Chapitre 21 : Le chant du phénix
Bonjour tout le monde !
Je devais poster hier, mais, milles excuses, la connexion me faisait défaut. Mais me voilà avec le chapitre 21 ! Y'a un passage que j'avais adoré écrire (celui du milieu), j'espère qu'il vous plaira tout autant.
J'ai été un peu optimiste en vous disant que vous retrouveriez Lucy pour longtemps ... J'avais oublié que le prochain point de vue arrivait si vite. DONC le chapitre 22 sera d'un point de vue différent (qui n'est ni Molly, ni Jina). Une idée?
Bonne lecture !
Chapitre 21 : le chant du phénix.
Son verre de jus de citrouille tremblait toujours entre ses mains. Agacée, Lucy le repoussa pour enfoncer ses doigts dans ses cheveux, plantant ses ongles dans son crâne pour empêcher ses mains de trembler.
-Hey, Weasley ...
Luke mit une main sur son épaule. Une main glacée. Ses cheveux étaient encore couverts de neige et sa lèvre était bleuie par le froid. Venait-il de dehors ? Que nenni.
Il avait neigé dans leur chambre.
Et elle n'avait pas besoin de ça.
La seule chose qui rassurait Lucy, c'était qu'il avait fait quelque chose de spécial dans toutes les chambres de Poudlard. Les Serpentards étaient remontés de leurs dortoirs en grelottant et avaient découvert au plafond d'épais nuage qui délivrait de gros flocons qui finissaient par tapisser le sol. Les Gryffondors s'étaient réveillés par une chaleur étouffante, une de celles qu'on avait en plein cœur de l'été. Les Poufsouffles avaient retrouvé toutes leurs belles plantes fanées par l'automne et une couverture de feuille morte aux couleurs vives sur le sol. Quant aux Serdaigles, certains avaient eu des réactions allergiques au pollen qui était apparut et leurs boissons avaient été remplacées par des filtres d'amour, parce que (et elle citait le message qui avait remplacé la célèbre citation « tout Homme s'enrichit quand abonde l'esprit » au pied de la statue de Rowena Serdaigle) : « le printemps c'est la saison des amours ». Ainsi, certains élèves dont Laureen Bones, Charles Corner, et même Dominique, avait été amené à l'infirmerie car ils déclaraient leurs amour aux ...
-Mousquetaires, grommela Lucy en serrant plus fort son verre de jus de citrouille de ses doigts tremblants. Je vais les tuer, cette fois.
-Au moins, on a pas été les seuls cibles, commenta Luke en s'en servant un verre.
-Et puis j'ai trouvé ça drôle, commenta Will, assis plus loin. C'était plus fin que d'habitude. Et honnêtement, quelle magie ... ça ne vous impressionne pas, vous ?
-Peut-être, mais il a fallu qu'on récolte l'hiver, marmonna Eléonore, emmitouflée dans un pull de Montague, le nez dans une écharpe émeraude. J'arrive pas à me débarrassera du froid.
Elle lança là-dessus un regard entendu à son petit-ami, qui soupira en se rapprochant d'elle pour la prendre dans ses bras - un miracle quand on connaissait l'amour de Montague pour les gestes tendres. Ils étaient à présent tous sur leurs tables respectives pour le petit-déjeuner. Chaque Maison de Poudlard s'était réveillé sous une Saison différente, et d'une manière générale, chacun avait trouvé la situation plus amusante qu'autre chose - sauf les Serpentards et certains Poufsouffles qui regrettaient la mort de leurs plantes. Les Mousquetaires ne s'était pas cachés et avait revendiqué leur exploit grâce aux filtres d'amour des Serdaigles, et autres divers messages, mais n'étaient inquiétés par personne, pas même par les professeurs. De l'avis de Lucy, ils devaient être, comme Will, impressionnés par la prouesse magique. Ce n'était pas facile de créer un microclimat à Poudlard.
Mais Lucy n'avait pas été amusée. Pas du tout, même.
Elle n'avait pas besoin de cela.
Dix jours avaient passé depuis l'attaque de Maeve Macmillan. Et Lucy n'arrivait pas à dormir sans avoir l'image de cette silhouette à la cape blanche, masquée, qui glissait vers la jeune fille, des étincelles que sa baguette avait jetées quand elle avait voulu protégé sa camarade, de ses pleurs quand Molly et Daphnéa l'avaient retrouvée. Apparemment, la silhouette à la cape blanche n'avait eut le temps d'injecter assez de Sérum à Maeve pour la mettre dans le même état que les autres victimes, mais assez tout de même pour l'envoyer à Saint-Mangouste. D'après le professeur McGonagall, les Médicomages étaient intervenus à temps pour pomper le Sérum. Maeve était à présent consciente et reviendrait dans quelques jours, ce qui avait soulagé tout le monde. Une petite victoire, mais qui inquiétait l'école : celui qui agressait les élèves courait toujours, et il courait dans Poudlard. Greengrass avait même avoué à demi-mot à Lucy, la mort dans l'âme, que la fermeture de l'école commençait à être envisagée.
La préfète de Serpentard avait été longuement interrogée par McGonagall et les quatre directeurs de Maison, mais, à sa plus grande frustration, elle n'avait pas reconnu son adversaire. C'était juste une silhouette à la cape blanche et au masque immaculé, sans nom. Avec le blizzard, Lucy n'avait même pas pu établir si c'était un homme ou une femme : juste une petite silhouette, au teint clair et à la baguette longue au bois sombre. Il avait essayé d'attaquer Maeve, l'avait immobilisé, et Lucy avait réussi in extremis à l'empêcher de mener son action à bien. Maintenant que cette histoire était finie, Lucy aspirait plus que tout au calme et à retourner à son enquête.
Et à coincer un certain Gethin Scampers, qui semblait prendre un malin plaisir à lui glisser entre les doigts ces temps-ci.
Cette histoire était extrêmement frustrante pour Lucy. Car elle avait enfin décidé de laisser le garçon en paix qu'il redevenait immédiatement suspect. Elle savait que le blizzard avait été épais sur le terrain de Quidditch. Mais si Gethin Scampers y avait été, elle l'aurait su. Et il n'y était pas, elle était formelle. Alors comment avait-il pu indiquer à Molly où elle se trouvait ? Elle avait essayé d'en parler avec Adam, en Arithmancie. Mais étrangement, le Gryffondor s'était lui aussi fait plus distant, et avait à peine adressé la parole à la jeune fille. Elle s'était sentie blessée par cette indifférence mais s'était efforcée de ne pas le laisser paraître. La famille Scampers semblait en ce moment extrêmement suspecte. Et cela faisait enrager Lucy.
Elle était à présent gelée, son verre de jus de citrouille entre les mains, l'esprit bouillonnant. Elle n'avait pas besoin de la farce de ses cousins. Pas en ce moment.
-Arrête de faire cette tête, Weasley, s'agaça Dorothy en faisant un vaste geste pour désigner la Grande Salle. Tu es la seule à ne pas être amusée par cette vanne. Avoue que c'est du génie !
-Et beaucoup moins désagréable que d'habitude, admit Montague, récoltant le regard noir de sa petite amie. Quoi ? Tu préférais les lutins de feu, peut-être ?
Personne ne répondit rien, et ils retournèrent tous à leur petit-déjeuner. Beaucoup considéraient l'incident comme clos, mais Lucy lorgnait toujours James, Louis et Scorpius, qui riaient avec Roxanne à la table des Gryffondors. Dominique venait de revenir dans la Grande Salle, l'air de très mauvais humeur après avoir été forcée à boire un filtre d'amour. Laureen Bones suivait, froide comme la glace, avec un regard féroce pour les Mousquetaires. La vue de la préfète de Serdaigle raviva un autre souvenir dans l'esprit de Lucy et ses yeux se déportèrent sur la table des Gryffondor. Gethin Scampers mangeait avec son amie aux nattes caramel, l'air pâle et maladif, comme toujours. Quelques chaises plus loin, Lucy remarquait que son frère le couvrait d'un regard inquiet entre deux bouchées de toast. L'incertitude quant à ses deux là lui laboura les entrailles. Elle s'était décidée à parler clairement avec Adam, quitte à tout lui révéler sur le Sérum de Basilius - tout, du moment qu'il lui disait ce qui clochait chez Gethin. Car quelque chose clochait réellement. Elle prit son courage à deux mains et prit congé de ses camarades.
-Frappe fort Potter pour moi, articula Eléonore, toujours couverte par son écharpe. Je lui dédis mon rhume.
Lucy hocha la tête, et abandonna son petit-déjeuner, mais à peine avait-elle fait un pas en direction de la table de Gryffondor que Gethin se levait soudainement, comme ayant un haut-le-cœur et se mettait à courir entre les tables de Serdaigle et Gryffondor pour sortir de la Salle. Adam le suivit deux secondes plus tard. Toujours à hauteur de la table de Serpentard, Lucy étouffa un juron en voyant ses deux proies s'échapper ainsi. Elle s'apprêtait à sortir de la Grande Salle à leur suite, bien décidée à obtenir des réponses, mais une poigne timide attrapa son bras au moment où elle sortait. Lucy se retourna et avisa avec stupeur les yeux verts de Shannon Finnigan. Un petit sourire retroussa ses lèvres.
-Salut, fit la jeune fille, l'air à bout de souffle. Euh ... On peut parler, s'il te plait ?
-On a Potion ensemble, rappela Lucy, les sourcils froncés. Maintenant.
-Je sais ... Mais, avant. Il faut qu'on ... parle de Maeve.
Lucy sentit un coup invisible frapper son cœur et elle hocha la tête, vaincue. Elle savait que Maeve Macmillan était une camarade de dortoir de Shannon et la jeune fille avait été affectée par son agression. De même que toute la Maison Poufsouffle. Ces dix derniers jours, la préfète avait remarqué certain regard de travers qui lui était jeté car c'était elle qui avait retrouvé Maeve. Lucy conduisit Shannon dans une salle vide et referma la porte derrière elles avant de considérer la Poufsouffle avec inquiétude.
-Il y a quelque chose qui ne va pas, Shannon ?
Shannon tripotait son farfadet qui agitait son trèfle sur son sac avec nervosité. Un air contrit se peignit sur son visage.
-Ce n'est pas grand chose ... Juste ... Des murmures que j'entends dans ma Salle Commune. Je pense que tu aurais aimé savoir ...
-Des murmures ? répéta Lucy, perplexe. Sur Maeve ?
-Non, affirma doucement Shannon. Sur toi.
Lucy dressa un sourcil, surprise par le ton catégorique et entendu de Shannon.
-Sur moi ? Pourquoi ? Ils m'en veulent parce que je n'ai pas su arrêter celui qui a agressé Maeve ?
-Non, fit Shannon, l'air de plus en plus mal à l'aise. J'entends ... je veux dire que certain disent ... pensent ... Oh, je ne sais pas pourquoi, je ...
-Shannon, crache le morceau, s'il te plait.
-D'accord, céda la jeune fille, tripotant encore plus son badge. Certains pensent que c'est toi qui a fait ça à Maeve.
Lucy dévisagea Shannon, abasourdie. Puis ses nerfs lâchèrent complètement ; entre l'attaque du Département de la Justice toujours pas résolue, la blessure de sa mère, les déboires de Molly et l'attaque de Maeve, tout lui paraissait absurde. Alors elle éclata de rire, prenant Shannon de court.
-Moi ? s'esclaffa Lucy, incapable de se contrôler. Agresser Maeve ? Il y en a vraiment qui pensent ça ?
-Je penserais que ça t'inquièterait, dit Shannon d'un ton légèrement pincé. Certains sont persuadés que c'est toi qui est à l'origine des agressions, mais pas uniquement celle de Maeve. Et pas que les Poufsouffles.
-Vraiment ? Mais c'est quoi leurs arguments ?
Lucy n'arrivait pas à prendre ce que Shannon au sérieux. Elle, agresser les élèves ? Alors qu'elle s'arrangeait depuis le début pour démasquer le coupable ? C'était risible.
-Beaucoup de chose, entonna doucement Shannon en prenant place sur une table. D'abord, beaucoup trouvent suspect que tu aies été présente quand on a découvert les victimes. Tu as découvert Alexandre Wallace, tu étais là quand on a trouvé Lionel Boot, et Maeve ... Chaque fois tu étais là.
-Je n'y peux rien, grommela-t-elle, s'installant elle aussi sur une table. Je suis une Weasley, les ennuis ont relativement tendance à me trouver sans que je ne les cherche.
-Ensuite, tu as un lien avec toutes les victimes, ajouta Shannon, l'air soulagée que l'hilarité de Lucy se soit calmée. Tu avais une dent contre Alexandre Wallace avant qu'il ne se fasse agresser, Lionel Boot est ton ex-petit-ami ...
-Et Maeve ? Elle était peut-être la même année que moi, mais je ne lui ai jamais parlé ...
Shannon haussa les épaules, comme si ça lui passait à elle aussi par dessus la tête. Lucy commença alors à trouver la situation nettement moins drôle au fur et à mesure que ce que lui disait la jeune fille s'insinuait dans son esprit.
Des gens la soupçonnaient.
Elle.
Une peur irrationnelle lui glaça le cœur et elle fit un signe de tête à Shannon de continuer.
-Certains trouvent que tu t'inquiètes trop de cette affaire ... Que tu enquêtes trop ... (elle s'interrompit, et finit par soupirer : ) notamment parce que certain t'ont entendu me demander des informations sur Maeve la semaine dernière, en Potion.
Lucy se mordit la lèvre inférieure. Dans l'optique de son enquête avec Luke, ils avaient tenté de faire la lumière sur tous les parents des victimes. Si ça avait été facile pour ceux d'Alexandre Wallace, Lionel avait posé, et posait toujours beaucoup de problème. Jina n'avait rien su lui dire : Terry était quelqu'un de très respecté et Marietta quelqu'un de discret, d'après elle. Après l'attaque de Maeve, elle avait demandé effectivement à Shannon des détails sur ses parents. Ça lui avait été utile car le père de Maeve, Ernie Macmillan était un ancien de l'armée de Dumbledore et à présent un imminent membre du Magenmagot. L'attaque de sa fille semblait être aussi incompréhensible que celle de Lionel et Luke et Lucy cherchaient encore le lien. Mais celui qui unissait les agressions à la Seconde Guerre ne semblait plus à faire.
-J'essaie de trouver des réponses, se défendit-t-elle avec une certaine sècheresse. On est tous inquiet, on cherche tous à comprendre ...
-Mais de manière moins insistante que toi, continua Shannon en tripotant son badge de plus belle. Et le coup de grâce, c'est certain Serpentards qui pensent que c'est toi qui sabote votre Salle Commune.
-Je quoi ?!
Les doigts se Shannon se figèrent sur son badge suite à l'éclat de Lucy. La préfète n'en revenait pas.
-Et pourquoi, cette fois ? Quoi, après quatre ans, je suis toujours amère d'être à Serpentard ?
-Quelque chose comme ça, oui, laissa échapper Shannon dans un filet de voix, comme si moins fort elle le disait, moins ce serait pénible pour Lucy.
Lucy étouffa un cri de rage et se mit à faire les cent pas devant la porte, tourmentée. Après être devenue préfète, après le fait d'enchainer les victoires au Quidditch en tant que Capitaine ... Encore maintenant, on pensait d'elle qu'elle ne voulait pas être à Serpentard ? Shannon la regardait faire, sans un mot. Lucy finit par s'appuyer sur le mur, à coté de la porte et passa une main rageuse dans ses cheveux.
-Désolée, finit-t-elle par dire à Shannon.
-Ne t'en fais pas, la rassura la Poufsouffle d'un ton qui se voulait clame et positif. Je comprends que ... ça te frustre. C'est pour ça que je te l'ai dit ... Je penserais que tu devrais être ... au courant.
-Oui, soupira Lucy en tentant de réprimait la hargne qui montait dans sa poitrine. Merci, Shannon, c'est ... prévenant que ta part. Mais qui pense ça ? Je veux dire, des gens qui m'en veulent ou des ...
Elle s'interrompit quand elle se rendit compte que Shannon avait détourné le regard pour fixer la porte d'un air suspicieux. Lucy fronça les sourcils et voulu parler, mais Shannon secoua la tête en sortant sa baguette :
-Homine ...
-Ça va, ça va, je suis là !
Lucy fit un véritable bond sur le coté en entendant une voix proche de la porte. Soudainement, une tête blonde surgit du vide et la cape glissa sur le sol. Shannon ne baissa pas sa baguette et Lucy sortit rageusement la sienne pour la pointer sur le font du nouveau venu. Celui-ci gratifia les deux jeunes filles d'un sourire, creusant ses adorables fossettes.
-Surprenant (ses yeux lorgnèrent la baguette de Shannon). Comment tu as su que j'étais là ?
-Intuition, répondit la Poufsouffle avec une certaine défiance. Tu as marché dans la craie, je crois, tes pas se voient.
Louis baissa les yeux sur ses chaussures, effectivement couverte d'une poudre blanche qui rendait de ce fait ses pas visibles. Il éclata de rire.
-Le Mousquetaire démasqué ! s'esclaffa-t-il avec un regard admiratif pour Shannon. Bien joué, blondinette.
-Ne m'appelle pas comme ça, rétorqua Shannon d'un ton digne et ferme qui ne lui ressemblait pas.
Louis sourit et s'inclina moqueusement.
-Toute mes excuses, milady. (il se tourna alors vers Lucy, un sourcil dressé, la cape argenté sous le bras) ça va ma cousine ?
-Toi, gronda Lucy, la baguette toujours pointée sur le front du Gryffondor, je te fais la tête.
Elle avait sorti ça sans trop réfléchir, de manière puérile, encore abasourdie par les révélations de Shannon et courroucée par la farce de ses cousins. Louis haussa les sourcils, l'air amusé par la réplique de sa cousine.
-Quoi, tu me boudes ?
-Tu as fait neiger dans ma chambre, feula Lucy, baguette toujours tendue.
-Et vous avez fané nos plantes, marmonna Shannon. Londubat nous avait trouvé un magnifique arbres aux prunes dirigeables qu'on a dû lui rendre parce qu'il était en train de mourir. De votre faute.
-Et quoi ? Tu vas me le faire payer ? Me jeter un sort ?
Shannon ne répondit pas, mais Lucy lut sur l'air inhabituellement volontaire de son visage qu'elle avait bien un sortilège ou deux qui lui venait à la tête. Elle fut satisfaite de constater qu'elle n'était pas la seule que la blague des Mousquetaires n'avait pas fait rire. Louis leva les mains en l'air, un petit sourire insouciant aux lèvres.
-Allez les filles, on fait la paix. De toute façon, je vous promets que je n'ai pas participé à cette farce. J'avais un devoir de Sortilège à rendre et je suis resté bosser dans ma chambre - ne me regarde pas comme ça, Lucy, évidemment que ça m'arrive de bosser. Si vous êtes sceptique, je vous en prie, demandez à Wayne, il est resté dans le dortoir avec moi.
Shannon et Lucy échangèrent un petit regard. La préfète pouvait lire dans les yeux de sa camarade un agacement similaire au sien. Elle ne pensait pas que Shannon était capable de s'énerver pour quelque chose d'aussi trivial que des plantes, mais ce visage plein de détermination lui plaisait. Finalement, elles s'accordèrent pour baisser leurs baguettes. Louis sourit encore, et s'assit à même le sol avec flegme.
-Alors, entonna-t-il en faisant tournoyer sa baguette en l'air. Ça ne demande pas pourquoi je me cache pour vous écouter ? D'ailleurs ! (il pointa Shannon de sa baguette, la lorgnant avec intérêt). Qui est-ce ?
-Shannon, une amie, éluda Lucy en contemplant son cousin avec irritation. Donc, pourquoi tu nous écoutais ?
-A l'origine je voulais voir si ça allait, et te dire que j'étais contre cette farce : j'étais pour quelque chose d'encore plus léger, qui aurait fait rire tout le monde. Je me doutais que les Serpentards râleraient de se réveiller sous la neige, et j'ai une trop mauvaise expérience avec les filtres d'amour pour les utiliser - une idée de Roxanne, du reste, je pense qu'elle a voulu se venger. Par contre, j'avoue que les Poufsouffles qui râlent pour les plantes, je ne l'avais pas vu venir.
Shannon ne dit rien, se contentant d'un regard mauvais pour Louis. Celui-ci l'ignora, et reprit d'un ton badin avec un geste pour la Poufsouffle.
-Et j'ai entendu votre conversation ... Et force est d'avouer que lady Charlotte et moi ...
-Shannon.
-Peu importe. On était en phase parce que je devais te parler de la même chose. Donc j'approuve tout ce qu'a dit milady. Y'a des gens qui murmurent que tu serais derrière toutes ses attaques. Je n'y aurais donné aucune foi, en temps normal. Ça fait un moment que j'entends ça. Mais j'ai commencé à m'inquiéter quand cette infamante rumeur s'est mise à infecter la famille.
Lucy eut l'impression de se prendre cinq sortilèges de stupéfixion en pleine poitrine. Infecté sa famille ? Ça voulait dire ... dire ... ?
-Ne me dis pas qu'il y a des cousins qui pensent que je suis derrière tout ça ? s'assura-t-elle d'une petite voix qui lui fit horreur.
Louis perdit son sourire et se laissa aller contre la porte avec défaitisme. Le cœur de Lucy tomba dans sa poitrine et elle passa une main troublée dans ses cheveux.
-Qui ça ? Qui dit quoi ? Et pourquoi je le sais que maintenant ?
-Je te l'ai dit, Lucy, fit Louis avec plus de douceur. J'ai surtout entendu ça cette semaine. Dans notre famille, en tout cas.
-Qui, Louis ?
Lucy jeta un bref regard à Shannon, et vit sur son visage désolé qu'elle avait une petite idée des membres de sa famille qui la croyaient potentiellement coupable. Cette idée lui donnait la nausée, alors elle se laissa glisser sur le sol, complétement défaite.
-Qui ? répéta-t-elle d'un souffle.
Shannon et Louis échangèrent un drôle de regard, comme s'ils cherchaient le meilleur moyen de rendre la nouvelle moins désagréable. La Poufsouffle semblait avoir oublié son animosité envers le Mousquetaire.
-Personnellement, entonna-t-elle d'une petite voix, j'ai entendu Rose et Albus en parler. Ils avaient Botanique juste avant nous et je les ai entendu alors qu'ils sortaient ...
-Rose et Albus, répéta Lucy d'une voix morte.
-Mais ils avaient l'air d'en parler sans y croire, ajouta précipitamment Shannon, s'asseyant elle aussi aux coté de Lucy. Ils sont vite passés à autre chose.
-Mais ils y ont pensé quand même.
Elle avait le cœur au bord des lèvres. Elle n'en revenait pas. L'idée qu'elle soit coupable effleurait même l'esprit de ses propres cousins. Celui d'Albus, qui avait retrouvé Wallace avec elle. Rose avec laquelle elle avait passé tant de temps avec le C.A. Elle leva mollement les yeux sur Louis.
-Qui d'autre ?
-On discute souvent avec les Mousquetaires, de cette histoire, expliqua le Gryffondor, un bras nonchalamment appuyé contre son genou. James s'inquiète beaucoup, et je pense que Jina n'y est pas pour rien : comme elle tenait à Lionel, elle est un peu mal et James le supporte difficilement. Alors il essaie de trouver des coupables et ... Il a cité ton nom.
Lucy sentit la bile lui monter à la gorge. Comment James pouvait-il ... comment osait-il ... ? Ses yeux emplis de détresse durent faire de la peine à Louis, car il rampa vers elle pour lui prendre la main et planter ses yeux envoutant dans les siens.
-Lucy, il essaie de trouver des solutions, il explore toutes les pistes ... Et il faut avouer qu'il y a des choses troublantes : tu as un lien avec presque toutes les victimes, à chaque fois tu étais là quand on les a trouvé ...
-Et à chaque fois j'étais horrifiée ! (A sa plus grande horreur, des larmes de rage lui montèrent aux yeux). Albus l'a vu quand on a trouvé Wallace ...
-Non, justement, murmura Shannon, avec l'air de quelqu'un qui voudrait disparaître dans la pierre pour ne pas dire ce qu'elle avait à dire. Quand je l'ai entendu, il disait que tu avais eu un sang-froid remarquable quand tu as retrouvé Wallace. Tu n'étais pas ... bouleversée.
-Mais ... (Lucy se défit de Louis pour passer ses deux mains dans ses cheveux avec angoisse, avant de tourner les yeux vers son cousin). Lionel ... Tu étais là ... Tu as bien vu ... Je ...
Louis pressa son genou pour la rassurer.
-Oui j'ai vu, Lucy. Et je suis complétement en désaccord avec cette théorie. C'est parfaitement stupide. Mais le fait est, comme te l'a dit Sharon ...
-Shannon, siffla la concernée avec un regard torve pour le Mousquetaire.
Louis soupira et plissa les yeux à l'adresse de la Poufsouffle.
-Tu sais quoi ? Je vais t'appeler Milady, ce sera plus simple. Bref, comme le disait Milady, il y a des choses qui se tiennent. Tu es une excellente sorcière qui avait la possibilité d'avoir une dent contre toutes les personnes agressées - enfin, je ne sais pas pour la dernière, mais Lionel et Wallace, ça me semble évident. Tu étais là à chaque fois qu'on les a retrouvé, ce qui est suspect. Et tu t'intéresses de beaucoup trop près à cette affaire, ce que les gens pourraient interpréter comme une personne qui voudrait cacher ses traces.
-Mais tu sais bien que c'est faux !
-Evidemment que je le sais, Lucy, c'est ce que je me tue à te dire. Mais pour d'autre, l'agression de Maeve est la preuve ultime que tu n'es pas toute blanche dans cette affaire.
Lucy eut la vague impression de tomber au ralenti de la Tour d'Astronomie. Elle regarda ses mains avec horreur, songea un instant que certain pensait que ses doigts avaient affligés ça, injecter ce Sérum dont personne ne savait rien, cette Potion expérimentale qui la terrifiait, à ses pauvres gens. Jamais elle ne pourrait faire ... pas même à des gens qu'elle haïssait, pas mettre à Alexandre ou à Liam Pucey ... Jamais ça n'effleurerait son esprit ... C'était de la pure malfaisance ... L'idée que des gens la pensait capable d'une telle barbarie lui donnait la nausée. Shannon s'assit prudemment à coté de Lucy mais ne fit aucun geste. La préfète leva les yeux sur elle. Ses cheveux blonds pendaient tristement autour de son visage et sa lèvre esquissait une moue contrite.
-Je pensais ... que tu devais être au courant. C'est stupide, comme l'a dit ton cousin. Mais ...
-Non, ne t'en fais pas, Shannon, la rassura Lucy en prenant difficilement sur elle. Tu as eu raison, c'est mieux de savoir ... Je comprends mieux pourquoi certaines personne me regardait de travers depuis le début de la semaine.
Shannon et Louis s'accordèrent pour lever sur elle un regard désolé. La Poufsouffle tenait toujours sa main dans la sienne, comme pour la rassurer. Un silence pensant s'installa dans la petite pièce. Même Louis paraissait avoir perdu de sa superbe. Il se contentait de scruter Lucy, l'air vaguement inquiet. La sonnerie interrompit leur conversation et Shannon sursauta violement. Louis retrouve un sourire espiègle.
-Tiens, la Poufsouffle a peur d'être en retard en cours ?
Les joues de Shannon rosirent, trahissant le fait que c'était exactement ce à quoi elle songeait. Lucy passa outre son malaise pour défendre sa nouvelle amie :
-On a Campbell, et tu es gentil, mais on a pas très envie de devenir des têtards.
-Elle menace toujours avec la Potion de ratatinage ? Ne vous en faites pas, avec toutes les conneries qu'on a faites avec James et Scorpius, ça fait longtemps qu'on serait en train de nager dans le Lac Noir.
Lucy eut un semblant de sourire et Louis se leva. Il tendit ses mains aux deux jeunes filles. Si la préfète attrapa la sienne sans hésiter, Shannon préféra se relever sans son aide, les joues de plus en plus rouges. Ils sortirent de la Salle discrètement pour se fondre parmi le flot d'élève qui se précipitait vers les classes. Maintenant qu'elle y prêtait attention, Lucy remarquait les petits regards qui glissaient rapidement sur elle, suspicieux, interrogateurs, timides, assez discrets pour qu'elle ne le remarque pas en tant normal, mais bien présent quand elle y faisait attention. Son cœur se serra si fort qu'elle fut obligée de s'arrêter, et Louis la heurta.
-Hey !
-Je ne ferais jamais ça. Comment ils peuvent croire que je suis capable de faire ça ?
-C'est parce qu'ils ne te connaissent pas, souffla doucement Shannon en se remettant à tripoter son badge.
-J'approuve ce que dit Milady, acquiesça Louis. Bien bien, nous semblons en phase ! D'ailleurs, une question, il n'y a pas une Milady dans Les Trois Mousquetaires ? Je pense que si, j'avais lu le livre. Ce serait drôle !
-Si, approuva Shannon en rosissant - et Lucy se rappela que son grand-père était moldu, elle devait en avoir une certaine culture. Milady de Winter. Mais ce n'est pas une personne recommandable. Tu as vraiment lu Les Trois Mousquetaires ?
-On s'en fiche. Je te nomme Milady des Mousquetaires. On va finir par reformer le roman ici ! Et oui, j'ai lu le livre, tu as l'air de me prendre pour un illettré. Je voulais vérifier qu'on ne m'assimilait pas à quelqu'un qui ne me correspondait pas. Et force est d'admettre que j'adore Aramis. Et puis j'en ai appris plein de truc sur les moldus. Ils auraient dû rester au XVIIème siècle, les épées avaient bien plus de charmes que leurs actuels ... comment on appelle ça ? Pissolé ?
-Pistolet, marmonna Shannon.
-Ah, c'est ça ! Bref. Finalement, Papy Weasley n'est pas si fou que ça.
-Papy Weasley n'a jamais été fou, se rebiffa Lucy.
-Un peu quand même.
Ils sursautèrent tout les trois en entendant James derrière eux. Accompagné de Scorpius, il fronçait du nez. Lucy remarqua que Shannon s'était encore plus repliée sur elle-même à l'arrivée du reste des Mousquetaires, même si elle les gratifiait de petits regards méfiants.
-Sa fascination des moldus, je n'ai jamais compris. Même si j'adore Papy, évidemment.
Sur ce, il passa un bras autour des épaules de Lucy, un sourire enjôleur aux lèvres.
-Ma petite cousine ! Comment tu vas ?
-Et toi ? rétorqua Lucy sans répondre, un sourire forcé aux lèvres. Tu files toujours le parfait amour avec Jina ?
-Tu les verrais, ricana Scorpius, qui avait le nez dans un parchemin. Un jour tu l'entendras déclamer « ses cheveux d'un noir corbeau sont telles des plumes obscures et douces qui caressent mon visage ... »
-La ferme, crétin, le fit taire James avec un coup derrière sa tête. Mais ouais, pour l'instant ... C'est pas mal.
Mais le ton suggérait que c'était mieux que « pas mal ». Un sourire sincère effleura les lèvres de Lucy. Elle était ravie que James et Jina aient fini par se mettre ensemble, ils formaient un couple bien assorti.
-Tant mieux. J'espère qu'elle te donne toujours des coups de balais quand tu le mérites.
-Ouais, de temps à autre, elle est pénible. C'est pour ça que je me venge en profanant sa Salle Commune. D'ailleurs, comment tu as trouvé la neige ? Du génie, non ?
Lucy se renfrogna immédiatement, et James parut sentir le vent tourner dans l'esprit de sa cousine. Sa main se referma sur son épaule et son sourire se fit plus enjôleur.
-Ah. Ça ne t'a pas plu ?
-Je n'avais pas besoin de ça, on va dire.
-Cette fois, tout Poudlard a été touché, fit remarqué Scorpius avec un sourire rassurant. Pas que les Serpentards.
Shannon laissa échapper un infime grognement, le nez toujours baissé, le visage caché par un rideau de cheveux blond. Louis la scrutait d'un air amusé, comme s'il contemplait un animal étrange et nouveau pour lui. Lucy sentit un grondement sourd remonter dans sa gorge.
-Même. De la neige dans la Salle Commune, ça ne fait plaisir à personne ... Norie te dédit son rhume, d'ailleurs, Jim.
James eut un sourire insolent qui fut difficilement supportable à Lucy. Elle se dégagea sèchement de l'étreinte de son cousin, qui la contempla avec étonnement.
-Ça t'a tant énervé que ça ? Franchement c'était drôle par rapport aux autres fois ! Même McColley est venu nous féliciter !
-Ce n'était pas drôle ! Il se passe des choses graves ici, Jim ! Des choses qui nous mettent tous sur les nerfs ! Et au lieu de les apaiser, tu continues à nous faire rager ?
-Tu es la seule à rager, rétorqua James en perdant son sourire.
-Dominique doit être ravie de son filtre d'amour, persiffla Lucy en plissant les yeux. Et Lorcan aussi, il a dû adorer la voir s'extasier sur les cheveux d'or de Louis ...
-En fait, c'était plus les pâle fils de soie de Scorpius, intervint celui-ci avec une grimace. C'est ma sœur, quand même, ça aurait été bizarre ...
-Tu crois ? Et toutes les plantes des Poufsouffles que vous avez fait mourir avec l'automne ?
-C'est sérieux, ça ? Ils nous en veulent vraiment pour ça ?
Lucy glissa un bref regard à Shannon. Devant les trois Mousquetaires, la belle assurance qu'elle semblait avoir eu contre Louis semblait mourir, comme son arbre aux prunes dirigeable. La préfète refusait d'intégrer Shannon à sa dispute avec son cousin, de toute manière.
-Apparemment. Réfléchis la prochaine fois.
-« Réfléchis la prochaine fois », répéta James en imitant sa voix. Non mais vraiment, Lulu ! Quoi qu'on fasse, tu vas râler ?
-Je suis préfète, rappela-t-elle avec dignité. C'est mon devoir de râler.
-Sauf pour demander d'agresser quelqu'un pour sauver ta peau.
Lucy eut l'impression de recevoir une nouvelle gifle en plein visage. Elle s'immobilisa net, et força James à faire de même. Ses ongles s'enfoncèrent dans son bras, comme pour faire passer physiquement le message, et elle fut ravie de voir son cousin grimacer.
-Tu ne vas pas remettre ça sur le tapis, chuchota-t-elle avec force. On en a déjà parlé ... Wallace ...
-... était un crétin de première, oui. Il n'empêche que ça ne te dérange pas mes blagues quand elles sont contre tes ennemis ...
-Par Merlin, James ! On ne va pas encore se disputer là dessus ? Plus jamais je te demanderais quelque chose comme ça, je ...
-Quoi ? ricana James. Tu vas préférer le faire toi-même ?
Lucy sentit son cœur tomber dans sa poitrine. Les paroles de Louis flottèrent un instant dans son esprit, comme un spectre. « James s'inquiète beaucoup, et je pense que Jina n'y ai pas pour rien : comme elle tenait à Lionel, elle est un peu mal et James le supporte difficilement. Alors il essaie de trouver des coupables et ... Il a cité ton nom. » Elle lâcha alors le bras de son cousin et le scruta, horrifiée.
-Tu n'y songes pas vraiment, là ? Dis-moi que tu n'y songes pas ...
James fronça les sourcils, perplexe, et interrogea les deux autres Mousquetaires du regard. Si Scorpius était aussi déboussolé, Louis regardait en l'air, la mine innocente Alors le Gryffondor parut comprendre et donna un coup de pied dans le tibia de son cousin.
-Je pensais qu'on devait parler de ça à personne ?
-Pas ma faute, se défendit passivement Louis. C'est Milady qui a entamé les hostilités.
Shannon le fusilla du regard, et Louis lui servit un sourire charmeur. James posa vaguement les yeux sur la Poufsouffle, décida sans doute qu'elle ne valait pas la peine qu'il s'attarde, et se retourna vers Scorpius. Celui-ci eut un sourire satisfait.
-Je te l'avais dit.
-Mais tu ne le penses pas vraiment ? s'enquit Lucy, agacée par leur aparté. Vous ne pensez pas réellement que je puisse être responsable de ces agressions ?
-Bien sûr que non, assura Scorpius, avec néanmoins un regard appuyé pour James.
Celui-ci leva les mains pour se défendre, un air innocent peint sur le visage.
-Je ne fais que chercher des solutions. Oui, ton nom est apparu dans la conversation ...
-Mais comment ça a pu t'effleurer l'esprit ?! Comment tu as pu ...
Scorpius se glissa derrière elle et posa une main prévenante sur sa bouche pour étouffer la fin de sa phrase. Lucy ne se rendit compte qu'elle avait crié que lorsqu'elle vit plusieurs têtes se tourner vers eux. Elle se dégagea de Scorpius et les fusilla du regard.
-Quand des gens pensaient que c'était vous qui agressiez les gens, que c'était toi (elle enfonça un doigt dans la poitrine de Scorpius), je vous ai défendu. Pas une seule seconde j'ai cru ...
-Pourquoi on aurait agressé Lionel ? s'enquit James avec un haussement d'épaule. Avoue que toi, c'est plus crédible. Mais ça ne veut pas dire que j'y crois, ajouta-t-il précipitamment en observant les yeux écarquillé de sa cousine.
-Mais tu t'es posé la question !
James balança la tête, l'air indécis, mais son silence était le plus poignant des aveux. Lucy n'en revenait pas. Même s'il n'y croyait pas, il y avait réellement songé ... Alors qu'elle avait tout fait pour les protéger de sa Maison, et ce alors qu'ils ne l'avaient pas toujours mérité. Elle serait restée figée à contempler son cousin pendant un moment si une petite main se serrer sur son bras.
-Lucy, intervint la voix timide de Shannon. On a cours. Viens.
Elle tira gentiment le bras de la préfète, et celle-ci remarqua le regard suspicieux qu'elle jeta aux Mousquetaires. Incapable d'articuler le moindre mot, Lucy se laissa entrainer par Shannon. Elle capta le regard dépité et désolé de Louis avant de partir, et celui réprobateur de Scorpius à l'adresse de James. Même celui-ci semblait gêné par la situation et se balançait d'un pied à l'autre. Finalement, ils allèrent en cours sans demander leur reste alors que les deux jeunes filles remontaient le couloir.
-Crétins, grommela Shannon, qui tenait toujours le bras de Lucy.
La Serpentard eut un pâle sourire, encore déçue par la discussion qu'elle avait eu avec James.
-Tu n'aimes pas les Mousquetaires, pas vrai ?
-Ce n'est pas ça, déclara doucement la jeune fille, les joues rosissantes. Je ... On est incompatible. Ils sont l'opposé de moi alors ... voilà.
-Tu sais, même si je n'ai qu'une envie, c'est de leur jeté un sort, je t'assure, ils ne sont pas si terribles quand on les connaît.
Shannon eut un vague mouvement d'épaule. Lucy n'insista pas. De toute manière, elle n'était pas sûre d'avoir envie de parler. Ni d'affronter les foudres de Campbell quand elles arriveraient en retard. Alors elle s'immobilisa au milieu du couloir et sourit doucement à Shannon.
-Tu peux dire à Campbell que je suis malade ? Je crois ... que j'ai besoin de prendre l'air.
-Merci de me laisser affronter la Potion de Ratatinage seule, plaisanta la Poufsouffle. Pas de problème, je comprends. A plus tard.
-Salut. Et merci.
Lucy regarda Shannon descendre les escaliers et sa chevelure blonde disparaître dans les cachots. Puis elle se tourna vers l'extérieur. La neige s'était figée dehors, et de pâles rayons de soleil avaient remplacé le blizzard. C'était de grand air qu'elle avait besoin. Alors elle s'engagea par delà les immenses portes.
***
Elle traina une heure entière à la lisière la forêt interdite, sans rien faire d'autre que d'observer la neige qui tombait des branches des arbres, les oiseaux qui fouillaient le sol blanc pour trouver de la nourriture. Elle observa même de loin un groupe de troisième année, parmi lesquels Alice Londubat, qui assistait au cours de Hagrid. Lucy sourit en remarquant que certains donnaient de la laitue à des bêtes visqueuses et peu ragoûtante. Les Véracrasses ne lui manquaient absolument pas. Se détournant de ce cours peu intéressant, elle flâna encore à la lisière de la Forêt Interdite, observant les sombres branchages mollement secoués par le vent. Elle n'avait jamais osé y aller. Les Mousquetaires et Roxanne se vantaient de s'y introduire régulièrement, mais elle ne s'était jamais risquée à entrer à l'intérieur. De ce qu'elle savait, les Centaures avaient pris plus de place dans la Forêt et malgré leur aide pendant la Guerre, beaucoup restaient hostile aux humains. Son oncle Ron leur avait raconté qu'il y avait nid d'Arcromentules caché, et que de même, y aller sciemment serait du suicide. Même le garde-chasse ne s'y risquerait pas. Et le demi-frère de Hagrid, le géant Graup, se baladait régulièrement à l'intérieur (du haut des tours du château, on voyait parfois sa tête jouxtait la cime des arbres), et malgré toute l'affection qu'elle avait pour Hagrid et toute la fascination qu'exerçaient les Créatures Magiques sur elle, elle n'était pas tout à fait sûre d'être prête à croiser un géant. Alors elle se contenait de marcher à la lisière et de jeter un bref coup d'œil aux immenses troncs de la forêt. Elle s'efforçait de ne penser à rien, respirait en marchant, observait l'intérieur de la forêt avec un mélange de curiosité et de crainte. Elle commençait juste à se détendre quand une voix derrière elle la fit sursauter.
-Alors, tu rentres ?
Elle fit un véritable bond et se colla à un arbre, le cœur palpitant. Lysander se tenait devant elle, une écharpe d'un bleu criard au cou, ses lunettes sur son nez et celles qui lui permettait de voir les Joncheruines sur sa tête, un sac sur chaque épaule. Ses cheveux blonds et emmêlés tombaient maintenant sur ses épaules et Le Chicaneur dépassait de son sac.
-Lys ! Tu m'as foutu la frousse !
-Ce n'était pas mon intention. Qu'est-ce que tu fais ici ?
Les grands yeux bleus de Lysander la dévisageaient derrière ses lunettes dont le verre était couvert de tâche de doigts, et opaques. Comment pouvait-il voir avec des verres aussi sales ? Lucy sourit doucement et sortit sa baguette. Lysander fit un pas en arrière.
-Reste ici ! ordonna Lucy en lui agrippant un pan de son écharpe, un sourire aux lèvres. Recurevite.
Le verre des lunettes s'éclaircit, et celui-ci cligna les yeux, surpris. Il retira ses lunettes de son nez et observa à travers avant de les remettre.
-Je me disais bien qu'il faisait bien sombre. Merci, Lucette.
-Un plaisir, Lys. Qu'est-ce que tu fais ici ?
-Je viens de te poser la même question et tu ne m'as pas répondu, fit remarquer son lointain cousin. Alors je ne vois pas pourquoi je répondrais.
Lucy eut un vague sourire. Elle n'était pas sûre que les rumeurs dont lui avait parler Louis et Shannon étaient parvenus aux oreilles de Lysander Scamander, tant il était hermétique à ce genre de chose. Et elle n'était pas sûre d'avoir envie d'en parler.
-J'avais besoin de prendre l'air, éluda-t-elle. A ton tour, maintenant.
Lysander dut deviner qu'elle ne disait pas tout, mais respecta le fait qu'elle ne veuille pas en parler en enchainant :
-Je viens souvent trainer ici. Il y a des créatures intéressantes dans la forêt, alors quand j'ai du temps, j'y passe.
-Pour voir quoi ? Les Centaures, les Acromentules ou Graup ?
-Hagrid m'a emmené voir Graup, à un moment, lui apprit Lysander avec un sourire. C'est ... fascinant, de parler avec un géant.
De l'avis de Lucy, c'était plus effrayant que fascinant, mais entre ces deux notions, la frontière était mince pour Lysander.
-Et puis, ajouta-t-il, l'air énigmatique. Il n'y a pas que ça dans la forêt. Sinon, elle serait bien triste.
-Lys, tu ne peux toujours pas voir les Sombrals, crut-t-elle bon de lui rappeler.
-Non, mais je ne parle pas des Sombrals. Tu veux voir ?
Il s'était avancé vers les arbres et commençait à pénétrer dans la Forêt. Lucy écarquilla les yeux.
-Lys ! On n'a pas le droit, c'est interdit par le règlement !
-Et ?
-Et tu n'es pas Préfet-en-Chef ? Déjà que tu ne supportes pas de mentir quand moi je le transgresse, tu vas ouvertement l'ignorer ?
-Lucy, rit Lysander en commençant à s'enfoncer dans la Forêt. Je fais ça depuis ma Troisième année. Et ce n'est pas en restant dans les murs de Poudlard que je vais apprendre quelque chose, personnellement. Alors, tu viens ?
Il continuait à s'enfoncer et sa voix ne lui parvenait plus que faiblement. Lucy hésita et jeta un œil du coté du cours que Hagrid dispensait. Les élèves nourrissaient à présent les Véracrasse, un air de dégoût sur le visage. Puis elle reporta son attention sur la lisière et vit que la chevelure blonde de Lysander avait disparu. Elle paniqua, et cessa d'hésiter pour entrer dans la forêt :
-Lys ! Attends-moi !
Elle tenta de ne pas trébucher sur les immenses racines qui soutenaient les arbres pour rejoindre son cousin. Lysander s'était immobilisé, appuyé contre un tronc d'arbre, un sourire entendu aux lèvres.
-Un jour, tu te rendras compte que la seule chose qui compte pour toi, c'est l'aventure, asséna Lysander alors qu'elle s'approchait laborieusement. Le sang de Newt Scamander coule dans tes veines.
-Je ne le nie pas, admit Lucy en regardant autour d'elle. Il fait si sombre ...
Les arbres étaient si resserrés que leurs branchages, même dépourvus de feuilles, laissaient à peine passer la faible lumière. Lysander se remit en marche en sifflotant joyeusement un air que Lucy ne connaissait absolument pas - et elle soupçonnait que cet air n'existait que dans la tête de Lysander. Ils s'enfoncèrent dans la forêt, suivant ce qui semblait être un sentier recouvert par la neige. Ils marchèrent l'un à coté de l'autre, en silence. Le cœur lourd, Lucy jetait des regards inquiets autour d'elle. Finalement, Lysander bifurqua et quitta le chemin. Pas rassurée pour deux noises, Lucy s'immobilisa. Le préfet-en-chef la fixa du regard, impassible, et elle finit par céder en le suivant. Ils débouchèrent finalement dans une clairière avec un enclos à l'intérieur. Dans lequel était allongé une majestueuse créature aux plumes d'un gris perle et aux yeux orange inquiétant.
-Un hippogriffe, souffla Lucy, émerveillée.
Lysander sourit doucement et fouilla son sac. Lucy détailla la créature. Grande, les ailes puissantes, le regard hautain, les griffes tranchante, elle semblait dangereuse et redoutable, pourtant Lucy ne put s'empêcher d'être attirée irrémédiablement par l'enclos.
-Stop, ordonna Lysander en l'attrapant par la taille, une main toujours dans son sac. Tss Tss. Pas avancer sans que je ne te l'aie permis !
-Et pourquoi j'aurais besoin de ta permission ?
-Lucette, ce ne sont pas des trucs tout mignons, les hippogriffes. Il faut savoir les apprivoiser.
Sur ce, il sortit une masse longue et informe de son sac. Lucy mit un moment à comprendre qu'il s'agissait d'un furet mort. Au lieu d'être dégoutée, elle se mit à frémir d'excitation en comprenant ce qu'il allait faire.
-Je peux venir, Lys ? S'il te plait !
-Pas question, je ne veux pas que Buck te défigure, refusa catégoriquement son cousin en s'éloignant. Observe et apprends, Lucette.
Sur ce, et en ignorant le regard envieux de sa cousine, Lysander passa souplement au dessus de la barrière. L'hippogriffe redressa la tête et darda un regard menaçant sur le jeune homme, mais une fois un pied à terre, Lysander s'inclina profondément. Il y eut une seconde d'attente, une seconde atroce où Lucy se demanda si la créature n'allait pas préférer mettre un coup de bec sur la nuque de son cousin. Mais finalement, elle courba majestueusement la tête. Lucy eut un sourire.
-Bien joué.
-Ce n'est qu'une formalité, affirma Lysander, l'air pédant sans le vouloir. Il commence à me connaître.
Il s'approcha prudemment et tendit le furet à l'hippogriffe. Son bec saisit la créature inerte avec une telle vivacité qu'un instant, Lucy craignit qu'elle n'emporte avec elle la main de son cousin. Mais aucune frayeur ne se lisait sur le visage de Lysander. Au contraire, il semblait apaisé. Loin du grand jeune homme décalé et raillé qu'il était à Poudlard, le Serdaigle était enfin dans son élément, à l'aise et décontracté. Il s'accroupit pour caresser le bec de la créature. Elle se laissa faire. Lucy s'approcha de la barrière, fascinée de la connexion qui semblait s'établir entre l'homme et l'animal.
-Il s'appelle Buck, c'est ça ?
-Oui. Hagrid en garde d'autre, mais il les laisse en liberté. C'est pour le cours des Sixièmes années, tu comprends ? Et comme il a vu que j'avais un bon feeling avec, il m'a autorisé à revenir. Au début il venait toujours avec moi, au cas où - il m'a raconté qu'il avait déjà eu des ennuis parce qu'un de ses hippogriffes avait blessé un élève. Mais maintenant je les ai assez côtoyé pour venir seul.
-Où sont les autres ?
Lysander leva les yeux au ciel et Lucy fit de même, mais elle n'aperçut que les branches oppressantes au dessus d'elle, qui se refermaient sur la clairière telles des doigts décharnés.
-Ils volent ? devina-t-elle avec perplexité. Mais comment ça se fait que je ne les ai jamais vu ?
-Ils restent très peu à Poudlard, expliqua Lysander. Hagrid les appelle quand il en a besoin pour les cours ... Mais le reste du temps, ils sont en vadrouille.
-Et Buck ?
L'hippogriffe se lissait les plumes de son bec avec dignité et darda son regard orangé sur Lucy quand son nom fut prononcé. Celle-ci, prudente, préféra baisser les yeux. Elle connaissait la fierté des hippogriffe, et ce que pouvait coûter ce qu'il considérait comme un affront. Lysander caressa son encolure avec douceur.
-Buck commence à être ... un noble, ancien et vénérable hippogriffe, entonna-t-il prudemment, par souci de ménager la susceptibilité de la créature. Les grandes vadrouilles ne sont plus faites pour lui. Et je pense qu'il aime être au calme. Et il est attaché à Hagrid, aussi. Ça fait plus de vingt ans qu'il s'occupe de lui.
Lucy hocha doucement la tête en signe de compréhension. Incapable de s'en empêcher, elle demanda presque timidement à son cousin :
-Tu crois que je peux essayer ?
Lysander la contempla un instant, accoudée à la barrière, frémissante d'impatience. Puis il sourit doucement, et se releva.
-Evidemment. C'est parti, Lucette.
Avec un mélange d'appréhension et s'excitation, Lucy enjamba prudemment la barrière. Les grands yeux orange de Buck se posèrent sur elle.
-Incline-toi, lui souffla précipitamment Lysander.
Lucy s'exécuta sans broncher, ni crainte d'offrir ainsi sa nuque au bec coupant de l'hippogriffe. Son cœur battait à tout rompre et elle sentait le regard scintillant de Buck sur elle. Il eut une longue attente, encore plus longue que pour Lysander, durant laquelle elle n'entendit que son cœur battant la chamade. Lysander était immobile au milieu de la clairière, son regard passant de l'hippogriffe à sa cousine. Puis, après une attente interminable, Buck daigna courber l'échine. Lucy mit un moment à s'en rendre compte car elle fixait le sol neigeux depuis quelques minutes, et ce fut Lysander qui la fit réagir en éclatant de rire.
-Tu peux te relever, Lucette !
-Sérieux ? s'étonna celle-ci, stupéfaite.
Buck s'était redressé, et Lucy était persuadée d'avoir vu dans ses yeux orange une lueur moqueuse.
-Je peux m'approcher, du coup ? s'assura-t-elle.
-Oui, mais sois prudente, toujours. Pas des gestes brusques ...
-... Pas d'insulte, beaucoup de flatterie et beaucoup de furet, acheva Lucy en tendant la main vers son cousin. Donne-moi un furet.
-Dominique hurlerait, fit remarquer Lysander en sortant l'animal mort à sa cousine. Donne-lui bien, c'est mon dernier.
-Dom est une chochotte, grommela Lucy en soupesant le furet. Elle a peur des araignées, au Terrier. Fred devait faire trois fois le tour de leur chambre pour vérifier qu'il y en ait aucune. Ça agaçait Molly.
-Je sais, une fois elle a hurlé dans la chambre de Lorcan, toute la maison s'est précipitée, et le seul problème, c'était le bébé Acromentule que mon père avait fait venir pour l'étudier car il s'était échappé.
-Il y a une légère différence de proportion, non ?
-Ça reste une arachnide. Bon, vas-y, Buck lorgne ton furet et si ça continue il va venir te le prendre de force - et ta main avec.
Lucy lui donna un coup de coude dans les côtes et s'approcha lentement de l'hippogriffe. Une fois qu'elle fut à portée de bec, elle leva doucement la main qui tenait le furet inerte. A peine suspendit-elle son geste que le bec de Buck avait agrippé le cadavre de l'animal, et avant que Lucy ne puisse sursauter, il l'avait englouti.
-Et bien, vénérable hippogriffe, tu as de l'appétit, remarqua-t-elle, un sourire au coin des lèvres.
Buck poussa un cri strident, comme pour approuver - ou réclamer un troisième furet. Mais Lysander rit et lui montra le sac vide pour prouver qu'il n'avait plus rien. Mais Buck, loin d'être convaincu, se dressa sur ses pâtes et entreprit de fourrer son bec dans le sac que lui tendait le préfet. Lysander rit encore et caressa l'encolure de la créature. Lucy la dévorait des yeux.
-Il est sublime, souffla-t-elle.
Buck redressa la tête, poussa un nouveau cri, puis continua à scruter Lysander à la recherche de furet. Après avoir tourné plusieurs fois autour d'un préfet très amusé par la situation, il finit par se rendre à l'évidence, et se rallongea en croisant les pâtes, l'air boudeur.
-Désolé Bucky, sourit doucement Lysander en se permettant une caresse sur son bec. Ce sera pour une prochaine fois. Tu peux t'approcher, Lucette.
Lucy, qui était restée en retrait dans sa contemplation, sursauta et avança timidement. Buck la lorgna un instant mais la laisser s'approcher. Finalement, elle se risqua à lisser une de ses plumes soyeuses et il ferma les yeux en posant sa tête sur ses pâtes griffues. Lucy sentit ses épaules se détendre et s'accroupit auprès de la créature, qui semblait plus tranquille maintenant. Ses mains allaient sur son plumage sans qu'il ne bronche comme elle le craignait.
-Il est plus ... calme que je ne le pensais, avoua-t-elle doucement à son cousin.
-Il n'est plus tout jeune, rappela Lysander en s'accroupissant à sa hauteur pour caresser l'encolure de Buck. Il est moins belliqueux, je suppose. Et il a l'habitude de la présence des humains. Ça le rend moins farouche.
-Et puis on lui a ramené des furets.
Lysander pouffa. Ils continuèrent un instant de cajoler Buck, le caressant, partageant ce qu'ils savaient tout deux des hippogriffes, racontant quelles autres créatures ils pouvaient rencontrer. Lysander était très professionnel dans ces cas là : précis et l'esprit scientifique, on sentait l'âme du Serdaigle rencontrant celui des Scamander et il apparaissait moins comme un savant fou décalé, mais comme un vrai chercheur. Voir Lysander aussi détendu, aussi lui-même, et parler de sa passion avec son cousin dû décrisper Lucy, car après une heure de discussion, ses entrailles s'étaient complétement dénouées. Ils étaient à présent assis de part et d'autre de Buck, et Lysander avait poussé le vice jusqu'à s'appuyer sur lui. Si au début, la créature lui avait jeté un regard d'avertissement, elle avait finir par pousser un bref cri de résignation avant de poser sa tête sur ses pattes croisées.
-Heureusement que c'est la dernière année, grommela Lysander en caressant le bec de Buck. Je commence à en avoir assez d'être enfermé à Poudlard.
-Si ça t'énerve tellement d'être à Poudlard ... alors pourquoi McGonagall a fait de toi un Préfet-en-Chef ?
Lysander haussa vaguement les épaules, la tête appuyée contre le cou de Buck.
-Une idée de Campbell. Elle m'a nommé Préfet parce que j'étais le garçon le plus sérieux de notre année. Et elle pensait que ... bah, ça m'aiderait à m'intégrer. Qu'après ça, les gens me respecteraient un peu plus, et que d'un autre coté, en prenant des responsabilités je serais moins ... Tu sais. Bizarre. Dans la lune. Mon coté loufoque, quoi.
-C'est loin d'avoir marché, alors.
-Effectivement, c'est même de pire en pire. Mais j'ai quand même bien fait mon devoir de Préfet parce que je respecte le règlement à la lettre, et que je ne supporte pas de mentir. Et puis, il paraît que McGonagall y tenait, comme pour prouver que quelqu'un comme moi ... pouvait être quelqu'un d'important.
-Bien sûr que quelqu'un comme toi peut être quelqu'un d'important, Lys. Ne me dis pas que tu en doutais ?
Lysander eut un petit sourire triste.
-A vrai dire, je me fiche d'être important. Et je suis très fier d'être « quelqu'un comme moi ». Pour rien au monde je ne changerais. Je veux quitter cette école. Et après je m'envolerais. Je n'ai pas encore décidé si j'allais en Australie ou en Amérique du Sud - on connaît tellement mal ces continents ! Et je ne te parle pas de l'Afrique ! Je reviendrais surement. Prendre des nouvelles de mes parents, assister au mariage de mon frère avec Dom, venir te chercher pour qu'un jour tu viennes avec moi ... Tu vois, tu ne le nies même plus ! ajouta-t-il triomphalement quand il remarqua le sourire amusé, mais envieux de Lucy. Tu ne nies même plus que tu n'as pas la moindre envie de mettre les pieds au Ministère !
Lucy ne répondit pas, se contentant de secouer la tête l'air désabusé. Evidemment qu'elle n'avait pas la moindre envie d'aller au Ministère. Evidemment qu'elle avait soif d'aventure, qu'elle avait passé son enfance à rêver d'aller en Roumanie avec son parrain voir les dragons, de visiter le monde comme son ancêtre Newt Scamander, à la recherche des créatures les plus insolites, parcourir les montagnes l'Himalaya avec Lysander dans les coins les plus reculés, inconnus des moldus où des créatures se logeraient encore dans un habitat inviolé et naturel. Tout cela elle en rêvait. Elle en rêvait tellement que ça lui semblait impossible. Alors elle se contenta de sourire.
-Un jour tu t'en iras ici d'aussi, continua Lysander, voyant dans son sourire un signe d'encouragement. Et le monde s'offrira à toi. Fais attention à ne pas le louper.
-J'y veillerais, promit-t-elle. Merci, Lys.
-Un plaisir. Maintenant que ça va mieux, tu vas me dire pourquoi tu es vraiment venue à la lisière ?
Lucy soupira profondément, et se laissa elle aussi aller sur Buck, dépitée. Lysander, ou de la manière de ne rien oublier. Elle sentait ses grands yeux bleus, sans artifices ni jugement, la scruter dans la semi-pénombre. Et malgré son manque d'envie de revenir sur sa discussion avec Shannon et Louis, elle se dit que s'il y avait quelqu'un à qui elle pouvait parler de cela, c'était justement Lysander. Alors d'une voix enrouée par l'indignation et la déception, elle révéla ce que lui avait dit son cousin et sa camarde. Lysander écouta, se redressant, impassible, une brindille entre les mains. Quand elle finit son récit, elle entendit un bruit sec. Lysander venait de casser la brindille.
-C'est parfaitement grotesque, grommela-t-il d'une voix où elle sentait pointer la colère. Toi, responsable des agressions ? Tu ne ferais pas de mal à une mouche ! Enfin, peut-être à Scampers au prochain match de Quidditch, mais ce n'est pas pareil.
Lucy eut un petit rire. Le soupçon d'énervement dans la voix de Lysander la surprenait un peu, lui qui semblait tellement détaché du monde. Elle ne pensait pas que ça l'affecterait. De toute évidence, c'était le cas.
-Et puis l'argument comme quoi tu enquêtes trop ... C'est parfaitement idiot. On enquête tous, d'une manière ou d'une autre. On cherche tous à savoir ce qui se passe. On a tous peur.
-Même toi ? tenta de plaisanter Lucy avec un demi-sourire.
-Evidemment. Tellement que ... Je peux pas rester les bras croisés. Alors ... je ne sais pas. A défaut de pouvoir prévenir les attaques, je pense qu'on pourrait les guérir.
Lucy se redressa, surprise. Mais Lysander semblait étrangement sérieux. Sérieux comme elle ne l'avait jamais vu. Il avait ramassé une autre brindille et la faisait tourner entre ses doigts.
-J'ai parlé à Hagrid, il y a quelque temps. Quand on est allé voir Buck, justement. Et il m'a parlé, en me demandant ... oh, je t'en prie Lucy, garde ça pour toi.
-Le venin d'Acromentule.
Lysander lui jeta un regard surpris derrière ses lunettes, mais acquiesça doucement.
-Comment tu sais ?
-Une bévue qu'il a fait. Il y a quelques semaines. Si tu sais pour le venin, alors ... si tu as été voir en bibliothèque ...
-La Potion expérimentale, oui. L'état végétatif. Pour toujours.
Une pointe d'horreur glacée avait percé la voix de Lysander. Lucy n'en revenait pas. Même Lysander Scamander, celui qui ne semblait avoir d'yeux que pour les Joncheruines et les Ronflaks Cornus, le nez baissé sur Le Chicaneur, avait été aussi loin qu'elle dans ses recherches sur la Potion. Son cœur se mit à battre la chamade.
-On en a parlé à Greengrass. Le Sérum de Basilius.
-Oui, j'en ai parlé à Campbell aussi. Elle a semblé mal à l'aise et a refusé de me dire la moindre chose. Elle m'a juste dit de me taire, et qu'elle, Londubat et Hannah s'en occupaient. Mais ... tu ne trouves pas qu'ils mettent du temps ?
-C'est compliqué de faire un antidote quand on n'a pas les ingrédients, fit remarquer Lucy avec défaitisme. Et ce n'est pas dans le sang des victimes qu'on aura les rendements les plus précis ...
Lysander se tut, lui concédant ce point. Lucy donna une dernière caresse à Buck et se rampa pour s'asseoir en tailleur devant son cousin.
-Tu as essayé ? s'enquit-t-elle en un souffle. De trouver un antidote ?
Tout le monde sous-estimait Lysander. Mais l'avantage quand on était le fils de Luna Lovegood et Rolf Scamander, c'était qu'on avait dès le plus jeune âge une connaissance accrue des plantes et animaux qui hantaient ce monde. Si quelqu'un devait avoir les connaissances d'herbologie nécessaire à la fabrication d'une Potion, c'était Lysander. Et son hochement de tête le lui confirma.
-Oui, j'y ai songé. J'ai coupé ce que je savais des effets de la Potion avec ce que j'ai lu sur le Sérum de Basilius et le venin d'Acromentule. Pour l'instant j'en suis au point mort ... Ce n'est pas évident, c'est juste des suppositions, mais généralement je devine bien. En cinquième année, Campbell m'a presque supplié d'aller faire des études pour devenir médicomage. J'ai dit « oui, professeur. Mais pour les bêtes. » Je crois l'avoir désespéré.
Il mit ses lunettes sur sa tête pour se pincer l'arrête du nez. Lucy put alors observer les cernes que cachaient ses verres et mangeaient presque son visage. Elle fronça les sourcils.
-Ne me dis pas que tu passes tes nuits à réfléchir à ça ?
-Non, lui assura Lysander en remettant ses lunettes, masquant quelque peu ses cernes. Mais un peu. Et le travail sur les ASPICs. Et mes recherches. Et ce soir j'ai ronde. Bref. Vivement que tout cela finisse.
-Je vais prendre ta ronde, proposa Lucy en mettant une main sur le genou de son cousin. Toi, va te reposer. Et j'ai dit te reposer, Lys. Tu mets toutes tes recherches dans ton placard et tu dors. Hey ! (Elle lui donna un coup dans le bras en voyant qu'il riait). Promet-moi, Lys !
-D'accord, céda-t-il en se calmant. Je te laisse ma garde et je dors ce soir. De toute façon, Lorcan a commencé à remarquer mes veillées et il surveille aussi maintenant. Alors ne t'en fais pas, je dormirais.
-C'est parfait.
Lysander sourit un instant, et se laissa de nouveau aller contre Buck. L'hippogriffe piaffa brièvement avant de reposer sa tête contre ses pattes.
-Et toi, ne te laisse pas affecter par ce que les gens disent. C'est stupide et tu le sais. N'arrête pas d'enquêter pour autant. Il faut qu'on sache ce qu'il se passe et je trouve que la communication des profs est plus que lacunaire. Alors on prend le droit. Et tant pis pour ceux qui trouvent ça suspect.
-C'est que Lysander Scamander s'affirme, se moqua Lucy.
-Lysander s'est toujours moqué de ce qu'on pensait de lui, rectifia-t-il. A toi de faire la même, petite cousine.
Lucy hocha la tête, lui promettant de faire de son mieux. Lysander sourit encore et se redressa pour sauter sur ses pieds et tendit la main à sa cousine.
-Allez viens. Je veux te montrer une dernière chose. Peut-être que ça te remontera le moral.
-On va où ? demanda Lucy en prenant sa main.
Cette fois elle n'hésita pas : sa curiosité était piquée. Et à présent, elle se sentait étrangement en confiance avec son cousin. Celui-ci sourit énigmatiquement et l'entraina hors de l'enclot.
-Salut Bucky !
L'hippogriffe poussa un bref cri, se remit sur ses pattes, s'ébroua et de ses puissantes ailes, prit son envol. Lucy l'observa se hisser vers les hauteurs des cieux, laissant Lysander la guider. Elle ne se rendit même pas compte qu'ils s'enfonçaient dans la forêt, de plus en plus. Après quelques minutes de marche, elle finit tout de même par demander :
-Rassure-moi ... On ne va quand même pas voir Graup ?
-Non non. Mais on ne va pas loin. Au pied de la montagne.
Lucy se stoppa presque net, retrouvant quelque peu de sa peur. C'était tout de même très profondément dans la forêt et l'air autour d'elle s'épaississait autour d'elle. La pénombre se renforçait. Mais Lysander tira sur sa main.
-Allez Lucette, viens. C'est un entrainement pour l'Himalaya.
La jeune fille sourit timidement, et ravala son appréhension pour suivre son cousin, tout en gardant précautionneusement sa main dans la sienne. Ils marchèrent encore un longtemps moment, slalomant entre les immenses racines, retrouvant parfois un chemin, le quittant aussitôt, jusqu'à que la pente se fasse plus raide. Les arbres étaient si resserrés à cet endroit que les rayons du soleil ne passaient plus du tout, et ils furent forcés d'allumer leurs baguettes. Finalement, Lysander s'immobilisa et lâcha sa cousine pour grimper dans un arbre. Après une seconde d'hésitation, Lucy le suivit, et ils se hissèrent jusqu'à une branche, assez haute pour donner le vertige à ceux qui l'avaient, et trop basse pour atteindre décemment la cime des arbres. Lucy lança un regard interrogateur à son cousin, le cœur battant.
-Qu'est ce que nous faisons tapis ici ?
-Nous attendons. Très patiemment.
-Patiemment comment ? J'ai cours, Lys.
-Moi aussi, mais j'avais d'ors et déjà décidé qu'aujourd'hui ce serait une pause. Alors ça en sera une pour toi aussi.
Lucy fronça les sourcils. Elle n'aimait pas particulièrement sécher les cours, mais les yeux pétillants de Lysander piquaient trop sa curiosité pour qu'elle ne reste pas. Et elle avouait avoir peur de retourner au château seule.
-Et on attend quoi ?
-Tu verras Lucette. En attendant, tais-toi.
-Et combien de temps ?
-Aucune idée. Chut.
-Mais qu'est-ce qu'il y a à voir ?
-Tu vas te taire ?
Lucy grommela dans sa barbe et s'adossa au tronc de l'arbre. Après un quart d'heure où rien ne se passa et où Lysander ne cessa de fixer la cime des arbres, elle finit par sortir un parchemin de son sac et entreprit à dessiner un oiseau-tonnerre d'après ses souvenirs du livre de son arrière-grand-père. Des heures passèrent, où Lysander ne bougea pas d'un pouce. Le jour déclina, et bientôt, leurs baguettes furent leurs seules lumières. Son ventre commençait à gronder. Elle avait entamé de représenter un Vert Gallois, la baguette dans la bouche pour se laisser les mains libres, quand elle l'entendit. Une vague mélodie, lente, douce et mélancolique. Les premières notes lui serrèrent le cœur, et elle en laissa tomber sa plume, qui alla s'échouer en contre-bas. Lysander se redressa, et agrippa la branche du dessus pour se mettre debout, l'air en alerte. Le chant les survolait, comme une douce neige. Les notes descendaient lentement, à un rythme mélancolique, des flocons de neige qui auraient cristallisé en eux une envoutante mélodie. Et un cri déchirant. Ces flocons étaient emplis de solitude, un gouffre de peine et de perte. Et pour finir, des flocons plus doux, moins triste. Des flocons qui, lorsqu'ils fondent, apportaient l'espoir. Les larmes montèrent aux yeux de Lucy. Puis c'était fini.
Lysander et Lucy restèrent un long moment silencieux, le Serdaigle debout, une main sur la branche du dessus, la tête baissée comme en recueillement, la Serpentard assise, hébétée, désorientée. Les larmes s'étaient figées sur ses joues. Elle ne sut dire combien de temps avait durer le chant. Et elle ne comprenait pas pourquoi elle avait pleuré. Que s'était-il passé ?
-Par Merlin, souffla-t-elle après quelques minutes. Merlin tout-puissant ... Qu'est-ce que c'était ?
Lysander ne bougea pas dans un premier temps. Il resta la tête baissée, debout sur l'arbre, avant de se redresser pour sourire tristement à sa cousine.
-Un phénix, Lucette.
Un phénix, se répéta Lucy, émerveillée malgré les larmes qui mouillaient ses joues. C'était le chant d'un phénix. Elle vrilla son regard sur la cime des arbres, imaginant le majestueux oiseau volait au dessus d'eux.
-On ne l'entend jamais, du château, continua Lysander d'une voix douce. Il vole dans les montagnes. C'est ici qu'on l'entend le mieux. J'ai même réussi plusieurs fois à l'apercevoir, mais il est farouche.
-J'ignorais qu'il y avait un phénix dans la forêt.
-De ce que je sais ... c'était celui de Dumbledore. Il y était très attaché. Alors à sa mort, il s'est réfugié dans la forêt. Et il pleure sa douleur. Il s'appelle Fumseck.
***
Lucy erra un moment dans les couloirs du château, avant d'aller à la ronde qu'elle avait prise à Lysander. Ils étaient lentement remonter vers Poudlard, une heure après avoir entendu le phénix. La nuit était complétement tombée sur l'école. Ils avaient passé la journée dans la forêt, à parler, dessiner, écouter le phénix. Ils n'avaient pas mangé, mais quand Lucy quitta Lysander, elle ne fut pas déçue quand elle constata qu'ils avaient également sauté le repas du soir. Elle n'avait pas faim, à vrai dire. Sa tête était emplie du chant du phénix. Et malgré la tristesse du chant, elle se sentait beaucoup mieux maintenant qu'elle l'avait entendu. Ça avait agi comme une sorte d'exutoire, comme pleurer après une déception et s'endormir apaisé. Simplement la solitude du phénix s'était profondément ancrée en elle, et elle avait fuit la compagnie à son entrée dans le château. Lysander était monté se coucher sans demander son reste, et elle avait brièvement vu Stephen MacGreggor, le préfet de Poufsouffle, lui sourire avant d'aller faire sa ronde. Elle-même devait songer à faire la sienne. Il était vingt-et-une heure passée et après ce qu'il s'était passé avec Maeve, un couvre-feu avait été instauré, et seuls les préfets pouvaient le transgresser dans le cadre des rondes.
Elle n'avait pas reparlé des rumeurs avec Lysander, mais était maintenant déterminée à les ignorer. Elle se savait innocente et c'était ce qui comptait. En revanche, une personne dans cette école n'était pas innocente. Elle était même loin de l'être. Et il fallait la trouver. A tout prix. Elle réfléchissait à cela pendant sa ronde, se concentrant à peine sur ce qu'elle faisait. Elle descendit du premier étage, refaisant dans sa tête la liste de ce qu'elle savait sur cette personne.
- Elle avait vécue la guerre.
- Elle devait avoir combattu aux cotés de Harry. Voire même avait-elle été persécutée. Ou si ce n'était pas un combattant ou une victime directe, ça devait être une fille ou un fils qui subissait les conséquences du traumatisme.
- Elle avait des connaissances fines en Potion.
- Elle voulait se venger d'un fait commis pendant la guerre. Voire même de la guerre en elle-même.
- Il était à Poudlard. En tant qu'élève, professeur, ou au sein du corps administratif, mais il était à l'école.
Tout cela était assez compliqué. Et assez effrayant. Elle admettait qu'elle pouvait correspondre à cette description. Ses deux parents s'étaient battus aux cotés de Harry, et avaient souffert de la guerre en perdant des proches. Elle était une sorcière raisonnablement douée. Elle était élève à Poudlard.
Mais non. Ce n'était pas elle. Jamais.
Elle aurait aimé que Lysander ait accès à la Potion. Il saurait peut-être arrivé à quelque chose, car il était un œil neuf, une manière insolite de voir un problème qui pourrait s'avérer bénéfique dans ce genre de cas.
Elle était plongée dans ses pensée, profondément, faisant mentalement des fiches, le cerveaux bouillonnant, mais bouillonnement sainement. Sa journée avec Lysander et le chant du phénix l'avait apaisé, mais également galvanisé : toute l'énergie qui l'avait quitté après l'agression de Maeve lui revenait d'un coup.
A vingt-deux heures trente, elle décida qu'elle avait assez potassé sur cela, et qu'elle devait enfin se concentrer sur sa ronde. Elle fit le tour du deuxième étage et le premier et décida d'aller au rez-de-chaussée avant de retourner se coucher et passer la main au suivant. Elle croisa la Dame Grise et Nick Quasi-Sans-Tête discutant dans un couloir et ils la saluèrent. Elle se dirigeait vers la Grande Salle pour une dernière inspection quand un bruit sourd attira son attention. Précisément là où elle allait. Les cauchemars de l'agression de Maeve l'assaillirent et elle saisit sa baguette.
-Stephen ? appela-t-elle, espérant vainement que c'était le second préfet de garde qui avait fait ce bruit.
Mais les sons de pas étaient précipités, comme quelqu'un s'enfuyant à tire-d'aile. Le cœur battant, elle s'élança dans le couloir et prit sèchement le virage qui menait à la Grande Salle. Une petite silhouette vêtue de blanc s'élançait au bout du couloir, courant, sa longue cape trainant derrière lui. Le cœur de Lucy manqua un battement mais malgré le tremblement qui éprenait sa main elle s'efforça à hurler, tout en s'élançant à sa poursuite :
-Stupéfix !
Mais le tremblement dévia son sort et la silhouette sursauta, perdant de la vitesse, et faisant teinter quelque chose à terre. Le cœur battant à tout rompre, Lucy tenta une nouvelle fois :
-Pétrificus totalus !
Mais son adversaire para rapidement le sort et passa le virage qui menait à un autre couloir. Lucy accéléra, avec la force du désespoir et lança un nouveau sort de stupéfixion à l'aveuglette dans le couloir. Mais quand elle regarda plus précisément dans le corridor et la seule chose qu'elle vit sur les dalles glacées, ce fut le corps inerte de Stephen MacGreggor, sa baguette gisant à quelques centimètres, comme s'il la tenait quand il était tombé. L'horreur s'éprit de Lucy.
-Oh par Merlin ...
Sa tête tourna pour voir le couloir de la Grande Salle, avec l'impression que ses entrailles se gelaient peu à peu. La première chose qu'elle vit ce fut une fiole près d'elle, qu'elle ramassa par automatisme. Une fiole avec un fond de potion à la robe pourpre vaguement familière. La seconde fut la silhouette étendue devant la porte de la Grande Salle.
Dont elle reconnaitrait la chevelure hirsute entre mille.
Par Merlin.
Sans se préoccuper de Stephen qui gisait toujours derrière elle, elle s'avança vers la Grande Salle, le cœur au bord des lèvres. Chaque pas était interminable. Il n'y avait que deux personnes à Poudlard qui avait cette chevelure. Et les deux faisaient partie de ses cousins.
James ou Albus. C'était James ou Albus qui gisaient là.
Non. Pas eux. Pas ma famille.
Ça n'a pas de sens.
Pas eux. Pitié.
A chaque pas, une supplication. Pour finalement s'agenouiller devant le corps inerte du Gryffondor, lourdement, comme une marionnette à laquelle on aurait coupé les fils. Elle vit le visage pâle, les grands yeux fixés sur le vide. Vitreux. Affreusement vitreux. Lucy se sentit prise de nausée et posa la main sur sa bouche pour ravaler un cri.
Des yeux bruns affreusement vitreux.
-Oh Jim... Non Jim, réveille toi, je t'en supplie, réveille-toi !
Elle lâcha brusquement la fiole qu'elle tenait pour agripper son cousin. Elle le secoua, le gifla, hurla, pleura, enfonça ses ongles dans son bras, lui jeta tous les sorts de guérison qu'elle connaissait. Rien ne marcha et James demeura inanimé dans ses bras. Le reste s'effaça autour d'elle. Elle s'acharna jusqu'à ne plus avoir de souffle, et finit par de recroqueviller, la tête dans les mains, tremblant de tout ses membres. Ce fut comme ça que McGonagall, Hukles, et Londubat la trouvèrent, suivis de Nick Quasi-Sans-Tête et la Dame Grise, agenouillée devant le corps de son cousin. Huckles la força rudement à se relever.
-Je l'ai madame la directrice ! Je l'ai !
-Lâchez-la, Caius ! aboya McGonagall avant de poser les yeux sur James. Oh par Merlin ...
-Professeur, grelotta Lucy, qui s'était effondré dès que Huckles l'avait lâché. Je crois ... je n'ai ...
-Minerva ! appela Londubat d'une voix presque stridente. Il y en a un autre ici ! Je crois que c'est Stephen McGreggor !
-Non, intervint Lucy, des larmes dévalant toujours ses joues. Je ... Je ne l'ai pas fait exprès, j'ai ... j'ai voulu ...
-Qu'avez-vous fait, Miss Weasley ? répliqua sèchement Huckles. Votre propre cousin ?!
Lucy, malgré la douleur qui lui étreignait la poitrine, eut un sursaut de révolte. Ses larmes se figèrent sur ses joues.
-Non ! Je n'ai rien fait, ce n'est pas moi, je ... Pitié ! (elle se tourna vers McGonagall avec désespoir). Professeur, je n'ai rien fait ! Ce n'est pas moi !
-Ah oui, et c'est quoi ça ?
Huckles ramassa la fiole à coté d'elle, et la secoua devant son nez, comme une arme triomphale.
-L'arme du crime ?
-Quoi ? Non ! Je l'ai trouvée ! C'est la silhouette à la cape blanche ... Madame, vous devez me croire !
Mais même les yeux de la directrice exprimaient le doute. Son regard tomba sur James et Lucy le suivit. Immédiatement les sanglots qui nouèrent la gorge quand elle vit les yeux vitreux de son cousin, qui hanteraient à coup sûr ses cauchemars.
Ce n'est pas moi, Jimmy. Je te jure que ce n'est pas moi.
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