Chapitre 1 ° Ciara et Lior
La pire chose qui puisse arriver à un catalyst, c'est de ne pas avoir de radiant à ses côtés.
A l'instant, lors que je regardais le camp en flamme, je ne voyais que mon impuissance et cela me consumait de l'intérieur. Les larmes giclaient de mes yeux et je ne pouvais rien faire d'autre que de contempler le massacre.
La colère m'étouffait. Je suffoquais. Lior. Je devais trouver Lior. Mon ami saurait quoi faire. Je descendis de la colline en courant sans m'inquiéter d'être vu. Au milieu de la cohue et des flammes, personne ne me remarquerait.
Je criais son nom. Où était-il bon sang ?
Un souffle brulant balaya la place, emportant des volutes de fumée noire. Je toussais. Soudain, j'aperçus enfin les mèches rouges de mon ami. Il se cachait derrière une des tentes encore intactes. Je courus jusqu'à lui et l'attrapais aux épaules. Lorsque je croisais son regard, mon estomac se retourna. Son regard était vide, détruit. J'y voyais mon propre désarois. Ma vue se brouilla de larme. Je le tirais derrière moi et il me suivit tel un pantin sans âme. Parce qu'il n'y avait rien d'autre à faire que d'essayer de fuir dans le désert comme nos camarades et nos familles. On ne pouvait rien faire. Rien du tout.
Je maudissais ma naïveté.
Cela faisait des mois que Gedd, notre mentor, nous mettait en garde. Ce n'était pas la première fois qu'il essayait de convaincre nos parents de nous laisser partir. Il était même prêt à nous accompagner. Mais nos parents ne l'étaient pas. Moi non plus. J'avais passer plus de dix sept ans ici sans que personne ne nous trouve. Pourquoi cela devrait-il changer ? Il avait aussi essayer de nous convaincre, harguant que nous mettions tout le monde en danger. Il avait raison, évidemment. Il était un peu tard pour les remords.
Alors que nous atteignons tout juste la sortie du camp, un des mercenaires monté sur un cheval nous barra brusquement le chemin. Ce n'était qu'un homme pourtant, il me terrifia. Les hommes du camp n'était pas pareil. Ils ne possédaient pas cette violence qui couvait dans chacun de ses gestes. Celle de la mort prête à s'abattre. Gedd possédait cette violence. Mais elle s'était estompé avec le temps.
En face de moi, je vis l'homme au regard dure nous détailler et je sus ce qu'il voyait. Il dégagea de son visage les turbans bleu nuit qui le camouflaient et dévoila un sourire inquiétant.
— Mais qu'avons-nous là ?
Je tentais vainement de le contourner pour fuir, mais d'un geste, il décala son cheval pour nous bloquer. La seconde d'après, deux autres cavaliers nous rejoignirent et je sus que nous étions perdus.
— Dites-moi que je rêve ? s'exclama l'un des nouveaux.
L'homme sauta de sa monture et m'attrapa la mâchoire avant que je n'ai le temps de reculer. Il s'approcha aussi de Lior pour vérifier aussi que ses yeux ne le trompaient pas, avant de s'écarter et de nous contempler avec avidité.
— Deux catalysts juste avant la saison des Jeux, c'est inespéré ! Embarquez-les.
Les bandits nous lièrent les poignets dans le dos.
— La plupart des caravaniers sont aller se cacher dans le désert. On fait quoi ?
— Laissez-les. Nous devons vite trouver un acheteur pour ces deux là. Je n'ai pas envie que les soldats de l'empire nous tombe dessus avec.
— Et pour le déserteur ?
Je me figeais. Notre mentor était encore vivant ?
— Je vais m'en occuper. Mais éloignez-moi ces deux là. Je ne veux pas savoir à quel point ils savent utiliser leur luminescence.
Un violent coup m'arriva à l'arrière du crâne et je sombrais.
***
C'était la dernière image que j'avais du camp. Après, nous avions été drogués jusqu'à être jeté ici. Je ne pouvais pas m'empêcher de rejouer la scène dans ma tête. À chaque fois, j'imaginais que Gedd allait surgir, que j'allais pouvoir me lier à lui et que j'aurais déchainé toute sa puissance. Il se serai transformé en guerrier sanguinaire, celui qui nous terrifiait quand nous étions enfants et aurai tué tous les mercenaires. Je me torturais avec un millier de combinaisons différentes où les choses auraient pu être différente. Aurait du !
Je sentis un pied cogner le mien. C'était Lior, assis par terre à côté de moi.
— Arrête de ruminer, marmonna-t-il.
Je grognais sans lui donner tord. Je n'arrivais pas à me détendre. J'ouvris les yeux, décidée à m'extraire de mes cauchemars et contemplait ce qui nous servait de goêle depuis deux jours.
Les quatre murs en pierre était un indice important. Rien n'est immobile le long de la Bordure. Les caravanes sont en perpétuels mouvements, fuyant les soldats, les mercenaires ou encore les humeurs du Désert. Des murs en pierre ne pouvaient dire que deux choses. La première serait que l'empereur nous avait mis la main dessus. Mais si cela avait été le cas, nous serions déjà morts. Dans l'autre cas, nous avions du atterrir dans une des rares ruines à demi enfoui par le Désert et seulement connu de quelques réseaux illégeaux.
Lior était là, à ma gauche. La tête renversée contre sa poitrine, il avait l'air de somnoler. Je m'accoudais contre lui pour essayer de trouver un peu de réconfort. Depuis vingt quatre heure, la drogue perdait de son effet. Enchainés et éloignés de tout potentiel allié, ils avaient pu cesser de nous droguer. Mes sens commençaient à revenir. Et mes pensées tournaient en boucle. Je pensais à ma famille. À Gedd. À ce qui allait nous arriver.
— Nous allons être emmené au marché des mirages, lâcha Lior d'une voix enrouée.
Je pris le temps de digérer l'information. Le marché des mirages était le repère de la pègres et des trafiques illégaux en tout genre. Même l'empereur n'arrivait pas à lui mettre la main dessus. Il bougeait au gré des astres, aussi insaisissable que les mirages dont il tirait son nom.
— Savais-tu que les catalysts valent une petite fortune ici ? marmonna mon ami, les yeux mi-clos.
— Je croyais que c'était trop dangereux.
Détenir un catalyst était un crime sans jugement. Les rumeurs disaient même que la sentence était pire que la mort. J'avais grandi en pensant que mon pire ennemi était l'empire. Jamais je n'aurais envisagé finir sur ce marché noir.
— Que veulent-ils faire de nous ?
Lior haussa les épaules.
— Je crois qu'on va bientôt le savoir.
Je me redressais non sans un léger vertige. Je détestais me sentir faible. Comme il l'avait prédis, deux mercenaires vinrent nous chercher. Ils nous ordonnèrent de nous lever. Ils n'eurent même pas besoin de nous menacer et cela me fit enrager. Je savais à quel point toute résistant serait futile. Sans radiant, nous n'étions pas plus dangereux que n'importe qui. Nous n'avions rien de spéciale.
Ils nous escortèrent, empruntant des galeries souterraines avant de déboucher sur l'extérieur. La lumière m'éblouit. La chaleur du désert nous enveloppa immédiatement et la soif m'agressa. Je regrettais déjà la fraicheur relative de notre cachot. On nous poussa pour nous forcer à avancer. La terre me brulait mes plantes de pieds nues.
Nous étions dans une toute petite cour à ciel ouvert. Il y avait d'autres prisonniers en lignes. Six au total avec nous. Tous des catalysts. J'étais presque étonnée d'en trouver autant. J'avais toujours eu l'impression que Lior et moi étions seuls au monde.
On nous jetta brusquement des sacs de jutes sur la tête. J'essayais de me coller à mon ami pour lui attraper une main mais on nous sépara sans ménagement et on nous ordonna de ne plus bouger.
Après quelques minutes interminable à bouillir sous le soleil, j'entendis des voix. Elles finirent par se faire plus distinctes et j'en déduisis qu'ils venaient de pénétrer dans la cour.
— Vous êtes le premier à pouvoir les voir. Je ne vous cache pas que c'est un exploit d'encore trouver des catalysts en liberté. Si j'étais vous, je ne ferais pas trop la fine bouche. Surtout si vous voulez participer aux Jeux.
— Un catalyst sans expérience ne sert à rien, Fragor, lui répondit une voix aux accents aristocratique. Il finira juste grillé.
La réalité de ce qui était en train de se passer me rattrapa. Nous allions être vendu. J'étais en train de devenir une esclave. La peur d'être séparé de Lior me broya les tripes. Il était hors de question que cela arrive.
— Il reste encore plusieurs semaines avant les Jeux. Votre réputation vous précède. Je suis sur que vous saurez les entraîner correctement.
— Je dois les tester avant.
— Je vous en prie, déclara le vendeur d'une voix onctueuse.
Je fronçais les sourcils. L'acheteur voulait sans doute connaître notre potentiel mais je ne comprenais pas bien comment il pouvait s'y prendre. J'entendis le sable crisser alors que quelqu'un s'approchait de nous. Le catalyst à ma droite eut un hoquet de surprise qui me fit sursauter.
— Arrêtez, gémit-il. Je ne sais pas m'en servir.
Je me crispais en entendant son corps glisser au sol dans un silence glaçant. Il ne l'avait pas tué quand même ? Les pas s'approchèrent de moi. Ne rien voir allait me rendre folle.
Soudain l'inconnu m'attrapa le poignet.
— Qu'est-ce que...
Je n'eus pas le temps de parler qu'une vague d'énergie se déversa brutalement autour moi. La compréhension me traversa. Il était en train de laisser sa luminescenc sortir de lui. Ma barrière était largemetn assez solide pour résister à cet afflux même d'aussi proche.
Il me traversa alors l'esprit que je pouvais m'en saisir. Son aura était bien plus forte que ce que j'avais l'habitude de cotoyer. Je n'étais pas quelqu'un de particulièrement impulsive. Pourtant, malgré les alertes qui hurlaient dans ma tête et me disaient que mon plan n'avait aucune chance d'aboutir, je m'y risquais. Je tendis ma main dans cette douce chaleur. Elle était si dense que j'avais l'impression que je pouvais la tenir.
Sa luminescence disparue subitement, rappelé par son porteur. J'eu l'impression qu'on me coupait le souffle alors qu'un vide froid emplissait mes poumons. Je chancelais. Une main arracha le sac de ma tête et m'empoigna violemment la mâchoire pour m'obliger à la regarder. Deux yeux d'un noir aussi sombre que l'onyx me toisèrent avec arrogance. Sa main me broyait la mâchoire et la douleur me fit fermer les yeux.
— Contente-toi de supporter ma luminescence, lâcha-t-il d'une voix grave.
Sans me lacher, il laissa de nouveau son aura irradier autour de lui. Mes défenses étaient toujours en place. Voyant que je ne bronchait pas, il intensifia son aura. Je clignais des yeux alors qu'une légère brulure commençait à le lécher la joue. Je concentrais mes forces sur ma barrière. Il n'avait pas l'air décidé de s'arrêter, m'observant grimacé sans émotion. Je compris qu'il ne s'arrêterait pas tant que je n'atteindrais pas mes limites. Je décidais donc me concentré sur lui pour faire abstraction de l'afflux de plus en plus chaud.
Il avait un peau claire, typique des enfants né la nuit. Il portait un turban qui le protègeait du soleil mais n'empêchait pas ses mèches aussi noire que ses yeux de s'échapper. Ses lèvres étaient incurvés par l'ennui. Il portait une tunique en lin déchirée aux épaules, dévoilant ses bras et ses épaules musclées. Des arabesques sombre s'entrelacaient sur son bras droit. Ce serait mentir que de nier sa beauté et je pris conscience de mon regard trop insistant. La température sembla subitement explosé autour de moi et je gémis.
— Ça suffit, River.
Après une seconde, le dénommé River me relâcha. Je m'écroulais pour de bon au sol, terrassée. Gedd nous avait montré ce qu'il en coutait de se bruler mais jamais avec une telle intensité. Malgré le soleil qui dardait toujours ses rayons sur nous, j'avais froid. Je lançais un regard mauvais au radiant. Celui-ci n'avait même pas l'air un peu fatigué. Je n'osais imaginer la porté de sa luminescence.
— River !
L'homme à la voix aristocratique s'impatientait. River me lança un dernier regard blasé avant de me remettre la cagoule. Lior était le prochain. Il avait dû entendre notre altercation et comprendre. Je pris une inspiration et je tendis l'oreille. Maintenant je comprenais mieux ce qu'il se passait et je visualiser la scène. River s'arrêta devant mon ami. Le froissement de tissu alors qu'il lui attrapa son bras. Puis le silence.
Encore.
Cela s'éternisa.
Et je commençais à m'inquiéter. Que quelqu'un m'enlève cette foutue cagoule ! J'étais à deux doigts de baisser la tête pour me libérer de son obscurité. Mais j'entendis soudain mon ami lâcher un grognement.
— C'est dommage, tu étais bien partie, lâcha la voix narquoise de River.
Lior poussa un soupir de soulagement. J'en déduisis que le contact avait été rompu. Les pas de River me le confirmèrent alors qu'il s'éloignait vers sa prochaine victime. Au bruit, l'un d'eux s'évanouit et le dernier tient bon.
— Vous pouvez retirer les cagoules.
Je n'attendis pas qu'un des mercenaires arrive à ma hauteur pour rejeter le bout de tissu. Je secouais ma tête pour dégager mes cheveux et me redressais prestement pour défier le fameux acheteur. Je fus prise de court alors que l'homme me souriait avec malice. Il avait un regard perçant, des iris grises à l'intensité intrusive. Je me sentis épinglée par ses pupilles froides qui ne collaient pas avec son sourire fin. Il me détaillait avec une attention sérieuse. Comme un marchant devant une pierre précieuse. Ce que j'étais surement à ses yeux.
J'en profitais pour le dévisager en retour. Il avait la peau sombre, les cheveux d'un noir profond et une barbe qui sculptait sa mâchoire. Une poudre dorée éclairait ses pommettes saillantes typiques de la caste des Marchands. Sous ses airs avenants se cachait quelqu'un de redoutable. Je frisonnais. Il eut un hochement de tête appréciateur.
— Je vais te prendre ces deux là, dit-il en me désignant ains iq ue mon ami.
Alors que le marchand s'occupait de finaliser les détails de notre achat, je fus tiraillée par mes émotions. J'étais soulagée. Lior et moi ne serions pas séparés. Mais notre liberté venait définitivement de s'envoler et même si cet homme ne semblait pas terrifiant, l'acolyte qui l'accompagnait me faisait douter. Il me rappellait la vérité criante de toute cette mascarade. Quelque soit l'objectif de notre acheteur, cela nous mettrait en danger, d'une façon ou d'une autre.
Accouder contre le mur, à l'ombre, River patientait. J'évitais de le regarder. Je ne savais pas qui il était mais j'avais peur de l'apprendre. Car une chose était sur : nous avions dorénavent le même maître.
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