XLV.
Ça coule, fluidement. Ça brûle. C'est lourd. C'est douloureux. Pas assez pour se plaindre, mais...
Mais c'est présent, et c'est fatiguant, enlaçant, traînant. Et le sourire devient lent, à se montrer. Et les yeux se plissent ; tu arbores désormais un air lassé en permanence. La vie est courte, tu veux te consacrer aux choses que t'aimes. Le monde est sombre, alors tu veux sourire. Tu es bizarre, alors tu veux être unique.
Ça mord, voracement. Ça dévore. Ça mastique, ça déchiquette, ça réduit en charpie. Lentement, sûrement. Le temps aux mille dents, aux mille morsures que ce glouton pourrait te faire et te fera ; ne soit pas rassuré.e : à chacun son heure de gloire, mais à chacun aussi son heure de douce dégringolade, la fin mortellement sombre, et le sommet avec des cicatrices noires recousues, sans anesthésie.
Ouais, c'est lent, bordel. C'est horrible, mais on finit par s'y habituer. Comme des coulées de métal en fusion froide, ça descend en un étau sur ton corps, et tu finis par comprendre. Le retour en arrière n'existe pas.
Ça te paralyse, te fait froid dans la nuque, tu te sens étouffée, puis... puis tout va bien, parce que « c'est la vie ».
Alors que la vie, aka le temps, ce long supplice qui continue sans t'attendre, et qui ne t'attendra jamais, continue à ramper, insidieux comme un python, tout va bien, parce que c'est normal. C'est normal de renoncer à ses rêves. Normal de devoir faire un choix entre ce que tu aimes faire, entre ce qui est bon pour toi, et ce qui est à ton niveau. Normal d'avoir cette angoisse éternelle ; parce que maintenant, tu le sais : peu importe ce que tu choisis, il y aura toujours un lendemain, c'est vrai, mais aussi, peu importe ce que tu choisis, il n'y aura jamais le même aujourd'hui. C'est comme ça, il n'y a pas à s'inquiéter.
Le problème, c'est que cette angoisse tire justement sa source de cette phrase.
Finalement, les autres te paraissent être des mille-feuilles : combien de couches à enlever, avant d'arriver au cœur ? Mille, cent, une ? Difficile à dire. Ce qui cloche avec toi, c'est que t'as juste la flemme d'enlever toutes ces feuilles, du coup tu les prends comme ils sont. Enfin nan, du coup. Tu les prends pas du tout, car tu ne prends même pas le temps d'aller leur parler.
Le ciel est gris. Il n'y a rien d'autre à dire, et pourtant, tout se cache derrière ces quatre petits mots. L'ennuie, la solitude, la tristesse, la routine. Le désir de s'échapper. Mais tu sais, peu importe où tu te trouves, tu ne verras jamais de ciel rayonnant si tu portes des lunettes teintées.
Lorsque le rêveur n'a pas les yeux dans le vague, et lorsque l'écrivaine n'écrit plus, lorsque le poète se tait, et que les vagues ne bougent plus, lorsque le soleil s'éteint, et que les falaises s'écroulent, lorsque que les montagnes s'enterrent, et que les enfants ne rient plus, lorsque que les cœurs ne battent pas, alors... tu peux apercevoir la lune, fière, tremblante de solitude, oubliée.
Anonyme.
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