être à tord. Elle était peut-être une catalyst mais elle venait bien de me montrer que cela ne signifiait pas tant que cela. Elle était douce et attentive. J'aurais voulu me confier à elle. La voix de Lior me rappela à l'ordre.

— Non, nous nous somme simplement inspirés de ce que nous entendions autour de nous. Savoir se battre nous paraissait important.

— Maltar attend de vous que vous soyez des armes vivante et il a eu une sacrée vaine de tomber sur vous deux. La plupart des catalysts qui grandissent sur la Bordure deviennent des Curatis.

— Une curatis ?

Son regard se voila de tristesse.

— C'était sans doute la première fonction des catalysts avant que le monde n'en fasse des guerriers. Ce sont des soignants.

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