Chapitre 43 : Les fantômes des Oubliés
Bonsoir !
Oui je sais j'avais annoncé samedi. Mais il se trouve que je ne suis pas sûre d'avoir le temps de poster demain alors vous l'avez un jour plus tôt ! Je sais, je suis d'une grande clémence.
Vous vous souvenez d'il y a longtemps où je vous avais annoncé qu'il restait un point de vue et demi? Donc vous avez eu Alan, maintenant il reste le 0,5 et vous avez été nombreux à deviner juste !
Donc ce chapitre sera d'un double point de vue, avec celui de Lucy et le second. Avant toute chose je tiens à préciser qu'il n'a absolument pas la forme telle que je l'avais imaginée en le commençant, et voilà bref je peux rien dire de plus sans spoiler donc j'expliquerais après le chapitre. Je vous invite donc à lire le paragraphe qui suivra le chapitre, que ce soit pour les explication ou sur la suite de la fic' (dont la fin est proche).
Bonne lecture !
Chapitre 43 : les Fantômes des Oubliés.
Shannon ignorait totalement ce qui s'était passé. La seule chose qu'elle savait, c'était qu'elle avait la tête affreusement lourde et qu'une douleur sourde pulsait sur sa poitrine. Elle cherchait le moindre souffle d'air à grand râle qui la faisait gémir de souffrance. Quand elle voulut porter une main à sa poitrine, elle se rendit compte qu'elle avait les poignets entravés derrière son dos. Elle entrouvrit difficilement une paupière : chaque courbe tanguait autour d'elle. Elle eut juste l'impression d'apercevoir une pièce sombre avant de refermer les yeux et de se laisser aller contre ce qui lui semblait un mât. Des voix floues lui parvenaient, sans que son esprit embué ne parvienne à les reconnaître. Shannon s'efforça de fermer son esprit mais elle entendait toujours les voix :
-Elle a l'air vraiment mal en point ...
-Shanny ! Shanny je t'en prie réveille-toi !
-Essaie de la pousser un peu ...
-Taisez-vous !
Ce fut qu'elle entendit l'écho de la phrase se répercutant le long des parois humides que Shannon comprit que ces gens avaient parlé à voix hautes. Avec difficulté, elle parvint à ouvrir une paupière lourde. La lumière lui agressa les prunelles mais elle s'efforça de ne pas craquer. Elle cligna plusieurs fois des cils pour s'habituer à la luminosité ambiante. Peu à peu, la pièce se découvrit à elle, dans toute son obscurité, et son horreur. Avant qu'elle n'ait le temps de la détailler, elle entendit un vague chuchotement à sa droite :
-Shanny !
Shannon parvint à pencher sa tête et, à travers la brume, reconnut sa camarade de chambre Maeve Macmillan. Ses cheveux bruns étaient plaqués contre ses joues et ses yeux brillaient de larmes. Elle ne semblait pas blessée, mais bouleversée.
-Maeve, haleta Shannon, provoquant un éclat de douleur dans sa poitrine. Maeve, qu'est-ce qu'il se passe ?
-Je n'en sais rien ...
Les larmes commençaient à couler sur les joues de Maeve. Shannon tenta de se redresser pour se donner de la hauteur, mais ses liens l'entravaient. Ses souvenirs commençaient peu à peu à affluer : son retour de l'infirmerie après son premier jour de retenue, le sourire radieux d'Hannah Londubat, son repas avec Maeve et Mary, comment elle était partie ... Pourquoi était-elle sortie si vite de la Grande Salle ? Elle s'en souvint alors soudain, comme un flash qui lui laissa le souffle coupé.
-Laureen.
Elle ne se rendit compte qu'elle ne l'avait dit à voix haute que lorsqu'elle entendit quelqu'un ricaner non loin d'elle. Le même timbre qui avait dit à Maeve de se taire. Le même qui l'avait fait trembler son enfance durant. Shannon leva les yeux et remarqua alors d'autres personnes, des personnes floues et blanches, comme des fantômes. Ils s'agitaient, murmuraient, avec des mots spectraux et indistincts qui glaçaient Shannon. Une silhouette était plus nette que les autres, sans doute parce qu'elle était plus proche. Elle était encapuchonnée, tel un Détraqueur immaculé, et Shannon ne voyait pas son visage. Cependant, elle percevait l'éclat de ses yeux, et la malfaisance qui y brillait lui était bien trop familière.
-Laureen, répéta-t-elle, vaincue. Laureen ... Par Merlin, qu'est-ce que tu fais ?
Laureen Bones eut un sourire et retira d'un geste gracieux sa capuche, laissant couler dans son dos un flot de cheveux blond-roux. Son visage pâle était éclairé par un sourire radieux.
-Tu le savais, Shannon. Ce que j'étais capable de faire, pour que tu t'arrêtes.
-Laureen, cingla une voix venant des silhouettes fantômes. Il me semblait d'avoir dit de ne pas les approcher. Pas encore.
-Pas encore ? Qu'est-ce que ça veut dire ?
Il eut le tirage sec d'une baguette et la voix fut immédiatement étouffée. Shannon reconnut immédiatement cette voix et son cœur tomba dans sa poitrine. Elle tourna la tête, l'esprit de plus en plus claire et étudia son environnement. Son rythme cardiaque s'emballa en constatant qu'elle était assise sur du bois, des ballots de bois empilés autour d'un piqué auquel elle était attachée. Il en était de même pour Maeve. Et pour les cinq autres personnes avec lesquelles elles étaient. Shannon était l'extrémité d'un demi-cercle composé de sept personnes. Elle aperçut vaguement l'élève qui constituait l'autre extrémité et son cœur se serra. C'était Luke. Son regard brillait de haine et pendant un affreux instant, Shannon lui trouva une grande ressemblance avec sa mère, cette femme glaciale et terrifiante qu'elle n'avait rencontrée qu'une fois. A ses cotés un garçon de première année aux cheveux bruns pleurait toutes les larmes de son corps. A coté de lui, une jeune fille que Shannon reconnut comme étant Lily Potter se débattait désespérément dans ses liens, ses cheveux roux s'agitant follement autour d'elle. Scorpius Malefoy restait plus calme à ses cotés et lui murmurait des paroles rassurantes. Shannon peinait à apercevoir la dernière personne, mais elle était nettement plus âgée et plus amochée que le reste du groupe. Sa tête pendait sur son épaule, et un filet de sang coulait sur son visage depuis l'arcade sourcilière. Shannon devina à ses cheveux roux qu'elle était de la famille Weasley, mais n'arrivait pas à discerner son visage. Elle craignit un instant que ce soit Lucy, avant de s'apercevoir qu'elle ne portait pas les armoiries de Serpentard, et que les cheveux de Lucy étaient plus longs. Elle chercha dans sa mémoire qui cela pouvait être et ne trouva à Poudlard que la sœur aînée de Louis, Dominique. Mais il lui semblait que ses cheveux étaient plus courts que cela ... Une violente quinte de toux l'empêcha de réfléchir d'avantage : ses poumons lui brulèrent atrocement et il lui semblait que ses côtes voulaient percer sa peau. Elle voulut baisser les yeux sur sa poitrine pour voir ce qui causait la douleur et elle faillit tourner à nouveau de l'œil. Sa chemise était souillée de traces noires et une odeur de brûlure émanait de sa peau.
-Par Merlin ...
-Ne regarde pas ça, lui enjoignit Maeva avec des trémolos dans la voix. C'est moche, ne regarde pas.
-Qu'est-ce qu'il s'est passé ?
-Pour toi je ne sais pas, ils t'ont ramène ici comme ça ...
Les sourcils de Shannon se froncèrent alors qu'elle cherchait à rassembler les morceaux éparpillés de sa mémoire. Elle se souvenait s'être retrouvée dans la bibliothèque pour chercher ... Chercher qui déjà ? Il lui semblait que c'était Adam. Elle voulait - une fois de plus - lui parler de son frère. Mais ce n'était pas Adam qu'elle avait trouvé. C'était Laureen. Sa cousine lui avait demandé de sortir pour qu'elles puissent parler. Elle se souvenait avoir serré sa baguette dans sa robe, le cœur battant, la haine aux lèvres. Elle n'avait pas en revanche prévu de devoir s'en servir de ci-tôt quand deux silhouettes blanches avaient surgi devant elle, baguettes à la main. Elle se souvenait s'être défendue contre elles et Laureen, quand elle s'était jointe à la lutte. Le sortilège qui avait mis fin à la résistance de Shannon était d'elle et la jeune fille avait été surprise de la puissance que sa cousine pouvait mettre dans un sortilège destructeur. Shannon fixa la silhouette blanche et découverte de Laureen, qui s'était éloignée avec une silhouette à peine plus haute qu'elle. Elle en compta moins d'une vingtaine, toutes regroupées dans un coin de la pièce, chuchotant et lorgnant quelque chose à leurs pieds.
-Qu'est-ce qu'ils regardent ?
-Un gamin, je ne le connais pas trop ... Il est à Gryffondor et c'est le seul qu'ils n'ont pas attachés.
Le cœur de Shannon se serra un peu plus dans sa poitrine et elle visualisa alors très bien de qui il s'agissait. Par pitié ... Je n'ai jamais voulu qu'il arrive cela ...
-Le petit frère d'Adam, précisa inutilement Scorpius en se penchant vers elle avec discrétion. C'est très bizarre ...
-Qu'on soit tous attachés sur des bûchers dans la Chambre des Secrets, c'est déjà assez bizarre en soi, rétorqua sèchement Luke à l'autre bout de la chaine.
Les mots de Luke furent de trop et donnèrent trop d'information à l'esprit embué de Shannon. Elle cligna les yeux et détailla un peu plus la pièce qui était restée pour elle dans l'ombre et le brouillard. Ils se trouvaient au bout d'une grande Salle en longueur, de belle démentions, et effectivement très obscure. De part et d'autre d'une immense allée se dressait d'inquiétantes têtes de serpent, tout crocs dehors. Il régnait dans cette pièce une aura poisseuse, humide et profondément malfaisante. Etrangement, Shannon n'eut aucun mal à croire qu'elle se trouvait dans la mythique Chambre des Secrets. Et à l'autre bout de la Salle, un peu excentré, Shannon voyait luire la blancheur d'un squelette - long et sinueux.
-C'est quoi ça là-bas ?
-Aucune idée, répondit craintivement Maeve.
-Oh je t'en prie, on sait tous ce que c'est, répliqua Lily, qui semblait plus courroucée qu'angoissée.
-Le monstre de Serpentard ? devina Shannon en un râle.
Elle commençait à comprendre l'environnement dans lequel elle se trouvait, et cela faisait monter adrénaline et angoisse dans ses veines. Adrénaline car toutes les connexions se faisaient dans sa tête : aussi incroyable que cela puisse paraître et sauf preuve du contraire, elle se trouvait dans la Chambre des Secrets. Et cela se tenait quand elle se souvenait de toutes ses discussions avec Lucy, Adam, Lysander et Luke dans la Salle-sur-Demande. Ceux qui avaient orchestré cette vengeance avaient une fascination pour l'épisode de la Chambre des Secrets et cela c'était vu dans le rituel. Si ces silhouettes blanches étaient les mêmes qui avaient agressées Alexandre Wallace, Lionel Boot, et James Potter - et Shannon en était presque persuadée à ce stade - alors il n'y avait rien d'illogique à ce qu'ils soient dans la Chambre des Secrets. Maintenant, ce n'était pas pour rassurer Shannon et elle sentit son rythme cardiaque s'emballer. Cela ne faisait qu'ajouter à l'horreur de leur situation. Elle s'agita quelque peu, ce qui alarma Maeve :
-Ne bouge surtout pas, réserve tes forces.
-Pourquoi ? Se faire cramer ? railla Luke avec toujours plus de subtilité.
Scorpius lui jeta un regard peu amène. Le sang de Shannon se figea dans ses veines et elle s'agita d'autant plus.
-Qu'est-ce qu'il veut dire ?
-Regarde ce sur quoi tu es assise, Finnigan.
Shannon obéit et examina ce qui la maintenant. Les ballots de bois, le pique. Les mots de Luke s'imposèrent dans son esprit comme une évidence, et le sourire ravi de Laureen, la lueur sadique dans ses yeux ne lui semblait pas de bon augure.
Un bûcher. Elle était assise sur un bûcher.
« Qu'ils brûlent tous ».
***
-Mais tu n'es pas sérieux !
-La Chambre des Secrets ... N'importe quoi !
-C'est vraiment une absurdité de Scamander !
Mais aux oreilles de Lucy, ça ne semblait pas si absurde, bien au contraire. Les liens se faisaient dans sa tête à une vitesse vertigineuse. Ils avaient toujours supposé que les agresseurs s'étaient inspirés des événements de la Chambre des Secrets : cela s'était vu dans le message initial, dans la façon d'empoisonner les victimes ... Sachant que Campbell et Crivey étaient liés, de près ou de loin à elle ... Elle se tourna vivement vers Rose, qui avait la prophétie entre les mains.
-Montre-la-moi, exigea-t-elle en tendant la main.
Rose cligna des cils, surprise et donna le parchemin à Lucy.
-Lucy, protesta-t-elle néanmoins. Tu ne peux pas sérieusement envisager ...
-Oh que si je l'envisage, affirma-t-elle, ses yeux parcourant rapidement l'écriture de Lysander. « La noirceur du passé par le sang continuera de s'écouler » ...
-Rien que ça, c'est obscur, répéta Teddy en fronçant du nez.
-Moi je trouve ça plutôt limpide, songea sombrement Alexandra. La « noirceur du passé », ça doit être les actes commis pendant la guerre. Ceux qui ont commis des actes répréhensibles. Et « par le sang continuera de s'écouler » ... Le sang, on le transmet. Pour moi, ça désigne les enfants, je pense. Les enfants de ces personnes.
-Les héritiers, comprit Henry en hochant la tête. Des gens comme Luke ...
Sa voix s'étrangla à la fin, et il échangea un regard chargé de détresse avec Alexandra. Lucy s'efforça elle-même de réprimer la bouffée d'angoisse qui montait en elle pour se remettre à réfléchir.
-Et comme Scorpius et Erwan, oui, acheva-t-elle en s'efforçant de garder contenance. « Car jamais les esprits n'auront oublié », ça c'est limpide ...
-« Sur le bûcher du passé flamberont les erreurs d'autrefois », lut Adam par dessus l'épaule de Lucy. Oh par Merlin ... « qu'ils brûlent tous » ...
-Le Petit Photographe devait être au courant de quelque chose, approuva Lucy, figée. Et pour le coup, ils ont vraiment décidé de nous brûler ...
-Je pense que ça peut être lu dans un autre sens que le littéral, commenta Lysander en réajustant ses lunettes. « les bûchers du passé » ... Je pense que dans sa mise en scène initiale, ça désignait juste son moyen d'exécution.
-Le Sérum ?
-Oui, le Sérum. On en avait discuté : les effets du Sérum ont des ressemblances avec le venin de Basilic. C'est ça, le bûcher du passé. Symbolique, je veux dire. On a crucifié les enfants comme on a crucifié les parents.
-C'est complétement tiré par les cheveux, fit remarquer Hugo.
-Parce que ces gars là sont logiques ?
Hugo concéda ce point à Lysander et se tut. Les yeux du Préfet-en-Chef étincelaient alors qu'il lisait la feuille.
-« ... libérerons des rancœurs et douleurs. Alors le venin sera éradiqué, et le futur purifié ».
-Ça, c'est tordu, dit Adam. Vous pensez que Crivey va « brôler » le « sang des erreurs d'autrefois », juste pour arrêter de souffrir de la mort de son frère ?
-Pour se venger, rectifia Louis en hochant la tête. Il y a des gens qui font des choses complétement folles, par vengeance.
Un silence angoissé accueillit ses mots et Lucy vit ses camarades s'entreregarder. Certains, comme Eléonore, James ou Rose, avaient les larmes aux yeux.
-D'accord, dit Marcus d'un ton posé, mais froid. Je vous fais une entière confiance concernant l'interprétation de cette soi-disant prophétie - et pour moi rien que ça, c'est fumeux, j'ai assez côtoyé Trelawney pour savoir que la Divination ne vaut rien. Mais je suis désolé, je ne comprends pas le lien avec le Chambre des Secrets.
-Ça mon cher Marcus, c'est parce que tu es un peu limité, commenta Lorcan sans ciller. C'est limpide, pourtant ?
L'assemblée le fixa avec des yeux ronds comme des Gallions. Visiblement, ce n'était pas limpide pour tout le monde. Jina plissa les yeux avec méfiance.
-On doit tous être aussi stupide que Montague, alors.
-Hey !
-Il y a un lien, céda Albus. Rien que dans le message qu'on a découvert en début d'année avec Lucy. C'était quoi, déjà ?
-« Les esprits du passé n'ont jamais rien oublié », récita Lucy, que les mots hantaient encore. « Le temps de la justice vient de s'ouvrir. Ennemis des héritiers, prenez-garde ».
-La première phrase rappelle la prophétie, observa Rose en relisant le parchemin. Et d'accord, la dernière phrase, c'est clairement une référence à la Chambre des Secrets. Mais par Merlin, ça s'arrête là !
-Quoique ..., douta Louis. On sait que les victimes ont été pétrifiées par le regard du basilic ...
-On n'en est pas sûr !
-A d'autre Rosie ! T'inquiète, James et moi on a bien fait notre travail d'enquêteur sur ce coup-là. C'était un basilic qui habitait la Chambre des Secrets. Les victimes ont été pétrifiées par un monstre ; les notre ont été mises dans un coma normalement éternel. Je ne sais pas, vous ne trouvez pas que ... Il y a une ressemblance ?
-Merci Louis !
Les voix soulagée s'élevaient de Lucy, Adam, et des jumeaux Scamander, qui observaient le Mousquetaire avec reconnaissance. Si Rose paraissait songeuse, les autres restaient dubitatifs.
-J'en sais rien, commenta Jina, la mine soucieuse. Ça me semble beaucoup trop tiré par les cheveux ...
-Et quand bien même, enchérit Marcus avec cynisme. Quelqu'un sait où est la Chambre des Secrets ?
Un silence s'abattit sur l'assemblée parce que le Serpentard venait de mettre le doigt sur le nœud du problème. Leur piste s'arrêtait là.
-Harry Potter doit savoir, fit néanmoins valoir Zephan en se tournant vers Albus. Ton père sait, non ?
-Oui mais mon père est à Pré-au-Lard. Alors à moins que tu sois capable de le contacter ...
-Le temps qu'il arrive il sera trop tard, fit remarquer James.
-Tu sais toi ? demanda Jina avec une pointe d'espoir. Tu te vantes de tout savoir sur Poudlard, est-ce que au moins tu sais ça ?
-Des pistes. Pas grand-chose, papa n'a jamais voulu trop nous en dire.
-C'est fort sage, parce que sinon dès la première année, tu te serais retrouver coincée dedans, railla Dominique.
-Si encore j'avais réussi à y entrer, mais c'est impossible, il faut parler Fourchelang pour ça.
Un nouveau silence envahi le couloir alors que tous réfléchissaient aux dernières paroles de James. Lucy pinça des lèvres avec inquiétude. Voilà qui compliquait les choses. Ils échangèrent des regards perplexes.
-C'est quoi le Fourchelang ? s'enquit Zephan Finnigan.
-La langue des serpents, explicita Rose, troublée. Euh ... Tu-Sais-Qui la parlait et Salazar Serpentard aussi.
-S'ils sont dans la Chambre des Secrets alors ... Comment ils ont fait pour rentrer ? s'interrogea Will en se grattant la tête. Et comment nous on ferait pour rentrer ?
-Déjà trouvons la Chambre des Secrets, on verra après comment on fait pour y rentrer.
-On va s'organiser, annonça alors Lysander, resté étonnement silencieux.
Il s'était écarté du groupe avec Lorcan, à réfléchir intensément le regard plongé dans les corridors de Poudlard. Visiblement, son esprit allait bien plus vite que pour le reste des mortels. Il désigna le groupe de Weasley qui le contemplait bouche bée :
-Vous, la grande famille, vous allez intensément réfléchir à où est la Chambre des Secrets. Il n'y a que vous qui puissiez trouver, je pense. Enfin si d'autres personnes ont des idées lumineuses allez-y, mais globalement je pense qu'il n'y a que de vous que peut venir cette idée.
-Non mais Lys, tu prends pour un Préfet-en-Chef ? s'amusa Louis avec une lueur appréciatrice dans le regard.
Lysander réagit à peine à la pique et se tourna vers un groupe de septième année qui comprenait Gloria Stones, la Préfète-en-Cheffe qui venait de Poufsouffle, et Dominique.
-Toi (il prit le bras de Lorcan). Tu prends les meilleurs de notre année et vous essayez de contacter Harry Potter. On ne va pas faire de connerie non plus. On verra ce qui va le plus vite - et pour notre bien à tous, j'espère que ce sera vous. Faites comme vous voulez, Patronus, transplanage ...
-On ne peut pas transplaner dans l'enceinte de Poudlard !
-D'accord Rosie on retiendra. En attendant, on réfléchit à un problème à la fois. Le reste des gens, faites marcher vos méninges. On a besoin que les idées fusent, des vies sont en jeu.
Les derniers mots firent frissonner les élèves et arrachèrent quelques larmes à Eléonore. Même James parut prêt à craquer, avant de hocher la tête l'air déterminé.
-A tes ordres, Lysou. Allez les gars, venez par là. Lucy, toi aussi.
Lucy se dépêcha de rejoindre ses cousins - si on exceptait Dominique, plus efficace avec sa baguette que pour ce qui concernait les vieilles légendes familiales - alors qu'Adam se penchait sur Lysander. Les Weasley formaient un cercle dans lequel Lucy s'intégra, entre Albus et Roxanne. Ils tournèrent le visage vers Louis et James, les plus âgés et plus charismatique.
-OK, on balance tout ce qu'on a, lâcha le fils de Harry avec gravité.
Ils résumèrent toutes les miettes d'informations, brides et soupirs que leurs parents avaient pu laisser échapper au fils des années, mais certains (Roxanne, Lucy et Louis) se trouvèrent vite à cours, leurs pères n'ayant que peu vécu les péripéties de l'oncle Harry. Rose, Hugo, James et Albus débattirent pendant plusieurs minutes avant d'arriver au constat résumé par Rose :
-En somme, on sait que c'est une salle sans doute sous-terraine, que l'on atteint après avoir parler le Fourchelang. Elle doit être des kilomètres sous le château, assez grande pour qu'un Basilic puisse s'y épanouir plusieurs siècles. En plus, mon père a déjà évoqué un long tunnel où il aurait sauté, je suis sûre que c'est l'entrée.
-Mais concernant l'entrée-même ? s'impatienta Lucy. Je vous en prie, des années à trainer les oreilles et rien ?
-Oncle Harry devait vraiment avoir peur que James s'y introduise pour de vrai, laissa supposer Louis avec un demi-sourire.
-Elargissons la recherche, proposa Hugo avec morosité. Ils étaient en deuxième année, c'est quoi l'élément le plus marquant de cette année là ? Celui qu'ils nous racontent le plus ?
-Les lutins de Cornouailles, grogna Roxanne.
-Le moment où papa a surpris Ron en train de sortir des toilettes des filles, ironisa Lucy en levant les yeux au ciel. On y a le droit à chaque noël.
-Ouais, ils ont passé la vie dans les toilettes cette année-là, se rappela Rose en hochant la tête. Ceux de Mini-Geignarde en plus, comment ils ont fait ?
Lucy fronça les sourcils. Elle avait oublié ce détail - que c'était devant les toilettes de Mimi Geignarde que son père avait coincé l'oncle Ron. C'était également non loin de ces toilettes qu'Alexandre Wallace avait été agressé. Et à la porte de celles-ci que la première photo avait été trouvée par Gethin.
La première. C'était forcément significatif.
-Ça vaut peut-être le coup de demander à Mimi, songea-t-elle tout haut. Elle a peut-être entendu quelque chose pendant qu'ils enquêtaient, s'ils ont passé leur année là-bas.
-A part à nous envahir de gémissement, à quoi elle peut s'intéresser d'autre ? douta James. Et puis ces toilettes sont affreux.
-C'est là qu'il y a eu la première agression, insista Lucy, vite appuyée par Albus. Que ce soit pour nous ou pour eux, Mimi a forcément entendu quelque chose.
-Et pas seulement dans notre cas, la première agression de la Chambre des Secrets était aussi devant les toilettes de Mimi, se souvint Roxanne. La chatte de l'ancien concierge, tu te souviens ? Mon père n'arrêtait pas de se demander pourquoi ils ne l'avaient laissé pétrifiée ! Lucy a raison, Mimi sait peut-être quelque chose !
James paraissait encore méfiant, mais finit par se ranger à leur avis et Lucy courut vers Lysander et Adam, qui continuaient de parler vivement. Du coté des septièmes années, des vapeurs blanches que Lucy reconnut comme étant des Patronus emplissaient l'espace, mais aucun d'entre eux ne parvenait à les faire parler.
-C'est hyper compliqué, on apprend ça à l'Académie des Sortilèges normalement, expliqua Gloria Stones, que Lucy savait pourtant être l'une des meilleures de sa classe. Et vous et la Chambre des Secrets, ça avance ?
-On tente, soupira Lucy avant de se tourner vers Lysander. On va voir Mimi, on croit que c'est notre meilleure chance.
-Ça devient n'importe pas ! s'agaça Adam avec un éclat de courroux dans le regard. D'abord on va dans le bureau de McGonagall pour avoir un indice, ensuite on va voir Mimi pour aller voir un autre ... Lucy on perd du temps, là !
-Pourquoi tu veux aller lui parler ? s'enquit Lysander avec plus de calme.
Mais Lucy voyait sa nervosité transparaitre dans ses traits et ses prunelles. La préfète lui répéta ce qui venait de se dire, sous les yeux anxieux et intéressés de Zephan Finnigan et Eléonore, qui passaient d'un groupe à l'autre en trainant une oreille.
-Je suis d'accord avec Adam, finit par lâcher Eléonore, les yeux plissés. Fini les devinettes bon sang, ce n'est pas une chasse aux trésors, c'est la vie de mon frère qui est en jeu !
-Tu penses vraiment que les toilettes de Mimi sont un lieu clef ? l'interrogea Zephan.
Son air avait changé du tout au tout quand Lucy avait évoqué les toilettes. Son visage était passé de l'anxiété la plus profonde à une marque de grande réflexion. Lucy lut dans ses yeux verts - si semblable à sa sœur - que cela lui évoquait quelque chose. Lysander parut percevoir la même chose.
-Un problème Zephan ?
-Je ne suis pas sûr, admit-t-il, les sourcils froncés. Mais ... En première année j'ai fait comme qui dirait ... Une connerie.
-En voilà une surprise, persiffla Adam.
Lucy et Lysander lui intimèrent tout deux de se taire. Zephan se gratta la tête avec un semblant de sourire et poursuivit :
-Je venais de me faire prendre mes premières heures de colle par Montrose et je savais que sa classe était au bout du couloir alors je me suis dit que ... Si j'inondais le couloir comme Mimi et qu'il se cassait une jambe en glissant, bien ...
-Du coup ? insista Eléonore, sceptique.
-Du coup j'ai ouvert tous les robinets des toilettes de Mimi. Je les ai inondé, sauf qu'il n'y avait un qui ne marchait pas. J'ai essayé de voir pourquoi, je l'ai examiné et j'ai trouvé un serpent gravé sur la tuyauterie. Je sais pas mais puisqu'on parle de Chambre des Secrets de Serpentard avec un serpent ... alors ... Vous pensez que ça un sens ?
Lucy contempla le frère de Shannon abasourdie, avec la vague envie de lui donner la gifle de sa vie pour ne pas avoir raconter cela plus tôt. Evidemment, Zephan ne pouvait pas savoir. Mais après tout cela, maintenant que Lucy l'entendait ... Oui, ça faisait sens.
-Ne me dites pas que la seconde idée lumineuse nous vient encorede Zephan Finnigan ? s'émerveilla Lysander avant de taper fièrement dans son bras. Tu es le digne frère de ta sœur !
-Vous êtes sérieux ? répliqua froidement Eléonore.
-On sera idiot de ne pas aller vérifier, souffla Lucy d'une voix rauque. Un serpent gravé dans les toilettes devant lesquelles il y a eu une victime de la Chambre ... Et le premier message ...
-Bon sang Lucy, l'entrée de la Chambre des Secrets dans des toilettes ?
-Je ne dis pas que j'ai raison, je dis juste qu'on serait idiot de ne pas aller vérifier. Mon oncle a passé son année là-bas, ce n'est pas pour rien !
-Et quand bien même c'est là-bas, comment on fait pour y entrer sans parler le Fouchelang ? cingla Adam, lui aussi dubitatif.
-Ça je peux gérer !
Ils se tournèrent tous d'un bloc vers Roxanne, qui les contemplait un immense sourire aux lèvres. Puis, sans attendre son reste, elle se tourna vers Louis et James pour leur agripper les cravates, et les trainer dans le couloir, son insupportable air malicieux plaqué sur le visage.
-Allez venez, on va chercher le matériel ! On se retrouve chez Mimi dans deux minutes !
***
De l'idée de Lucy, ça avait été une très mauvaise idée de laisser Roxanne, Louis et James partir seuls. Mais elle n'avait pas pu les empêcher et ils étaient partis en courant vers la Tour de Gryffondor. Lysander n'avait pas laisser tout le monde participer à l'expédition jusqu'au deuxième étage : ceux de moins de quinze ans restaient dans la Tour avec une troupe d'élève plus âgés, dont beaucoup de majeurs et bons sorciers qui ne souhaitaient pas se déplacer. Evidemment, l'ensemble du Clan Weasley (sauf Hugo et Albus, trop jeunes, qui avaient vociféré devant un Lysander intransigeant) s'était immédiatement porté volontaire. Gloria Stones, Marcus, Dominique et les jumeaux Scamander étaient les seuls septième année du voyage. Suivaient Eléonore, Jina et Stephen pour les sixième années, Henry, Adam, et Lionel Boot pour les cinquième année, et Zephan et Will pour les quatrièmes années ayant quinze ans. Il étaient moins d'une vingtaine, mais parmi les meilleurs et plus astucieux de leurs classes. Les autres septièmes années s'échinaient derrière eux à prévenir Harry de leurs dernières découvertes, mais en ce qui les concernait, ils avaient perdus trop de temps pour attendre les renforts.
Alors autant prendre les devants.
Lucy savait que c'était risqué. C'était même peut-être la pire chose qu'elle avait à faire. Mais elle savait aussi qu'elle ne pouvait pas faire autrement. Ils n'avaient même pas attendu Victoire, de l'autre coté du château, mais deux élèves de sixième année s'était précipitée pour la prévenir alors que les autres descendaient vers les toilettes de Mimi. Ils pénétrèrent la pièce avec déférence et crainte. Les gémissements de Mimi emplissaient l'espace et Lucy posa un regard emplit d'appréhension pour les vasques face à elle. Les miroirs crasseux lui renvoyaient ses yeux hagards. Zephan fit le tour des lavabos, testa les robinets un par un alors qu'Adam fouillait les cabines. Il finit par s'arrêter devant l'une d'entre elle et Lucy comprit ce qu'il cherchait quand il murmura :
-Mimi ?
La tension était telle que plus de la moitié du groupe sursautèrent. Les gémissements se firent plus strident et Lionel grimaça.
-C'est pas idiot ce qu'il fait. Mais alors mieux vaut lui que moi.
-On te remercie pour cette information capitale, Léo. Maintenant chut.
-Mimi ? insista Adam avec douceur. Est-ce que ça va ?
Tout le tact qui avait manqué à Luke. Songer cela fit saigner le cœur de Lucy - bien que ce fut dans les faits ces oreilles qui saignèrent quand Mimi poussa un hurlement perçant :
-NON ! Non ça ne va pas du tout !
Sa silhouette s'éleva rapidement au dessus de la cabine pour s'installer sur la tuyauterie, et elle se mit à sangloter éperdument dans ses bras fantomatiques. Lucy lorgna nerveusement la porte, espérant que Roxanne la passerait avec sa solution miracle.
-Tu as vu des gens venir ici, pas vrai ? poursuivit suavement Adam. Des élèves ?
-Fichez-moi la paix !
-Mimi, intervint Lucy en tentant de ne pas avoir l'air trop pressante. Ça aiderait mon oncle Harry si ... Si tu nous disais ce que tu as vu.
L'évocation de son oncle avait marché comme elle l'avait espéré sur le fantôme, qui releva aussitôt la tête, ses verres de lunette luisant. Un de ses broussailleux sourcils se dressa.
-Harry ?
-Il cherche des élèves qui ont disparu, expliqua-t-elle succinctement. Harry les cherche. On pense qu'on les a emmené ... Dans la Chambre des Secrets.
-On pense qu'elle est ici, tu peux nous le confirmer ? demanda Adam. Tu sais tellement de chose sur Poudlard, Mimi, tu dois forcément savoir ...
Les yeux de Mimi s'écarquillèrent quand ils évoquèrent la Chambre des Secrets, mais au moins elle cessa de pleurer. Elle se redressa, sourcils froncés.
-Vous n'êtes vraiment qu'une bande de fouineur arracheur d'information ...
-Mimi, des vies sont en jeu, qu'est-ce que tu as vu ? s'enquit plus durement Adam, commençant légèrement à perdre patience.
-Rien du tout ! répliqua Mimi d'une voix stridente. Juste ...
Son regard se porta sur les lavabos et Lucy y vit l'ultime signe que son intuition avait été bonne.
-Elle est ici, affirma la préfète en un souffle horrifié. Et tu l'as vu s'ouvrir.
-Se fermer, admit Mimi dans un marmonnement. Je ... Je n'ai pas vu ce qui s'est passé avant.
-Par les chaussettes puantes de Merlin, jura Jina les yeux écarquillés.
Lucy n'aurait pas dit mieux.
La Chambre des Secrets étaient dans les toilettes de Mimi.
Les toilettes de Mimi Geignarde !
C'était invraisemblable. Pourtant, la voix incertaine de Zephan s'éleva et ancra un peu plus ce fait dans l'esprit de Lucy.
-Je l'ai trouvé !
Elle se tourna vers lui et le vit tourner encore et encore un robinet qui s'échinait à ne pas couler. Gloria Stones à ses cotés effleurait doucement les tuyaux, le visage crispé.
-Il y a bien un serpent ... (Elle leva les yeux sur Lucy et Adam qui revenaient vers eux). Mimi vous a dit quelque chose ?
-Que Serpentard a eu le mauvais goût d'enfermer un monstre dans les toilettes des filles. Les toilettes des filles, par Merlin !
-Il devait être misogyne et espérait qu'il nous tue toute, évalua Dominique. Connaissant le personnage, ce ne serait pas étonnant.
Les Serpentards de la salle - et ils étaient plus nombreux que ne l'aurait cru Lucy - jetèrent un regard noir à la Serdaigle. Will secoua la tête. Il avait pâli de plusieurs teintes en entrant dans les toilettes.
-Franchement arrêtez ça les gars. On ne pourrait pas genre, enterrer la hache de guerre, juste le temps de sauver tout le monde ? Juste ... Se serrer les coudes, pour que ce cauchemar se termine.
-Evidemment qu'on le peut Will, le rassura Rose en lui mettant une main sur le bras. On va ...
Le son fracassant de la porte l'empêcha d'en dire plus. La moitié du groupe tira prestement sa baguette pour la pointer sur les trois nouveaux venus, qui répliquèrent de la même manière. Jina, une de celle qui s'était armée, poussa un grondement sourd :
-Par Merlin, Jim, tu nous as foutu la frousse !
-Navrée mon cœur, s'excusa James en rengainant sa baguette d'un geste souple. Vous avez trouvé quelque chose de probant ?
-Si la Chambre n'est pas là, je veux bien manger Buck, assura Lysander. Et vous, la solution pour rentrer ?
Son regard glissa sur Roxanne, qui tenait toujours sa baguette fermement en main. Ses yeux étaient loin d'être serein, pourtant un sourire effleura ses lèvres alors qu'elle sortait un paquet de chewing-gum de sa poche.
-Des bonbons ? constata sceptiquement Henry.
-Des bonbons de chez Farce pour Sorciers Facétieux, qualité Weasley, précisa Roxanne, ses yeux roulant dans ses orbites. Démonstration.
Elle tira une des plaquettes de chewing-gum, la déballa et la mit derechef dans sa bouche. Elle mâcha quelques secondes, avant de grimacer. Elle ouvrit la bouche pour dire quelque chose, mais la seule chose qui dépassa ses lèvres fut d'affreux sifflements. L'ensemble du groupe eu un mouvement de recul et jeta un regard horrifié à Roxanne. Le sourire de cette dernière s'était élargi.
-C'est un classique de la Farce et Attrape, expliqua Louis en désignant le paquet. Les changeurs de voix. Tu prends un chewing-gum et hop ! Selon celui que tu avales, tu parles soit la langue des chats, des éléphants ... N'importe quel animal.
-Mais oncle George les a vraiment perfectionné, poursuivit James. Il y en a même un qui nous permet de parler de Gobdebabil !
-Donc celui que Roxanne est en train de mâcher lui fait parler le Fourchelang ? comprit Adam avec une note d'admiration dans la voix.
-Oui, mais il ne marchera que tant qu'il a du goût, ajouta Louis avec précipitation. Alors on ferait vraiment bien de se dépêcher. Où est la Chambre selon vous ?
Lucy désigna Zephan et Gloria, qui examinaient toujours le robinet gravé d'un serpent. Roxanne secoua la tête, les yeux écarquillés, et émit quelques sifflements vaguement sceptiques. Tous lui jetèrent un regard épouvanté.
-Weasley, arrête ça, c'est grave flippant, commenta Will, livide.
-Au contraire, il faut qu'elle continue, protesta Lysander en désignant le robinet. Roxanne, après toi. Pour la première fois de ta vie, dis quelque chose d'intelligent.
La noirceur du regard de Roxanne fut masquée par son appréhension. Elle s'avança vers le robinet, le fixa un instant, indécise, avant de lâcher quelques sifflements secs qui arrachèrent des grimaces à certains. Ils attendirent quelques secondes dans l'angoisse, retenant leur souffle. Le temps semblait se suspendre dans la pièce jusqu'à que l'impensable se produise. Le robinet brilla soudain d'un éclat blanchâtre et se mit à tourner sur lui même, arrachant des cris de stupéfaction à Zephan et Gloria qui se trouvaient devant. Puis le lavabo entier se déroba et bascula avec un bruit strident évoquant les longs gémissements de Mimi, pour laisser place à un trou obscur au bord duquel personne ne voulut d'approcher.
-Bon sang de bordel de Dieu, laissa échapper Stephen avant de donner une tape dans l'épaule de Zephan. Bien joué, mon vieux.
-A qui l'honneur ? demanda Gloria d'une voix tremblante.
Lucy et Adam s'approchèrent lentement de l'entrée supposée de la Chambre des Secrets. Le lavabo avait laissé place à l'entrée noire d'un tuyau humide et fort peu accueillant. La colère et l'incertitude brillèrent dans les yeux d'Adam.
-J'y vais. Je ne laisse pas mon petit frère là-dedans.
-Moi aussi, enchérit farouchement Eléonore.
-On y va tous, trancha Lysander. Au stade où on est ...
-Je reste ici, annonça néanmoins Marcus. Pas par lâcheté, précisa-t-il quand une partie de la troupe lui jeta un regard noir et éperdu. Mais vous me l'avez assez répété pour que je m'en imprègne, je n'ai aucun talent magique qui vous aiderait là-dedans. En revanche, il faut bien quelqu'un pour prévenir que vous avez sauté, et pour arrêter ceux qui tenteront de s'enfuir.
-Ce n'est pas idiot, ça, Montague, remarqua Rose en hochant la tête. Je vais rester aussi, alors.
-Moi aussi, enchérit Henry.
-Bien, ceci étant décidé ...
Eléonore prit la main de Marcus et se hissa sur ses pieds pour l'embrasser. Le reste de la troupe détourna les yeux pour leur laisser de l'intimité. Lysander fut le premier à s'asseoir au bord de la bouche. Ses jambes basculèrent et bientôt son corps entier fut aspiré par le tuyau. Louis et James suivirent derechef, puis Jina, Eléonore, Lorcan, Dominique, Gloria, Stephen, Lionel. Lucy et Adam furent les derniers avec Zephan et Will. Marcus avait tenté de les convaincre, comme ils étaient les plus jeunes, de rester avec lui, mais ils avaient repoussés l'offre d'un geste de la main, et Will s'était glissé dans le tuyau.
-A plus Zeph !
-Oh par Merlin, glapit Zephan alors que le Serpentard disparaissait. Bon ... Rosie tu as une mission : si je n'en reviens pas, dis à Roxanne que je l'aime.
-Bon sang, soupira Rose avant de donner un coup de pied dans le bas du dos de Zephan. Tu lui diras toi-même tout à l'heure, Finnigan. Allez, haut les cœurs.
Zephan eut un vague sourire malicieux, avant de s'élancer avec un faux cri de jouissance qui se mua en cri d'appréhension. Lucy s'engouffra à sa suite, le cœur au bord des lèvres. Elle jeta un regard nerveux à Marcus. Il avait sorti sa baguette. Un sourire effleura ses lèvres quand il croisa ses yeux inquiets.
-On se revoit bientôt, Weasley. Et ramène-moi ma copine vivante.
-Compte là-dessus.
-Allez, vas-y, lui souffla doucement Adam.
Mue par le sourire encourageant de son ami, et la voix familière d'Adam, Lucy trouva la force se jeter dans la gueule du serpent. Ce fut le début d'une descente interminable, poisseuse, et la plus angoissante qu'elle n'ait jamais vécu. Elle entendait derrière elle Adam faire diverses embarquées à mesures qu'ils passaient dans les coudes, et s'y rattacha. Enfin le tunnel devint horizontal et elle eut à peine le temps d'apercevoir une vague lueur qu'elle heurta Zephan de plein fouet. Le garçon, qui venait à peine de se redresser, retomba pêle-mêle avec elle.
-Par Merlin, Weasley !
-Désolée, marmonna Lucy en se redressant, une main sur sa poitrine.
Le choc avait ravivé sa blessure de Quidditch, et elle s'était un instant retrouvée le souffle coupé. Jina et Will l'aidèrent à se relever avant qu'Adam de débouche du tunnel, les cheveux ébouriffés, les yeux hagard.
-C'est humide, par ici, maugréa-t-il avant de se tourner vers Lucy, toujours haletante. Ça va ?
Elle hocha sèchement la tête et passa sa main dans la sienne en calmant sa respiration. Les doigts d'Adam avaient été écorchés par les tuyaux et tous étaient dans un sale état.
-On est au complet ? s'enquit Lysander, son regard bleu se posant sur chacun d'entre eux. Allez on y va !
Lucy détailla mécaniquement les tunnels pour tromper la peur. Le sang battait sourdement à ses oreilles. Ils étaient dans un long couloir humide, sombre et visqueux, uniquement éclairés de leurs baguettes. Le silence était simplement rompu par les craquements sinistres d'os sous leurs chaussures. Des petits animaux avaient dû passer de sinistres moments ici, si Lucy en jugeait par le sol recouvert de leurs squelettes. L'ambiance était tendue et chaque son les faisait sursauter, et chacun se retournait sur le qui-vive, comme s'il s'attendait à trouver le monstre de Serpentard derrière eux.
-Vous êtes sûr qu'il est mort, le monstre ? s'enquit justement Zephan dans un chuchotement.
-Oui, répondit sèchement James sur le même mode. Maintenant tais-toi, le Farfadet. On ne voudrait pas qu'ils nous entendent arriver.
-Avec le boucan qu'on fait ? marmonna Stephen en jetant un regard sombre aux squelettes de rongeurs.
Il était en tête de file, tel le leader de Poufsouffle qu'il était. Il était d'ailleurs le seul représentant de sa Maison : Octavia, la préfète-en-cheffe, était restée pour les sortilèges, et les autres volontaires comme Erin Flint-Fletchey étaient trop jeunes. Et de toute manière, la seule autre Poufsouffle dont ils auraient eu besoin se trouvait parmi les personnes à sauver. Soudainement, au détour d'une courbe, alors que Lucy n'apercevait toujours pas la fin du tunnel, il se tendit :
-Arrêtez, stop !
L'ensemble du groupe s'immobilisa et Lorcan se heurta à Lucy brusquement. La jeune fille ravala une plainte, mais ne put s'empêcher de porter sa main à sa poitrine. Adam remarqua son geste et lui jeta un regard suspicieux. Stephen les força à se coller à la paroi rocheuse et donna un coup de coude à Lysander.
-Regarde là-bas, souffla Stephen d'une voix si basse que Lucy n'était pas certaine que tous aient entendu. Ça bouge.
Il avait raison. Maintenant que le silence était fait, Lucy pouvait percevoir l'agitation qui se répercutait sur les parois humides du tunnel. Des timbres de voix, des bruissements de tissu. Il lui semblait même entendre des pleurs et son cœur manqua un battement. Lysander se pencha discrètement pour apercevoir la fin du tunnel avant de revenir vers eux en hochant sinistrement la tête. Il les força à reculer discrètement avant de leur chuchoter :
-D'accord je pense qu'on y est. Euh ... (Il lorgna Roxanne et les Mousquetaires restant). Je suppose que vous n'avez pas d'oreilles à rallonge sur vous ?
Roxanne se fendit de sifflements indignés (le chewing-gum ne devait pas avoir perdu son goût) qui se répercutèrent dans le couloir, si bien que Lionel se dépêcha de lui couvrir la bouche sa main.
-Je pense qu'elle veut dire qu'on a assez perdu de temps comme ça, traduisit James, les yeux étincelant. Maintenant on doit y aller.
-Comme ça, sans plan ? protesta Jina, dubitative.
-Ça mon cœur, il fallait y penser avant de plonger ici.
-Jina a raison, insista néanmoins Eléonore. Il nous faut quand même un plan, même en gros. (Elle planta son coude dans les côtes de Zephan, lui arrachant une grimace). Une troisième idée lumineuse ?
-Lui je ne sais pas ..., entonna James en extirpant quelque chose de sa poche. Mais j'ai quelque chose qui pourrait nous être utile.
Il sortit du tissu argenté roulé en boule dans son poing et Lucy reconnut la Cape d'invisibilité héritée de son père. Dominique plissa les yeux.
-Vu l'obscurité ambiante, si on est assez discret, un simple sortilège de désillusion ferait l'affaire.
-Attendez deux minutes, siffla Lorcan en se penchant pour apercevoir le bout du tunnel. On ne peut rien faire sans savoir ce qu'il en est ...
-Roh, marmonna Dominique, consternée par le manque de discrétion de son petit-ami. Je vous jure ...
Elle abattit sèchement sa baguette sur le crâne de Lorcan, qui se mit à lentement disparaître jusqu'à se fondre complétement dans le décors.
-Maintenant tu peux aller jouer les espions.
-Vous êtes sûrs que c'est une bonne idée d'envoyer un Scamander ? s'enquit timidement Lionel.
-Lorcan est le plus discret de nous deux, en tout cas, assura Lysander, alors que Lucy foudroyait son ex-petit-ami du regard.
Ils attendirent nerveusement, collé à la courbe de la paroi rocheuse, le souffle court. Lucy se pencha le plus discrètement possible pour tenter d'apercevoir quelque chose. Ce qui semblait être deux battants d'une porte en pierre était ouvert sur une salle dont elle percevait la faible lueur. Mais avant qu'elle ne puisse en voir plus, Louis la fit sèchement revenir en arrière. Néanmoins, elle en avait assez vu pour se pencher vers Adam et lui murmurer à l'oreille :
-Gethin l'avait vu.
-Quoi ?
Il avait répondu sur le même mode, très bas pour que personne ne puisse les entendre. Lucy en était à présent certaine : elle revoyait l'esquisse que Gethin leur avait montré il avait de cela quelques semaines. Rien de bon, disait-il alors.
-Près de l'escalier, Gethin nous a montré un dessin pas terminé. Quelque chose d'hostile et d'humide, il disait. Je suis sûre que c'est ça.
Adam hocha mollement la tête, sonné. Puis enfin, quelques minutes plus tard, une voix s'éleva à coté de Lysander :
-Franchement, c'est des cinglés !
Lysander fut le seul à ne pas sursauter. Dominique leva le sortilège et Lorcan fut à nouveau visible par tous. Ses yeux luisaient d'effroi. Il se mit alors à décrire ce qu'il avait entraperçut au bout du tunnel, et le sang se figea dans les veines de Lucy.
-Des bûchers ? souffla-t-elle, incrédule. Tu es sûr ?
-C'était assez loin, tout au bout de la Chambre, mais pour le coup oui je suis assez sûr. Sept bûchers.
-Il a décidé d'appliquer la prophétie à la lettre, constata Adam d'une voix éteinte. « Qu'ils brûlent tous » ...
-Tu as vu Shannon ? s'enquit immédiatement Zephan.
-Et Lily ?
-Arrêtez, on a des questions plus urgentes ! les interrompit Stephen avant de se tourner vers Lorcan. Et les ravisseurs, combien ils sont ?
Un frisson parut parcourir Lorcan.
-Une vingtaine environ. Tous en cagoule blanche, comme des anti-Mangemorts, si on veut. Il n'y en a qu'une qui n'avait pas de capuchon et ... Bon sang par Merlin ... Je le crois pas ...
-Laureen, devina sombrement Lucy en hochant la tête. Comme c'est surprenant.
-Qu'est-ce qu'on fait ? s'enquit alors Zephan, baguette brandie. On y va ?
-Du calme, le Farfadet, le coupa James en posant une main sur son bras. Il est temps de laisser faire les maîtres. Roxy, il a encore du goût ton chewing-gum ?
***
C'était un cauchemar.
Elle allait se réveiller.
Pourtant, malgré la douleur lancinante qui lui labourait la poitrine, Shannon ne se réveillait pas. Elle en concluait que la vingtaine de silhouettes blanches alignées à présent face à elle était bien réelle.
Ainsi que le petit Gethin Scampers en pleurs entre elles.
Elle avait été néanmoins soulagée que le Gryffondor ne semblait souffrir d'aucune blessure physique. Comme eux tous, il avait été privé de sa baguette, mais il n'était pas attaché. Quelqu'un d'assez petit - qui, selon ce que Shannon avait pu observer, semblait être l'un des chefs - gardait en permanence une main sur son épaule.
Maeve avait courageusement su sécher ses larmes à ses cotés. Malgré tout, ses yeux luisaient encore de terreur quand elle regardait les silhouettes devant elle. La seule personne que Shannon n'avait pas réussi à identifier - la Weasley - avait fini par relever la tête. Shannon n'avait pas reconnu tout de suite ses traits, avant de comprendre par déduction qu'il s'agissait de Molly, la sœur aînée de Lucy. Une des silhouettes avait tenu à lui attachée une cravate aux couleurs de Serdaigle à son cou, ce à quoi la jeune femme avait tenté de répondre par un coup de pied bien placé. Malheureusement, un sortilège l'avait immobilisé et elle se contentait de contempler férocement leurs ravisseurs.
-Nous pouvons commencer, déclara soudainement une voix féminine à la droite de Gethin.
-Oui, Cattermole, je le pense. Fantômes ... Nous pouvons nous dévoiler.
D'un ensemble parfait, ils découvrirent leur tête et laissèrent tomber les masques. Laureen avait déjà était découverte et souriait de toutes ses dents. L'autre personne que Shannon reconnut immédiatement, ce fut le professeur d'Arithmancie Dennis Crivey : c'était celui qui tenait Gethin par l'épaule. Mais il fut le seul qui lui évoqua quelque chose. Les autres étaient de tout âge : assez âgés pour avoir connu pour avoir connu Grindewald et les deux guerres, trop jeunes pour avoir consciemment connu la chute de Voldemort.
-Vous avons le temps, reprit la première femme qui s'était exprimée.
Elle était assez jeune, environ vingt-cinq ans, mais son visage sévère et ses traits tirés lui faisaient paraître plus.
-Mais je propose que l'on se dépêche. Il faut que nous soyons parti avant que Harry Potter ne se rende compte que nous sommes encore à l'école. Finissons-en.
-Non, Ellie, nous en avons déjà parlé, protesta un vieil homme à la voix sifflante. Ils ont le droit de savoir pourquoi ils vont mourir.
La phrase gela complètement les entrailles de Shannon, et tout les prisonniers devinrent livide. Un sanglot s'échappa de la gorge d'Erwan et Scorpius eut visiblement lui aussi du mal à réprimer son émotion. Lily et Luke parvinrent eux à garder cette expression ouvertement hostile qui impressionna Shannon. Car on avait beau se dire qu'on allait être courageux, qu'il fallait affronter la mort en face quand elle se présentait à vous ... Il n'empêchait que dans ces cas, la seule chose qui emplissait leur être était une terreur indéniable. Et peu importe toute la bonne volonté dont la jeune fille voulait faire preuve, c'était bien la peur qui lui paralysait les membres à présent qu'on lui annonçait qu'elle allait mourir.
La peur et rien d'autre.
-Ne vous donnez pas cette peine, on a deviné, ironisa Luke, visiblement incapable de se taire. Qui est le premier année que ma cinglée mère a torturé quand elle était élève ?
-Torturer ? répéta un homme d'une trentaine d'année en lorgnant Luke avec une expression d'avidité indécente. C'est un faible mot, quand on parle d'Enoboria Selwyn.
-Nous nous étions mis d'accord, rappela alors Dennis Crivey en haussant la voix, avec une gravité que Shannon ne lui avait jamais connue. Que je parlerais en notre nom. Maintenant, taisez-vous, et savourez l'accomplissement de notre œuvre.
Il tapota l'épaule de Gethin d'un air presque paternel qui arracha quelques larmes à l'enfant. Gethin trouva la force de lever le visage vers Crivey, ébranlé.
-Pitié, gémit-t-il, les larmes roulant encore sur ses joues. Pitié, je n'ai ... Je n'ai jamais voulu ça je vous le jure ... Peu importe ce que j'ai dit ... Vous n'êtes pas obligé de le faire, ce n'est pas forcé ...
-Ah mon cher Gethin, soupira Crivey, comme si ce qui se passait lui fendait le cœur. J'espère sincèrement que tu n'auras jamais à comprendre à quel point si, nous sommes forcés de faire ce que nous faisons.
-Mais c'est mal, plaida l'enfant. Vous ... Vous allez faire autant de mal que vous en avez subi.
-Un juste équilibre, Gethin, et c'est ce que nous voulons. Un équilibre. Une justice.
-La justice, vous l'avez eue, cracha Molly, qui pouvait parler malgré son immobilité. Des centaines de Mangemorts et de partisans ont été envoyés à Azkaban.
-Vous voulez parler de ceux que votre mère, ainsi que le père de Miss Macmillan et la mère de Miss Finnigan se proposent maintenant de relâcher ?
Shannon sentit son cœur se serrer, comprenant en un éclair pourquoi c'était elle qui était accrochée à ce bûcher - et elle ne doutait pas un instant que l'idée venait de Laureen. Les yeux de Molly se plissèrent.
-Vous n'avez vraiment rien compris à la Loi d'Amnistie, alors. Comme si ma mère allait relâcher l'assassin de sa sœur !
-Une des personnes qu'on envisage de relâcher est Dolores Ombrage, martela une femme d'une quarantaine d'année. Celle qui présidait la commission d'enregistrement des Nés-moldus. Vous êtes trop jeunes, évidemment, pour que ce nom vous évoque quoique soit ...
-Bien sûr que si ! protesta vivement Lily d'une voix forte. C'est l'ancienne prof de mon père !
-Ton père, ricana Ellie, la première femme qui avait parlé. On pourrait faire tout un chapitre sur ce que ton père a fait ...
-Trahison, enchérit l'homme qui avait répondu à Luke. La plus amère de toutes.
-Oh je vous en prie, grogna Molly. Harry vous a tous sauvé ...
-Il nous a tous trahis ! trancha vivement Crivey d'une voix plus forte. Lui, qui nous a sauvé, comme tu le dis ... longtemps nous avons cru qu'il se battrait pour nous ... Pour faire valoir nos droits ... Ceux de tout ceux qui étaient morts pour lui ... Avant finalement de faire marche arrière ... De nous oublier. Et d'oublier nos fantômes.
-Les Fantômes des Oubliés.
La voix sèches, mais tremblante de Molly résonna dans toute la pièce. Shannon comprit qu'il s'agissait du nom de ce groupe - et que la sœur de Lucy était bien plus informée qu'il n'y paraissait. Crivey lui jeta un regard pénétrant.
-C'est cela. Les Fantômes des Oubliés.
Ils étaient aussi fanatiques que Shannon se l'était imaginé. Aussi mauvais, aussi rompus à la vengeance et à la douleur. Une lueur folle brillait dans les yeux de Crivey - une lueur qu'elle s'inquiétait de voir au dessus de Gethin. Le professeur d'Arithmancie prit une grande inspiration.
-Maintenant, vous savez tous pourquoi vous êtes là. Vous comprenez.
-Si on veut ..., lâcha vertement Luke. Vous vengez sur les enfants de vos bourreaux - ou ceux que vous imaginez l'être ... C'est franchement lamentable.
-Les enfants, ricana Ellie. Moi aussi je n'étais qu'une enfant, quand ils sont venu en fracassant ma porte enlever ma mère parce qu'elle n'avait pas le sang assez pur pour eux. Moi aussi, je n'étais que l'enfant de ceux qu'ils s'imaginaient être leurs ennemis. Pourtant, dès qu'ils ont eu ma mère, c'est sur nous qu'ils se sont acharnés, nous, les enfants du sang impur ... humiliation, douleurs, tortures, rien ne nous était épargné. Pourtant, nous n'étions que les enfants de.
-Alors pourquoi tout ce cirque avec le Sérum ... Si c'est pour finalement tous nous brûler ?
Shannon ne savait ce qu'il l'avait poussé à poser cette question : la volonté de gagner de précieuses secondes avant que le feu ne s'embrase, ou juste la curiosité intellectuelle, venue des profondeurs de son esprit. Elle avait déjà des brides de réponses, des brides qu'elle devinait, d'autres qui lui étaient parvenues, dans le flou et l'obscurité. Elle tenta de fermer une nouvelle fois son esprit pour garder toutes ses capacités de concentration sur la situation. Laureen s'était animée au son de sa voix. Elle qui était restée étrangement silencieuse, Shannon comprenait à présent que ce silence venait de toucher à sa fin.
-Oh je suis sûre que tu as déjà quelques idées, Shanny, cingla-t-elle avec un sourire atroce. Ça m'étonnerait fort que tu n'y aies pas réfléchi ...
-Le Sérum avait quelque chose d'attrayant, admit le vieux sorcier à la voix sifflante. Une sorte de regard de Basilic dans un flacon ... C'était approprié. Ça a été compliqué de convaincre Pénélope. Mais elle a fini par se ... plier à nos exigences.
Shannon accrocha le regard de Luke. Le préfet de Serpentard avait remarquablement bien fait son travail : c'était bien Pénélope Campbell qui avait préparé le Sérum.
-Et comme Shannon et Lysander ont trouvé un antidote, poursuivit Luke sur la lancée de la Poufsouffle, vous vous êtes finalement dit que vous pourriez utiliser une façon plus radicale, non ?
-« Sur le bûcher du passé flamberont les erreurs d'autrefois et libérerons rancœurs et douleurs », déclama quelqu'un.
-« Ainsi le venin sera éradiqué et le futur purifié », achevèrent deux autres personnes en chœurs.
Les mots se répercutèrent sur les parois humides de la Chambre et glacèrent Shannon jusque la moelle. Gethin poussa un long gémissement qui donnait à la jeune fille une indication sur la provenance des mots - et pour ce pourquoi il était là. Les prisonniers échangèrent un regard épouvanté. « Sur le bûcher ».
« Qu'ils brûlent tous ».
-Finissons-en, répliqua durement Ellie en pointant sa baguette sur la personne devant elle, c'est-à-dire Molly. Ils en savent assez, on a assez perdu temps. Dennis ?
Crivey contempla un instant Shannon, l'air de savoir ce qu'elle savait réellement, avant de poser les yeux sur Laureen. Finalement, il hocha sèchement la tête.
-Tu as raison Ellie, allons-y.
-Non !
Le cri de Gethin alarma Shannon. Elle vit l'enfant se défaire de l'étreinte de Crivey pour se jeter sur Ellie, et la renverser. Ils tombèrent tout deux sur le sol et Gethin arracha à Ellie sa baguette. Mais avant qu'il n'ait pu l'utiliser, un sortilège rouge l'atteignit en pleine poitrine et il s'écrasa sur le sol, les bras en croix.
-Gethin !
-Vous êtes vraiment des monstres, attaquer un gosse !
-Bébé-Scampers, debout !
Shannon n'arrivait pas à déterminer si ces voix étaient hautes ou dans sa tête tant elles emplissaient son esprit. Son sang battit à ses tempes et elle se mit elle aussi à s'agiter. Elle se redressa, tira sur les liens, et se mit à vociférer le nom de Gethin avec les autres. Son esprit logique était persuadé que ce n'était rien de grave - un sortilège de stupéfixion - mais l'âge de Gethin mêlé à l'attachement qu'elle commençait à éprouver pour l'enfant chassait la logique et mettait son esprit en ébullition.
-SILENCE !
L'ordre de Crivey fut accompagné d'un coup de baguette en direction de Lily, qui hurlait le plus fort - et pas que d'aimables choses. La voix de la jeune fille se trouva coupée mais elle continua malgré tout à s'agiter. Crivey les réduisit un à un au silence, avant de se tourner vers les autres, le regard flambloyant.
-Mettez le gamin à l'écart, intima-t-il à deux hommes non loin de lui. Le reste ... Vous savez ce qu'il nous reste à faire ...
Un des hommes hissa Gethin dans ses bras et s'éloigna vers les murs latéraux. Sept autres personnes se plantèrent devant chacun des buchers et pointèrent leur baguette sur eux. Shannon releva la tête pour quoi que c'était Laureen qui la menaçait, un sourire fin et glacial aux lèvres, une lueur dangereusement meurtrière dans le regard. Le rythme cardiaque de Shannon s'emballa alors et elle sentit des larmes d'horreur et d'impuissance lui monter aux yeux. Des dizaines de sorts lui venait en tête pour se protéger, mais ils seraient inutiles sans sa baguette. Pourtant les sorciers de moins de onze parvenaient parfois à maitriser son pouvoir sans son aide, pourquoi à présent qu'ils grandissaient, cela était moins vrai ?
-A trois, souffla Crivey, qui prenait pour cible Molly. Un ...
Shannon ferma les yeux, et évoqua en elle tout les sorts qu'elle connaissait, tout ceux qui avaient pu éviter la crémation à toutes ces sorcières du Moyen-âge, en espérant que, par un miracle, la magie serait assez puissante pour la protéger, même sans sa baguette. Des larmes coulèrent sur son visage.
-Deux ...
Ses oreilles bourdonnaient, pourtant elle entendait Maeve sangloter à coté d'elle. Elle attendit que Crivey s'exprime, que le couperet tombe, en répétant dans sa tête la formule encore et encore. Les visages de tout ceux qui l'avaient accompagnée sa vie durant - ses parents, son insupportable mais attachant petit frère - dansèrent devant ses paupières closes et Shannon y trouva une force supplémentaire. Un timbre de voix s'éleva alors et elle rentra la tête dans les épaules, ravivant quelque peu sa blessure à la poitrine. Mais c'était une autre voix, plus forte, plus spectrale que celle de Crivey. Une voix qui lui donna d'avantage la chaire de poule et qui emplissait tout l'espace.
-Qu'est-ce que c'est que ça ?
Shannon rouvrit les paupières pour voir les yeux terrorisés d'Ellie, armée devant Erwan Nott. L'attitude du groupe avait changé du tout au tout. De déterminé, ils étaient passés à nerveux et craintif. Shannon comprit un instant plus tard quand la voix, venue de nul part, surgit de nouveau, glissant sur les salles comme un souffle glacial. Cette voix ne parlait pas.
Elle sifflait.
-On est sûr qu'il est mort, celui-ci ? grogna l'homme blond.
-Sûr et certain.
-Et il n'y en a pas un autre ?
D'autre sifflement furent émit, affolant les Fantômes des Oubliés, mais également les prisonniers. Maeve lança un regard apeuré à Shannon. La jeune fille voulut lui répondre, la rassurer, avant de se souvenir que Crivey les avait réduit au silence. Alors qu'elle tentait de deviner d'où venait la voix, un souffle chaud lui effleura l'oreille.
-Surtout ne sursaute pas, Milady.
Mais ce fut précisément ce que Shannon fit et une main s'abattit sur son épaule pour le masquer. Elle s'efforça de rester immobile, d'autant plus que Laureen la fixait toujours, et qu'elle reconnaissait parfaitement la voix. Son cœur explosa de soulagement.
Louis Weasley. Elle n'avait jamais été aussi heureuse de l'entendre l'appeler « Milady ».
Elle sentit ses mains glisser sur ses poignets et ses liens. Elle ne le percevait pas et devinait qu'il devait être sous un sortilège de désillusion.
-Ne bouge pas, insista Louis à voix si basse que Shannon était sûre qu'elle seule l'entendait. Et ne t'en fais pas pour le serpent, c'est juste Roxy qui s'amuse. Ça va ? Serre une fois pour oui, deux pour non.
Shannon agrippa un de ses doigts et serra une fois, tout en le gardant dans sa main. Elle se doutait que vu son état, Louis ne serait pas dupe, mais pour l'heure, le soulagement effaçait l'angoisse et la douleur. Petit à petit, Shannon sentit ses liens tomber sur ses poignets, mais Louis les maintint serrer derrière son dos.
-Si tu peux, reste comme ça, lui dit-t-il, collant presque sa bouche contre son oreille pour couvrir les sifflements toujours plus forts et intenses. Dès que tu vois un signal, tu cours jusque la sortie, d'accord ? James s'occupe de récupérer vos baguettes. Je vais délivrer les autres.
Shannon serra une fois son doigt pour signifier qu'elle avait comprit et le doigt de Louis glissa doucement dans sa main. Elle se retrouva à nouveau seule, mais allégée du poids de ses liens. Les sifflements se faisaient plus sonores et plus terrifiants.
-Allons-nous-en, siffla le vieil homme en regardant autour de lui. Je n'aime pas ça.
-On doit finir, d'abord, protesta Laureen en détachant ses yeux de Shannon. Professeur Crivey ...
Les sifflements se firent plus furieux, plus insistants et si Shannon n'avait pas était au courant que Roxanne Weasley était derrière tout cela, elle aurait voulu prendre ses jambes à son cou. Crivey ne semblait pas si sûr de lui. Sa baguette s'était abaissée et il regardait la pièce avec indécision. Le visage froid de Laureen se crispa devant le manque de réponse. Une lueur vacilla dans ses yeux, qui fit malheureusement craindre le pire à sa cousine. Le cœur de Shannon, si léger un instant avant, retomba dans sa poitrine.
-Professeur ! (Elle pointa sa baguette sur Shannon, le regard lui tourné, furieux, vers Crivey). Vous m'aviez promis ! J'ai besoin de ça, nous avons tous besoin de ça ! Reprenez-vous ! Nous sommes là pour ça !
Elle tourna le visage pour planter son regard dans celui de Shannon et le sang de celle-ci se figea dans ses veines. Tout ses sorts et sa peur lui revinrent immédiatement en tête avant que Laureen ne hurle « incendio ! ». L'adrénaline et la terreur montèrent dans ses veines alors que le sort atteignait de plein fouet son bûcher, l'embrasant sec. Shannon réagit de façon instinctive en repliant les bras sur sa poitrine malgré les instructions de Louis. Le feu rugit sous elles ; des gens hurlèrent ; des lueurs fusèrent. Le sang battait aux tempes de Shannon et il faisait si chaud autour d'elle qu'elle n'en sentait presque plus la douleur qui lui labourait la poitrine.
Mais justement.
Il faisait chaud.
Autrement dit ?
Elle ne brûlait pas.
Shannon ouvrit les yeux et contempla son corps qu'elle pensait en train de s'embraser. Mais les flammes ne faisaient que lécher ses vêtements sans lui causer la moindre blessure. Elle se redressa à l'aide du poteau, une main repliée sur la poitrine, le souffle haletant. Le feu lui montait à la taille et ne la blessait pas. Elle crut qu'elle allait éclater de sanglot.
Son intuition avait vu juste. Baguette ou pas, la magie était toujours présente dans leurs veines. Elle coulait, chantait, les enveloppait tout entier, parcourait chaque fibre de leur corps. Et elle les protégeait.
-Milady !
Shannon tourna le visage, et vit Louis par delà les flammes, visible. Il lui tendait la main, en respect du feu, une expression de profonde stupeur gravée dans ses traits.
-Saute, dépêche-toi !
La jeune fille déglutit et posa prudemment les pieds sur les premières cendres. Puis elle se laissa glisser et sauta en dehors de son bucher, traversant les flammes comme si elles n'existaient pas. Louis fut là à sa réception et elle s'écroula sur sa poitrine avant même que ses pieds ne touchent le sol. Elle faillit se laisser aller sur le sol, mais les bras du Mousquetaire la maintinrent debout. Elle tremblait de tous ses membres et ne réalisait pas encore ce qui s'était passé.
Elle avait fait de la magie seule. Sans baguette.
-Par Merlin, Milady, grogna Louis en la soutenant. Tu nous en réserves, des surprises.
-Louis !
Shannon leva la tête en même temps que le Mousquetaire. Et elle vit le carnage qu'avait causé la mise en feu de son bûcher.
Des élèves avaient surgi de l'entrée de la Chambre et s'étaient jeté toute baguette dehors sur les Fantômes des Oubliés. Shannon vit Lucy désarmer celui qui tenait Luke en joue, Stephen se battre férocement avec Ellie, Will McColley et Lionel Boot acculait le vieil homme sur un mur, Jina et Eléonore stupéfixier une autre silhouette, Lysander Scamander échanger des sorts avec Crivey. Ils étaient nombreux et se battaient avec férocité. James était de l'autre coté du bucher de Molly, qu'il venait de libérer. La jeune femme, malgré le sang qui coulait toujours sur son visage, se jeta dans la mêlé et adressa un sortilège féroce à la personne contre laquelle se battait sa sœur. James lança quelque chose que Louis rattrapa avec souplesse avant de suivre sa cousine. Shannon baissa les yeux sur la main de Louis et reconnut sa baguette. Son cœur battit dans sa poitrine quand Louis la lui tendit et que ses doigts effleurèrent ce bois si familier. Des étincelles jaillirent de sa pointe.
-Va te mettre à l'abri, lui enjoignit Louis, sortant lui-même sa propre baguette. Je vais aider Adam.
Mais Shannon n'avait pas envie de se mettre à l'abri. Maintenant que l'adrénaline gonflait ses veines et qu'elle venait d'échapper à la mort, la seule chose qu'elle voulait faire c'était se battre et délivrer la magie qui crépitait en elle. Louis s'en fut sans demander son reste et Shannon vit Adam se battre contre l'homme qui avait stupéfixier Gethin. Celui-ci, sans doute réveillé par son frère et caché derrière une des statues, jetait les seuls sorts qu'ils connaissaient aux Fantômes qui passaient près de lui. Mais ce ne fut pas cela qui retint l'attention de Shannon. Ce fut Laureen, se battant comme une diablesse, sa baguette fouettant follement l'air, contre une bouille aux cheveux blonds-roux horriblement familière. La voix de Laureen revint à sa mémoire.
« Et qu'est-ce qu'il se passerait si c'était Zephan que je brûlais ? »
La rage emplit les veines de Shannon. Elle serra sa baguette entre ses doigts et se précipita vers son frère et sa cousine. Elle arriva à temps pour déployer un bouclier devant Zephan avant que le maléfice de Laureen ne le frappe. Son frère lui jeta un regard surpris et un éclair de soulagement perça ses prunelles.
-Shanny ! gronda-t-il néanmoins pour la forme. Je maitrisais !
-Tu ne maitrisais rien du tout ! répliqua Shannon en contrant un nouveau sortilège de Laureen. Et toi ! (Elle tenta de désarmer Laureen, qui para in extremis). Comment tu as pu oser ? (Elle jeta un autre maléfice et sa cousine eut plus de mal à s'en protéger et recula). Comment tu as pu ... croire ... que me brûler ... ça te ramenait ton père ?!
-Tais-toi ! hurla Laureen, la baguette brandie, le regard fou. Tais-toi, ça ... ça ne devait pas se passer comme ça, tu devais ... ça devait ...
-Me tuer ? Eradiquer le venin, et purifier le futur ? répéta Shannon en se souvenant des mots prononcés par les Fantômes. Mais comment tu as pu être si stupide ?!
Le maléfice suivant passa à un cheveu du visage de Laureen et Shannon pesta contre elle-même. Malgré l'adrénaline et la magie qui affluait en elle, la douleur de sa blessure se faisait à nouveau sentir et rendait ses sorts moins précis et moins puissant. Elle ignorait combien de temps elle pourrait tenir ainsi. Assez pour mettre Laureen hors d'état de nuire, elle espérait. Elle avait toujours su que sa cousine la détestait, pour des raisons irrationnelles, simplement parce qu'elle était née dans une famille plus équilibrée que la sienne. Jalousie, ou simple déséquilibre mental, Shannon n'avait jamais su. En revanche, elle avait compris très tôt que Laureen était prête à lui faire du mal, pour ça. Elle avait profondément intégré ce fait, et cela ne la surprenait plus. Mais de là à la tuer ? Malgré leurs différents ces dernières années, c'était douloureux pour Shannon, comme un poignard glacé planté en plein cœur. Elle échangea encore quelques sorts avec sa cousine, jusqu'à ce que, malgré sa blessure, il semble évident à la jeune fille qu'elle prenait le dessus. Laureen dut le percevoir également car ses gestes étaient plus désespérés et ce désespoir paraissait lui donnait de la puissance. C'était dans cela que puisait Laureen, cela qui lui donnait de la force : désespoir, jalousie, colère et malfaisance. Et elle devait en ressentir énormément à ce moment, assez pour pointer sa baguette sur Shannon avec une glaçante détermination. Les mots qui sortirent de sa bouche suffirent presque à clouer Shannon sur place.
-Avada Kedavra !
Le jet de lumière verte jaillit si vite de la baguette de Laureen que Shannon peina à réagir - d'autant plus que sa blessure la ralentissait. Elle eut à peine le temps de lever sa baguette, mais elle sut qu'elle ne parviendrait pas à parer à temps - si tant était que le sortilège était parable. Elle le vit prendre du terrain et avancer vers son cœur, inéluctable.
-Non !
Shannon ne sut comment, mais elle se retrouva projetée sur le sol. Sa tête claqua la pierre avec un bruit sourd qui la laissa un instant étourdie, les oreilles bourdonnantes. Déboussolée, elle chercha à se redresser, avant de prendre conscience du poids qui pesait sur elle. Quelqu'un était tombé avec elle. Et ce quelqu'un, c'était Zephan.
-Zeph, souffla Shannon en le repoussant.
Zephan retomba sur le sol avec un bruit sourd, inerte. Le cœur de Shannon dévala sa poitrine quand elle avisa ses yeux grands ouverts sur le vide.
-Zephan !
Elle se précipita vers lui pour le retourner et se mit à le secouer, tapoter ses joues en murmurant frénétiquement son nom. Une angoisse pure et irrationnelle s'éprenait d'elle quand elle se rendait compte qu'il ne se réveillait pas le moins du monde. Ses yeux continuaient de fixer le vide, inlassablement. Elle posa une main crispée et suppliante sur une poitrine qui ne se soulevait plus. Des larmes dévalèrent ses joues et elle jeta un regard meurtrier à Laureen, toujours debout, la baguette encore tendue. Elle contemplait le corps de son cousin, hébétée.
-Qu'est-ce que tu as fais ?! hurla Shannon, le corps secoué par ses sanglots réprimés. Par Merlin, qu'est-ce que tu as fait ?!
-Je ...
Laureen abaissa sa baguette, le visage figé en une expression d'horreur et de stupeur. Comme si elle venait de revenir à la réalité.
Comme si sa folie meurtrière l'avait quittée au moment même où elle prenait une vie.
Car tuer n'était pas anodin. Tuer déchire l'âme. Tuer déchire des vies. Et la vie de Shannon venait d'être déchirée.
Elle éprouva l'envie irrépressible de lui jeter un sort, le plus douloureux possible, qu'elle souffre comme elle était en train de souffrir, que son cœur saigne comme son cœur le faisait. Elle fut à deux doigts de le faire, mue par la rage, la douleur et la haine.
Mais elle n'y arrivait pas. Elle n'arrivait pas à détacher ses mains du corps inerte de son jeune frère. La bataille faisait encore rage autour d'elle, pourtant elle ne bougeait pas, figée, pleurant sur Zephan. Elle se pencha sur son visage, tremblante de sanglots.
-Zeph ... Zeph je t'en supplie regarde-moi ...
Mais les yeux verts de Zephan fixaient un point que seul lui pouvait voir. Un point qui ne se trouvait pas dans le même monde que Shannon. Un bruit sourd lui indiqua que Laureen venait de laisser tomber sa baguette.
-Je ... Je voulais juste ... Arrêter de souffrir, Shannon je ...
Shannon ne put en supporter plus. Elle agrippa vivement sa baguette qu'elle avait laissé choir à coté de Zephan, et se redressa pour la pointer sur Laureen. Sa main tremblait si fort qu'elle craignait de la manquer.
-Tu ... (De nouvelles larmes s'accumulèrent à ses yeux, lui brouillant la vue). Tu ... Tu l'as tué, tu as tué Zephan ...
-Je voulais arrêter de souffrir ! cria Laureen, pleurant elle aussi. Je pensais ... Je voulais ...
-Tu ne sais même pas ! Tu ... Tu l'as tué pour rien, tu ...
Les mots se bloquèrent dans la gorge de Shannon, formant un bouchon douloureux chauffé à blanc. Laureen ouvrit à nouveau la bouche mais la jeune fille ne la laissa pas finir. Un « BANG » sonore se fit entendre et elle se retrouva violemment projetée contre l'une des parois. Elle s'écroula comme une poupée de chiffon, complétement sonnée, mais toujours consciente. Une petite voix souffla à Shannon que c'était injuste, que Zephan avait fermé les yeux pour toujours et que maintenant, cela devait être le tour de sa cousine. Alors, écoutant cette voix qui hurlait à présent dans son esprit, elle leva sa baguette une nouvelle fois. Elle ignorait encore quel sort elle allait jeter, ce qu'elle allait lui faire subir, quand sa baguette lui sauta prestement des mains. Elle tourna le visage vers la personne qui l'avait rattrapé souplement et elle lui jeta un regard consterné. Sa colère fondit comme de la neige au soleil. Gethin Scampers pleurait, caché derrière sa statue, leurs deux baguettes à la main.
-Tu le regretterais, affirma-t-il d'une voix tremblante. Je te le promets, tu ... Tu le regretterais.
Elle ignorait si c'était les yeux fatigués et déchirés de Gethin, ses mots ou ses larmes qui lui remirent les idées en place. Mais sa colère se réduit à peau de chagrin et la douleur l'accabla une fois plus, physiquement et moralement. Elle replia une main sur sa poitrine et laissa échapper un long gémissement de bête blessée en s'écroulant à nouveau au pied de son frère. Elle vit à peine Gethin s'approcher timidement, mais elle sentit sa main prendre la sienne, et ses larmes tombées sur leurs doigts entrelacés. Shannon s'y accrocha pour ne pas sombrer, la poitrine compressée par le chagrin. Gethin détailla la bataille, lui annonça que les Aurors étaient arrivés, que Harry Potter en personne avait arrêté Dennis Crivey, que personne d'autre ne semblait gravement blessé - si ce n'était Lucy qui se tenait douteusement les côtes, sa sœur qui saignait toujours abondement, ou Lionel qui boitait. Shannon écoutait à peine. Elle se contentait de pleurer, murmurer le nom de son frère encore et encore, une main crispée sur son bras, l'autre sur les doigts de Gethin. Finalement, une Auror qu'elle reconnut comme était la cousine de Lucy vint tenter de l'arracher à la dépouille de son frère. Elle s'y refusa et lâcha Gethin pour s'y agripper un peu plus. Elle refusait de le quitter, lui qui était descendu dans la Chambre des Secrets pour venir la chercher.
Lui qui s'était sacrifié pour que ce maudit sort ne l'atteigne pas.
Un sanglot s'échappa de ses lèvres et secoua ses épaules. Un autre Auror tenta de la décrocher, sans succès. Puis une voix perça les ténèbres dans lesquels l'esprit de Shannon était plongé :
-Viens Milady, il faut te soigner. Ils vont s'occuper de Zephan. Allez, viens ...
Cette voix était si douce que Shannon fut un instant persuadée que ce n'était pas Louis qui parlait. Ce n'était pas son timbre naturel. Il lui pressa tendrement les épaules.
-Allez, Milady, viens avec moi.
Et étrangement, ce fut ce qu'elle fit : elle le laissa la relever, défaire lentement ses doigts de l'uniforme de son frère. Shannon songea vaguement qu'il utilisait sur elle ses pouvoirs hypnotiques dont lui avait un jour parler Lucy. Mais pour l'heure, elle était trop faible pour lutter contre eux. Alors elle laissa Louis l'emmener. Loin de Zephan. Au bout de trois pas, il parut évident qu'elle ne pourrait plus tenir sur ses jambes, alors il la hissa dans ses bras. Elle se laissa aller contre sa poitrine, et laissa libre court à ses sanglots, espérant vainement que la souffrance s'échapperait avec les larmes.
Bon, je sais que le personnage de Zephan n'était pas particulièrement important dans la fanfiction mais j'ai eu mal au coeur de le tuer quand même.
Je vous explique (si vous voulez de mes explications) : mon intention première n'était pas de le tuer. Le sort de Laureen devait manquer de puissance magique pour être meurtrier et il aurait simplement dû être assommé en gros - Shannon pensant qu'il était mort. Sauf qu'en écrivant les cris de Shannon et en repensant à ce que j'avais fait de Laureen j'ai été terriblement tenté par une véritable mort du personnage. J'ai franchement hésité, en discutant avec Cazo, imaginant les deux scénarios, mais finalement arrivé à un moment ça m'est apparu comme une évidence de faire mourir Zephan. Donc évidemment ça a changé ma fin qui devait être un happy-ending en une fin douce-amère, mais au final peut-être que ça correspond mieux à la fanfic', vous me direz ce que vous en pensez !
Donc je vous annonce officiellement qu'on arrive à la fin. Il reste un chapitre de conclusion et l'épilogue (qui est très court, peut-être qu'il faut que je le rallonge, je verrais à la relecture). Donc je vous invite si vous le pouvez à réfléchir sur la fanfic', ce que vous avez aimé, pas aimé, que ce soit au niveau de la construction, de l'intrigue, des personnages, de l'écriture bref. Parce que j'ai tendance à toujours faire un bilan à la fin de mes écrits, voir comment ils ont été perçu, et où je peux m'améliorer (et puis c'est toujours marrant de voir vos moments/personnages préférés). Sur Booknode je l'avais fait sur forme de questionnaire, je vais voir si je garde la même forme.
Enfin bref, je vous remercie d'ors et déjà d'avoir suivi cette histoire ! A la semaine prochaine !
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