~°•○Chapitre 10○•°~
~°•○Sol Daystar○•°~
Il ne reste que quelques jours avant la fin de la colonie. Si le début a marqué Sol, il a l'impression que le milieu de ses vacances n'est qu'un souvenir flou et déjà enrayé par sa morosité. Sans doute qu'il devrait au moins essayer de rendre les derniers jours marquants, histoire de garder à jamais une trace mémorielle de ce séjour peu banal.
Pourtant, quand Sue et Hurley annoncent qu'ils vont jouer au basket cette matinée, Sol se dit qu'il vaut sans doute mieux qu'il ne participe pas à cette activité. Après tout, la partie de football de la semaine dernière ne s'est pas exactement bien passée pour lui, et un match de basket implique probablement les mêmes sensations à la fois enivrantes et destructrices.
Sauf que c'est sans compter sur Arion, qui écarte les doutes de son meilleur ami d'un revers de main.
- Allez Sol, ça va être amusant ! Tu ne peux quand même pas passer toute la matinée assis à nous regarder !
Bien sûr qu'il n'en a pas envie. Mais ce n'est pas une question de vouloir, c'est une question de pouvoir. Son cœur supportera-t-il une telle intensité de sensations ? Arion le prend un peu à l'écart du groupe, et, les mains posées sur les épaules du rouquin, le regarde droit dans les yeux.
- Ecoute Sol, je sais que tu as peur de refaire une crise, mais si ça arrive, je serai là pour toi. Alors t'en fais pas, et essaye de jouer, d'accord ? Si tu sens vraiment que ça va pas, sors du terrain, mais joue au moins les premières parties. Okay ?
Sol ne peut pas vraiment refuser après un tel discours.
- Bon, t'as gagné, il concède finalement. Mais c'est bien parce que c'est toi, hein !
Arion sourit, satisfait. Et, en vrai, Sol lui est reconnaissant d'insister. Parce qu'il sait parfaitement que, sans le brun, il serait déjà parti s'asseoir dans un coin, à observer les autres sans oser les rejoindre. Son meilleur ami a raison. Quitte à être là, autant essayer, non ?
- Vas-y doucement, et tout ira bien, lui assure Arion.
Et Sol ne demande qu'à le croire.
Cette fois, comme tout le monde se connaît un peu mieux, les adolescents ont le droit de choisir leurs propres équipes. Comme lors des matchs de football, ils doivent se séparer en quatre groupes de sept, et l'un d'entre eux est complété par l'un des animateurs, à l'exception que, cette fois-ci, il s'agit de Sue.
- Arion, Sol ! Par ici ! les interpelle alors Victor.
Il a déjà rassemblé Riccardo, Gabriel, Aitor, et, sans surprise, Bailong. Lui et Sol évitent de se regarder tandis que les dossards verts sont attribués à leur équipe. Pour être honnête, plus le temps passe, plus le rouquin est fatigué de fuir sans arrêt Bailong. Ils ne s'adressent plus la parole, s'évitent dès que possible... C'est à peine s'ils osent croiser le regard de l'autre.
Sol en connaît bien la raison. Et il sait bien qu'il est égoïste de sa part d'être vexé par le comportement du garçon aux cheveux bicolores quand celui-ci a bien des peines qui le tourmentent. Seulement, s'éviter est-il vraiment la solution, quand cela ne fait que ternir des vacances censées guérir leurs maux respectifs ? Plus le temps passe, moins Sol en est convaincu. Et voir la fin du séjour se rapprocher sans que les choses ne s'améliorent entre eux l'angoisse de plus en plus.
Leur équipe joue le premier match contre l'équipe rouge, dans laquelle il y a notamment Terry, Falco et Lucien. Comparé au football, Sol ne sait pas particulièrement jouer au basket. Néanmoins, cela reste une activité sportive, en équipe de surcroît, il y trouve donc facilement du plaisir malgré les doutes qui tourmentent son esprit.
Hurley siffle le début du match, et, aussitôt, Terry s'empare de la balle pour s'approcher de leurs filets. Sol se souvient l'avoir entendu dire qu'il joue dans un club et fait partie des meilleurs joueurs de leur génération. Autant dire que l'équipe verte, avec seulement des amateurs dans ses rangs, est mal barrée.
Dire qu'ils se font laminer serait un euphémisme. Quand Gabriel parvient à récupérer la balle, Terry la lui vole aussitôt. Quand Riccardo essaye de la lui reprendre, il ne réussit qu'à trébucher et manquer de chuter. Quand Aitor saute pour empêcher la balle d'atteindre le panier, Terry saute encore plus haut pour le contourner. En d'autres termes, ils n'ont pas la moindre chance.
Pourtant, malgré la défaite, Sol retrouve ce plaisir de jouer qu'il affectionne tant au football et qui lui a tant manqué ces derniers temps. Pour compenser ses lacunes, l'équipe verte doit ruser, coopérer, et redoubler d'effort dans le seul but d'empêcher Terry de les écraser plus qu'il ne le fait déjà. Heureusement, une faille se révèle bien vite dans le jeu du basketteur aguerri : il joue bien trop perso. Or, aussi fort qu'il soit, à un contre sept, le nombre l'emporte généralement sur le talent.
La rencontre se termine donc sur un score nul, ainsi qu'un profond agacement de la part de l'équipe rouge envers Terry qui n'a absolument pas essayé de les faire participer. L'équipe verte, elle, est satisfaite de sa remontada de dernière minute. Sol sent que son rythme cardiaque est plus élevé que d'ordinaire, et, fermant les yeux, tente de le faire redescendre. Cela n'échappe évidemment pas à Arion, qui s'inquiète aussitôt.
- Sol ? Tout va bien ?
Le rouquin acquiesce, puis ajoute :
- Je crois que j'ai juste besoin de m'asseoir.
- Bien sûr. Profite qu'on ne joue pas pour te reposer.
Sol part s'asseoir dans l'herbe, un peu à l'écart. Il a beau avoir toute la volonté du monde de profiter de ce moment et de s'amuser, la peur demeure dans un coin de sa tête, prête à frapper à la moindre faiblesse. Il ne peut qu'essayer de la contenir, du mieux qu'il peut. Les yeux fermés, il inspire, il expire, lentement, doucement, jusqu'à ce que le martèlement de son cœur cesse de harceler ses oreilles.
Lorsque Sol rouvre les yeux, il se rend compte qu'il n'est plus seul. Assis à ses côtés se trouve Gabriel, qui lui sourit gentiment.
- Ça va aller ? Tu préfères que je te laisse seul ?
Le rouquin secoue la tête et essaye d'imiter, avec quelques difficultés, l'expression calme du garçon aux couettes roses.
- Non, tu peux rester. Ça va mieux.
- Tant mieux. En fait, ça fait un moment que je voulais te parler seul à seul. Si ça ne te dérange pas, bien sûr.
Cette remarque surprend Sol, qui se demande de quoi Gabriel peut bien vouloir lui parler. Enfin, il n'a rien contre le fait de l'écouter, alors il l'invite à poursuivre. Le garçon aux cheveux roses lève la tête, et, tandis que son regard bleu, d'une couleur similaire à celui du rouquin, se perd dans le ciel sans nuage, il admet :
- En fait... Moi aussi, je faisais des crises d'angoisse avant.
- Vraiment ? s'étonne Sol.
- Ouais. Sans rentrer dans les détails, c'était le bazar, dans ma vie. J'avais peur que tout finisse par s'écrouler, et... disons que ça finissait par exploser de temps en temps, assez littéralement. Et, à force d'en faire, j'ai commencé à avoir plus peur d'en refaire d'autres que la raison pour laquelle ça avait démarré. J'ai arrêté de sortir, j'évitais les gens... Je voulais rester au calme pour pas que ça recommence.
Le visage de Gabi, jusque là marqué par la peine des souvenirs douloureux lui revenant en mémoire, s'adoucit lorsqu'il reprend :
- Mais, heureusement, ça a fini par passer.
- Comment ? Comment t'as réussi à t'en débarrasser ? ne peut s'empêcher de demander Sol, la question le tourmentant depuis si longtemps.
- Ça a demandé du temps, et du soutien. Riccardo m'a beaucoup aidé. Aitor aussi, à sa manière. Mais, je crois que le plus important, c'était que j'accepte que ça allait pas, et que j'avais peur.
Gabriel plonge son regard dans celui de Sol.
- En fait, là où je veux en venir, c'est que c'est normal d'avoir peur. Parfois, on a des moments où plus rien ne va, où c'est tellement le bordel qu'on a envie de crier de frustration, de fracasser le premier truc qui nous tombe sous la main. Sol, si je te dis ça, c'est que tu me rappelles moi à l'époque. Je souriais tout le temps à Ric et Aitor, je leur disais que ça allait... Alors que derrière, la moindre contrariété pouvait me faire péter les plombs.
- Mais, l'interrompt Sol, si j'en parle, ça va juste m'y faire penser encore plus, et...
- Sol, t'as le droit de pas aller bien ! le coupe Gabriel. T'as le droit de craquer, de pleurer, de t'énerver, t'as le droit d'être contrarié à cause de quelque chose !
Leur discussion est interrompue par Hurley qui demande à l'équipe verte de retourner sur le terrain pour un deuxième match. Sol et Gabriel se relèvent, et ce dernier accorde une dernière parole au rouquin avant de rejoindre ses deux amis.
- Crois-moi, ignorer tout ce qui te contrarie fait juste gagner du terrain à tes peurs. Réfléchis à ce que je t'ai dit, d'accord ?
Oh, ça, Sol ne doute pas qu'il y réfléchira, et pas qu'un peu. Au moins, ça lui offrira une bonne distraction pour ne pas penser à son coeur lors de ce match.
~°•○Bailong Blade○•°~
Après le dîner, lorsque tout le monde commence à quitter le réfectoire pour vaquer à ses occupations de la soirée, Bailong attend devant l'entrée qu'ils aient tous fini de sortir, un objectif bien précis en tête. Evidemment, cela n'échappe pas à Victor.
- Qu'est-ce que tu fais ?
- Pars sans moi. Je dois parler à Hurley et Sue, l'informe Bailong.
- T'es sûr que tu veux pas que je reste ?
"Dès fois que les mots n'arriveraient pas à sortir," implique cette dernière question. Le garçon aux cheveux bicolores comprend l'inquiétude de son frère, seulement, pour cette fois, il la trouve injustifiée. Il sait ce qu'il veut, et il a bien l'intention de l'obtenir.
- Ça va, je te dis. Dépêche-toi d'aller retrouver Arion, il t'attend, il ajoute avec un clin d'œil et un coup de coude taquin.
Effectivement, plus loin, Arion s'est arrêté au milieu du chemin et regarde dans leur direction. Victor lève les yeux au ciel, mais s'exécute tout de même, laissant Bailong seul à ses affaires. Quelques minutes plus tard, Sue sort à son tour du réfectoire, et est surprise de trouver l'adolescent à côté de l'entrée.
- Bailong ? Qu'est-ce que tu fais ici ? Tu as besoin de quelque chose ?
Bon, qui ne tente rien n'a rien... Il n'a plus qu'à se lancer.
- Oui. En fait, j'aurais un service à vous demander.
- Bien sûr ! Je t'écoute, l'encourage l'adulte.
- Je voudrais récupérer mon téléphone pour passer un appel.
La demande contrarie visiblement l'animatrice, qui affiche une moue réprobatrice.
- Bailong, je suis désolée, mais tu sais très bien que vous n'avez pas le droit à vos téléphones pendant le séjour...
- S'il vous plait, c'est très important, insiste le jeune garçon. Je le garderai pas longtemps, trente minutes tout au plus. J'ai vraiment besoin de passer cet appel !
Bailong regarde Sue droit dans les yeux, bien déterminé à ne pas détourner le regard. De toute façon, si elle refuse, il est prêt à s'infiltrer dans le local où les portables sont conservés. Demander la permission d'abord est simplement un moyen de voir s'il peut s'éviter cette peine. Et, heureusement, l'adulte finit par céder :
- Bon, allez, suis-moi, on va le chercher.
Bailong la remercie, et ils partent pour le petit local situé près des dortoirs, où sont aussi stockés nombre d'équipements sportifs. L'adolescent ne peut ignorer la possibilité que Sue ait accédé à sa requête par pitié, après l'avoir vu sauter plusieurs activités et tiré la tête dans celles auxquelles il a participé. Honnêtement, il s'en moque, tant que ça lui permet de récupérer son portable.
Dans le local, l'adulte déverrouille une caisse en bois, fermée avec un cadenas des fois qu'un adolescent venu chercher du matériel aurait l'idée de subtiliser son téléphone par la même occasion. Sue farfouille un peu avant de trouver celui de Bailong grâce aux étiquettes qu'ils ont collées dessus le premier jour.
- Tiens, le voilà. Ah, et, ne t'inquiète pas, prends le temps qu'il te faut. Rends-le moi juste avant le couvre-feu, d'accord ? Je serai dans mon bureau.
Oui, elle éprouve sans aucun doute de la pitié envers lui. Enfin, peu lui importe. Il a obtenu ce qu'il voulait, après tout. Une fois sortis du local, l'adulte et l'adolescent se séparent. Bailong s'éloigne des dortoirs, dans un coin isolé entre quelques arbres. Il ne tient pas à être dérangé, d'autant que, si le fait qu'il a pu récupérer son téléphone s'ébruite, certains pourraient venir râler auprès de Sue. Après qu'elle a accédé à sa requête, le moins que le jeune garçon puisse faire est de lui épargner cela.
Son téléphone allumé, il doit attendre que le flot de notifications cesse avant de pouvoir faire quoi que ce soit. Il les ignore toutes, n'en ayant que faire pour le moment. Il n'y a qu'un seul contact qui l'intéresse, contact qu'il trouve très rapidement, étant tout en haut de sa messagerie. Un peu anxieux, il appuie sur la touche d'appel, en espérant qu'il ne soit pas occupé. Heureusement, après quelques bips, son correspondant décroche.
- Bailong ?
Le son de cette voix détend aussitôt le dénommé.
- Coucou Vlad.
- Il y a un problème ? Je croyais que vous n'aviez pas le droit à vos téléphones ?
- C'est le cas. J'ai demandé à le récupérer.
- Je vois, répond Vladimir sans poser plus de questions. Victor est avec toi ?
- Non, il est avec les autres. Il...
- Il ne sait pas que tu m'appelles, n'est-ce pas ?
Comme d'habitude, Vlad lit en lui comme dans un livre ouvert. Il le connaît si bien... Tout comme Bailong et Victor ne se lâchaient pas d'une semelle dès la maternelle, Vladimir agissait déjà comme un grand frère auprès du garçon aux cheveux bicolores avant même qu'il ne devienne un Blade. C'est pour ça que le simple fait d'entendre la voix de l'aîné suffit à rassurer le plus jeune, parce qu'elle lui est si familière.
- J'avais besoin de te parler... seul à seul.
- Bien sûr. Je t'écoute.
Bailong prend une grande inspiration. Comme d'habitude, les mots ont du mal à venir, ils restent comme bloqués dans sa gorge. Cependant, cette fois, il tient absolument à les laisser sortir. Ils le doivent, avant qu'il ne finisse complètement dévoré de l'intérieur. De plus, il sait que, quoi qu'il arrive, Vladimir le soutiendra. Alors, malgré la crainte, malgré la difficulté de mettre des mots sur ce qu'il traverse, Bailong se lance :
- Y'a quelqu'un à la colo. Un garçon. Avec lui, je me sens vraiment bien. Ça faisait dès mois que je m'étais pas senti aussi bien, depuis... Enfin, tu vois.
- Tu l'aimes ? demande gentiment Vlad.
- Oui.
L'avouer à voix haute a un goût particulier, comme si ça donnait d'autant plus vie à ses sentiments. C'est beau, et, en même temps, c'est terrifiant, parce qu'il sait que, désormais, il ne peut plus juste les ignorer.
- J'ai essayé de faire comme si c'était pas le cas, d'arrêter de lui parler, mais c'est encore pire... Je sais, c'est débile. Je me doute bien que Tezcat voudrait pas que je m'empêche de vivre comme ça, mais... Je sais pas, c'est plus fort que moi !
A dire vrai, il est même certain que ce n'est pas ce que Tezcat aurait voulu. Après tout, c'est écrit noir sur blanc dans sa lettre d'adieu. Sauf qu'entre comprendre ses mots et les appliquer, il y a tout un monde...
- Bailong, écoute-moi bien, lui dit alors Vladimir. C'est normal que tu hésites. C'est normal que tu aies peur de construire quelque chose de nouveau après ce qu'il s'est passé. Et, honnêtement, peut-être que j'aurais pas dû autant te pousser à partir en colonie aussi vite...
- Non, tu as bien fait.
Les mots se sont échappés des lèvres de Bailong avant même qu'il ne puisse y réfléchir. Toutefois, il a immédiatement la conviction qu'il s'agit là de la vérité. Dans le fond, il avait besoin qu'on le secoue un peu, qu'on le pousse à sortir un peu après s'être enfermé si longtemps dans sa chambre sans parler.
Il y est parfois allé à reculons, néanmoins, Bailong a tout de même l'impression d'avoir plus accompli en quelques jours qu'en plusieurs mois. Il s'est ouvert à de nouvelles personnes, a accepté de passer du temps avec elles... Et, surtout, il est tombé amoureux. Il ne veut plus nier ses sentiments, malgré les dégâts qu'ils ont causés et risquent encore de causer à l'avenir.
- Je vois... tant mieux, alors. Bailong, j'aimerais te dire une dernière chose.
- Oui ? l'invite à continuer le plus jeune.
- Tu as le droit d'être heureux. Tu n'es pas responsable de ce qui est arrivé à Tezcat. Tu as le droit d'être à nouveau tombé amoureux. Alors, n'hésite pas à passer du temps avec ce garçon jusqu'à la fin. Tu le mérites, après tout ce que tu as traversé.
Les mots de Vladimir frappent son jeune frère en plein cœur. Il avait désespérément besoin de les entendre. Enfin, à vrai dire, il les entendait déjà, sous une autre forme. La présence de Victor à ses côtés, depuis le début, envers et contre tout, exprimait déjà cette même pensée. Sa famille ne veut rien d'autre que le bonheur de Bailong, parce qu'ils sont convaincus qu'il le mérite.
Et il commence lui aussi à y croire, enfin.
L'appel se termine assez rapidement, Vlad incitant son frère à vite rejoindre ses amis. De toute façon, ils se retrouveront dans quelques jours. Décidément, ce séjour est vraiment passé à la vitesse de l'éclair. Bailong regrette d'avoir gâché autant de temps à se morfondre seul dans son coin. Toutefois, il sait aussi qu'il lui reste quelques jours, et il a bien l'intention de profiter de ceux-ci.
- Bailong ?
Alors qu'il se dirige vers le bureau de Sue pour rendre son téléphone de nouveau éteint, deux personnes viennent à sa rencontre. Victor et Sol. Le premier s'approche aussitôt, pendant que l'autre reste légèrement en retrait. La tension entre eux n'a toujours pas disparue, pourtant, Bailong peut sentir qu'elle commence petit à petit à retomber.
- Tout va bien ? demande Victor en posant une main sur son épaule.
Bailong acquiesce. Comme toujours son frère est à ses côtés, toujours là pour le soutenir dans sa peine. Le garçon aux cheveux bicolores réalise la chance qu'il a d'être si bien entouré. Il a subi l'abandon étant enfant, a vu son amoureux s'échapper sans pouvoir le retenir. Malgré tout, lui est toujours là. Il a deux frères qui l'ont recueilli alors qu'il n'avait personne, et un soleil qui lui rappelle que la vie, sa vie, continue.
Et, bon sang, il est heureux d'être encore en vie.
Tezcat ne sait vraiment pas ce qu'il a raté. Bailong en a peut-être bavé après son départ, mais il a aussi vécu de quoi combler le trou béant présent dans son cœur depuis avril. Alors que cette pensée lui traverse l'esprit, les larmes commencent à couler sur ces joues. Il n'a jamais pleuré depuis le suicide de son ancien petit ami, comme si sa tristesse restait coincée avec ses mots au creux de sa gorge. Mais, là, ce sont des larmes de soulagement qui s'écoulent. Le soulagement d'être là, de réaliser qu'il peut, qu'il va s'en sortir.
- Bailong ! s'exclame Victor, qui s'inquiète aussitôt.
Mais Bailong lui assure de ne pas s'en faire, et le sert dans ses bras de toutes ses forces. Victor est là, il ne partira pas. Sol aussi, d'ailleurs. Il est toujours à quelques mètres d'eux, l'inquiétude lisible sur son visage. Le garçon aux cheveux bicolores lui fait signe d'approcher, et, après quelque seconde, le rouquin se joint finalement à l'étreinte. Ils restent comme ça quelques minutes, le temps que les larmes de Bailong ne se tarissent. Une fois qu'ils se séparent, il annonce aux deux autres :
- Je dois passer au bureau de Sue. Je vous rejoins après.
- Tu es sûr que ça va aller ? insiste Victor, toujours inquiet.
Le regard de Bailong dérive vers Sol. Et, là, sur son visage ensoleillé se dessine le sourire qui l'a tant aidé à remonter la pente. Le garçon aux cheveux bicolores sourit en retour.
- Oui, ça va aller.
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