Chapitre Bonus 1

ATTENTION.

Ceci est un chapitre bonus, qui intervient à la fin de l'histoire. Assurez-vous d'avoir lu le livre auparavant. Où trouvez le roman entier ? Je vous invite à vous référer à la partie "Lire la suite du roman". 

✨✨

Bonus 1

Un regard, à travers le miroir, qui signifie tant de choses. Mon père hoche la tête, sa façon de me dire qu'il approuve le chemin que je prends avant de quitter la pièce.

Puis, il y a un reflet, qui m'appelle et je fais volte-face. Je me retrouve devant les deux femmes de ma vie. Ma sœur rit. Ma mère me sourit. Ma sœur s'avance vers moi, et pose sa main sur mon bras. Mais je ne sens rien, parce qu'elle n'est pas vraiment là.

— Elle est jolie. Je l'aime bien.

Je lui fais un sourire et me penche à son niveau.

— Toi aussi, tu es jolie.

— Oui, mais moi je suis trop jeune pour toi.

Et puis une dernière phrase.

— Fils, je n'ai qu'une chose à te dire. Prends soin d'elle. Car je sais qu'elle prendra soin de toi.

Pour la première fois de ma vie, je leur dis ces trois mots «je vous aime». Et le sourire qui orne leur visage tandis qu'elles deviennent invisibles, je ne l'oublierai jamais. Un jour, je les retrouverai. Mais avant, je vais rester avec cette femme qui m'a choisi, et qui devient la troisième de ma vie.

— Kei, moment

✨✨

— Mais elle te va très bien !

— Tu es sûre ?

Je me regarde dans le miroir, beaucoup moins convaincue que Liliana.

— Évidemment !

Je souffle un bon coup et descends de la petite estrade sur laquelle j'étais montée. Je m'assois tant bien que mal sur le tabouret de ma coiffeuse, posant ma tête entre mes mains. Voyant mon trouble, ma meilleure amie fait signe au couturier de nous laisser. Le pauvre est dépité. En bougeant de cette façon, j'ai dû faire tomber toutes les épingles qu'il avait mis des heures à poser.

— Quel est le problème ?

Elle me regarde, attendant ma réponse. Mais je ne suis pas sûre de la connaître. Je ne sais pas, j'ai l'impression que tout ça, c'est trop pour moi.

— Je ne sais pas.

— Eh bien, moi non plus. Tu es magnifique, dans une robe sublime, et tu vas te marier avec l'homme que tu aimes. Alors franchement, dis-moi ce qui ne va pas dans tout ça.

C'est bien le souci. Tout va bien dans ce qu'elle vient de me dire. Il y a des mois, j'ai cru perdre mon amour. Et la perdre elle aussi. Aujourd'hui, je les ai tous les deux près de moi, et pour longtemps, mais il y a quelque chose qui me manque. Peut-être ai-je attendu pendant si longtemps que maintenant, j'ai peur. Il aura fallu du temps pour remettre le royaume en ordre. Former un nouveau Conseil, s'assurer que les autres royaumes fonctionnent bien aussi. Alors durant tout ce temps, Kei et moi n'avons pas vraiment pensé à nous. Aujourd'hui, nous pouvons enfin le faire, mais cela paraît tellement irréel. J'ai l'impression que quelque chose cloche, sans savoir quoi.

Liliana s'appuie au fond de son fauteuil, et me scrute.

— Laisse-moi deviner. Tu n'arrives pas à croire que tu mérites ce bonheur-là.

L'idée ne m'était pas venue, mais à l'instant même où elle la prononce, c'est comme une évidence. C'est ce qui me bloque, l'impression de ne pas y avoir droit. Pas après que tant de personnes aient perdu la vie. Pas après qu'elle ait été mise dans cet état. Quel droit aurais-je de me porter comme un charme, d'être si heureuse, avec un homme qui va bien lui aussi, alors que d'autres ont été brisés ?

Je sais que la pensée est stupide. Je sais ce que mon amie va me dire là-dessus. Mais c'est plus fort que moi.

— Tu le sais, non ? Que tu as le droit d'être heureuse. Ce n'est pas parce que tu es en vie que tu n'as rien perdu. Les gens veulent que tu sois heureuse, Lux. Parce que ton bonheur participe au leur. Comment veux-tu que le peuple soit bien s'ils te voient mal en point ?

Elle n'a pas tort. Mais c'est dur tout de même.

Et puis justement. J'ai perdu des choses aussi, pas seulement lors de cette guerre, mais aussi dans ma vie. Je n'ai plus aucune famille. Mes parents ne me verront jamais en robe de mariée.

Et la mère de Kei ne le verra jamais avec une couronne sur la tête. Nous sommes un couple qui a beaucoup perdu. Qui a appris à se découvrir dans des conditions étranges. Mais en même temps, ce qui fait notre particularité fait notre force, et c'est aussi ce qui nous rend uniques. Alors, oui, il y a de nombreuses de raisons qui font que j'ai peur d'arriver devant l'autel. Mais au final, il y en a tout autant qui me donnent envie d'y être.

Je veux épouser Kei. Malgré ma peur.

Alors je souris à ma meilleure amie.

— Elle me va vraiment bien ?

— Si j'étais lui, je dirais oui.

— J'espère qu'il dira oui lui-même.

— Comme s'il pouvait te dire non. Il est fou de toi. Bon, allez, c'est pas que tu te maries aujourd'hui, mais un peu quand même. Donc il va falloir la finir, cette robe.

Et il en faudra, des heures pour que je sois prête. Liliana m'a laissée seule, pour se préparer elle aussi. Les ajustements de la robe, la coiffure, le maquillage, tout cela prend tellement de temps. Mais ça y est. Dans quelques minutes, je dirai oui à l'homme que j'aime. Dans quelques minutes, il aura une couronne sur la tête. Dans quelques minutes, les hommes et les cieux seront témoins de ce qui nous unit. Maintenant, je comprends mon père, quand il me disait que l'amour est le plus beau des sentiments, le plus puissant.

J'aurais aimé qu'il m'emmène jusqu'à l'autel. Mais il n'est plus là. C'est le père de Kei qui tiendra mon bras. Je trouve la symbolique forte. Il m'a dit un jour qu'à Ferrum, le mariage, c'est aussi un partage de famille. Que son père devient le mien et que, s'il ne remplacera jamais le premier homme de ma vie, il sera toujours là pour être ce soutien dont j'aurai besoin. J'ai failli pleurer. Peut-être l'ai-je fait en secret, d'ailleurs. Et je crois bien que son père, s'il n'était pas si pudique sur ses sentiments à l'instar de son fils, aurait pu verser quelques larmes, quand je lui ai demandé de m'accompagner dans cette marche particulière.

J'aurais aimé que ma mère me dise que je suis belle, dans ma robe.

— Mais tu l'es.

Je me retourne précipitamment.

Mes yeux s'embuent au moment même où je vois leurs silhouettes. Mes parents se tiennent là, debout devant moi. Ils me sourient tous les deux, et je comprends que les Dieux me font un nouveau présent. Un peu de temps avec ceux qui m'ont quittée. J'ai envie de leur sauter dans les bras, mais je vois bien qu'ils ne sont pas vraiment là. Leurs corps n'existent plus, c'est seulement leurs consciences qui se matérialisent devant moi.

— Maman, Papa.

J'entends les sanglots dans ma voix, autant que je sens le bonheur s'emparer de moi.

— Ne pleure pas. Tu vas ruiner ton maquillage.

Je souris en reniflant, essuyant le dessous de mes yeux. Je m'avance d'un pas vers eux.

— Vous me manquez.

Mon père me sourit, et s'il le pouvait, il me prendrait dans ses bras.

— Nous sommes toujours là.

Il pointe du doigt mon cœur, et je hoche la tête, pendant qu'il continue à parler.

— Et nous ne sommes pas inquiets. Nous te savons bien protégée.

Je sais qu'il parle de Kei. Je le sens, et je sens qu'il veut me dire qu'il l'approuve. Il n'ose pas le faire, peut-être pudiquement, mais je le comprends. Et ça me fait du bien parce que cela me prouve que mon cœur ne s'est pas trompé de personne.

Je tourne le regard vers ma mère, et je comprends en la voyant devenir transparente que les Dieux n'ont pas pu nous accorder trop longtemps. Les morts ne reviennent pas à la vie, et ce principe ne saurait être bafoué plus de quelques minutes, au risque de rompre l'équilibre des mondes.

— Tu seras heureuse. Et après, nous nous retrouverons.

Ils me regardent tous les deux et une dernière larme dévale ma joue quand ils disparaissent complètement avec une dernière phrase.

— On t'aime, petite lumière.

— Moi aussi, je vous aime.

Et je me retrouve à nouveau seule. Mais je ne suis pas triste. Je suis prête, heureuse, et je me sens entière. Alors je relève la tête, et avec un sourire, je sors de la pièce.

Je retrouve l'un des nouveaux hommes de ma vie. Je prends son bras, et j'avance jusqu'à celui que je suis destinée à aimer jusqu'à la fin de celle-ci. Et alors que nos yeux s'accrochent, sa voix résonne dans mon esprit. Elle m'offre ces petits mots qu'il ne m'a pas encore dits. J'en écarquille les yeux, sans comprendre. Et je souris. Peu importe comment, peu importe pourquoi, c'est ainsi.

Je me contente de transpercer moi aussi son esprit, et de lui offrir ma réponse.

«Je t'aime aussi.»

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