XLI.
Je voudrais mettre un petit warning au début de cette lettre, elle ne convient pas aux personnes sensibles ou mentalement instables. Cette lettre peut blesser certaines personnes.
La vie c'est de la merde. Elle est éphémère, fragile, précieuse, et c'est bien pour ça qu'on s'y accroche alors qu'elle ne nous apporte rien d'autre que des doutes et du désespoir.
Putain j'ai la rage. J'veux tout détruire.
Vivre, ça veut plus rien dire.
Chuis déjà en train de mourir, de pourrir.
Je sens mes organes flétrir à l'intérieur de mon corps brisé.
Est-ce que je peux encore être sauvé ?
J'déconne, je sais qu'il y a pas moyen.
J'ai déjà dit adieu à cette vie de chien.
Putain j'ai la haine. J'vais y passer pour de bon.
Est-ce que j'ai des regrets ? Bien sûr que non.
Il ne reste que les larmes, le sang, un cœur démoli, mais des remords, pas questions.
Bordel j'ai mal !
Je souffle.
Je pleure.
Je hurle.
Je meurs.
La douleur.
Elle est cruelle, vicieuse, sournoise mais je n'ai plus qu'elle alors je l'accueille à bras ouverts.
Elle parcourt mes veines avec lenteur comme le plus addictif des poisons, me torture, me rend accroc et me bousille pour ne laisser qu'un corps malade.
Elle m'est essentielle, primordiale, c'est ma came.
Et puis il y a la solitude.
Elle me ronge, me rend faible, vulnérable et me tue à petit feu.
Mais sans elle je serais resté aveugle. Elle m'a fait comprendre qu'autrui ne sert qu'à nous détourner de la sinistre vérité.
Pour comprendre à quel point le monde est sal et perverti, il faut être avoir ressenti la solitude, la vraie, celle qui finit par te rendre fou.
J'attends de crever mais on dirait que mon cœur refuse de s'arrêter.
Pourtant il peine à battre alors pourquoi s'accroche-t-il ? Il devrait juste laisser tomber.
Je le déteste ce cœur. Il a été broyé, piétiné, brisé, mais il continue d'espérer, ce con.
A quoi ça sert d'espérer ? L'espoir c'est succin. Ca dure un moment puis on réalise que ça rime à rien. L'espoir c'est qu'une putain d'illusion qui sert à nous appâter et à nous faire croire que la vie est belle.
La vie est belle ? Quelle connerie. Je trouve rien de beau à la vie. C'est laid, cruel, hideux, repoussant, gerbant.
Je connais une citation : « l'homme est condamné à être libre ». Il était sous LSD ou quoi celui qui nous a pondu une connerie pareille ? L'homme est enchainé à la réalité et ne peut se défaire de ses liens qu'en acceptant l'idée qu'il n'a rien à foutre sur terre. L'homme ne sera libre que quand il sera mort. La voilà la vérité. On n'est pas libre. On est prisonnier de notre propre corps, de notre instinct de survie qui nous pousse à nous débattre alors qu'il n'y a plus d'espoir. Il n'y a que la mort qui peut nous défaire de ce tragique destin.
La mort est libératrice.
Elle est si séduisante, si tentante, si bandante.
Je l'attends, cette mort, ma sauveuse.
Je l'attends mais elle ne vient pas.
Elle me fait languir, se complait dans la souffrance et la terreur qu'elle suscite.
Elle me tend les bras mais je n'arrive pas à l'atteindre.
Certains la craignent, moi je l'admire et la convoite.
Toi, tu fais partie de ceux qui la craignent.
Toi, je te déteste. Oui je te parle à toi, qui lis ces quelques mots couchés sur le papier sans but particulier, mis à part celui d'évacuer ma haine et ma frustration d'être encore en vie dans ce monde corrompu.
Je te déteste parce que tu es naïf. Tu penses encore que la vie est un cadeau ? Putain tu me fais marrer...
La réalité dans laquelle tu croies exister, c'est de la merde. Ton identité, tes désirs, tes peurs, tes rêves... Tout ce qui fait de toi ce que tu penses être, c'est de la merde.
Tout n'est que mensonge.
Tu penses avoir le contrôle de ta vie, tu penses être capable de faire tes propres choix, tu penses être conscient de toi-même. Je suis désolé de briser tes convictions, mais tout ça, ce n'est qu'illusoire.
Dans ma bonté d'âme, je vais même te donner un exemple pour que tu comprennes le sens de mes paroles.
Tu croies avoir le choix, soit. Mais si tu choisis d'arrêter de respirer, ton corps va passer outre ta volonté. Il est conditionné pour craindre la mort, pour survivre, pour se débattre. Alors même si tu veux cesser de respirer, le manque d'oxygène forcera ton corps à inspirer de l'air puis à l'expirer.
Tu es prisonnier de ce corps qui n'a pour seule fonction la survie. Tu es à sa merci, condamné à exister jusqu'à ce que la mort t'en délivre.
Donc au risque de me répéter, la mort, il n'y a que ça de vrai.
Il y a un trou dans mon cœur.
Et tout ce qu'il me reste en tête, c'est la peur.
Elle me hante, me tourmente.
Cette peur est comme un poison qui coule lentement, lentement... détruisant tout sur son passage.
Mes veines sont en feu, mon souffle est douloureux et mes pensées torturées sont sur le point de déborder.
Je ne suis pas seul dans ma tête.
Il y a moi. Et il a l'autre moi.
L'autre moi, ce sont mes désirs, ma noirceur, ma volonté de tout détruire, mon besoin de violence, mon irrépressible envie de tout faire crever autour de moi.
Cet autre moi, je le déteste. Je l'aime. Je le hais. Je l'adore.
Il y a aussi des couleurs dans ma tête.
Il y a le noir.
J'aime bien le noir, c'est réconfortant. Je peux y disparaitre, y faire oublier ma pitoyable existence. Et parfois, il me donne même la sublime impression d'être mort.
Mais le rouge, c'est encore mieux. Le rouge c'est la couleur de ce liquide essentiel à la vie. Ce liquide qu'il est si facile de faire couler. Ce liquide qu'il suffit d'une coupure le long de l'avant-bras pour qu'il s'échappe et se répande sur le sol afin d'y former une flaque aux contours frôlant la perfection.
Et puis il y a le blanc. Je l'aime bien aussi parce qu'il évoque le vide que je rêve d'éprouver.
Mourir. Mourir. Mourir. Mourir. Mourir. Mourir. Mourir. Mourir. Mourir. Mourir. Mourir. Mourir. Mourir. Mourir...
C'est le mot qui revient en boucle dans ma tête chaque fois qu'il n'y a plus de bruit pour me distraire. C'est un joli mot.
Je vois tous ces visages autour de moi, je les vois sonder mon âme malade et je déteste la façon qu'ont ces inconnus de me regarder avec cet air désolé. Ne soyez pas désolé pour moi. Vous pouvez me haïr, me trouver répugnant, hideux et cruel, mais gardez votre pitié pour vous-même. Etouffez-vous avec.
La haine ou la peine ? Ces émotions sont trop violentes et destructrices pour les éprouver en même temps alors j'ai décidé de choisir entre les deux. Et devine laquelle l'a remporté... Non, tu trouves pas ? Ben c'est que t'as pas bien suivi tout ce que j'ai dit avant. Je vais te donner un indice parce que je suis quelqu'un de sympa. Un peu dérangé, mais sympa. Alors mon indice : je veux que tout le monde crève, que tout le monde souffre. Je veux que toi tu crèves. Si possible, j'aimerais être la cause de ta mort. Que mes mots t'insufflent l'envie d'en finir parce qu'ils auront ébranlés ton petit cœur fragile. Donc maintenant tu devrais avoir compris que c'est la haine qui l'emporte. C'est tellement plus simple de haïr.
Je vais y rester. Toute cette rancœur qui coule dans mes veines commence à me pourrir de l'intérieur. Chaque jour qui passe est une épreuve que je peux me montrer fier d'avoir surmonté. Seulement ce n'est pas de la fierté que j'éprouve. C'est toujours et encore de la haine. Il ne reste que ça. Elle me consume, me ronge, me broie, m'assassine.
J'ai fait un rêve. Dans ce rêve, il y avait une multitude de couleurs, d'émotions, de personnes. C'était vivant. Et puis je me suis réveillé et je me suis rappelé que j'étais mort, que je n'étais plus qu'un déchet. Les larmes ont coulé sur mes joues et m'ont paru si brulantes qu'elles m'ont fait penser à de la lave, ravageant tout sur son passage.
J'ai un dilemme dans la tête.
Tuer ou être tué ?
Ma chance de trouver une forme de paix intérieure résulte dans une de ces deux possibilités. Mais je reste indécis. Si je tue, j'hôte la vie, je délivre quelqu'un du fardeau qu'est sa propre existence. Au passage, je me débarrasserai de toute cette rage qui me dévore de l'intérieure. Je ferai donc d'une pierre deux coups. Seulement une part de moi s'y refuse. Il y a toujours cette petite flamme, toute petite, qui m'empêche de libérer ma colère. Je déteste tellement cette flamme qu'on appelle aussi l'espoir. Il persiste, s'accroche, comme un parasite. A cause de lui, je ne peux ni tuer, ni être tuer. Il me force à me battre, à user de mes dernières forces pour essayer de survivre.
Mais c'est tout ce que je fais. Je survis. Je ne vis plus.
J'ai envie de me bourrer la gueule, de me défoncer, de détruire ce corps que je méprise, ce corps qui est malade.
J'ai besoin de drogue, j'ai besoin de savoir qu'il y a quelque chose de nocif qui ronge ce qu'il reste de mon âme. Mon âme torturée.
Je pense à mes entrailles que je me fais violence pour ne pas arracher, à ma peau qu'il est si difficile de ne pas déchirer, à mes cordes vocales qui sont sur le point de se briser parce que j'ai tant hurlé.
J'ai hurlé pour faire comprendre au monde que j'existais encore.
Mais personne ne m'a répondu.
Il n'y a eu que le silence.
Et il n'y a rien de pire que le silence.
C'est violent, assourdissant et surtout, le silence, c'est la preuve que t'es seul.
Et la solitude, c'est une douleur qui prend aux tripes.
Enfin bref. Ca tourne en rond, la solitude, la colère, le désespoir... C'est encore et toujours la même chose. C'est comme si je restais bloqué, coincé dans un endroit où il ne m'est pas permis d'éprouver autre chose que de la douleur. Et je suis fatigué de lutter pour tenter de rompre ce cercle.
Donc j'ai décidé de tout arrêter.
Je vais arrêter de souffrir, de penser, d'exister, de vivre.
C'est terminé.
Audrey.
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