~°•○Chapitre 9○•°~
~°•○Sol Daystar○•°~
Lorsqu'il voit Victor et Bailong entrer dans la salle de détente, Sol se demande s'il doit remercier ou maudire Arion. Fausser un sourire, c'est toujours plus difficile quand l'objet de nos doutes se trouve juste à côté, presque à portée de main.
Sol n'a de toute façon jamais vraiment eu son mot à dire, dans cette histoire. Bailong a décidé du jour au lendemain qu'ils ne devaient plus se parler, et le rouquin n'a rien pu faire d'autre que se résigner et accepter. Une part de lui veut croire que c'est mieux ainsi, qu'il risque moins de blesser celui qu'il aime en se tenant loin de lui. Sauf que la douleur dans son cœur ne se tarit pas pour autant, et il a sans arrêt la sensation d'être au bord de la crise, sans que jamais ses émotions ne débordent pour autant.
En d'autres termes, il est au bord du gouffre, mais essaye de donner l'impression que tout va bien.
Après tout, comparé à Bailong, ce qui le tourmente n'est rien. Lui ne vit pas avec la perte d'un être cher, avec la culpabilité de trahir cette personne en tombant amoureux d'un autre. Sol essaye tant bien que mal de se raisonner, de se rassurer, de se dire que le reste de ses vacances vont bien se passer. Sauf que toutes les désillusions du monde ne suffisent pas à combler le manque que l'absence de Bailong a causé.
Enfin, il n'a pas le temps de s'attarder sur ça, de toute façon. La partie de loup garou en cours se termine, et les cartes sont mélangées à nouveau. Le nombre de participants grimpe à huit. Bailong préfère regarder pour l'instant, et il leur faut un narrateur. Riccardo demande d'ailleurs à être remplacé, puisque cela fait trois parties qu'il joue ce rôle. Sol, qui a besoin de se changer les idées et en a un peu marre après avoir été cupidon trois fois de suite, se propose aussitôt.
- Le village s'endort. Allez, hop hop hop, au lit !
Tout le monde lui rit au nez, et Aitor marmonne un "tu parles d'un narrateur", mais ils finissent tous par s'exécuter. Bailong, forcément, est le seul qui ne ferme pas les yeux, bien que son regard ne dévie pas du carrelage. Sol essaye tant bien que mal de l'ignorer, et de se concentrer sur son rôle.
- Alors, c'est qui en premier déjà... il murmure. Ah, oui ! Cupidon se réveille, et choisit de lier deux âmes sœurs pour l'éternité !
Riccardo lève la tête, l'air un peu dépité de son rôle. Après une courte réflexion, il pointe du doigt Gabriel et Terry, avant de se rendormir. Sol tape ensuite sur la tête des deux intéressés qui ont l'air ravis d'avoir été mis en couple, comme l'indique le regard désespéré de Gabi et celui meurtrier de Terry. Il faut dire que, depuis le début, ces deux-là passent leur temps à s'entretuer à la moindre occasion.
- J'en appelle ensuite à la sorcière !
- Mais non, c'est la voyante, pauvre débile ! lui rappelle gentiment Aitor.
- Roh, ça va ! Bon, la voyante, qui vas-tu gentiment stalker avec tes pouvoirs ô combien puissants ?
C'est à Lucien d'ouvrir les yeux, et de montrer Aitor du doigt. Aussi discrètement que possible, Sol retourne la carte de l'intéressé. Chasseur. La voyante semble un peu déçue, ayant probablement espéré faire une découverte plus utile. Et, justement, en parlant, sans mauvais jeu de mots, du loup...
- C'est alors que trois créatures des enfers se réveillent ! Ils ont faim, très faim, et ils sont bien décidés à faire une victime cette nuit ! Mais qui sera-t-elle ? C'est la-
- Ta gueule et laisse-les choisir ! râle cette fois Falco.
Gabriel et Terry se réveillent à nouveau, cette fois imités par Victor. Les trois loups-garous se concertent du regard, et, pendant ce temps, Sol remarque que les paupières de Falco n'ont pas l'air si fermées que ça... D'ailleurs, il n'est pas le seul à s'en apercevoir, puisque Gabi le pointe presque aussitôt du doigt, et ses camarades le suivent. Sauf qu'en levant le bras, Victor cogne accidentellement celui d'Arion. Oups...
- La sorcière... Euh, c'est bien elle cette fois ?
- Oui ! crie tout le monde en même temps.
Sol lève les yeux au ciel. Si on n'a même plus le droit de se tromper dans ce monde...
- Donc, la sorcière, munie de ses potions de vie et de mort, s'éveille. Sera-t-elle généreuse, ou cédera-t-elle à ses pulsions sadiques ?
Arion fait un signe de main à Sol, et celui-ci pointe du doigt Falco pour indiquer qu'il est mort. Mais, sans surprise, le brun fait non de la tête, et oriente son pouce vers le bas avant de montrer Victor du doigt pour indiquer qu'il veut utiliser sa potion de mort sur lui. Pas de chance, le loup-garou a cogné le mauvais bras...
- Bien, le village se réveille ! Debout bande de marmottes !
- Sol, je veux pas dire mais t'es un peu nul comme narrateur, lance Aitor.
- Eh ! s'offusque l'intéressé.
- Parce que tu crois que tu ferais mieux, peut-être ? lui rétorque Gabi.
- Et sinon, qui est mort ? les coupe Falco.
Sol se racle la gorge histoire de se remettre dans le rôle, et lance dramatiquement :
- Hélas mes amis, cette nuit fut un carnage. Nous avons deux pertes à déplorer. Tout d'abord, Falco, et ensuite Victor...
Les deux révèlent leurs rôles, et les villageois se réjouissent d'avoir réussi à virer un loup dès le premier tour. Personne ne déplore vraiment la perte de la petite fille, puisque, de toute façon, si elle s'est faite cramer dès le début, c'est qu'elle n'était pas très utile. Sol lance ensuite le débat pour déterminer l'identité des deux loups restants, et, aussitôt, les accusations partent dans tous les sens.
- Aitor, je suis presque sûr que t'as bougé cette nuit !
- N'importe quoi ! C'est Gabi qui me poussait !
- Eh ! J'ai rien fait !
- Moi je trouve que Riccardo et Lucien sont bien silencieux !
- En même temps vous faites que vous engueuler, que voulez-vous qu'on dise...
- Moi je propose de voter Riccardo, lance soudain Aitor.
- Mais pourquoi ???
- Je sais pas, juste une envie, comme ça.
Personne ne trouve rien à redire à une logique pareille, et Riccardo est officiellement exécuté sur la place publique, révélant par la même occasion son rôle. Terry et Gabriel le fusillent aussitôt du regard, prêts à l'étriper.
- Vous voyez, grâce à moi, on a trouvé le couple, se vante fièrement Aitor.
- Ta gueule Aitor, tout le monde lance à l'unisson.
- Allez, tout le monde au lit, la deuxième nuit commence ! leur intime Sol.
- Tout le monde, c'est vite dit, râle Falco.
- Ta gueule, les morts ça parle pas, lui rétorque Terry.
La voyante se réveille de nouveau, et, cette fois, Lucien demande à voir la carte de Gabriel. Un sourire se dessine sur son visage lorsqu'il découvre le rôle du garçon à couettes. Vient ensuite le tour du duo, ou plutôt, en l'occurrence, du couple de loup de choisir leur victime. Riccardo hallucine en découvrant qu'il a mis deux loups ensemble, et son meilleur ami lui offre un splendide doigt d'honneur en réponse. Arion est choisi comme victime, mais, forcément, en tant que sorcière, il choisit d'utiliser la potion de vie pour sauver sa peau.
- Le village se réveille ! Contrairement à la nuit dernière, aucune mort n'est à déplorer cette fois. Peut-être que les loups sont végans ?
- Bah et Falco alors ? demande Lucien.
- Sélection naturelle, répond aussitôt Terry.
Il se récolte un regard courroucé de l'intéressé, ce qui ne le tracasse pas plus que ça.
- Je propose de tuer Gabi, lance alors Aitor.
- Aitor, arrête de lancer des accusations au pif, rétorque l'intéressé.
- J'aime pas les couples, ça me rappelle mon célibat.
- Non, je suis d'accord, on devrait tuer Gabi ! approuve Lucien, qui, forcément, connaît déjà le rôle de celui aux cheveux roses.
- D'ordinaire, je serais d'accord avec vous, mais on m'a forcé à m'attacher émotionnellement à l'individu donc je vais voter Aitor à la place.
L'individu en question se penche en avant pour lui donner un coup dans les côtes, et s'ensuit une énième bagarre entre les deux que le reste choisit d'ignorer. Lucien et Aitor se tournent vers Arion, le seul à pouvoir trancher.
- Allez Arion ! On est camarades de chambre, tu peux pas nous trahir ! le supplie Aitor.
Le brun réfléchit longuement, puis, d'un air faussement désolé, pointe le garçon aux cheveux turquoises du doigt.
- Gabi m'a donné son dessert hier, adieu Aitor.
Le regard du concerné lance des éclairs à Arion tandis que Sol le déclare éliminé et qu'il retourne sa carte. Puis, Aitor se rappelle alors qu'il est chasseur, et, tout content, tire Gabriel en arrière alors que celui-ci se chamaille toujours avec son "amant" et déclare fièrement :
- Gabi, vient goûter à la douce saveur de la mort avec moi !
- Mais merde, je savais qu'on aurait dû flinguer Arion ! peste Terry. Tout ça c'est de ta faute Gab !
Les villageois décident encore une fois de les ignorer et de célébrer leur victoire. Sol ramasse les cartes et s'apprête à les redistribuer, quand Victor l'arrête en pleine action.
- Attends, quelqu'un peut pas prendre ta place ? T'es nul comme narrateur.
- Bah vas-y, si tu te crois meilleur, lui rétorque Sol, vexé.
- Oh, attendez, je veux le faire ! s'exclame aussitôt Lucien.
Le nouveau narrateur se lève, et le rouquin lui donne le paquet de cartes. Il n'a plus qu'à aller s'asseoir... Oh. La place libre que Lucien a laissée se trouve juste à côté de Bailong. Bon, ce n'est pas comme s'il avait le choix. S'il reste planté là, tout le monde va le regarder bizarrement. Sol part donc s'installer, en prêtant bien attention à ce que son regard ne croise pas celui désormais assis à sa gauche. Au même moment, la voix de l'intéressé retentit, à sa plus grande surprise, et, à n'en pas douter, celle de Victor :
- Attendez, je joue aussi.
Heureusement, personne ne fait la moindre remarque, et l'attention se tourne surtout sur le choix du rôle qu'ils vont rajouter.
- On met un voleur ? propose Gabriel.
- C'est nul voleur, rétorque Terry.
- Tu préfères villageois peut-être ? lui demande Riccardo.
- Tout compte fait, c'est bien voleur.
Les cartes sont de nouveau distribuées, et la deuxième partie peut commencer.
~°•○Bailong Blade○•°~
Bailong fait de son mieux pour ne pas prêter attention à la présence de Sol à côté de lui. Il demande même à jouer pour avoir de quoi s'occuper l'esprit. Il sait bien que c'était le but de Victor, qui ne voulait pas que son frère continue de se morfondre seul dans son coin pour le reste des vacances. Sauf que ce n'est pas facile de faire face à sa propre lâcheté.
Car oui, Bailong est lâche. Il a choisi de repousser Sol, celui qui l'a fait se sentir mieux qu'il ne s'est jamais senti ces derniers mois, par peur. Il a peur de cette lumière nouvelle, de cette chaleur réconfortante qu'il a le sentiment de ne pas mériter. Il est trop tôt, il n'a pas encore assez payé pour avoir laissé Tezcat s'enfuir sans le rattraper.
Les mêmes mots résonnent dans sa tête depuis avril. Les dernières paroles que son ancien amour lui ait laissé avant de s'en aller tournent en boucle. Cette lettre, personne à part lui ne sait qu'elle existe. Il l'a gardée pour lui, ne l'a jamais montrée à Victor, mais l'a relue tant de fois qu'il en connaît le contenu par cœur. D'ailleurs, alors qu'il ferme les yeux lorsque la partie de loup garou commence, les mots défilent une nouvelle fois dans son esprit.
A Bailong,
Celui à qui j'ai confié mon cœur.
Tu sais, j'ai toujours voulu être une fleur. Parce qu'une fleur, ça se contente d'être joli. Ça n'a pas d'obligations. Personne ne connaît son nom. Elle se contente d'exister, à l'air libre, pour finalement s'éteindre sans cérémonie. Il n'empêche qu'elle apporte le sourire à ceux qui croisent son chemin au bord d'une route.
Tu dois me détester en lisant ça. Je te comprends. Moi aussi, je me déteste. Et je n'ai pas envie de te mentir en disant que je regrette mon geste, parce que tu vaux mieux que ça. Je ne te dirai pas pourquoi je l'ai fait non plus, parce que toutes les excuses du monde ne suffiront pas à pardonner mon égoïsme. Alors, à la place, je vais te demander une petite chose.
Ne m'oublie pas.
Dans une heure, dans quelques jours, dans trois mois, dans dix ans, offre moi une petite seconde de ton temps, de temps en temps. Parce que, même si je sais que c'est égoïste, j'ai terriblement peur d'être oublié. Un esprit oublié, il risque de disparaître. Et je veux continuer de pouvoir veiller sur toi. Alors s'il te plaît, ne m'oublie pas.
Ne m'oublie pas, mais ne t'arrête pas de vivre pour autant. Même si mon départ peut laisser penser le contraire, les jours que j'ai passés à tes côtés ont été merveilleux. Et je veux que tes journées futures continuent d'être remplies de joie et de bonheur, parce que tu le mérites, pour avoir éclairé la vie de quelqu'un comme moi. Alors vis, sois heureux, tombe amoureux, que sais-je. Mais vis, je t'en conjure. Continue de sourire, comme ça, quand tu croiseras ma route au bord d'un chemin, mes pétales seront un peu plus colorés.
Au revoir, et merci pour tout. Je te promets que moi non plus, je ne t'oublierai pas. Jamais je ne le pourrais, après tout ce que tu m'as apporté.
Je suis désolé. Je t'aime.
Tezcat
Où est-il, déjà ? Que fait-il ? Difficile de se concentrer sur le présent quand l'esprit ne peut s'empêcher d'aller voir ailleurs. Bailong ne parvient pas à aller de l'avant. Il sait bien que cela va à l'encontre de tout ce que Tezcat lui a demandé. Il en est parfaitement conscient. Pourtant...
C'est si difficile.
Parce qu'à chaque regard échangé avec Sol, chaque sourire partagé, chaque moment complice partagé ensemble, il a le sentiment de trahir son défunt amour. Parce que chaque bouffée d'air qu'il prend est une de plus comparée au nombre fini de celles de Tezcat. Parce que lui continue de vivre, tout simplement. Ou plutôt, de survivre, ces derniers temps. C'est avec Sol qu'il a vraiment eu l'impression de vivre à nouveau.
C'est stupide. Il est stupide. Il n'a qu'à tendre la main, attraper celle du garçon à ses côtés, et il ressentirait de nouveau cette douce chaleur qui lui rappelle que son cœur bat encore, qu'il n'est pas aussi vide qu'il le pensait.
Pas étonnant qu'il passe son temps libre allongé dans son lit. Il a vraiment mal au crâne, à se torturer l'esprit de la sorte.
- Bien, le village se réveille !
Pour le coup, Bailong se réveille très littéralement, tant il a divagué loin de la réalité. La partie de loup garou lui revient en mémoire, tout comme la présence de Sol juste à côté. Enfin, ça, il ne l'a jamais vraiment oublié. Quel est son rôle, déjà ? Ah, oui, chasseur. Heureusement, ça signifie qu'il n'a pas grand chose à faire à part laisser les autres débattre.
- Cette nuit, hélas, nous déplorons la mort de Bailong...
Ou pas. Qui est-il censé choisir comme victime, au juste ? Il n'a rien suivi, rien écouté. L'un de ses voisins pourrait très bien être loup et avoir cogné son bras pendant son tour qu'il ne l'aurait pas remarqué. Eh bien, en parlant de ses voisins...
- Victor, Bailong désigne finalement.
- Evidemment, râle l'intéressé.
Victor dévoile son rôle de voyante, et, suite à un long débat toujours aussi animé, Arion est voté pour avoir manqué de faire gagner Gabriel à la partie précédente. Bailong redevient spectateur peu de temps après s'être joint au jeu. Il observe observe Aitor échanger son rôle avec Riccardo, Terry, Falco et Sol tuer Gabriel, et Aitor, de nouveau, utiliser la potion de mort pour faire tomber Terry.
Les parties s'enchaînent si vite que Bailong a du mal à suivre. Il contribue rarement au chaos ambiant, et se contente d'être spectateur, n'intervenant que lorsque nécessaire. Pourtant, paradoxalement, il trouve cela apaisant, presque relaxant. Les éclats de voix de ces quelques personnes qu'il a appris à connaître ces derniers jours emplissent l'air, et, tant qu'il se concentre dessus, le passé ne reprend pas le dessus sur le présent.
En fait, c'est en les écoutant que Bailong se rappelle qu'il est vivant. Il est là, dans cette pièce, assis entre son frère et un garçon qui lui évoque bien des sentiments tous plus compliqués les uns que les autres. Mais, plus important encore, il est là, aussi bien physiquement que mentalement. Il est là, et pas ailleurs. Il est vivant. Il est en vie. Son cœur bat encore.
Ne m'oublie pas, mais ne t'arrête pas de vivre pour autant.
Oui, il le sait. Bailong sait qu'il ne devrait pas avoir peur de vivre. Qu'au contraire, chaque moment comme celui-ci devrait être une bénédiction, la confirmation que ses émotions ne se sont pas éteintes. Mais c'est difficile de s'en souvenir à chaque fois. Il y a toujours des moments où la culpabilité reprend le dessus, des moments où il réfléchit tellement que tout devient confus.
Bailong aimerait juste savoir comment les faire taire une bonne fois pour toute, pas juste un jour sur deux.
Une paire d'yeux bleus le regarde. Celui au regard ocre n'a pas pu s'empêcher de se tourner vers lui, et se retrouve incapable de s'en détourner. Parce qu'au fond, il sait. Sol est la clé. Sol est la solution. Sol est celui qui le fait se sentir vivant en toute circonstance. S'il réparait son erreur d'il y a quelque jours, s'il s'excusait d'avoir rejeté le rayon de soleil de ses journées, alors, enfin, il pourrait dire qu'il continue de vivre, comme Tezcat le lui a demandé.
Si seulement Bailong était prêt. Il ne sait même pas quand il le sera. Il n'a plus qu'à espérer que cela viendra assez tôt. Car, après tout, leur temps ensemble est compté.
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